Récit de la course : Les Templiers 2006, par Clairette et Vincent
L'auteur : Clairette et Vincent
La course : Les Templiers
Date : 29/10/2006
Lieu : Nant (Aveyron)
Affichage : 4052 vues
Distance : 66km
Objectif : Pas d'objectif
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Templiers 2006 - récit de notre course en couple
Bonjour à tous, en guise de premier post dans ce forum, nous souhaitions vous faire partager notre Aventure sur la course des Templiers 2006.
Prêts pour le départ?
Partez ... et bonne lecture!
Nous sommes dimanche 29 octobre, le réveil sonne, il est 3h du matin. Tout doucement, nous nous levons pour une petite douche de mise en place des idées. Mais oui, ce n'est pas un rêve, dans deux heures trente nous serons au départ d'un trail de 66 km (certains dépliants affichent 67 km). Après la douche, un délicieux gateau-sport fait office de petit déjeuner accompagné de quelques verres d'eau. Cela ressemble à un cake au citron, mais un quart de ce délicieux gateau contient 800 calories voire davantage. Peu importe, il est sec mais délicieux, et dans la bouche il est un peu difficile à avaler mais délicieux, vraiment. C'est comme si on mangeait un gros plat de pâtes.
Habillage méthodique, léger car il va faire chaud. Vérification du contenu des sacs à dos, des sangles, de l'arrimage des bâtons téléscopiques, c'est tout bon. Il est déjà 4h00, il faut se mettre en route. Nous ne sommes pas les seuls coureurs à loger dans cet hôtel de Millau situé à 25 km de Nant, village où le départ de la 12ème édition des Templiers sera donné dans 1h30. La route est large mais très sinueuse. Ca monte en lacets jusqu'à un plateau, le typique plateau du Larzac avec son aspect désertique égaillé de pierres blanches confondables avec les troupeaux de moutons. Nous sommes au pays du Roquefort. La veille, nous avions repéré des places de parking juste à l'entrée de Nant, le long du mur du cimetière. Nous y voilà. Sommes pas les seuls. Nos buffs sont placés sur la tête, dessus nous posons la lampe frontale, petite contorsion pour enfiler le sac à dos, les demi-gants sont enfilés, les chaussures bien lacées. Eh bien voilà, nous descendons tranquillement vers le centre de ce gros village, doublés par un flot de voiture à la recherche d'une place de parking.
Il y a foule. 2560 coureurs et leurs familles. Il va être l'heure. Tiens, on ne part pas dans le sens où nous pensions partir ! Surprise ! Tant mieux, ça descend un peu. Lumières roses des flambeaux, musique entraînante, on sautille sur place, fait pas chaud, une journaliste nous filme et nous interviewe. Sommes les deux seuls luxembourgeois.
05h30 ! C'est le départ. Musique solennelle, style chants grégoriens, avec des tambours, un peu kukluxklan. Vincent prend ma main et ne la lâchera que 2h30 plus tard, lorsque les singles tracks ne le permettront plus. Nous courons à notre rythme, lentement, les gens doublent à fond la caisse. Un long ruban de lucioles s'étire dans la nuit. C'est magique. Ca y est, on n'a plus froid du tout. J'ai mis mon T-shirt fétiche de la Jungfrau 2004. Mes jambes vont bien. Suis légère. Pas de gel énergétique avant le départ. Le délicieux gateau-sport était suffisant (burp!).
Et voici la première montée. On ne dirait pas. Les gens continuent à doubler comme s'ils couraient sur du plat. Je me retourne et suis rassurée de voir que la longueur du ruban lumineux derrière nous est équivalente à la longueur devant nous. Devons donc être approximativement au milieu du peloton. Les sensations sont bonnes. Après quelques km de route, on prend un chemin de terre qui continue à grimper tranquillement en lacets. On voit bien avec ces petites lampes fixées autour de la tête. Beaucoup de cailloux, de la terre, du sable, des pieds, des chevilles, des mollets... Et voici la première bosse, très raide. On marche tous, ça monte fort. Quelques uns ont sorti les bâtons bien que ce soit interdit avant le 15ème km car trop de monde, style troupeau. Arrivés en haut, c'est un plateau en légère descente, mais le terrain est piégeux. Cailloux toujours, des flaques d'eau, un peu de boue. On court toujours tranquillement. Echauffement. Mon Polar fonctionne mal, il n'affiche pas du tout mon rythme cardiaque. Quant à celui de Vincent, il affiche mon rythme cardiaque. La nuit se dissipe peu à peu. Nous voici sous un tunnel, nous courons sur une ancienne voie ferrée dont les rails ont été enlevées, of course. Tout va bien. Nous nous forçons à maintenir un rythme calme car la tentation est grande d'accélérer. On se fait toujours encore doubler mais de moins en moins.
