Récit de la course : Trail du Tour des Fiz 2009, par Duvi
L'auteur : Duvi
La course : Trail du Tour des Fiz
Date : 2/8/2009
Lieu : Passy (Haute-Savoie)
Affichage : 2512 vues
Distance : 62km
Matos : Pluie orageuse:
- 2 vestes
- 2 t-shirts
- 1 gilet
- sac 10 l
- casquette/bonnet
- collant long
Tout du matos "technique"
Objectif : Terminer
2 commentaires
Partager :
21 autres récits :
- Les récits de 2019 (2)
- Les récits de 2017 (2)
- Les récits de 2016 (2)
- Les récits de 2015 (2)
- Les récits de 2014 (3)
- Les récits de 2013 (4)
- Les récits de 2012 (2)
- Les récits de 2011 (2)
- Les récits de 2009 (2)
Trail du Tour des Fiz 2009
Difficile, oui difficile de savoir par quoi commencer !!! Tellement ce trail est la course des superlatifs ! Je pourrais débuter par cette de météo de M… qui a bien failli tout faire capoter, « ou bien » (je suis suisse) par cette fantastique organisation (et la sécurité sans faille qui est une première), ou encore ce décors qui classera ce trail dans le top 10 des plus beaux trails de France sans aucune équivoque. Bref mon récit est un peu long, mais le trail aussi et il méritait bien ça.
Et bien je vais simplement commencer par le début, c’est beaucoup plus simple. Tout d’abord le contexte : ma petite famille est en vacances dans la maison familiale en Italie, donc j’ai le week-end 100% dédié à la course. Alors moteur, départ samedi midi pour le Plateau d’Assy où j’ai prévu d’aller faire la via ferrata du coin, histoire de voir les Fiz sous le soleil …. car demain c’est une autre affaire selon météo France (leur site web, une cata pleine de « flash » alors qu’on veut juste savoir s’il va pleuvoir).
Mais avant la via, petite halte au Vieux Campeur de Sallanches pour m’acheter un sac à dos de trail un peu plus grand (10 l), car demain il paraît qu’il va pl… donc faut que je prenne des affaires de rechange. Je suis aimablement aidé par un vendeur, qui lui-même participera au trail, et qui connaît bien l’organisateur, et qui sais que le trail pourrait être annulé ou en tout cas écourté à cause de ces p…. d’orages annoncé le lendemain. Dingue il faut dire, qu’avec 2 semaines de grand beau avant, 15h d’orages annoncés pour le dimanche (pille poil pendant la course) et qu’après le beau temps revient pour au moins une semaine, c’est une malédiction (ma belle mère a du piquer des poupées vaudou en pensant à moi). Bref, j’achète mon sac, tout en restant optimiste, car j’y crois et ça sert à rien de tirer des plans sur la comète.
Moteur, départ pour la via, très sympa, pas trop dur, je la conseil pour une première … et vive le soleil. Après je vais prendre mes cantonnements au « Fontenay », un horrible bâtiment, immense et seul au milieu de la nature. Un machin construit dans les années 60/70 par des promoteurs véreux qui n’avaient pas beaucoup de soucis en dehors de leurs portes monnaies. Mais là où ils sont très fort, c’est que ces bâtiments sont classés bâtiments historiques … et donc indestructibles (faut juste espérer qu’un tsunami passe par là pour faire le ménage …. peut-être dans un million d’année). Heureusement l’accueil est très agréable, et j’intègre donc ma cellule, oups pardon, ma chambre d’hôpital, oups, d’hôtel (on comprend pourquoi les gens devenaient dinguent dans cette austérité, car à mon avis après 2 jours dans ce lieu, on a des envies suicidaires !)
Et c’est l’heure d’aller chercher mon dossard, d’écouter le briefing (qui est un vrai briefing) et de faire la queue avec Dawa Sherpa à la spaghetti party ! A la question « Avez-vous un adversaire pour demain », il me répondit « oui, l’orage ». Ciel, il a aussi regardé météo France, que diable.
On déguste les pâtes (800g par personne selon le cuisto, probablement marseillais d’origine) et au lit dans mon cachot (sans camisole de force, ouf !).
