L'auteur : Zaille
La course : 100 km de Metz Métropole
Date : 7/9/2019
Lieu : Longeville Les Metz (Moselle)
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Distance : 100km
Matos : Altra Paradigm 4.0
Objectif : Faire un temps
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Un nouveau défi et pas des moindres : courir 100km. Une folie, c’est ce qu’on me répond le plus souvent quand on ne me lance pas juste un regard plein d’incompréhension. Pourtant, les courses de 100km existent depuis bien longtemps et elles n’ont rien à voir avec la surenchère kilométrique des trails, d’ailleurs les 100km de Millau fêtent leur 50ème anniversaire en 2022.
Une boucle de 10km
Parmi la dizaine de 100km organisés en France il y a les 100km de Metz Métropole que j’ai choisi pour sa proximité et son tracé plutôt plat. Cette 2ème édition comme la précédente a la particularité de se dérouler sur une boucle de 10km à parcourir … oui, 10 fois !! Un « détail » qui m’a fait un peu peur au départ. Ne va-t’on pas devoir lutter contre l’ennui (ou le tournis) en plus de tout le reste ? Qu’importe, tout ça n’est qu’une question de mental.
J’ai commencé mon plan d’entraînement inspiré par Bruno HEUBI (une référence sur la distance) en pleine saison caniculaire suivi de vacances en famille donc un plan avec quelques trous et beaucoup de réaménagement. J’ai malgré tout fait 2-3 grosses semaines à 90, voire 100km. Pas de sorties incroyablement longues mais un maximum de 32km et juste pour le fun une sortie trail de 42km sur le GR53. Pendant des semaines j’ai beaucoup travaillé mon allure spécifique (AS100) qui a évolué en fonction de mon objectif chrono de plus en plus gourmand.
Quel temps peut-on espérer faire sur un 100km sans avoir de temps de référence sur la distance ? La règle la plus simple (ou simpliste) est de multiplier son temps sur marathon par trois: 3h25 x 3 = 10h15 dans mon cas. Ma première idée a donc été de courir à 10km/h (6:00) et de m’octroyer quelques minutes pour les arrêts aux ravitos ou les parties marchées. En effet, comme sur marathon, j’ai décidé d’adopter la méthode Cyrano avec des petites sections de marche. Le ratio choisi sera 2,5km de course pour 45 secondes de marche que je calerai le plus possible à l’endroit des ravitos.
La SNCF et moi
Bon, tout est planifié, l’entraînement se passe bien, pas de douleurs, je me décide enfin, la boule au ventre, je clique ! Un clic à 50€, ce qui, ramené au km, est plutôt honnête avec t-shirt et médaille. Il me reste encore quelques entraînements mais la charge se réduit à présent. Je fais les dernières sorties longues en intégrant les parties marchées, tout roule. Je parfais encore la logistique du week-end et de la course en elle-même.
Pour me rendre à Metz j’ai choisi le train. 1 heure de voyage depuis Brumath et une gare à 10 minutes de mon pied à terre chez un ami. Le train c’est bien, c’est beau, c’est pas cher (pas toujours, OK), c’est ECO-friendly mais … Oui, mais ! Le problème c’est que je suis un maudit du train. La SNCF et moi c’est toujours compliqué. Pour aller à la Saintelyon l’an dernier, le train était bloqué par des gilets jaunes et je suis arrivé in-extremis aux dossards. En avril, pour le marathon de Paris, panne de courant sur la ligne, 2h30 d’arrêt, j’ai envoyé en urgence mon oncle parisien chercher mon dossard sinon c’était cuit. Et cette fois-ci, ce sera un peu plus original, un incendie à proximité de la voie annulera TOUS les trains en direction de Metz !! MAUDIT que je suis !
C’est donc en voiture pas ECO-friendly du tout que je me rends à destination un poil excédé. Arrivé à 20h30, un repas vite fait chez un vietnamien et dodo vers 23h00. J’ai un petit stress supplémentaire car durant ma petite sieste d’après-midi j’ai été réveillé par une ENORME et très douloureuse crampe au mollet droit. C’est quelque chose d’inédit pour moi et je ne l’explique pas car en plus j’ai bien pris soin de m’hydrater toute la semaine avec de la Saint-Yorre et de la Maltodextrine. Dans tous les cas, ça m’inquiète car je sens encore le siège de la douleur et me demande comment ce mollet va réagir avec le boulot que je vais lui demander.
