L'auteur : Zaille
La course : 100 km de Metz Métropole
Date : 16/9/2023
Lieu : Longeville Les Metz (Moselle)
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Distance : 100km
Objectif : Faire un temps
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Quel drôle d’idée de vouloir tourner en rond durant 100km sur un circuit de 4km ! C’est pourtant la proposition indécente des 100km de Metz Métropole et évidemment je n’ai pas su la refuser. J’avais déjà succombé à la formule 10x10km proposée en 2019 où j’avais étrenné mon statut de centbornard avec une marque à 10h27 et me voilà de retour avec en plus un nouvel objectif chronographique.
Hésitation
Un mois après l’Ultra Trail Tour de Nancy, début des hostilités, début d’un plan d’entraînement de 12 semaines made by Bruno HEUBI. 4/5 séances hebdomadaires avec comme d’habitude un peu de frac’ et beaucoup d’endurance. J’ai quand même réussi à caler 2 courses dans cette période à la rigueur quasi-monacale avec les 6h de Xonrupt-Longemer et les 32k du trail des Crêtes Vosgiennes.
Ma forme n’étant pas ce que j’expectais, j’ai longtemps attendu avant de m’inscrire. J’ai même attendu le dernier jour, un dimanche où finalement une sortie longue en AS100 de presque 40km faite assez facilement m’a poussé au clic fatal. Mon hésitation était légitime considérant mes dernières performances en course et surtout l’état dans lequel j’étais aux arrivées. Mais tout ça, c’est du passé, en course à pied on ne garde que le meilleur et c’est comme ça qu’on s’inscrit à des trucs toujours plus dingues !
Il va faire chaud
9h30 ! Est-ce bien raisonnable ? Bien que très cartésien, la raison me fait bien souvent défaut mais là… Considérant mon sub10 (9h54) en début d’année au 100km du Grand Est avec ses presque 1000m de D+, je crois que c’est carrément jouable sur ce circuit beaucoup plus plat (25x10m D+). Une chose me fait vraiment peur et met à rude épreuve mes plans sur la comète : la météo. Plus les prévisions météo s’affinent et plus je me rends à l’évidence : il va faire chaud et peut-être même très chaud (29°C selon certains sites) et je supporte très mal la chaleur à l’effort.
D’hors et déjà je prévois une petite glacière et une gourde d’eau dédiée à l’aspersion de la bête (moi). Evidemment je ne vais pas promener une glacière durant mes tours de manège mais je laisserai mon bazar au ravito de départ/arrivée qui sera à disposition tous les 4km. J’ai également prévu des compotes Baouw, j’ai craqué sous les coups marketing de certains podcasts de running, j’ai un peu honte mais je compte bien sur cette potion magique pour maintenir ma forme le plus longtemps possible.
Pizza-bières
Une fois de plus j’ai fait « confiance » à la SNCF pour me véhiculer à destination la veille de la course et pour une fois j’arrive presque à l’heure à Metz où mon neveu va me loger le temps d’une nuit dans sa chambre d’étudiant. Pizza-bières et dodo vers 23h00, pour un réveil vers 5h30. J’ai largement le temps de me préparer et de marcher les 20 minutes nécessaires jusqu’au parc St Symphorien pour ma promenade du jour.
Il fait encore bien nuit quand j’arrive vers 6h30 et l’organisation s’affaire aux derniers préparatifs. Je récupère le dossard et le maillot souvenir rapidement avant d’installer mon ravito perso qui se résume à un sac kraft dans le plus pur style SDF comparé à certains qui avaient carrément ramené leur propre table sur laquelle était disposé chirurgicalement leur alimentation. Beaucoup étaient également venus accompagnés d’une personne d’assistance pour gérer le bazar tout au long de l’épreuve, le grand luxe.
Capitaliser et lever le pied au fur à mesure
Je vois quelques têtes connus dont Stéphane Mathieu, multiple vainqueur de la Mil’kil (entre autres courses de dingue), qui est venu à Metz pour boucler son 307ème cent-bornes ! Je l’entends discuter de son repas de la veille, un copier-coller du mien, ça me fait marrer et me conforte dans ce choix stratégique 😉. Il y a quelques pointures sur place aussi dont un champion de France du 24H venu faire sa sortie longue de la semaine. Ils sont quand-même quelques-uns ici à avoir un record sous les 8 heures sur la distance. Moi je suis là incognito.