Le réveil est réglé sur 3h45 (pas 15h45) et mon horloge biologique sur 3h44. Et c’est cette dernière qui a fonctionné en premier (c’est pour cela que les suisses sont inégalables dans la précision horlogères). Donc réveil en pleine forme (la forme du siècle), la journée du dimanche commence bien.
4h30, c’est le briefing du matin, ouf la course n’est pas annulée, mais l’étape du Grenairon est coupée --> donc on passe de 65 km avec 5300 D+ à 55 km avec ~4100 D+. Petite frustration, je ne ferai pas plus qu’aux Aiguilles Rouges … sniff ! Mais l’essentiel est là, et c’est parti mon kiki !
C’EST PARTI, avec la frontale sur le front et les nuages au dessus de la tête. On commence par de la descente avant d’attaquer la montée au refuge du Platé qui passe par un joli défilé rocheux (cheminée). Au milieu de cette cheminée, un guide est là pour la sécurité …. et oui, il est temps de parler de l’organisation et de la sécurité.
Visiblement, tout a été prévu et pensé. Des guides/pompiers positionnés aux endroits dangereux (mais objectivement je pense qu’il n’y avait qu’un seul passage dangereux, mais no worries), une multitude de points de contrôle, ce qui vu le contexte météo, est très bien, car si le brouillard monte, on peut vite se perdre. Le balisage est tellement omniprésent que le Petit Poucet n’aurait pas eu besoin de prendre de petits cailloux avec lui. On dirait que le drame du Mercantour a laissé des traces (j’ai peur qu’une telle sécurité deviennent un standard pour l’organisation de trail, ce qui découragera bon nombre d’organisateurs). Il y a encore une petite surprise à Salvagny (j’en parle après) et surtout une méga démonstration de cette formidable organisation très réactives aux éléments.
1h de course et me voila arrivé au refuge de Platé, en bordure du plateau du même nom (le plus grand désert européen nous a t'on dit). On passe le col de Portettes où quelques supporters fort bruyants nous encourage, merci beaucoup, et tout ça sous un ciel bien dégagé ... mais pas pour longtemps! Et hop, 1500m de chute jusqu'au 1er ravitaillement solide de Salvagny, sous la pluie maintenant. Je me restaure, et je dirais même que je me gave, car après la mauvaise expérience de la Transju'trail au mois de juin où j'étais tombé en hypoglycémie sans m'en être rendu compte à temps, j'ai décidé de me la jouer bouffe. 3 pains d'épice, 3 verre de coca, une quinzaine de carrés de choc et un gel --> et après une petite surprise ... c'est l'heure de la visite médicale. Mais avant faut faire la queue, qui commence sous la pluie car la tente n'est pas très grande. 15 min plus tard me voici avec un appareil au bout du doigt qui me prend le pouls et la saturation en oxygène et une brave dame qui me prends la tension. Brif bref, une visite médicale à l'oeil. Pendant qu'on m'analyse, le ciel lui se déchaine (son pouls doit être à 300 pulse/min), l'orage (sa tension à 30) gronde et la pluie (pas saturée en oxygène mais en eau) devient torrentielle ... finalement on est pas si mal sous cette tente. Et au moment où j'allais m’élancer sous ce déluge .... on nous annonce que la course est interrompue ! Ouf sur le court terme, horreur sur le long terme (pourvu que ça reparte). Et déjà les premiers abandons : « J’veux pas courir sous la pluie !» … il est 8h20 du mat ! Etrange pour moi ce genre de défaitisme alors que la journée vient de commencer, qu’on a couru tout juste 3h et qu’en générale un orage ne dure jamais très longtemps !
