L'auteur : PaL94
La course : Le Grand Raid du Mercantour
Date : 20/6/2009
Lieu : St Martin Vesubie (Alpes-Maritimes)
Affichage : 1630 vues
Distance : 104km
Objectif : Pas d'objectif
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J’ai hésité à poster ce récit. Comme d’habitude je l’ai fait avec suffisamment de détails pour pouvoir me souvenir plus tard mais aujourd’hui cela prend une dimension particulière car je me dis que nous n’étions pas très éloignés et que nous dû avoir les mêmes conditions de course. Et puis on avait à peu près le même âge. Cela n’explique rien mais bon disons que cela me touche. Disons que si cette belle course est reprogrammée (ce que tous souhaitent) j’espère que ce récit pourra aider un coureur pour sa préparation. Disons que c’est une façon pour moi de conjurer le sort. Disons que c’est pour qu’il me reste au moins cela pour se souvenir….
MERCANTOUR 2009
Départ 4h au lieu de 2h : 2 heures de sommeil gagnées ca sera toujours utile car quand bien même la course a été réduite (preuve que les organisateurs ont tenu compte des conditions. Question faire taire les critiques), ça reste un gros morceau à avaler. L’objectif pour moi est de le finir et de mesurer à partir de là le reste à faire pour le GRP. Autre gros morceau !
Donc comme d’hab., j’arrive le dimanche soir question de m’acclimater à l’altitude et pour randonner un peu question d’habituer mes chevilles aux terrains que je sais cassants pour les avoir expérimentés sur le 75km en 2007.
Vendredi AM, retrait du dossard et je cherche à faire la connaissance de Marcassin Mercantour mais il n’est pas là (je voulais le féliciter de vive voix lui et ses collègues pour tout le travail accompli rapidement avec le site web et la determination et la mise à niveau du parcours bis). Fin d’AM j’assiste à la conférence très instructive de G Millet et je retrouve JPV comme convenu. Je me trouve aussi assis à coté du fameux Francis avec qui on va jouer à se croiser plusieurs fois sur la course. Repas du soir avec JPV avec force pâtes (of course) et vers 20h30 on se quitte pour faire dormir les yeux car ensuite la journée sera longue !
Départ 4h donc et je suis au fond comme d’hab. (clin d’œil à Dhom). Pas vu JPV ni d’autres kikous, je suis encore un peu à la masse. Top départ, bisous à ma blonde et la meute est lâchée.
J’y vais tranquille à l’écoute de mes sensations me rappelant trop bien qu’en 2007 je vomissais dès le 3ème km. Evidemment comme toujours je suis largué car ça part trop vite pour moi. Mais un peu avant Venanson je commence à retrouver voire à dépasser qq coureurs. J’aperçois çà et là des buffs, des casquettes et des macarons Kikous mais c’est la fin de la nuit et j’ai encore la tête dans les godasses donc je reste concentré et au risque de passer pour un solitaire je ne les interpelle pas. Comme je porte le buff également et que eux aussi restent muet cela me conforte dans mon idée que le plus important pour l’instant est de négocier le tout début de course, on verra après.
Pas tout çà il faut maintenant monter vers le Col de la Colmiane. Pas trop de caillasse mais ça monte correct et je rattrape encore un ou deux coureurs partis trop vite mais petit à petit je me trouve dans mon groupe de niveau. Le col est atteint et allons-y pour la descente ! Je trottine tranquillement, tout content de mes sensations : il fait jour maintenant, je me sens serein, pas de douleur et l’estomac tranquille, je suis chaud maintenant : je suis dans la course (et à ma place !).
St Dalmas nous voilà (5h52) et on attaque la montée vers le col Veillos. Je prend le temps de faire qq photos mais cette +MNL ! de numérique, malgré que je vérifie régulièrement l’enregistrement va m’en détruire après coup les ¾ (faut vraiment que je le fasse réviser). J’en ai une ou deux de réussies malgré tout, la preuve :
On continu vers le ravito de Veillos (7h12) où je me ferai un thé qui me réchauffera agréablement. 3mn après y être je repars en express car je veux arriver le plus tôt possible à la Madone de façon à pouvoir faire les crêtes jusqu’à la baisse de Férisson de jour (j’ai reconnu l’endroit 3 j avant et je préfère évoluer dans le coin avec toute la vision générale de la topographie).
