L'auteur : Rag'
La course : 100 km de Steenwerck (Open)
Date : 30/4/2008
Lieu : Steenwerck (Nord)
Affichage : 1938 vues
Distance : 100km
Matos : ma bite et mon couteau.
Objectif : Objectif majeur
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Cela faisait deux ans que l’idée m’effleurait l’esprit, qu’elle revenait à intervalles réguliers. Après chaque course, chaque épreuve un tant soit peu ardue.
« Serai-je capable de devenir un Centbornard ? »
C’est début 2008 que l’idée s’est petit à petit concrétisée. Sous la forme de boutade, puis de vague projet, enfin de défi lancé à moi-même ainsi qu’à mon fidèle acolyte, Fabrice. Suite à l’Hivernale du Raid Normand (+ 50 bornes et 1200 D+) où je n’avais pas ressenti de grosses difficultés, j’ai décidé de me préinscrire sur le site des 100 kms de Steenwerck.
Néanmoins, durant les trois mois qui me séparaient du départ, les soucis, approximations et découragements se sont accumulés… La préparation fut une longue et morne improvisation : dans l’incapacité de suivre un plan de préparation digne de ce nom, je me suis mis à accumuler les longues sorties de 1h30 à 2h15. A cela venaient s’ajouter des pépins physiques récurrents (sciatiques, tendinites, contractures). A noter également que mon sommeil est loin d’être réparateur depuis trois semaines (boulot, stress, morosité sont les malvenues avant une épreuve de ce calibre). Il s’en est fallu de peu que ma préinscription ne devienne jamais une inscription…. Et ce « peu » se nomme Fabrice. Le fou s’est inscrit directement sans passer par la case préinscription « je-prends-le-temps-de-bien-réfléchir ».Donc, nous voilà, tous les deux ce 30 avril à 19h au départ des 100 kms. Auparavant, j’ai pu bavarder avec Pégase et Chtigrincheux, ce dernier me prêtant généreusement un Buff Kikouroù (j’ai perdu le mien trois semaines plus tôt), j’ai croisé Embrunman, Voilier59, ForrestGump, 100bornard1022. Sympa de faire ou refaire connaissance !
Nous nous élançons donc à petite allure sur le tracé jaune. Nous blaguons, saluons la foule et les premiers kilomètres sont vite avalés. Je prends bien soin de m’hydrater et manger à chaque ravitaillement, et il y a de quoi ! Nous discutons avec un coureur qui participera à l’UTMB 2008, son rythme est identique au nôtre et nous faisons un bon bout de chemin ensemble.
Etant donné que la nuit n’est pas encore tombée et que le ciel rechigne à nous tomber sur la tête (petite pluie au départ et le vent semble se calmer au fur et à mesure de la course), il est de bon ton d’admirer le paysage et les quelques bâtisses qui jalonnent le parcours. Bon, c’est vrai que c’est plat mais l’on peut admirer les flèches des clochers alentours qui se découpent sur l’horizon avec le soleil couchant en arrière-plan. Le seul dénivelé se matérialise par deux montées de ponts d’autoroutes que je décide d’affronter en marchant.
Le premier tour se termine et il est temps de faire un bilan : pas de bobos à l’horizon, les jambes commencent à être raides (déjà ?) mais j’ai espoir que la production d’endorphine puisse me les « endormir ». 2h34 pour les 23 premiers kilomètres, c’est honorable car nous nous arrêtons une à deux minutes à chaque ravitaillement. Manuwak m’encourage et cela me booste vers la sortie de la salle (merci à lui).
Le deuxième tour est entamé, la frontale est sortie et nous reprenons notre rythme. Nous passons le km25 et ma réaction fut de déclarer que nous avions fait le quart. « Déclaration digne de La Palisse » me direz-vous. Peu me chaut car, à cet instant de la course, mes neurones sont en stand-by et, vu que je ne suis pas très optimiste quant à ma forme physique, j’essaie de me motiver comme je peux… C’est mauvais signe.
Plus la nuit avance, plus les distances s’étirent. Ce tour n’en finit plus. « Si ça continue, faudra qu’ça cesse... » me dis-je en pouffant intérieurement. Mieux vaut prendre çà à la rigolade ! Chaque arrêt au ravitaillement est un soulagement pour mes cuisses qui durcissent (et y’a bien que ça qui durcit à ce moment-là !), je m’étire un peu et repart à chaque fois pour une épreuve de trois kilomètres, distance entre chaque ravito. J’essaie de dire quelques mots à Fabrice mais il n’est pas en meilleur état que moi, j’entends sa foulée qui rape le sol à intervalles réguliers. Pas dans son habitude, lui qui monterait les genoux au niveau du menton !
J’essaie de positiver, de me dire que l’endorphine va bientôt faire son effet, que je vais me brancher en mode « croisière » avec neurones en mode « off », que les 40 kms ne sont pas loin, que 50 kms, c’est pas grand-chose, que ça sera super une fois la ligne d’arrivée franchie…. Rien n’y fait, le moral s’évapore à mesure que le doute m’assaille. Très mauvais signe.
Et voilà qu’une voiture de l’organisation nous dépasse lentement, un gyrophare sur le toit. Que fait-elle là ? La réponse nous arrive très vite en pleine poire : le premier nous dépasse ; C’est bouche-bée que Monsieur Premier nous dépose comme deux vieilles déjections canines sur un trottoir…
Peu de temps après, je ressens une pointe sous le genou gauche. Bizarre. Cela fait deux ans que mon genou droit me fait des siennes, que je me focalise sur celui-ci et v’là ti pas que le gauche se rappelle à mon bon souvenir… « non ! Pas toi ! Tu peux pas m’faire çà ! Pas maintenant ! Pas aujourd’hui ! Traître ! » Cinq cent mètres plus loin la douleur est vive et me force à l’arrêt. C’est fini. La messe est dite. Le doute qui m’assaillait a fini par me submerger et l’idée d’abandonner s’est incrustée définitivement au sein de mes pensées. J’essaie de reprendre le rythme initiale mais je dois me rendre à l’évidence : le mal est là, l’envie n’y est plus, j’ai envie de hurler, de pleurer, de frapper ce genou qui me trahit, ces cuisses qui ne répondent plus à mes sollicitations. J’ai honte. Quel prétentieux j’ai pu être.
