Mon premier marathon : Un corps à la dérive...
La pluie et le vent fouette le pont Jacques CARTIER, les dossards verts se mettent en place,
je fais quelques longueurs, mais à quoi bon s'échauffer, j'aurai 35 km pour le faire. Juste après la ligne je vais applaudir les dossards verts (les coureurs du semi marathon qui partent 20 miniutes avant nous), le maire de la ville de Montréal est placé juste après la ligne et tape dans la main de tous les coureurs qui passent devant lui, ils sont hypers content de le faire, ils font la fête. Puis les dossards rouges se mettent en place, d'abord enlever le sac poubelle qui sert d'abri sur les deux heures de pluie que l'on vient de prendre sur la tête puis jeter son tee shirt à manche longue de " La ronde des vignes" 1997, un jour où j'avais le feu dans les jambes (57mn au 15km) On décompte : 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, (c'est bon cela fait 8 mois que je me prépare, j'ai envie !!!) 3, 2, 1, 0... Je suis à côté du lapin 3h45, tout se passe bien : la pluie battante a laissé d'immense flaque d'eau, que l'on ne peut éviter il pleut toujours, les chaussures et les habits se chargent. Nous avons formé un groupe d'une centaine de courreurs autour du lapin "3h45, qui s'appelle Julien TREMBLAY et qui vient de courrir sous la canicule le marathon de QUEBEC en 3h02. Sur une épingle ou au cours des 5 premiers km je suis content de voir des autres gars du Groupe, Marcelin, Claude, Stéphane. Tout se passe bien pour le groupe, on prend un peu d'avance mais je dis à chaque fois "Ce n'est pas grave cette minute d'avance nous en aurons bien besoin tout à l'heure, au 30 ième" Julien TREMBLAY répète sans cesse " Le marathon, c'est après le 30 ième kilomètre, avant ce n'est pas le marathon... " On passe sur la piste du circuit de Formule 1 de MONTREAL, juste après la ligne de départ ils ont marqué deux mot pour Gilles VILLENEUVE l'enfant du PAYS... C'est drôle mais je pense à lui à ce moment. Une ampoule derière le talon commence à me chatouiller, je me dis ce n'est pas possible, j'ai fait des sorties de 17 km sans rien et aujourd'hui après 5-6 km c'est déjà brûlant... Je me dis je ne suis pas arrivé... Pour ce projet de course à pied j'ai écouté tous les expérimentés du groupe, mais Fabrice a été le plus patient et celui qui m'a toujours poussé qui m'a donné tous les conseils, il m'a dit avant, si tu as fait ce que je t'ai dit : "tu peux faire 4 heures", il m'a donné pas mal de conseils je les ai presque tous suivi à 100 %. le problème on le verra plus tard c'est le "presque"
Avec fabrice, la veille, devant l'Hôtel ! Fabrice, un Ultra, Ultra !
Je cours avec un canadien, on est dans la même foulée, on discute de ses vacances en France, en Provence, c'est impressionnant comme ses repères là sont importants... On ne se quitte pas, mais le groupe d'une centaine commence à s'étirer, Julien TREMBLAY a un mot pour les premiers que l'on double et qui sont en difficulté " Lâche pas, accroche toi" , certains ont des crampes, d'autres vomissent, On Arrive au semi marathon à 1h52, juste après je vois Marcelin, ça me fait plaisir, c'est mon collègue de chambre, je continue avec le lapin "Julien TREMBLAY", plusieurs fois pendant la course je lui dis "tu me forces, tu ne me lâches pas, tu m'enmènes jusqu'au bout" "Ca va ? "On arrive au 25 ième km, Philippe de l'EPM de LYON qui participe aussi à ce marathon, revient de l'arrière, je viens de m'apercevoir que les pansements spéciaux que j'ai mis sur la poitrine se sont enlevés et que je commence à saigner (Fabrice avait dit, pas besoin d'acheter des pansements spéciaux, tu colles des petits bouts de sparadrap, ça peut tenir plusieurs jours) " Tu as un pansement ? " Non, il n'en a pas, je décide de m'arrêter au point médical sous le pont en plein milieu de la montée de BERRI , les deux infirmiers sont assis tranquillement sur un brancard : " Vous avez de la vaseline ? Ils cherchent, il ne trouvent pas, il ouvre un grand sac, au fond il trouve et me tend un gros pot de vaseline, je trempe la main dedans, si ça ne me soigne pas cela me soulagera, le groupe a filé je ne veux pas le lâcher si je lâche maintenant je ne reviens pas, je sprinte, je monte la deuxième partie de la Côte de BERRI à fond ( Fabrice avait dit : si il y a une côte, tu ralentis, surtout tu ne forces pas) et je les rejoints au bout de 500 mètres, on ne doit plus maintenant être qu'une dizaine, ça a lâché un par un, ceux que l'on double sont à la dérive, à bout de force, il ne pleut plus mais la chaleur est étouffante humide, nous sommes moites, nous ressentons des bouffées de chaleurs sur le visage, même à 40° à Marseille je n'ai pas ressenti cela...