Beau passage au lac long et lac Gros et arrêt au dessus pour immortaliser l’instant. J’y croise FasciaLata et son pote dont j’ai oublié le pseudo et on discute un petit peu. Je les prends en photos mais après coup ils seront flous (comme ma mémoire !).
Dernier coup de rein vers le col du Barn et on attaque la descente pour rejoindre la vacherie du Collet. Tout va bien les sensations sont bonnes et j’ai même un peu d’avance sur mon tableau de marche. Surtout ne pas se griller ! L’objectif est de finir et de finir pas trop à la ramasse question de mesurer le chemin restant à faire pour affronter le GRP en Août prochain (encore du costaud).
Plusieurs photos dans le secteur mais aucune exploitable après coup rogntudju !!!
Ca trottine gentil et je me fait doubler une première fois par le fameux Francis (il a du rester plus longtemps au ravito) mais après la vacherie je le rattrape dans la montée vers col de Salèse et on taille le bout de gras sur nos différentes courses et expériences. Il me raconte que sur mai-juin-juillet tous ses we sont consacrés à un trail et Aout pour l’UTMB. Comme on se disait la veille il n’est pas représentatif des stats présentées par G Millet. Tu parles carrément hors norme ! Et pour ceux qu’il ne connaisse pas il faut ajouter qu’il a environ 65 ans. C’est peu de dire que je suis impressionné.
Apres le col (9h32) et avoir échangé nos souvenirs émus d’arrivée à Cham’, il me lâchera car il déboule à mort dans les descentes sans qu’il ne ressente rien dans les genoux (hors norme je vous dis). J’aimerai être capable de faire la moitié de ce qu’il fait à son âge mais c’est loin d’être gagné.
Bon maintenant faut trottiner dans les sous bois et les racines. Pareil, section reconnue 4j avant et je constate que ca a bien fondu par endroit mais c’est toujours très ruisselant et j’ai beaucoup mal avec ma chorégraphie d’évitement de ruisselets et de cailloux. Apres mon estomac mes pieds sont mon plus gros handicap et je ne veux pas les mouiller. J’ai déjà pris avant le col une gamelle pour éviter un ruisseau et je me suis étalé de tout mon long dans l’eau; pas envie de renouveler l’expérience. Sautillant et trottinant je croise Xav04 avec qui j’échange quelques mots. On débouche finalement vers le Boréon et son joli lac et surtout son ravito. 30 km et 10h21 : tout va bien pour mon niveau mais ce ravito n’est qu’un préliminaire.
Bon ce n’est pas le tout faut avancer je sais trop que ce qui m’attend. Je repars avec 20mn d’avance sur mon tableau et surtout de bien meilleures sensations qu’en 2007, la montée que je sais raide par moment va me permettre de mesurer cela. Passage le long de la rivière à truite et des enclos à loups du parc Alpha visité vendredi et ensuite on attaque ensuite la montée vers les cascades. Bout de chemin avec l’inénarable Françoise et on compare nos soucis différents de pied : échauffement pour elle et humidité pour moi. On échange nos souvenirs sur le temps pourri de la Diago 2008 (si on savait). Elle me larguera peu avant les cascades tellement ce petit bout de femme est tonique en montée (impressionnante aussi celle là !).
Photos donc des cascades et pas ratées pour une fois :
Pas tout ça maintenant, sus au Pas de Ladres , on va moins faire le malin !
Le vallon et la grimpette dans la neige sur le col mais je ne reconnais pas l’endroit et pour cause ce n’est pas encore le pas mais le col près du lac de Trecolpas.
Passage devant le Lac et tout là_bas au loin on aperçoit la colonne des traileurs et l’ascension du pas. Ca va être moins rapide il reste encore beaucoup de neige !