Il est temps de prendre un Squeezy. Vincent nous donnera le tempo pour la nourriture tout au long du parcours. Les km ne sont pas affichés mais nous avons un petit plan plastifié à porter de main. On arrive au premier ravitaillement dans un tout petit village, Sauclières. Seulement de l'eau à celui-ci. On fait le plein de nos camelbacks car le prochain ravitaillement n'est qu'à 33 km. On range les lampes dans le sac à dos et on prend les casquettes à la place des buffs. Les bénévoles sont très sympatiques et serviables. Sortie du village, descente d'un talus à pic et remontée par un sentier dans une forêt de feuillus. Et tout à coup, nous sommes stoppés. Comme sur l'autoroute. Bouchon. Trop de monde apparemment au même moment au même endroit. Pendant ce temps on récupère. On se prend en photo. J'ai un appareil jetable tout léger facilement accessible dans une poche ventrale de mon sac. Les gens parlent beaucoup. Des hommes. Quelles pipelettes ! Un quart d'heure de perdu mais pas vraiment puisqu'on se régénère. Et voilà, ça redémarre. Aucun obstacle. Juste de la montée. On débouche sur un plateau venteux. Alors là, oui, il y a un vent fort qui souffle et nous fait tenir la casquette. Le sentier serpente en montée entre de gros blocs de rochers. Il fait beau. Le panorama est grandiose. On marche car ça monte fort. Et puis on court à nouveau. Je n'ai pas encore sorti les bâtons. Ah oui, mais là, je vais les sortir. On arrive au pied d'une montée alpine. Plus possible de courir. On attaque l'ascension vers le premier sommet situé à 1366m d'altitude. Le vent est bien présent. Il faut lutter contre. On grimpe. Des pierres partout roulent sous nos chaussures. Certains montent en zigzag. C'est hyper raide, mais assez large et c'est sur une crête. Le vide chaque côté. Nous arrivons sur un replat et Vincent me dit chouette c'est le sommet. Tu parles Charles, on déchante bien vite lorsque l'on découvre le sommet à l'horizon. A cet instant, notre moral en a pris un petit coup, dois-je dire. Mais pas d'autres solutions que de continuer. Alors un petit shot et c'est reparti. Vincent a un coup de barre. Je passe devant. On ralentit la cadence. En fait, il y a 30km d'approche avant d'arriver à ce foutu sommet. On y est au St Guiral. On redescend en pleine pente tchac tout droit. Comme si c'était une piste de ski. Et on arrive dans un creux qui nous permet de remonter aussi raide sur l'autre versant. Heureusement, le sentier se transforme en sentier en balcon. Toujours des pierres partout. Quel pays ! Il faut les éviter, et éviter de se tordre les chevilles. Et voilà de la boue. Beurk. Jusqu'à la cheville mais tant pis on fonce (tranquillement, toujours, car la course ne débute qu'au 46ème km, disent les spécialistes). Et puis tout à coup on plonge littéralement dans la vallée, vers le village où se trouve le ravitaillement. Je commence à râler. J'en ai marrre de leurs descentes à la noix suivies de remontées et de redescentes et de remontées mais qu'est-ce que je fais là, dis-moi, j'abandonne. Tant pis, j'abandonne, j'en ai marre. Quelle galère ! (Je pense que j'étais en hypoglycémie). On arrive au village de Dourbies dans la vallée mais le ravitaillement, lui, se trouve dans la remontée. Et zut, il faut même remonter pour se ravitailler. Mais j'en ai marre j'en ai marre de ce pays.
Vincent me calme, m'encourage, tout comme les supporters qui applaudissent allez madame, bravo et moi qui rétorque quelle galère ! Je me jette sur les pâtes de fruits. Du sucre, du sucre, du sucre. J'engloutis les barres de muesli au chocolat blanc. Je bois de la Vichy (pour le sel). Je remplis mon camel back. Fais des étirements. Pas de problèmes de hanche. Mais les cuisses par contre ont tendance à faire des crampes. Allez, encore quelques pâtes de fruits et c'est reparti. Vincent passe devant. Ca monte, et fort, pour changer. Mais je ne râle plus. Si j'avais dû abandonner, c'était maintenant. Alors, on y va. Coup de barre de moi. Je passe devant. Les bâtons sont très utiles. Arrivons devant un abreuvoir, on se rafraîchit. Il fait chaud. Sais pas l'heure. Veux pas regarder. Continuons à grimper pas à pas. Dominons de nombreux sommets. C'est beau. Ciel est bleu. Economise mon souffle. Un monsieur couché par terre, teint cireux, les secours arrivent par le sommet. Y sommes presque. Et voilà, nous y sommes. Courte descente, et ça remonte par un sentier recouvert de feuilles mortes sous lesquelles se cachent des pavés, des racines courtes, de petites pierres rondes, sympathique. On ne peut pas accélérer sous peine de se tordre les chevilles. Et pourtant, ça descend à présent. Trop dangereux de se laisser aller. Nous voici en train de traverser un ruisseau, oulala les pieds sont mouillés et en face on remonte dans la boue. Mmmhhh les jolies chaussures et les belles