L'auteur : richard192
La course : Ultra Trail du Vercors
Date : 9/9/2017
Lieu : Villard De Lans (Isère)
Affichage : 1816 vues
Distance : 86km
Objectif : Faire un temps
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Eh oui après plusieurs UTV, Grand Duc j’en passe des meilleurs bouclés, j’ai coincé !
Malgré une bonne préparation physique, qui m’a donné confiance jusqu’à me dire que ça ne serait pas quelques gouttes de pluie qui pourraient contrarier ma course, et bien si j’ai stoppé au ¾ du parcours.
Car cette année sur l’UTV, la performance n’était finalement pas de faire un bon chrono mais tout simplement de terminer tant les conditions changeantes ont rendu cette épreuve difficile.
J’avais pourtant goutté un peu à cela au Grand Duc 2014 avec pluie, orage et parcours de replis interminable d’où peut être un bon excès de confiance au départ. De plus, la température clémente à 5H à Villard (15-16°C) avec ce vent du sud m’aurait presque poussé à partir avec le strict minimum.
La pluie était attendue en fin de matinée ou en début d’apm. C’était d’ailleurs le sujet de ma discussion du matin avec Samontetro : « On attend la pluie peut être à 11H ou plus tard, selon les sources météo ». On l’aura eu finalement à partir de 11H.
La course
Un départ rapide programmé pour arriver sur les balcons est sans être gêné par les bouchons et surement inconsciemment aller le loin possible avant l’arrivée de la pluie. Si elle arrive à 14H, je devrais avoir passé St Nizier donc ça devrait le faire. J’avais prévu environ 12H30 pour boucler le parcours.
La montée au col vert se passe plutôt bien avec un petit vent frais vers le sommet. Pour la vue, il fait nuit donc s’est râpé. Je m’engage sur les balcons : 11 km c’est long et un brin ennuyeux vers la fin. J’ai même la surprise de voir qu’un coureur s’y est engagé sans frontale. Sauf qu’aujourd’hui, on est en septembre et pas en juin et donc il a du faire la traversée à tâtons. J’en termine, le jour se lève et je vois cette longue file indienne de frontales s’étendre le long du balcon, on se croirait presque à la Saintélyon version montagne.
Le pas de la balme passé et quelques places gagnées, je m’engage dans la descente. Après quelques m sur une piste : boom par terre, étalé comme une m….de : j’ai glissé chef ! Rien de mal, mais un bon avertissement pour la suite. Passé, le mur de la descente la jonction jusqu’à Corençon est plutôt sympa et rapide.
2 minutes pour ravitailler, je bois beaucoup, j’ai finalement eu chaud sur ce segment. Le timing est bon : 10 min d’avance sur les prévisions.
Direction Méaudre, avec beaucoup de faux plats et relances : pas difficile sauf quand tu sais qu’il reste plus de 60 km et qu’il ne faut pas piocher et qu’autour du moi, ça avance fort alors forcément je suis et relance pour voir ! Finalement pas top ce segment, avec pas mal de route.
Passage à Méaudre, puis direction Autrans. Ces 7 km je les connais par cœur. Quelques gouttes commencent à tomber mais les arbres nous abritent bien. Descente du tremplin, j’en profite pour regarder les jeunes sauter à ski. Ils ont l’air de bien s’amuser. Moi, je commence à sentir les genoux grincer.
Là encore, un ravitaillement rapide ça revient fort derrière. J’ai passé la mi-distance mais pas la moitié du dénivelé. Physiquement, je tiens malgré quelques douleurs normales à ce stade. Il est moins de 10H30, je suis dans le top 20. C’est maintenant que ça va se durcir.
Effectivement, la montée vers Plénouze s’avère particulièrement délicate. La pluie s’intensifie, le vent a tourné au nord et donc la température baisse même si je ne ressens pas encore les conséquences et la pente augmente. L’approche du sommet dans les nuages est assez épique. J’aperçois un bénévole et lui demande si le sommet est encore loin et il me dit : « c’est là bas pas loin où on ne voit rien ». 100m plus loin, je décide de sortir l’imperméable probabelement un peu tardivement. Je n’ai pas froid mais complètement trempé. Un photographe me dit faut courir pour la photo ! Attends un peu je finis de m’habiller !
La descente vers Engins est délicate : du vent, de la pluie et du froid. Je reste prudent sur les lapiazs. Ça devient interminable, il faudrait que je m’alimente mais avec ce froid, l’envie n’y est pas. Je continue à prendre l’eau sans vraiment m’en rendre compte et je me refroidis. Le bout de route à prendre jusqu’au barrage est un vrai ruisseau.