Mickael et moi, il finira en 2h45, son objectif, 12ième du marathon !!!!!!!!!!
Julien TREMBLAY s'arrête faire pipi vers le 28 ième kilomètre, c'est mon erreur, je ne l'attends pas, je continue, et franchement là, j'ai le feu dans les jambes, j'ai envie de mettre la gomme (Fabrice avait dit : même si tu te sens bien, tu n'accélères pas, tu restes dans ton rythme) : C'est ma phase d'euphorie dans ce marathon (Fabrice avait dit : tu vas avoir des phases d'euphorie, penses aux km qu'il y a après, cela ne va pas durer, n'accélères pas), j'ai des ailes, je double, je double, je double c'est facile pour moi, Céline me fait un coucou et une photo vers le 28 ième, puis Isabelle (l'accompagnatrice de Contrastes voyages) vers le 30 ième, alors il est où le mur ? J'ai pas de mur, je me crois invincible. Je n'arrête pas de me répéter "Putain, il n'y a pas de mur !!!!!" Vers le 32 ième kilomètres, une sono crache à fond le titre de MIKA "relax Take it easy" je ferme les yeux, je pense à ceux que j'aime, c'est la plénitude et si je continue sur ce rytme, je vais être en dessous de 3h40, un exploit pour moi... au 35 ième kilomètre c'est pas un mur qui me tombe dessus, c'est une muraille, une pyramide... Plus rien dans les jambes, elles font mal, je souffre, j'ai pleins de couteau plantés dans chaque muscle, désolé mon corps me dit d'arrêter et pour ne rien arranger on est sur une ligne droite qui fait trois km, c'est simple j'insulte dans ma tête celui qui a tracé ce parcours, j'ai perdu de la lucidité un canadien me parle de pompiers qui viennent de FRANCE, j'ai pas la force de lui répondre, pourquoi il me parle de pompiers ? Pourquoi ? Est ce que je suis pompier, moi ? Qu'est ce que j'en ai à faire que des pompiers soient venus exprès de France courrir cette conchonnerie ? Une fille tape un peu des chaussures à côté de moi, ce n'est rien mais ça m'énerve. Julien TREMBLAY revient de l'arrière, il est content de me retrouver, il me dit, "c'est bon accroche toi, on y est" je fais 500 mètres", mais je n'insiste pas, pour ne pas exploser, il part devant Je calcule à chaque km (Fabrice avait dit tu peux faire moins de 4 heures) avec le peu de lucidité qu'il me reste les minutes pour aller à quatres heures divisé par le nombre de km, pour arriver avant 4 h00 franchement mon corps me dit de lâcher, je n'ai plus rien dans le corps ( Fabrice avait dit, à un moment ça va être dur, c'est dur pour tout le monde, surtout tu laches pas tu essaies de te faire un peu mal) et là j'ai envie de tout envoyer balader, je repense à toutes mes sorties du matin, seul, dans la nuit parfois avant d'aller bosser, je repense aux longues sorties avec mon boss, le samedi et le dimanche matin, je pense à MiCKAEL Kathia, Fabrice, Jean Marc, Claude et Guillaume qui sont devant qui sont déjà arrivés, quand je suis sur cette ligne droite maudite de 3 km et de 100 mètrre de large, tout petit avec ma détresse, avec cette carcasse qui fait mal, comme si je courrais sur des charbons avec pleine de petites aiguilles qui rentrent dans tous les muscles à chaque foulée, j'ai du venin dans les jambes... J'aperçois le stade au loin, c'est cool, c'est là que l'on arrive, et puis sur la carte du parcours j'avais vu que l'on finissait dans un parc, le parc botanique de MONTREAL, trop cool je me dis, les 5 derniers km dans un parc, sur des allées souples, avec un paysage moins monotone, le parc Botanique ce sera le parc de la Tête d'Or de LYON, le parc Borély de Marseille, le parc de SCEAUX à PARIS ou la forêt de MEUDON. J'ai fait les 35 premiers kilomètres au physique, les deux suivants au mental, et là on va rentrer dans le parc, je vais voir des arbres, des allées souples, de l'herbe, c'est cool ? Il s'appelle comment celui qui a fait le tracé ? Il habite où, je pourrai lui parler quand on aura passé l'arrivée... Parce que l'on y rentrera jamais dans la parc on reste sur les