Passage par plusieurs névés, mes bâtons m’évitent plusieurs gamelles et je me félicite encore d’avoir mis mes guêtres car la neige ne rentre pas et les pieds ne sont pas trop humides. Ascension ensuite et là on ne se cause plus. C’est raide et à la fin la corde est la bienvenue. Arrivée 12h52 j’ai perdu un peu de temps mais bon l’urgence était de ne pas se griller ou de se ramasser. Puisque le Pas m’a fait ch…. Je lui rend la pareil avec un petit arrêt technique.
Bonjour aux bénévoles qui me confirme qu’ils se les gèlent un peu, Photos de la descente et on enchaine prudemment autour du premier névé avant la corde
Arrivée à la corde et connaissant mes faibles capacités d’équilibre (je tiens debout comme une bique sur ses cornes comme on dit dans ma Charente natale), j’opte donc pour une technique moins orthodoxe : je prends la corde entre les bâtons et je descends à fond de train (c’est le cas de le dire) sur les fesses. Ca mouille le fondement mais ca marche bien car les 200m problématiques pour moi sont avalés en un clin d’œil. Je réitérerai ainsi dans d’autres portions cette partie de luge mais sans corde. On attaque ensuite la partie plus pierreuse et je me refais doubler par le chamois Francis. Pas moyen de le suivre je suis impressionné de sa maitrise en descente. En parlant de chamois en voilà un au bord du chemin qui nous nargue, question de nous faire comprendre qu’en comparaison de lui on est des rigolos en montagne :
Dernière descente et je déboule sur la Madonne ou m’attend piaffant PAM le Canari que je n’ai pu joindre faute de réseau. 13h40 pas trop mal et surtout je suis frais. Arrêt-buffet, soupe, coca et j’expérimente le mélange d’Arvie avec eau plate dans ma poche à eau. Je ne mange pas beaucoup mais j’ai mes gels qui me maintiennent. L’estomac est moyen et j’espère que l’eau gazeuse va le calmer. Changement de chaussettes mais je garde mes chaussures, je les changerai au retour.
Ca y est on part 14h01. Le premier névé en sortant a bien fondu depuis mercredi. Au pont arrêt pour enfiler le gore tex la pluie commence et va pas nous lâcher avant un bout de temps. On attaque la montée reconnue ce mercredi et PAM me laisse mener le train de façon à ne pas faire le lièvre bien qu’en tortue de base je n’ai peu de chance d’y gagner quoique ce soit en terme de classement.
Dès le vallon du Ponset la grêle fait petit à petit son apparition comme l’atteste une photo du Canari progressant en arrière :
On rattrape une nouvelle fois notre ami Francis avec qui on échange quelques vannes sans scrupule sachant qu’il va encore nous mettre un boulevard dans la descente. Il est accompagné maintenant d’un binôme avec qui il progresse au diapason. La dernière pente pour la Baisse des 5 lacs est gravie sous une averse de grêlons pas loin de la grosseur d’une bille et PAM s’arrête pour protéger ses oreilles à coup de soleil tellement ça lui fait mal. On n’est pas à la fête !
Descente maintenant dans le vallon avant la baisse de Prals toujours sous les grêlons et évitement tant bien que mal des ruisseaux de tous côtés mais sans trop de succès les pieds sont mouillés espérons qu’ils sècheront dans la descente. Plusieurs photos mais toutes ratées.
Dernier coup de rein et névé pour la Baisse 15h45 mais sous cette grêle ça n’a pas le même cachet que sous le soleil. Les bénévoles de la Baisse nous confirment qu’eux aussi ne sont pas à la noce et nous les remercions d’être là mais en leur disant que nous préférons être à notre place car au moins nous on bouge. Je ne sais pas jusqu’à quelle heure ils sont restés là haut mais comme ceux du pas des Ladres ils n’auront pas volé leur soupe chaude. Ils ne seront pas les seuls d’ailleurs comme on va le voir plus loin.