Dans la lumière artificielle des projecteurs
Réveil à 5h00 ! Bah oui, le départ est prévu à 6h30. Je compte 30 minutes pour me préparer et manger ma préparation à base de poudre d’amandes/pommes/cannelle. Je suis à 10 minutes en voiture et arrive donc avec 45 minutes d’avance en me garant directement devant le stade Dezavelle, là où ça se passe, c’est nickel. Je récupère rapidement le dossard et le T-shirt. Il n’y a pas foule, on n’est que 104 ultra-fondus et beaucoup ont l’air de se connaître.
Il fait encore nuit et le stade baigne dans la lumière artificielle des projecteurs, c’est une ambiance inédite pour moi. Je repère le ravito du stade et y dépose mon sac de ravitaillement perso qui me servira à réapprovisionner mon sac de trail dans lequel je transporte une flasque de boisson (Eau/Sirop d’agave/Acerola/Citron/Sel) et un peu de solide. J’ai aussi pensé à ramener un gobelet pour éviter l’utilisation de gobelets jetables.
Un dernier tour par les toilettes car la route sera longue aujourd’hui. Il est 6h25, pas de stress pour ma part, les coureurs se dirigent sur la ligne de départ sous les ordres du speaker. En fait, il pleut et on est tous agglutinés sous une tente. La météo nous a promis une journée très humide. Je vois au dernier moment un coureur qui pourrait être un ami FB et effectivement c’est Guillaume, on se sert la main, on se souhaite bonne chance et voilà que l’aventure commence, il est 6h31.
« Sub 10 »
Il fait toujours nuit, l’ambiance est particulière, ce n’est pas souvent que l’on prend le départ d’une course de nuit. Ce 1er tour me servira à analyser le parcours. Du bitume, du chemin gravillonné, le passage dans un parc autour d’un plan d’eau et c’est déjà le km5. On longe le port puis la Moselle et un alignement de péniche. Déjà on entend au loin le speaker, on voit le stade du FC Metz en travaux, et on retourne sur le stade pour un tour de piste. Je clos ce 1er tour en 56:52.
OK, je ne fais pas du tout ce que j’avais prévu à l’entraînement là ! En fait, je me suis mis en tête de faire un « sub 10 » comme ils disent les centbornards. Sous les 10 heures, la théorie dit 10h15 mais je me dis que ce serait quand même dommage de louper cet objectif, probablement irréaliste, pour 15 « petites » minutes, c’est beau de rêver mais qui ne tente rien … etc … Je décide donc de continuer sur ma lancée et m’octroyer tour par tour un peu de gras pour espérer atteindre ce nouvel objectif. Avant de continuer, je quitte ma veste car finalement il ne pleut plus et le ciel se dégage.
Très à l’aise
Le 2ème tour, dans ma bulle, je me trompe deux fois dans le parcours. Une fois je vais tout droit au lieu de tourner autour d’une barrière et tombe au bout de quelques mètres sur un chemin barré. Je mets quelques secondes à me rendre compte de mon erreur et fait demi-tour. La 2ème fois ce sont des coureurs qui m’appellent et me font comprendre que je suis en train de prendre un mauvais chemin. Tout est bien indiqué mais c’est vrai que, plongé dans ses pensées, on peut se laisser entraîner sur une fausse route.
Je suis toujours dans les temps de mon objectif (encore heureux, il reste encore 80km), je termine le 2ème tour en 56:40, un vrai métronome ! Je profite du ravito pour remplacer ma première flasque vidée, j’en ai prévu une pour tous les 20km. Le 3ème tour se termine en 56:02, je continue de capitaliser et me sens très à l’aise même si j’ai quitté la zone cardiaque d’endurance fondamentale, je suis en résistance douce et c’est vrai que c’est un peu tôt alors qu’il reste 70km. Bon, on verra bien !