7h00, il fait jour à présent, hop, on y va. Les premiers km devront se faire à 5:20 pour moi. J’ai décidé de partir plus vite que la moyenne espérée (5:42) pour capitaliser et lever le pied au fur et à mesure. Le circuit est plat mais pas tout à fait, les 10m de D+ sur ces 4km sont des faux-plats qui ne s’ignorent pas. Je sais déjà que les montées feront mal à un moment mais que les descentes me permettront de dérouler un peu.
Top 10
Je cours les 2 premiers tours un peu sous les 5:20 et ne marche pour la première fois qu’au bout de ces 8 premiers km. Je prends de l’eau dans mon gobelet pliable et marche une petite minute. Je suis aux alentours de la dixième place mais on est tellement loin de l’arrivée que ça ne me fait ni chaud ni froid bien que l’objectif Top 10 fait partie de mes paris du jour.
Je suis dans les pieds du centbornard stakhanoviste cité plus haut, il y va tranquille, la gestion sur la distance, il pourrait en écrire des livres. J’arrive parfois à son niveau puis il me re-dépasse mais à aucun moment je ne force les choses, je reste rivé sur mes objectifs d’allure. Je sais que le km25 devra être bouclé en 2h15 et qu’à partir de ce moment je pourrai courir plutôt aux alentours des 5:30.
Dans la bonne humeur
Km25, 2h15 et quelques secondes. Je suis dans les temps prévus mais pas en avance malgré mon allure un peu plus rapide. La faute à mes séquences marchées qui me font « perdre » 20 secondes environ à chaque tour et donc 5 secondes au kilo. Pas grave, je reste persuadé que ces secondes perdues sont autant d’énergie capitalisée pour boucler le chantier.
Il fait déjà un peu chaud mais ça reste supportable surtout qu’il y a pas mal de tronçons à l’ombre. Certaines de ces portions sont à double sens, il faut parfois être vigilant pour ne pas percuter un coureur à contre-sens. Nous ne sommes que 45 centbornards mais à ceux-ci se rajoutent les coureurs du 50km et du 100km en relais. Tout se fait malgré tout dans la bonne humeur malgré parfois des slaloms entre coureurs ou promeneurs.
Mes allures sont toujours bonnes
Je cours à présent aux alentours de 5:25 sans forcer. La prochaine étape mémorisée et celle du marathon devant être franchi en 3h50. Je cours un peu plus vite que prévu pour amortir mes pauses marchées. Je commence aussi à ralentir ostensiblement dans les petits faux-plats montants à des fins d’économie sachant que le D- qui suivra équilibrera la balance. J’ai à présent dépasser Stéphane Mathieu, imperturbable, mais je ne doute pas qu’il me rattrapera dans la seconde partie de la course quand je serai aux alentours des 6:00 au kilo (ou probablement plus).
Je commence à avoir mal au ventre, comme si l’élastique de mon short était trop serré. Ça m’inquiète, j’espère que ça va passer. L’eau gazeuse n’est probablement pas une bonne idée ! Je passe le tiers, une première barrière psychologique qui fait du bien et en plus mes allures sont toujours bonnes. Je joue à l’élastique avec la 3ème féminine qui bénéficie d’une assistance 3 étoiles, Une amie qui a squatté une table du parc et lui sert flasques, barres ou compotes selon ses volontés.
La chaleur commence à m’atteindre
Km42,195, 3h50 et quelques miettes, parfait, je suis pile dans l’objectif. Tout se passe comme prévu, pas de douleur, les jambes fonctionnent mais je ralentis. Je ne m’en aperçois pas vraiment mais la montre ne ment pas. Pas grave, c’est prévu, à partir du km50 je sais que le rythme devra être aux alentours de 5:40 et donc là je peux me permettre d’avance à 5:30. Je m’arrête même à un bac d’épongeage pour m’écraser une éponge sur le crâne. La chaleur commence à m’atteindre.