La descente enfin plusieurs névés d’abord et la caillasse ensuite je raconte au Canari notre douloureuse progression à Christian et moi en 2007 mais malgré le temps, qui semble d'ailleurs s’améliorer, mon moral et ma forme sont bien mieux. J’y vais tranquillement mais régulièrement toujours soucieux de ménager la monture pour aller au bout. Fidèle compagnon de route, le Canari me file le train et me laisse le mener s’adaptant comme mon ombre à mes différentes ruptures de rythme.
Re-Francis et son pote et re_vanne et re-au-revoir. Bon on les retrouvera peut être au relais des Merveilles s’ils nous prennent pas trop de temps dans la descente. Finalement je ne descends pas trop mal pour mon niveau et nous atteignons rapidement St Grat non sans avoir dérangé peu avant un troupeau de vaches paissant tranquillement dans la partie déboisée. Un petit kilo qui nous délasse les cuissots avant le relais que nous atteignons à 16h45. Je suis dans mes temps. Il me semble qu’il y a déjà quelques abandons car nous apercevons un traileur fumant sa cigarette, fait assez rare pour le signaler. Nous retrouvons Francis et son binôme qui ne nous ont pas pris tant de temps que cela finalement. Je refais le niveau à l’Arvie car ça passe bien une petite soupe et je mange à peine car toujours cet estomac noué. PAM lui se gave comme à son habitude et je me demande où il met tout ça vu son gabarit.
Nous repartons après 5 mn au lieu des 20 que j’avais planifiée car je veux me trouver un coin pour arrêt technique un peu plus long. On trottine par moment sur cette section mais je ne suis pas trop à l’aise. Passage devant le lac de St Grat et ensuite à la vacherie de la Gordolasque et bonjour au chien et au poney dans la courette. Tiens !? Au lieu de continuer le long du torrent il faut le traverser. Ca a changé, qu’est-ce que cela nous réserve ? Effectivement on ne prend pas l’itinéraire et on passe au dessus de la cascade. C’est raide par moment et il faut contourner les arbres écroulés. Peu avant Francis et son compère nous on encore une fois redoublés, profitant de notre arrêt technique. Encore quelques vannes et on se dit à tout à l’heure.
Chacun va à son rythme et surtout personne ne fait le malin car le gros morceau de la course nous attend : Une rampe partant de 1268m pour se finir à la cime de la Vallette de Prals à 2496m, soit 1228m de D+ d’un coup, évidemment ça incite à la sagesse !
En toute fin de la piste carrossable nous rattrapons une traileur au pied du début du sentier en train de se restaurer en prévision de la grimpette. Ouh la ! ça grimpe bien ! Ca nous rappellerait presque la montée de la Fournaise. Bon ben y-a plus qu’à ! On y va à notre tempo, repris vite par le traileur du début d’un bien meilleur niveau. Ce sera ensuite un vénitien avec lequel j’expérimenterai mes restes d’italiens et ensuite plus personne.
Ca grimpe bien et il semble qu’on rattrape du monde car on entend des voix dans la montée. Et au tiers de la pente qui revoilà ? Francis, toujours avec son binôme ! On se donne rdv à la Madonne et nous poursuivons notre progression. Pour l’instant tout va bien je tiens la cadence et si je ne flanche pas je devrais passer la Baisse de Férisson avant la tombée du jour. PAM me rassure dans ce sens en me disant qu’il le sent bien. Nous rattrapons çà et là quelques traileurs et traileuses qui se restaurent ou peinent un peu. Devant nous une féminine qui semble complètement rincée, s’arrête et s’assoit pour ce restaurer. A ce moment là on ne donna pas cher sur ses chances de rallier St Martin mais finalement elle nous doublera plus tard après la Baisse, preuve qu’on peut toujours se refaire la cerise sur un ultra. Plus le temps ni l’envie de prendre des photos d’autant que les nuages menacent bien qu’à l’horizon dans la vallée nous apercevions le beau temps. Nous croisons un bénévole qui nous préviens que plus haut les nuages sont plus présents et qu’il faut bien aller jusqu’en haut delà cime de la Valette où nous attendent d’autres bénévoles frigorifiés.