La remontée du barrage vers St Nizier, je connais (2 maratrails à Béné bouclés). C’est donc une montée sans surprise et curieusement malgré un sentiment de la faire au ralenti, le temps nécessaire pour à atteindre St Nizier pas si mal. Les 2 1er duos me passent juste à l’entré du village. Il est moins de 13H30 au pointage soit 30 min d’avance. Un ravitaillement fait sous une pluie battante et puis d’un coup le doute, la perte d’envie !
Je suis trempé, j’ai froid, la pluie est forte et pas prête de s’arrêter et je dois monter à 2000m soit plus de 700m. Sur que là haut, on est limite pluie/neige, sans compter le vent. Voilà, l’idée de bâcher est dans la tête, je retourne au pointage pour arrêter, croise Romain qui me dit non tu ne peux pas t’arrêter ! Alors je repars.
Arrivé sous le téléski qu’il nous faut suivre, c’est le déluge. A quoi bon, s’engager dans la montée si c’est pour s’arrêter au milieu ? Il fait 6°C ! C’en est trop, cette fois la décision est irrévocable : stop. Finir en warrior, ça ne sera pas pour aujourd’hui. J’en n’ai pas envie.
Je rentre à l’abri en attendant le rapatriement à Villard, les 2 coureurs qui me suivaient feront de même. Les bénévoles et les masseurs au chômage s’occupent de moi avec une place proche du radiateur. Samontetro qui passait par là nous ramène sur Villard, je l’en remercie. On passe le trajet à discuter de son expérience sur la TDS 2012 et de l’évolution du temps qui devrait s’améliorer. Sauf que pendant ce temps, sur les 19 concurrents devant moi, presque la moitié s’arrêtera avant l’arrivée pour des raisons d’hypothermie.
Arrivée à Villard toujours sous la pluie, j’ai toujours la tremblote. Il me faudra une bonne douche chaude pour retrouver l’utilisation de mes doigts et répondre au téléphone pour rassurer ma famille en expliquant mon abandon.
Quoi retenir de cette édition : J’aurais plus appris sur cette course qu’au travers de tous les autres Ultra terminés jusqu’à présent. Il n’y a pas de certitude. Mon excès de confiance à supporter une météo difficile m’a conduit à l’abandon. Mentalement je ne m’étais pas préparé à affronter ce changement rapide de climat. Et puis côté équipement, si j’étais assez fier de mes choix jusqu’à aujourd’hui, là je me suis planté : finis les kways bon marché qui prennent la flotte après une heure. Le matériel technique certes c’est cher mais c’est efficace. Donc, pour l’année prochaine j’investirais.
Enfin, un mot sur l’organisation : vous aussi, vous en avez tiré surement beaucoup d’enseignements sur cette édition épique. Je continue à être fan : de l’accueil, de la qualité de l’organisation, des choix de parcours (sauf pour la liaison Corençon –Méaudre) même si j’ai raté le vertige des cimes comme beaucoup (alors Samontetro, ça serait sympa d’y retourner l’année prochaine ?).
Et pour finir, j’envoie toutes mes félicitations aux vrais warriors les finishers et plus particulièrement au kéké, peno38 et Albacor38 qui ont fait le doublé Grand Duc/UTV et ont bouclé ce parcours aujourd’hui sans faiblir, supportant les épreuves de la météo avec une sacrée maîtrise et une parfaite gestion. Bravo les gars!
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24 commentaires
Commentaire de BOUK honte-du-sport posté le 13-09-2017 à 22:30:24
Ça c'est du recit!!!
Merci Richard
Comme tu dis, après le GD2014 pouvait-il y avoir pire? Tu donnes la réponse
Quelle stupeur en découvrant ton abandon mais comme tu l'ecris vu ce que ça a donné sur les 19 premiers, bon... t'en as fais les 3/4 quand meme!!!
Des bisous en ce jour d'anniversaire de ton binôme adoré !
Commentaire de richard192 posté le 14-09-2017 à 07:27:55
Merci mon Boukinou!
Commentaire de Albacor38 posté le 13-09-2017 à 23:11:38
J'ose à peine dire où j'étais à 13h30 alors que tu arrivais, déjà (!) , à Saint-Nizier... Quoi que si attends je peux le dire comme ça : J'étais, comme toi, sous des trombes d'eau... (mais plutôt du côté d'Autrans) Manifestement tu as pris la bonne décision car étant déjà à moitié en hypothermie la montée sur les crêtes aurait pu être dangereuse.
Pour ma part j'avais pris un T-shirt de rechange, gardé bien au sec dans un sac congélation hermétique + une veste de pluie D4 à pas cher mais parfaitement étanche et qui m'a tenu au chaud 15h durant. Pas besoin d'investir des fortunes non plus donc.