Nous assistons à une nouvelle expérience. Car la tente continue a se remplir avec les nouveaux arrivants pour la visite médicale, mais elle ne se vide plus .... ce qui pose un léger problème métaphysique. Comment mettre un max de monde dans 12 m2. ça me rappelle le Pérou quand on arrivait mettre 17 personnes dans un de ces collectivo (minibus) prévu pour moitié moins de monde. Revenons à notre tente, celle-ci prend joliment du volume sur les côtés et je me retrouve agglutiné dans un coin, bloqué par un carton de l'assistance médicale. L'avantage c'est que tout ce beau monde fait que la température se maintient, car dehors il commence à faire frais et ça vas bientôt faire 45min que je suis arrêté. Finalement les organisateurs décident de nous transférer dans la salle communal de Sixt-Fer-à-Cheval pour nous mettre au chaud et à l'abris. Je saute dans le coffre du minibus, à la péruvienne. C'est cool, c'est l'aventure, j'aime bien ! On se réchauffe, on fait sécher les affaires et on discute météo avec un peu tout le monde. Je retrouve mes compagnons de la pasta party, le trail est définitivement très convivial (finalement je constate que le côté spartiate, l'effort et l'aventure rapprochent les gens qui se soutiennent et s'entraident mutuellement ... bref tout ce que l'on perd dans notre société de confort individualiste et matérialiste. C'est peut-être pour cela que le trail a de plus en plus d'adeptes).
9h50, la jeune fille de l'office du tourisme, ultra dynamique, nous annonce que la course va reprendre car le ciel a décidé d'être clément avec tous ces trailers. 10h la miss donne le départ depuis la salle, donc on se retape 2km sur la route en montée pour rejoindre la tente de la visite médicale. Pendant qu'on court, la miss nous dépasse avec le minibus et nous attend à la tente pour nous pointer le dossard afin de redémarrer le chrono ! ça c'est de l'orga, je mets mon chapeau bas, BRAVO et MERCI !
Et c'est reparti, cette fois plus rien pourra nous arrêter ! On ne passera pas par le refuge du Grenairon mais directement par celui des Fonts. Une piste nous y conduit, un peu monotone, du coup je sors mon lecteur MP3 et la montée se fera avec Supertramp et U2. Juste un passage super sympa, une passerelle, style "pont de singe", permet de traverser un torrent encaissé dans une gorge peut avant le refuge. Après c'est la montée par un joli sentier jusqu'à Alfred Wills. Là je monte avec Madonna, puis Kate Bush (j'ai ressorti tout les vieux trucs) car il n'y a plus de trailer avec qui discuter. C'est vrai qu'au départ on était moins de 200, donc étalé sur la journée on se retrouve vite seul, d'autant plus qu'on a été scindé en 2 (il y a les "bloqués de Salvagny" et les autres). Une marmotte me fera un petit coucou juste à quelques mètres de moi. La suite se passe bien, je passe à côté du refuge d'Alfred Wills, perdu au milieu de nul part, et du lac d'Anterne perdu au milieu de nul part aussi. Petit coup de pompe, petits gel et ça repart, passage au refuge Moede d'Anterne et descente sur le Lac Vert avec un petit passage aérien où il a été clairement dicté qu'il était interdit de courir. D'ailleurs le staff est là nous le rappeler.
Au Lac Vert c'est la 2e visite médicale (je ne suis jamais allé aussi souvent chez le médecin). On me demande si j'ai fait mon petit pipi et sur l’affirmative je me goinfre de tout ce qu'il y a sur la table ... vive les calories ! Y'en a encore besoin, il reste 16 km et 1000 D+ (et peut être plus). Mais je pête la forme, alors moteur, c'est pas aujourd'hui que je vais prendre l'option d'arrêter la course à 50 km (40 km en réalité puisque le Grenairon a sauté). Départ pour un bout assez roulant et pas des plus sympa car on traverse Passy, pas terrible mais je comprends que la commune voulais que la course traverse le village. Depuis Passy, c'est la grimpette sur le dernier refuge du trail: "Varan". Montée ennuyante car on emprunte une piste carrossable des plus monotones, visiblement j'aime pas la monotonie (ben ouais, chui un peu hyperactif quoi). Par contre l'arrivée sur le refuge est superbe et la suite aussi. Merci à tout ces bénévoles qui ont passé leur journée à attendre le trailer hébété qui se pointe à l'horizon ... à une fréquence très lente. Mon prédécesseur était 8 min avant moi, et mon successeur doit être dans ces temps là aussi, ils ont le temps de s’ennuyer (pour rester poli). Aller, c'est la dernière ligne droite, la dernière descente sur Plaine Joux où on recroise le chemin de l'aller. On entend le speaker au loin et j'arrive en pleine démonstration de chiens de berger, très rigolo car tous les spectateurs regardait les chiens et les moutons, quelle solitude des fois !