Il fait beaucoup moins chaud que prévu mais le ciel nuageux rend l’atmosphère lourde et je commence déjà rêver d’Orangina. Mon mal de ventre s’est calmé, je ne sais pas si c’est une bonne idée mais rien que le fait de penser à ces 3 cannettes d’Orangina coincées entre 2 pains de glace dans ma glacière me font avancer plus vite vers le ravito. Km48, je craque. J’ouvre ma glacière et en retire l’élixire que je descends par grosses gorgées tout en marchant. Je marche un peu plus longtemps que prévu le temps de vider ces 33cl de bonheur et je repars pour mon prochain pointage.
Km50, 4h34 pour 4h35 de prévues, une fois de plus le plan est respecté. Je m’en félicite et profite du peu de gras engrangé pour un petit arrêt technique entre 2 bosquets. On est mi-course et je commence à faiblir, mes jambes deviennent lourdes. Subitement courir à 5:40, mon allure cible du moment, devient difficile, mince alors. Je suis 8ème mais talonnés de près par 3-4 poursuivants. Le classement m’importe peu, du moins ma priorité est ailleurs mais ça reste motivant.
Sur un banc
J’ai de plus en plus de mal et passe le 14ème tour avec difficulté. Le mental est entrain de lâcher, je pense à l’abandon, une fois de plus. J’ai du mal à tenir les 6:00 au kilo et je ne suis pas loin de l’allure la plus lente prévue (6:07) mais ce ne devait pas être pour tout de suite, pas maintenant. Je passe le dernier km du 15ème tour en 6:01, je me rends à l’évidence, mon pari est perdu. Le moral prend un gros coup de gourdin dans la tronche, je décide de m’assoir sur un banc en face du ravito en buvant un coca tiède.
Rien ne va plus, la tête d’abord et les jambes pas loin derrière. J’ai fait 60km en 5h30 environ, il m’en reste 40. Comme ça s’annonce, je vais encore en avoir pour plus de 4h pour boucler la chose. Je me tâte, les minutes passent et je ne vais pas mieux … Allez ! On va y aller, ça va le faire. Une amie, Nat, est censée venir bientôt me rejoindre et faire quelques tours, ça ira mieux à ce moment et puis je peux encore battre mon PR (9h54) : GO !
DNF
Je repars tant bien que mal, les jambes sont lourdes, les muscles durs mais j’avance, j’avance jusqu’à ce que je sente un début de crampe au mollet et puis … Je m’arrête … Je m’arrête pour de bon, la décision est prise. Tête baissée, je coupe mon chrono et me dirige vers la zone de départ de laquelle je m’étais éloigné d’à peine 200m. La mort dans l’âme, honteux, je tends mon dossard au chronométreur : t’es sûr ? C’est dommage, t’es 6ème !
Oui j’en suis sûr ou du moins je le crois. Mon premier abandon. Mon premier DNF. Quelle déception, quelle tristesse. J’aurai peut-être dû continuer, souffrir, je sais souffrir et je sais que la satisfaction est d’autant plus belle quand le chemin a été compliqué. Mais non, là j’arrête, comme un enfant trop gâté qui se ravise au moindre obstacle, lâchement, la queue entre les jambes avec le sentiment d’être au plus profond des abysses.
Je pars sans me retourner
Je bois mes derniers Orangina frais en me demandant si je mérite bien ce luxe ! Je vois défiler les coureurs que j’avais dépassé : la 3ème féminine, Stéphane Mathieu, … Bravo, 1000 fois bravo, bravo à eux mais il m’est devenu insupportable de rester. Chaque coureur qui passe me renvoie au médiocre centbornard que je suis.
Après une toilette de chat, je pars sans me retourner, j’entends le speaker, je n’entends plus les applaudissements, juste des hués, ceux dans ma tête de perdant. L’abandon n’est absolument pas libérateur, il devient un poids infiniment plus douloureux que des crampes ou des jambes lourdes.
Lundi, mon cerveau se contorsionne encore à se demander si la bonne décision a été prise. Mes proches disent que oui, bien sûr, mais franchement, je n’en suis pas certain. Maintenant se pose la question de la suite, les prochains défis, les prochains objectifs … La course à pied ?? Je n’en sais rien ! Laissons un peu de temps, les plaies finissent toutes par cicatriser et puis ce n’est que de la course à pied, n’est-ce pas ?
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