On rattrape également le traileur en débardeur qui ne semble être affecté par les conditions météo et qui nous confirme que son problème c’est plutôt le refroidissement moteur.
Peu avant la cime du Mont Joia, j’ai une baisse de régime et petit à petit moi aussi un gros coup de moins bien. Tout en marchant je me fais un gel et ça repart que même le Canari est impressionné ! Je suis pressé, car ça s’assombrit effectivement et la visibilité est de moins en moins bonne. Dernier effort et il caille de plus en plus. La croix de fer et le sommet. On pointe (20h10) et merci rapide aux bénévoles, on ne s’attarde pas car le chemin de la crête nous attend avec ses nombreux névés.
On y va et je suis agréablement surpris car depuis mercredi ça a pas mal fondu. Néanmoins il en reste et la route est longue jusqu’à la baisse environ 3,5 km mais beaucoup sur la pente ce qui ne va pas m’inciter à bruler les étapes. On trottine parfois mais le plus souvent c’est en marche rapide que je progresse toujours filé par PAM. Les nuages sont, à cette altitude, bien présents et on ne devine rien au-delà de 100 ou 200m. Il y a du vent mais il ne pleut pas. C’est déjà çà, dirait La Souche.
C’est long mais ça le fait et peu à peu nous formons un groupetto avec d’autres qui ne veulent pas dépasser et c’est ainsi nous arrivons enfin à la Baisse de Férisson. Je marque l’heure 21h00 et je fais un petit arrêt pour manger et laisser passer nos suivants qui me semblent bien plus véloces. Bon premier objectif atteint il fait encore jour. Allons-y pour le retour à la Madone.
Descente encore avec des névés de la caillasse des racines, des troncs…etc, la routine quoi ! Nous nous attendons à tout moment à nous faire enrhumer par le retour de Francis mais finalement nous ne le verrons pas. On s’était dit à ce moment-là avec le Canari qu’il avait peut être eu un coup de mou mais le bonhomme est plus solide que çà !
On y va donc mais trop vite car par moment je me sens très moyen au niveau de l’estomac et ce qui devait arriver, arriva. Je m’arrête pour vomir. Vomir c’est un bien grand mot car je ne rejette que de l’eau mais ce n’est pas moins douloureux. Et surtout ça me coupe les pattes. Le Canari attristé est devant, peut-être un peu gêné. Il s’arrête à chaque borborygme suspect et repart des que je repars pour me motiver. Fort heureusement ça passe petit à petit. Ce n’est pas le Pérou mais ca peut le faire.
C’est comme cela après le dernier raidard que nous retrouvons La Madone 22H06, 20mn apres mon temps prévu mais que je savais ambitieux mais par ailleurs bien avant les onze heures-minuit comme annoncé plus réalistement à mon camarade. Lequel est tout content d’en finir plus tôt bien que n’ayant jamais été inquiet sur ce point là comme il me le confirme. Objectif atteint en ce qui le concerne puisque que sortie longue de 28km avec environ 2000 de d+. Au pied de la Madone quelques éclairs disséminés nous avait fait croire à quelques flashs de supporters mais c’était déjà les signes avant-coureurs de l’approche de l’orage que nous avions crus s’éloigner.
Ravito donc mais très léger pour moi : coca pour l’estomac, soupe mais sans pâtes pour le sel et arvie pour la poche à eau. L’important se sécher les pieds rechanger de chaussettes et surtout de chaussures. Je prends mon temps car ça commence à bien faire. Tout autour, des traileurs également fatigués, j’en reconnais certains mais déjà on se parle moins. La nuit est là et le biorythme s’affaisse. Mon Canari préféré s’en va rejoindre sa femme tout en me rassurant, me disant qu’il me voit bien qu’il n’est pas inquiet et que je vais aller au bout. Je le remercie encore du bout de conduite et de sa sollicitude et on se quitte rassurés. Il faut dire que dans ces instants d’amitié traileuse je ne suis pas inquiet non plus. Je n’imaginais pas ce qui nous attendait. Comme quoi on a encore à apprendre.