42,195km en 3h54
Au km32 je suis rejoint par Olivier un runner de Metz qui fait sa sortie longue du dimanche en préparation du marathon de Metz. Il me demande s’il peut courir avec moi et j’accepte volontiers, je suis plutôt esseulé depuis le début mis à part les parties où le circuit est à double sens. On commence à papoter, on parle de nos courses, les marathons etc … et le temps passe vite, trop vite. J’en oublie même de faire mes pauses marchées. Je fais ce 4ème tour en 55:34, ça sera mon tour le plus rapide.
J’explique à Olivier la méthode Cyrano et que ce prochain tour je n’oublierai pas de marcher de temps en temps. On court aux alentours de 5:20 et toujours en toute aisance. Je passe le kilométrage mythique des 42,195km en 3h54. C’est plutôt pas mal sachant que c’est un meilleur chrono que sur mes 2 premiers marathons. Je suis donc content de moi et espère que ça dure. Avec mon compagnon du jour on continue en tout cas de discuter de tout et de rien et c’est ainsi que j’arrive avec facilité à la moitié du parcours. J’ai à présent 17 minutes de marge pour espérer faire moins de 10 heures. Calcul rapide, 17x60/50=19,4. Si je fais du 6:19 de moyenne à présent, j’arriverai encore avant 16h30.
Une réalité de plus en plus dure
Sauf que là, d’un coup, les jambes ne sont plus d’accord avec moi, je commence à décélérer. Je fais encore des kilo à 5:30 mais il n’y a plus la facilité du début, je suis même essoufflé et deviens par la force des choses de moins en moins bavard avec Olivier qui est toujours avec moi. Je termine le 60ème kilomètre avec un tour en pile 60 minutes, je conserve donc toujours mon avance mais mes espoirs commencent à se confronter à une réalité de plus en plus dure et mes arrêts aux ravitos sont de plus en plus long.
Je continue de m’alimenter comme il faut avec aussi du fromage, des TUC et même du saucisson. A présent c’est plus de salé dont j’ai envie. J’entame le 7ème tour et ne pense déjà plus qu’à chaque section de marche où je pourrai reposer mes jambes. Le souffle est de plus en plus lourd bien que mon cardio baisse. Une réaction de défense normale de mon organisme, il faut que je fasse avec. Mon compagnon du jour me quitte, il aura fait plus de 30km avec moi, on se sert la main, je le remercie mais suis un peu gêné car les 10 derniers km je n’étais pas de la meilleure compagnie.
Ça devient du n’importe quoi
Ça devient dur et les premières pensées d’abandon me hantent. Le 70ème km sera-t’il mon dernier. Je veux me coucher là, dans l’herbe ou pourquoi pas dans ma voiture. J’en peux plus mais dans tous les cas il faut rejoindre le stade alors je continue, je marche, je cours, ça devient du n’importe quoi. Je vais mettre 1h06, croquant ainsi d’un coup un tiers de mon avance. Je prends mon temps, bois un Coca, qu’il est bon ce Coca, tant pis pour ces bulles qui me seront peut-être fatale. Il me faut ce réconfort. Je pense à mes amis, à Laetitia, à mes enfants. Je reçois des messages d’eux depuis le début sur ma montre, ça me fait avancer alors pourquoi arrêter ?
J’avance étape par étape
Je me donne un énième coup de pied au cul (oui, je suis très souple du genoux) et repars, il me reste 3 tours mais je ne sais pas si je vais arriver au bout, ça sera sûrement mon premier abandon, même les meilleurs abandonnent parfois. Ce que je sais, c’est que le « sub 10 » est à oublier mais quelle importance ? Il est 14h30, samedi après-midi, et je me dis que je pourrai être avec ma famille à faire je ne sais quoi … mais qu’est-ce que je fous là ? Au km72 je pense même faire demi-tour, retourner au stade, rendre mon dossard mais non, je ne le ferai pas. J’avance étape par étape. Le parcours est mémorisé, je me fixe chaque tronçon comme un objectif.