grandes lignes droites infinies, sur ses rues larges de 200 mètres... Et en plus on s'éloigne du Stade : je n'ai plus de physique, je n'ai plus de mental, j'ai plus rien, je m'en fous de cette course, si cet idiot qui a fait ce tracé croit que je vais tout lâcher pour lui, il rêve, je fais encore une foulée, puis deux, puis trois, 5 kilomètres c'est long, je suis seul, je double quelques carcasses qui ne ressemblent plus à des courreurs, j'aperçois vaguement quelques corps désarticulées (Fabrice m'avait dit quand t'en peux plus tu penses à tes gosses, tu le fais pour eux, tu t'engueules tu te dis de ne pas lâcher...) je ne m'arrête pas quand même j'essaie d'avancer, et je reprends un peu la pêche, de telle sorte que je retrouve Julien TREMBLAY seul au 39,5 ou 40 km, il est seul, a t-il ralenti ? en tout cas il me dit qu'il va me faire finir, que je vais mettre 3h45, je lui dis "julien, 3h46, c'est ok ! " Il me chouchoute, il me tire, je retrouve des forces, plus que deux, plus qu'un, ça va ! La stade enfin, je le revois, il est en bas, cela va descendre, c'est cool : je rentre dans cette antre, un demi tour de piste, je regarde le temps 3h47,
je ne suis pas heureux, je n'ai plus assez de force en moi, ni physique ni mental pour ressentir une quelcquonque émotion, on passe la ligne, julien TREMBLAY, me tombe dans les bras, et là je suis heureux quand même, les nerfs se relâchent, Mickael arrive en hurlant, il me prend dans ses bras. Je les retrouve tous Mickael, Kathia, Fabrice, Guillaume, Claude, Jean Marc et Céline : je n'ai plus de force, j'ai envie de tomber, de m'allonger, de vomir ... Fabrice dit "tu l'as fait !" Ils s'occupent de moi, je n'ai plus aucunes forces, ils me font manger, ils m'enlèvent mes chaussures en sang au niveau des talons (les ampoules des 5-6km), me mettent des habits secs, ils vont me chercher à manger, Guillaume dit que je suis en hypoglycémie, je n'ai quasi rien mangé du parcours... J'ai poussé la machine au bout ! il n'y a plus rien dans le corps, il me faudra une heure pour aller mieux ! Allongé sur le lit à l'hôtel, quelques heures après, du coca frais un café chaud, avec Marcelin, c'est cool, je suis dans la plénitude !
ma conclusion ? il y a dans l'Administration Pénitentiaire des hommes et des femmes extraordinaires, je le constate chaque jour, mais dans ce groupe cela m'a explosé à la figure : merci les gars, merci les filles sans vous jamais je n'aurais été capable de faire cela ! MERCI à Denise, Didier, Suzy, Sylvie, Michel, Olivier, Marcelin, Roger, Céline, David, Fabrice, kathia, Guillaume, Jean Marc, Claude, Stéphane, ! PS : Fabrice, sur un 100 km, il est où le mur ?
PS : ma plus belle émotion de cette course ? c'est stupide mais c'est le lendemain, quand nous avons ouvert le journal, je l'ai trouvée très très belle cette photo de nos deux champions !
Le vainqueur homme et la vainqueur femme, retrouvés par hasard à l'aéroport de MONTREAL , c'est moi qui tient le WINNER par l'épaule, j'ai cru que j'allais lui broyer, tellement il est sec...
3 commentaires
Commentaire de CROCS-MAN posté le 22-11-2008 à 22:04:00
ça c'est du CR, bravo Monsieur le MARATHONIEN, tu m'as rappelé que ce n'est pas rien de courir un marathon (j'ai fait celui de Nice) Merci et on se verra peut être à celui de Marseille.
A plaisir.
Commentaire de Le CAGOU posté le 22-11-2008 à 22:26:00
BONSOIR VINZ,
LONGIN DE LONGINE CONGRATULATION POUR TON 1ER MARATHON. CA DE WISS!! MERCI POUR SE SUPER CR ET MOI QUI SOUHAITE PARTICIPER POUR MON 1ER LE 26 AVRIL A MARSEILLE TU ME DONNES DE BONNES INFORMATIONS MAIS TU ME FAIS PEUR AUSSI. BRAVO ET ENCORE BRAVO POUR TON CHRONO ET MAINTENANT C'EST QUOI?
SPORTIVEMENT LE CAGOU
Commentaire de Aiaccinu posté le 23-11-2008 à 08:33:00
Tout en émotion ce CR , bienvenu chez les kikous !
Je t'attends pour le marathon de Marseille
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