Les deux derniers kilomètres, car ce seront les derniers, sont un calvaire ; à la douleur physique vient s’ajouter la douleur morale, autrement plus dure à accepter et à supporter. Nous entrons dans la salle, je bois, mange, cherche autour de moi un regard salvateur. J’échange quelques mots avec Fabrice et me décide à consulter un des kinés à disposition. Il est à mon écoute, me questionne. Son diagnostic semble s’orienter sur un problème au niveau des lombaires. Je m’étire, essaie de trottiner hors de la salle mais quelques secondes de footing me forcent à l’évidence : je ne serai pas centbornard aujourd’hui. Fabrice, quant à lui, est cuit de chez cuit. Ce n’est pas son jour. Ce ne sera pas notre jour.
Avant de rejoindre la voiture, je laisse un mot sur la fiche Kikouroù pour signaler mon abandon.
Honteux, anonyme, seul…
Rag’
Bravo à tous.
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12 commentaires
Commentaire de la panthère posté le 01-05-2008 à 18:37:00
y'en aura d'autres!!!!
je sais, il est amer le goût de l'abandon, mais il sera effacé un jour! bonne récup! soigne toi bien!
Commentaire de Khanardô posté le 01-05-2008 à 21:28:00
On apprend plus de ses défaites que de ses victoires, dit-on.
Il y aura d'autres courses, et bien d'autres 100 bornes. Et tu finiras.
Accorde-toi le temps nécessaire à la récup', sans forcer une blessure qui ne demande qu'à revenir.
A un des ces quatre ?
Alain
Commentaire de rapace74 posté le 02-05-2008 à 06:51:00
il n'y a pas de honte a abandonner sur une course ,il y a des jours avec et des jours sans!!! et puis dit toi que c'est reculer pour mieux sauter!!!!
repose toi et soigne toi bien
au plaisir
manu
Commentaire de chtigrincheux posté le 02-05-2008 à 11:18:00
Reviens nous en forme après une bonne cure de soleil.
Je t’interdis de te rabaisser car tu a était vulnérable dans une période prédéfini.
A tout bientôt mon ami traileur dans l’âme et dans l’esprit
Commentaire de voilier59 posté le 02-05-2008 à 15:52:00
Rares sont les coups de maitres dès le coup d'essai. Apparemment, faut s'appeler Chtigrincheux pour le faire. J'en connais qu'il l'on fait 17 fois et l'on fini que 3 fois, alors soignes-toi bien et dis-toi que ce sera pour une prochaine fois.
J'ai moi aussi arrêté au 42ème km alors que j'ai terminé l'an dernier.
Bonne récupération.
Commentaire de hagendaz posté le 02-05-2008 à 21:13:00
récupère bien, et dans quelques jours ça ira mieux
Commentaire de fanfan59 posté le 03-05-2008 à 08:58:00
Soigne-toi bien ! il te reste un peu plus de 360 jours pour être de nouveau en super forme et le réussir ce 100 km, car tu le réussiras ce 100 km. Paroles des Chtis
Commentaire de Hay-David posté le 04-05-2008 à 15:01:00
Salut,
inutile de voir ça sous cette angle, laisse toi le temps de prendre du recul et tu verras ça ira mieux après la guérison et ça te laisse le temps de prévoir une bonne préparation pour la prochaine fois!
J'ai été vraiment désolé pour toi en voyant sur la feuille que tu avais abandonné mais ce n'est que partie remise, j'ai entendu dire ou lu un coureur que sur un cent bornes il n'y a pas d'abandon mais que ce n'est que partie remise...
Commentaire de béné38 posté le 04-05-2008 à 23:05:00
Surtout soignes toi bien pour pouvoir mieux repartir ensuite. Le prochain sera le bon, et merci en tout cas pour ce récit qui n'a pas dû être facile à écrire, mais que tu reliras autrement dans quelques mois...
Béné
Commentaire de Pegase posté le 06-05-2008 à 12:17:00
Que te dire dans un moment de détresse tel que celui là. Pas évident à vivre, même si tu es capable de relativiser un tel événement.
Repose toi bien, pense à toi de façon que l'esprit se sente de nouveau apaisé et redevienne en total harmonie avec le corps.
Puis il y également la main tendue vers l' autre, revenir sur des p'tites coursettes pour s' amuser entre nous et se remémorer que l' on courre pour le plaisir
A bientôt Yannick.
Laurent
Commentaire de Manuwak59 posté le 06-05-2008 à 13:19:00
Salut Rag. Honte ? elle est où la honte ??!!
C' est un défi ce genre de course pour des coureurs comme nous. Quelque soit la préparation, rien n'est jamais fait en ultra. Tu seras plus fort la prochaine fois mais ce ne sera jamais gagné pour autant. Il y a tant de facteurs qui peuvent rentrer en compte.
Récupère bien l' ami et je te donne rendez-vous pour le trail de la Sapinière ou avant cela pour un entrainement dans nos monts !!
Mes salutations à Fabrice.
Manu.
Commentaire de shunga posté le 03-03-2010 à 22:22:00
ah beh bravo !!! mais alors tu l'es ou tu l'es pas ? Je comprends plus.
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