Bon me voilà seul et je n’ai plus envie de trainer un dernier coup de soupe et je pars donc non sans avoir aperçu avant une nouvelle fois le Francis qui m’a l’air mieux que ce que je pensais. Tant mieux ! Allons-y ! 22h36 Dès dehors je réalise que les reporters ne sont pas là mais que c’est bien l’orage qui frémit. J’ai à peine quitté la route et emprunté le chemin qui monte vers la cime du Pisset et ensuite celle de Piagu, que je prends déjà les premières gouttes. Ca promet ! Une ou deux lucioles devant et rien derrière pour l’instant, je ne risque pas de perdre du temps en bavardages. Ca ne me gêne pas car je suis aussi un solitaire (I’m a poor lonesome blaireau) mais je joins quand même ma blonde pour la rassurer et lui laisse un message.
L’estomac est revenu à peu près à niveau et la forme relative est là donc tout va bien. Ben non ! tout va de mal en pis plus j’avance sans trop de fatigue et plus le ciel se répand. Ca grêle comme l’après midi, ça pleut à verse ça souffle de plus en plus. Le terrain devient de plus en plus humide. J’aperçois de l’autre côté de la vallée encore pas mal de lucioles qui descendent vers la Madonne et je le plains intérieurement, préférant être plus en avant. Je me dis que je serais couché plus tôt. Ouais mais pour cela faut aller au bout et il reste du chemin. Ce foutu temps ne me quitte pas et maintenant ça pète beaucoup plus fort et ça illumine plus. Je compte mentalement les secondes après les éclairs. C’est encore loin mais ça ne rigole pas quand même. Peu après la cime du Pisset la grêle s’attenue mais je n’y gagne rien car il pleut plus et je suis encore plus exposé au vent. Ma tenu gore-tex a beau être de bonne qualité, la pluie qui ruisselle dessus conjuguée à l’effet du vent, refroidissent l’ensemble et le traileur qu’il y a dedans selon les bonnes vieilles règles de la thermodynamique. Malgré les replats je ne progresse pas vite car sur les pentes j’avance prudemment connaissant mon habitude chronique à accrocher toutes les caillasses possibles. N’étant pas trop téméraire et sujet au vertige je négocie chaque passage un peu tarabiscoté car je me vois déjà me tordre une cheville ou me casser une patte. Bilieux avec çà !
Mais c’est vrai que là haut ça devient de plus en plus dur. Dantesque que je me dis à ce moment, je ne voyais pas mieux pour l’exprimer. J’ai les bouts des doigts dépassant de mes gants qui ont l’onglet et comme mes manches sont longues j’ai encore une fois recourt à les tirer jusqu’au bâtons pour me les réchauffer. Mais ce n’est pas la joie je caille quand même. Par moment un éclair révèle d’un coup tout le paysage.
J’attends en progressant l’arbre de mes souvenirs où sur le plat la succession de rubalises m’indiquera l’approche du Piagut. Deux traileurs me doublent et le voilà l’arbre mais je ne reconnais pas trop la cime. Et pour cause c’est bien l’arbre mais la cime est bien plus loin ça me reviens maintenant. Ca me mine un peu et la lassitude le mauvais temps qui ne décolère pas et la nuit, je ne progresse plus très vite. Et puis j’attends maintenant le pain de sucre qui m’avait impressionné en 2007. Il en faudra des minutes sans faiblir, exposé au vent et à la pluie par rafales pour ne serait-ce que l’apercevoir.
Ca sent pour moi la pénitence d’y avoir cru et je ne mesure que trop bien le chemin à parcourir pour le GRP. Finalement tout arrive et me voilà enfin au pied. Ca ne s’améliore pas : le feu que le pointeur frigorifié mais fidèle à son poste (chapeau bas) a fait, produit des flammes horizontales tellement le vent ne relâche rien. J’ai même peur en passant au large que les flammèches trouent mon gore-tex. La fatigue je vous jure ! Je remercie rapidement le bénévole (j’écrirai plus tard à l’organisation qu’il a été le digne représentant de l’engagement de tous les bénévoles. Je persiste et signe) et je me hâte à grimper le raidard non sans m’étaler une fois.