9h04 de course pour une 29e place, 1er suisse si on considère Dawa comme népalais et à 1h30 environ après Dawa (encore), ouais bien content !
Mais voilà ... c'est pas fini .... Ben ouais, je fais un petit bilan physiologique, psychologique, schizophrénique et masochique. Bien pour récapituler: Le trail devait faire 65 km pour 5300 D+, mais en fait elle a été raccourcie à 55 km pour 4100 D+ --> Donc un peu équivalent au trail des Aiguilles Rouges --> Donc pas PLUS .... --> Donc ça vas pas ---> Donc faut que je me rajoute 1000 D+ pour franchir la fatidique barre des 5000 D+ (et oui, c'est comme la montagne, ya son 1er 4000, après son 1er 5000 et ainsi de suite) --> Donc je mange (bouffer est plus exact) des pâtes et du pain et du camembert assez vite car il est déjà bientôt 17h (les 2 heures passé à Salvagny non rien arrangé) et c'est reparti pour le refuge du Platé, comme ce matin, mais en A/R (non je ne viens pas de Mars ... quoique, d'après ma femme oui ... mais elle, elle viens de Vénus … hihi --> cf un certain bouquin sur le sujet).
Je repars donc sur mes pas et j'en profite pour encourager les quelques traileurs(es) que je croise et qui doivent bien se demander ce que je fais. 30 min plus tard je bifurque sur le sentier qui monte au refuge, et qui cette fois ne doit plus contenir de trailer. Je monte, un peu, beaucoup, passionnément .... et je ne sais si c'est à la folie ... mais j'entend une voie qui crie "t'es sûr que c'est là" ? Hein, quoi, ya quelqu'un. Je vois 30 m au dessus de moi un coureur: immédiatement je me dit que je ne suis pas le seul taré à vouloir passer les 5000 D+, mais quelque chose ne colle pas, car il a toujours son dossard (bien sûr je ne portait plus de dossard car mon "extra" ne pouvait se faire dans le cadre de la course, question de respect pour l'orga). En fait ce brave avait suivi le balisage du matin et avais tout simplement recommencer à monter croyant que la course continuait par là .... mais il est quand même monté 300 D+ avant de revenir sur ces pas ... quand on a plus la tête, on a les jambes. Bon, je lui confirme qu'il doit redescendre s'il veut que les chiens de la démonstration ne parte pas à sa recherche. Je continue donc mon ascension, où là j'accuse un petit coup de pompe, mais 2 gels plus tard ce n'est plus que du passé. J'arrive au refuge: mince 2032 m d’altitude seulement, j'aurais voulu au moins 2100 m car faut pas prendre le risque de faire 4990 m D+, et d'autant que je ne connais pas l'altitude de Plaine Joux. Aller encore un petit bout, j'hésite à monter jusqu'au Col de Portettes, mais c'est déjà tard et j'ai dit à ma petite femme (par SMS) que j'avais bientôt fini.
Je redescend, tranquille, sans courir car si je me vautre personne ne saura que je suis là ... donc prudence. Je rejoins le parcours de fin du trail et je tombe sur un des derniers coureurs. On fera les 30 dernières minutes ensemble en papotant. Il m'a raconté qu'il n'avait pas pu obtenir son dossard car son certificat médicale avait été égaré.
Il est presque 20h, soit 12h de course et environ 65 km / 5300 D+, cette fois c'est bien fini et encore pas mal la patate. Je vais encore m'offrir une bonne bière avant d'aller rejoindre mon hôtel 5* pour y passer une 2e nuit, préférant ne pas prendre la voiture tout de suite.
Cédric Delavy
2 commentaires
Commentaire de Oliv'BCA posté le 06-08-2009 à 10:59:00
Salut,
bravo pour ta course, t'as su bien garder le rythme malgré la pause à Salvagny! On a dû se croiser sans se voir la-bas mais j'ai eu le temps de repartir.
Commentaire de sarajevo posté le 06-08-2009 à 21:26:00
Tu es un GRAND MALADE ... repartir après l'arrivée ... ca j'ai jamais vu ...
en tout bravo pour ta perf et ton récit.
J'habite Annecy et je travaille a Genève ... chez les fous à Belle-Idée .... tu es sur de ne pas être un patient évadé ..... :o)
a+
pierre
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.