Et merci pour tes félicitations Richard. Quand ça vient d'un cador ça touche encore plus.
Commentaire de richard192 posté le 14-09-2017 à 07:29:35
Je mettrai en application tes remarques Christian dès l'année prochaine. Car je compte bien prendre ma revanche sur cette édition ratée.
Commentaire de Phénix posté le 14-09-2017 à 01:53:34
Merci Richard pour ce récit, moi aussi j'avais la veste D4 à 70 euros... elle m'a gardé plutôt bien au sec. Quand je vois que des grands comme toi n'ont pas pu terminer... je complexe un peu. Finalement, heureusement pour moi que j'ai été retardé au départ sur les balcons...
Commentaire de richard192 posté le 14-09-2017 à 07:31:26
Il ne faut pas complexer mais être fier de ce que tu as fait! Moi j'en ai tiré plein d'enseignements pour les prochaines courses. Et puis, je suis assez satisfait tout de même de ce que j'ai fait sur les 3/4 du parcours.
Commentaire de yannos69 posté le 14-09-2017 à 10:09:50
Bravo Richard malgré ton arrêt, ce n'est jamais évident de stopper, surtout si "proche" de l'arrivée, tu as sans doute pris la bonne décision.
Je crois que le fait d'aller lentement m'a permis de poursuivre à St-Nizier car il ne pleuvait plus, sans cela je me serais surement arrêté.
Commentaire de richard192 posté le 14-09-2017 à 14:42:43
Merci Yannos. Ce qui est sur c'est que je l'ai fait sans regret. Même quelques après, je ne vois pas comment j'aurais pu aller au bout.
Commentaire de ilcourtlefuret posté le 14-09-2017 à 10:27:20
J'aurais dû participer mais finalement je ne le sentais pas. A lire ton récit j'ai peu de regrets car je n'aurais pas fini non plus, même si tu soulignes très justement avoir plus appris avec cet abandon que sur tous les autres ultras réussis. Tu as bien fait de ne pas monter au Moucherotte, et si tu étais arrivé plus tard à St Nizier tu aurais dû droit au parcours de repli... dur d'être un champion ;-)
Commentaire de richard192 posté le 14-09-2017 à 14:53:43
Le soucis, c'est que je m'étais plus mis un objectif de temps de course que de finir et que dans ce cas le moindre grain de sable (ici froid + pluie + équipement inadapté) peut te conduire dans le mur.
Commentaire de le_kéké posté le 14-09-2017 à 15:59:30
En tout cas ton premier 3/4 de course était très impressionnant, quelle fusée. Après c'est très différent de se mettre en danger pour faire une perf et d'être en mode gestion uniquement dans le but de finir. Nous on était en mode gestion pour finir, avec aucune possibilité d'abandon, sauf blessure on allait au bout et picétout. On ne s'est presque pas posé la question, juste un tout petit peu vers Sornin où là quand même ça devenait hard sous les trombes d'eau et le froid. Il est vrai que la veste d'alpi étanche que j'ai acheté m'a sauvé la mise me maintenant (relativement) sec jusqu'au bout (vive les soldes). Finalement j'ai presque bien aimé cette météo, pour une fois aucun problème de bide, me reste plus qu'à avoir des cuisses qui tiennent jusqu'au bout et ça sera parfait.
Même si je suis sur que tu as pris la meilleur décision, elle doit quand même laisser un petit gout dans la bouche, sur un malentendu il y avait presque un pas loin du top 10 à aller chercher et c'est quand même sacrément impressionnant.
Commentaire de richard192 posté le 14-09-2017 à 22:30:00
La décision a été assez facile à prendre. C'est clair que l’hécatombe devant a facilité sa digestion. Mais finalement, j'ai apprécié de prendre des risques, non pas sur l'équipement qui était tout bêtement un mauvais choix, mais sur la gestion de course plutôt ambitieuse. Ça permet d'avoir moins de frustration à l'arrivée, ce qui a été parfois mon cas, pensant pouvoir donner plus.
Commentaire de the dude posté le 14-09-2017 à 17:22:54
Ah ben zut alors!
Bon ça fait partie du métier et comme tu le dis toi-même on apprend aussi pas mal de choses dans ces cas-là.
De toute façon tu as pris la bonne décision, trempé et déjà refroidi c'était prendre un gros risque que de monter au Moucherotte avec la quasi certitude de devoir arrêter quand même.
Le Kéké a raison soit tu es en mode "finisher peu importe le chrono", soit tu es en mode "gros chrono-gros classement" et dans ce dernier cas tu es forcément sur la corde raide, ça passe ou ça casse.