Le sommet enfin. Reste la descente pas mieux pour moi. Et celle là elle va m’en faire baver. Qu’en dire de plus ? La descente raide qui semble interminable , la pluie, le vent, le froid , les gamelles, le branches dans la figure, les arbres à enjamber , les caillasses et les glissades, on aura tout eu. ‘’Long long journey through the darkness, long long way to go…. That’s coming home’’ chanterait Enya. A mis pente je me fais rattraper par le groupetto de Françoise mais je les laisse passer sans les suivre pas confiant dans mes appuis. Quelques membres de se groupe se prendront des gamelles devant moi ce qui prouve que c’est dur pour tout le monde.
Lolo qui m’appelle, je ne traine pas en ligne je lui dis que tout va bien mais que j’en ai marre qu’il fait froid et que je devrait arriver peut être dans 30 ou 45mn. Je ne sais même pas où je suis et fatigué je lui refais le coup de la Diago. J’ai hâte d’en finir mais ça va être long. J’avais oublié des parties du final. A des moments je me demande comment on peut gravir le chemin que je suis en train de descendre tellement je le trouve raide. On est très loin des chemins habituels de grande randonnée.
Ce n’est que sur la toute dernière portion que je retrouverais des chemins plus carrossables et que je trotte tout en rassurant ma blonde qui s’inquiète. C’est à bonne foulée que je la retrouverai dans les petite rue de St martin au niveau du groupe de Françoise qui manifestement n’a pas plus envie de courir. Le portique et je les laisse pointer devant, la place n’a plus d’importance à mon niveau. 3h05 du matin mieux que ce que je pensais finalement. On nous apprend que vues les conditions météo la course a été neutralisée et qu’ils n’attendent plus que 8 coureurs. On se dit avec Françoise que certains on dû l’avoir amer d’être arrêtes ainsi avant la barrière horaire. On ne pouvait imaginer alors mais on se voit toujours tous dans la course à leur place.
Je me change rapidement en grelottant et endosse la polaire bleu ciel qui me réchauffe un peu et je rejoins notre hôtel choisi tout près pour une nuit réparatrice et que j’estime égoïstement bien méritée. Sommeil dur à trouver, il reste encore de l’adrénaline et lolo qui tape des sms dans la nuit pour rassurer PAM et la famille.
La triste suite, tout le monde la connaît, c’est après le repas de midi sur un appel de Marc qui s’inquiète que j’apprends le drame. Je ne réalise pas tellement cela me semble incroyable et incompréhensible. J’ai du mal en dire plus et trop de choses ont été dites. Je garde en tête ce que quelqu’un a écrit sur une mort dans sa passion sportive et j’évite d’aborder le sujet avec Laurence qui a été choquée… Mais si on participe à ce sport (coureur, organisateur, bénévole ou proche) on ne peut qu’être atteint par cela. Il n’a plus qu’à se recueillir pour les disparus et leurs proches (surtout les proches).
La Montagne, terrible de beauté et de violence, une fois de plus nous écrase….
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5 commentaires
Commentaire de Cyrille posté le 29-06-2009 à 13:35:00
Merci.
Commentaire de Jay posté le 29-06-2009 à 14:58:00
très fort , dans tous les sens du terme....
Commentaire de Pat'jambes posté le 30-06-2009 à 00:46:00
Que dire... merci pour ce récit qui m'aide (pratiquant plutôt le bitume et la "course nature") à comprendre ce qu'est le trail de montagne à ce niveau et les conditions difficiles qui ont pu mener au drame.
Merci de ne ne pas avoir fait l'impasse, de ces belles photos et, encore une fois, une pensée pour les trois trailers et leurs proches
Commentaire de akunamatata posté le 30-06-2009 à 09:04:00
tres beau recit Pal ;-)
Commentaire de Cantalou posté le 05-07-2009 à 14:57:00
Bravo Pierre et ne t'inquiète pas trop pour le GRP avec le mental que tu as.
Rendez-vous fin Août du côté de Vieille Aure.
Jean-Pierre
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