Récit de la course : Verbier Ultra Run 50 2006, par bamban
Pas d'autre récit pour cette course.
Verbier Ultrarun 50
Pour préparer mon Trail 91 de septembre, j’hésitais entre le Tripou Trail et la Grande Traversée des Mélèzes…et puis voilà qu’un jour, je lis sur le forum un post de Phil nous indiquant que l’organisatrice du Verbier Ultrarun offre inscription et hébergement pour sa course qui a lieu le 15 juillet. Bon… Petit coup d’œil sur le Web : le Verbier ultramachinchose en question, c’est trois distances : 20km, 50 ou 100 km, c’est en Suisse, et ça grimpe ! Petits échange de mails avec Phil puis avec Betsy, qui organise l’événement, super sympa et méga efficace : une pro…Et voilà que finalement ma préparation va passer par Verbier !
Bref, j’arrive à Verbier le 14 au soir, avec 100 bornes parcourues à tout casser depuis le Trail du Pays de Sully, c’est à dire sur ces 5 dernières semaines. Autant dire que je vais une fois de plus devoir miser sur ma fraîcheur plutôt que sur mes acquis à l’entrainement, (c’est ce que je me dis quand j’ai rien glandé et que néanmoins j’ose me présenter sur une ligne de départ…et je dois dire que mon pouvoir d’autopersuasion est assez déconcertant : je finis par gober tout ce que je me rentre dans le crâne… positivons,donc !)
Positivons…sauf que voilà : quand je pointe le bout du nez à l’Hôtel de Verbier au retrait des dossards, j’ai les boules : toutes les têtes que j’y croise, j’ai plutôt l’habitude de les cotoyer sur le papier glacé de mes mags préférés qu’en chair et en os. Vous voulez quelques noms ? Bon allez je balance, c’est cadeau : Lahcen Ahansal, Vincent Delebarre, Bruno Heubi, Christophe Jacquerod…et plein d’autres balaises venus des 4 coins du globe, pour un total de 140 personnes réparties sur les 3 courses à ce qu’on dit…et Bamban, qui cherche où est cachée cette foutue caméra, parce que là, c’est pô possib’ c’est une farce, non ? Gloups !
Malgré tout, la pasta passe bien. J Après le repas, je me présente à un gars qu’est tout tatoué « UFO » de partout : c’est Cyril (cklein), venu avec 1 pôte qui fait le 100 bornes (en ce qui me concerne, ce sera le 50). Il est en reportage pour le mag, une méchante blessure l’empêche de courir.
Enfin, Betsy, qui nous a chaleureusement accueillis, comme si on était des potes de longues date, nous mène au Chable, où nous dormirons. C’est l’occasion de faire plus ample connaissance et de parler de ses projets : son trip, c’est d’organiser une référence olympique en matière d’ultratrail. C’est pourquoi, elle a invité tant de grosses pointures. Pour l’instant, elle y est complètement de sa poche, mais on espère que le bouche à oreille aidant, sa course devienne vite une référence… et franchement : y’a moyen !
Le lendemain matin arrive (réveillé depuis 4 h du mat’, mais la perspective de m’éclater dans ces montagnes me file la patate ) : Je salue au passage ceux avec qui j’ai fait connaissance la veille. Notamment un couple belge qui prépare l’UTMB (comme la majorité des coureurs sur cette course) : Chris et Karl. On se souhaite bonne chance, elle me dit qu’on va pas se voir beaucoup, que « tout gringalet comme t’es, tu s’ras d’vant ». Ah bon ? par sûr, ça !
Arrivé sur place à 10 min du départ, je me sens 1 peu speedé, mais je trouve quand même le moyen d’aller me « délester » manquant tout juste de faire une « Delgado» (louper le départ pour cause d’envie pressante !) . Du coup, j’ai tout juste le temps de saisir au vol le camel back que me tend Vien (mon amie), pendant que le départ est donné, de m’entortiller les bras en l’enfilant tel un fou pris dans une camisole tentant de s’échapper vers on ne sait où, de saisir ma casquette dans la poche arrière, de m’apercevoir que j’ai pas déclenché mon chrono…
Le parcours débute par un faux plat descendant dans Verbier, mais on comprend très vite vu la direction, que ça va pô durer ! Bref, au premier virage, on est dans le vif du sujet : ça monte. Heureusement, me direz-vous, sinon, à quoi ça servirait de se taper 800 bornes pour retrouver un truc tout plat ? A ce moment là, si on lève la tête, on voit bien que la montée est loin d’être finie : y’a bien mille mètres à se taper… bigre !
On est encore sur l’asphalte, je cours, puis me met à marcher dès que la pente l’exige. Certains s’obstinent à courir, mais sans trop de succès. En haut du premier raidillon, on rejoint la piste où nous attendent Betsy et les siens : photos et encouragements chaleureux à l’appui, ça fait chaud au cœur, mais ne nous emballons pas au bout de 15’ de course !
Le chemin est large, on se jauge encore, entre coureurs du 20 et du 50 partis ensembles (pour le 100, ce fut à 5h30…), dans l’genre on s’influence mutuellement : tu marches ? ok, je marche. Tu cours ? hop, je relance… et ainsi de suite. C’est que le début, les choses vont vite rentrer dans une logique plus individuelle, tout le monde n’ayant pas le même comportement sur les différents terrains. Je profite de ce prologue pour entamer la conversation, je me pointe à la hauteur d’un coureur : Marco, qui esquisse un large sourire. Il m’avoue être italien, et là, tout de suite, la rivalité s’installe entre nous !…
Mais nan, oh ! J’déconne J vous pensez bien qu’à crapahuter dans ces magnifiques montagnes, on est à mille lieues de penser à tous ces « drames » du foutibôl !