J’arrive au bout de ce 80ème avec un tour en 1h12. Toute l’avance engrangée en 60km je l’ai anéanti en 20km et il me reste 2 tours. Oui 2 tours car maintenant il est hors de question d’abandonner. Je suis épuisé, mes jambes me font mal mais j’y arriverai, je courrai au ralenti, je marcherai un peu plus mais j’y arriverai. Tout le monde à mal aux jambes à ce niveau de la course. Je pense encore être dans les 30 premiers car très peu de coureurs m’ont dépassé et je sais qu’il y aura des abandons (40/120 l’an dernier mais il faisait très chaud).
Le moral change
C’est l’avant dernier tour et je me force à ne marcher que tous les 2,5km, le reste je cours. Très lentement (6:30/7:00) mais je cours. Même dans les petites montées, je cours, le cerveau sur OFF. Maintenant je sais que je serai centbornard, après ce tour ça sera le dernier tour. Je commence à plaisanter avec les bénévoles, le moral change, le mental fait son travail. C’est long, très long mais je vais y arriver. Le dernier quart de tour j’entends à nouveau le speaker au loin et c’est toujours aussi motivant. Je passe une avant-dernière fois la ligne avec un tour en 1h12.
Dernier tour, dernier tour, dernier tour !! Je n’ai plus que ça en tête. Je pars avec le même rythme qu’auparavant et m’impose les mêmes contraintes, j’ai un nouvel objectif : moins de 10h30. Cette ultime boucle je la ferai avec un nouveau compagnon : Bador. Il est dans son avant-dernier tour et cherche un binôme pour arriver au bout. Je lui explique mon plan de course et qu’il approuve. On trottine ensemble et faisons connaissance. On peut aisément discuter, la FC est bien descendue avec les allures de ces derniers tours.
10 tours
Au ravito de mi-parcours il ne me reste plus que 5km, incroyable. Je suis euphorique et dis au revoir à tous les bénévoles qui sont presque devenus des amis au fur à mesure des passages. J’étais connu comme le gars avec le gobelet en plastique perso. A d’autres endroits on se tape dans les mains, on me félicite, ça devient magique. Je suis un peu désolé pour Bador qui va devoir attendre un tour de plus. Cependant, dans le dernier quart sa famille l’attend et je le laisse partir devant moi terminer son avant-dernier tour accompagné de sa fille.
Il reste 1km, je n’y crois pas. Je suis tout sourire, c’est génial. Je rentre dans le stade, je répète à qui veut l’entendre que c’est fini pour moi, c’est l’arrivée. Enfin !! Je passe la ligne et lève les mains montrant mes 10 doigts, j’ai fait les 10 tours : 100km, 10h27, un truc de dingue !!
Satisfait
Je reviens une dernière fois au ravito, me fait prendre en photo et m’installe sur un banc pour déguster un énième Coca ma médaille de centbornard en main. Je vais rester longtemps sur ce banc pour partager mon bonheur avec d’autres coureurs et avec les amis et la famille via SMS. Je suis 25ème et fini donc dans le 1er quart du classement pour cette première expérience sur une telle distance. Je suis satisfait et fier même si je suis persuadé de pouvoir mieux faire avec une meilleure gestion mais ça … pour l’instant, on s’en fout !
Direction la douche en marchant comme un zombie avant de passer chez les kinés bénévoles, merci à eux, ça m’a fait un bien fou surtout que j’avais encore 1h30 de voiture à faire. C’était le gros objectif de l’année et je le valide mais je pense déjà à la suite, peut-être encore cette année, mais place à la récup’ maintenant. Un truc de dingue !!
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3 commentaires
Commentaire de galak42 posté le 10-09-2019 à 09:26:35
Félicitations pour ta course et ne rien avoir lâché ! c'est souvent vers le 60/70 km que ça devient dur.
Bienvenue chez les centbornards:)
Et à quand le prochain:)?
Commentaire de Zaille posté le 10-09-2019 à 09:59:44
Merci. Il y aura un prochain, c'est sûr ! Je pense à Millau pour fêter les 50ans en 2022 mais avant ça je vais sûrement trouver un autre ;-)
Commentaire de marathon-Yann posté le 10-09-2019 à 12:10:43
Bravo pour ta course et ton récit ! J'étais aussi à Metz (récit en gestation), tu décris parfaitement cette course. A mon avis tu avais la bonne stratégie, il faut être un peu ambitieux au départ, car c'est difficile d'accélérer après 70 bornes.
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