jambes bien noires. Aucune importance, il faut s'agiter si on ne veut pas se faire arrêter au poste de contrôle pour dépassement du temps. Là, j'ai un blanc. Sais plus rien du parcours. Les images reviennent alors que nous descendons (tiens donc) vers Trêves par un "chemin" très ombragé, beaucoup d'obstacles, beaucoup de pente. Les cuisses crient au secours et se contractent en crampes. Apparemment je suis en tête d'un petit train de coureurs. Tout va bien. Les endorphines me dopent. Arrivons dans le village, mais n'oublions pas de remonter vers le ravitaillement situé en sortie de village. Sommes au 46 km. Avons 1/2 heure d'avance sur le temps prévu pour stopper les gens pas assez rapides. Et c'est à partir de là que commence la course, paraît-il. Ravitaillement en pâtes de fruits. Vincent mange une mini tartine au roquefort. Quelle santé ! Avons continué à consommer nos gels régulièrement. Je disais donc que nous allions remonter un versant de montagne. C'est parti. Ca grimpe sévère, comme d'habitude dans ce coin. C'est très cassant comme relief. Rien à voir avec les Alpes, ni les Vosges d'ailleurs. On monte bien en rythme, tous les deux. On se fait toujours doubler. Il y en a qui ont la santé, dis donc. Arrivés en haut, nous courons sur une sorte de plateau. Beau panorama, mais je n'en suis pas tombée amoureuse. Beaucoup de sable cette fois-ci. Un coureur nous double et nous conseille de ranger les bâtons car dans 500 m on va plonger dans la paroi... Merci monsieur. Nous nous exécutons. Et nous voici au bord de la falaise. Gloups ! Une personne chargée de la sécurité de la course est postée là pour nous donner des conseils sur comment se comporter dans cette descente. Mammmmma mia... on se met de dos, on s'accroche aux cordes (merci les gants) et on laisse glisser les mains le long du cordage en essayant de freiner avec les pieds qui eux glissent sur le sol sablonneux. De plus, quelques branches d'arbres parfois bien parfois moins bien placées risquent de nous embrocher... Le coureur derrière moi me donne la main dans les passages difficiles, ils le sont tous mais certains pires que d'autres, et Vincent me réceptionne en aval. Je tombe plusieurs fois sur les fesses, mais sans gravité. On arrive un peu plus bas, mais le sentier très escarpé s'étire en balcon et flirte avec le vide. J'adore. Je trébuche d'ailleurs plusieurs fois mais sans jamais tomber. Ouf. On arrive bien plus bas, on remonte en face et là se trouve le dernier ravitaillement. St Suplice (Sulpice, en fait). Je mange des pâtes de fruits, Vincent a pris goût aux tartines de roquefort, re-pâtes de fruits et ensuite on repart. Toujours beaucoup de coureurs. On n'est jamais seul. Sentier qui monte, ça discute encore dans ce coin-là et toujours des hommes. Ca monte toujours, mais on court. J'appelle vivement les endorphines afin qu'elles atteignent mon cerveau. Vincent me dit qu'il veut arriver avant la nuit. J'active mon mental de plus en plus. Sentier en balcon, mais montant toujours. On se fait doubler. Toujours, encore, à nouveau. Parfois des jambes déjà vues, parfois non. Le moral est bon. Je n'ai plus envie d'arrêter. On va vers la délivrance. Oui, mais avant cela, encore deux descentes à cordes et une montée digne d'Indiana Jones. Tortueuse à souhait, humide à souhait, boueuse à souhait, escarpée à souhait, des blocs de pierre en guise de marche de 1 m de haut. Nous suivons un jeune couple. Lui, donne le rythme. Ca avance. Personne ne pipe mot. On progresse en silence. Plus envie de faire de l'humour, on marche mais rapidement. La pente s'adoucit, on décide de courir. Nous remercions le jeune couple pour avoir joué le rôle de la locomotive. On les dépasse (yes !!) et on court. On court encore et toujours. Sommes sur la crête. Avons atteint le fameux Roc Nantais. Le sentier serpente et tout à coup se jette dans le vide ! Dammit... Des cordes à nouveau, des glissades involontaires sur les fesses pour moi, des trébuchages pour moi encore, Vincent me supplie d'être prudente, des cordes à nouveau et le sentier très étroit qui plonge dans la vallée vers la délivrance. Il est recouvert de jolis pierres blanches, suffisamment pointues pour empêcher de courir sereinement. Arrivés en bas, on touche l'asphalte et... ça remonte jusqu'à l'arrivée officielle. Nos mains se rejoignent. Nos regards sont remplis de reconnaissance l'un envers l'autre. On nous acclame, une clameur plus forte monte vers nous alors que nous foulons le tapis rouge bravo les amoureux lance-t-on autour de nous, encore un effort, nous courons, nos jambes sont inexistantes et pourtant elles nous portent vers le portique d'arrivée et voilà que l'animateur cite nos noms, les applaudissements crépitent, on s'embrasse, on est heureux : 12h14mn38sec.
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