Des ultras tu en feras plein d'autres et des chronos de fous aussi, j'ai aucun doute là-dessus.
PS: pour le matos, Ekko sport Chambé liquide son stock, y a de très bons tarifs :o)
Commentaire de richard192 posté le 14-09-2017 à 22:49:24
Merci Bruno, j'irais y faire un tour. Et puis pour la gestion de course, j'ai apprécié de risquer un peu. Car finalement, les courses trop bien gérées peuvent rendre ce type d’accomplissements parfois un peu fade.
Commentaire de fred_1_1 posté le 14-09-2017 à 19:43:47
Belle lucidité, pour prendre la bonne décision au bon moment !
C'est toujours délicat de savoir quand enfiler le coupe-vent, surtout quand on vise un chrono : trop tot , on est tout mouillé de transpiration, trop tard , tout mouillé par la pluie !
Commentaire de coco38 posté le 14-09-2017 à 21:07:34
Bravo pour cette course et ce récit plein de lucidité. Ce qui s'est passé pour certains montre que c'était la bonne décision. On ne peut pas jouer avec les éléments quand on n'a pas l'équipement adéquat. On est frustré forcément mais il faut apprendre et recommencer plus fort. A se recroiser un de ces jours.
JC
Commentaire de richard192 posté le 14-09-2017 à 22:31:25
Merci coco, effectivement je pensais avoir une fin de saison un peu fade. Mais ce coup manqué m'a bien remotivé.
Commentaire de l-ignoble posté le 15-09-2017 à 07:30:29
ah force de se prendre pour un dauphinois,et ben voila ce qui arrive.
Nan,je déconne évidemment.
moi je dis bravo,en tous cas pour l ensemble de ton oeuvre,et puis c'est avec cette petite mésaventure qu on apprend d avantage l humilité et qu on progresse aussi.
a plus dans le bus
Commentaire de richard192 posté le 15-09-2017 à 09:17:06
Tu as raison Boris, en Limousin on est habitué à la pluie et au froid mais pas aux conditions aussi changeantes. Je manque encore d'adaptation...
Commentaire de tonio2083 posté le 15-09-2017 à 16:21:31
Salut Richard,
j'avais dans l’idée de faire un récit, mais en lisant le tien je n'ai rien à ajouter.
J'avais aussi fait le pari d'arriver à St Nizier au début des fortes pluie. Raté. Pour la petite histoire c'est moi qui t'es demandé si tu travaillais dans la même boite que moi quand on s'est croise sur Herbouilly. Il me semblait t'avoir croisé, mais c'est en fait parce que tu es un des contacts de Samuel F.
Commentaire de richard192 posté le 15-09-2017 à 20:51:31
Ravi d'avoir faire ta connaissance Anthony. Effectivement, j'ai vu qu'il t'arrive de faire un "peu" de sport avec Samuel. Et déçu, que tu es bâché comme moi.
Bon, on devrait avoir l'occasion de prendre notre revanche l'an prochain!
Commentaire de peno38 posté le 15-09-2017 à 20:44:07
Sage décision, surtout avec le recul et les problèmes en tête de course. Comme Albacor, ou étais je à 13h30 ... pas à Saint Niz en tout cas. Quelle 3/4 de performance !
Et merci pour le petit mot gentil. Je plussois Alba et le phénix, ma vieille veste D4 à 70 euros ne prends pas l'eau et la relative respirabilité n'est pas un problème avec ces températures.
Commentaire de richard192 posté le 15-09-2017 à 20:59:35
Avec un doublet tel que vous l'avez réussi cette année, tu mérites toutes ces félicitations Philippe. A très bientôt pour faire plus ample connaissance sur les courses au sauce.
Commentaire de samontetro posté le 16-09-2017 à 14:55:40
Cet UTV a fait effectivement beaucoup de dégâts en tête de course. Le gros du peloton, sachant que la course serait longue, a plus joué "le confort" en essayant de rester sec et chaud le plus longtemps possible. J'ai vécu ça lors de ma dernière MH100 avec la gore-tex qui m'attendait à la base vie et le pari (perdu) que j'y serais avant les orages... Avec ton expérience tu n'es plus dans la phase "essayer de boucler" mais celle de "tenter des stratégies pour aller vite". Il faut tirer les leçons de cet abandon mais surtout ne rien regretter: tu as joué, ça aurait pu passer, ça passera le prochain coup et le chrono sera au delà de tes prévisions. Tu as surtout eu la sagesse de ne pas te mettre en danger avec ta connaissance du terrain. Tous les voyants sont au vert pour une prochaine (très) grosse perf!
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