Le Marco, donc, il est sympa, il m’explique qu’il vient de Turin et qu’il prépare l’UTMB. Il a gagné son dossard au tirage…et maintenant, il à plus qu’à gratter !
On va se côtoyer assez souvent sur le parcours, comme 5 ou 6 autres à se tenir plus ou moins à distance, mais en gros les positions sont prises rapidement pour ne plus trop évoluer…Chacun à donc l’air de parfaitement maîtriser son allure.
Très vite, on profite du cadre enchanteur du Verbier Ultrarun. Là, c’est un chemin semi ombragé bordé par un petit ruisseau qui chante, et franchement, ça l’fait ! On oublie tout, les p’tits tracas du quotidien, etc. Nous sommes des privilégiés, alors il faut en profiter… C’est sans doutes ce que se dit ce coureur qui s’arrête tous les 200 m pour photographier ce qu’il y a à prendre. A ce moment de la course, c’est rigolo : y’a plein de sculptures directement taillées dans les souches des arbres (un hibou, une morille géante, des cèpes…mais pas de traileur, ça viendra peut-être ?). Donc, le gars mitraille à fond, mais il n’oublie pas la course pour autant : c’est simple, malgré tous les arrêts qu’il fait, on avance à la même allure ! Ce qui me plait particulièrement ici, c’est qu’on est au frais, qu’on en prend plein la vue, on peut dérouler sur cette piste souple. Bref, ça va bien.
On arrive au premier ravito, situé aux alentours du 8e Km, 55 minutes au chrono. La table est proche d’un chalet, avec une fontaine qui coule. AAAh, c’est bien paisible, ici…d’ailleurs, je vais prendre l’habitude de profiter un max de toutes ces haltes, c’est décidé ! 1 verre de coca, 1 verre d’eau, 1 quartier de pomme. Allez, c’est reparti, on traverse un petit chemin en dévers à travers les alpages. Parfois, on doit faire attention à ne pas se prendre les pieds dans les clôtures électriques qui barrent le chemin. Ce sont des passages à négocier avec prudence, j’évite de faire le kéké : pas de saut à pieds joints, donc ! Comme on traverse les champs, forcément, y’a des vaches. C’est chouette, toutes ces sonnailles, il nous manquait plus que la bande son à ajouter au paysage… et maintenant, on l’a ! Les vaches font quand même un peu trop de zèle sur ce coup là : il y en a 2 en travers du chemin. Les 3 coureurs qui me précèdent s’arrêtent tout net. C’est un gars et 2 filles…alors le gars se sent un peut obligé d’assurer le coup, il entame la négo courageusement. Elles sont mastoc, ces vaches, c’est vrai qu’elles sont pas rassurantes. Ils passent tant bien que mal. J’ai bien observé la technique : une bonne claque sur le train arrière, « façon Chirac au salon de l’agriculture », et hop, la bête passe son chemin ! Je m’arrête 100 m plus loin, histoire de voir comment les poursuivants vont négocier l’affaire, mais rien ne se profile à l’horizon. On n’a peut-être pas tous la même maîtrise de la meuh meuh !
Ensuite, la piste redescend vers un petit pont en bois, pour aboutir à une prairie qu’il faut dévaler. Avec les herbes hautes, il manquerait plus qu’une petite musique et on se prendrait pour Laura Ingalls ! Du coup, à cette pensée, j’me fend la poire et dévale la pente de plus belle. En bas , y’a un aiguilleur qui me dit que pour la suite, ça s’passe tout droit à travers les bois. J’m’arrête à sa hauteur et en refaisant un lacet défait, je lui dis combien je trouve ce trail « tip-top ». Je peux faire le malin, on n’a pas encore vu ce que nous réserve la suite !
La suite, c’est encore de belles pistes de montagne. Je suis (du verbe suivre !) une fille devancée elle même par un gars avec qui j’ai déjà échangé suffisamment de mots pour voir qu’il est du coin. C’est confortable de dérouler ainsi et de suivre le mouvement, Non ?
Et bien NON ! Parce que mon suisse, il est peut-être du coin, mais ça l’empêche pas de faire un « tout droit » là où il fallait descendre sur la droite. Je le vois donc qui revient vers nous : « c’est pas lààà… ». Je sais pas comment on a fait sur ce coup là, mais on était 3, et aucun de nous n’a vu le balisage, qui pourtant saute aux yeux (facile, maintenant qu’on a le nez dessus !). Du coup, ça créé un regroupement, nous sommes maintenant 6, et tous de nationalité différente. On baragouine en anglais, mais on arrive à peu près à se comprendre…c’est bien sympa, tout ça.
Parmi ceux qui nous ont rattrapés, il y a Karl, que je suis heureux de voir en pleine forme, sauf que… « j’ai cassé mon bâton », il me dit…ça me semblait bizarre en effet de le voir avec 1 seul outils, mais sur ce coup là, c’était apparemment pas par snobisme ! Moralité, comme le note Guillaume Millet dans l’dernier mag : c’est peut-être pas plus mal qu’ils soient d’un seul montant, …pour ma part, j’ai pas encore investi là dedans, mais je vais commencer un peu à le regretter…
Ensuite, le chemin mène au ravito du 16e…km. On repart et ça grimpe de plus belle. On emprunte maintenant des pistes plus larges sur lesquelles on croise randonneurs et vététistes qui nous encouragent. Du coup, ça rythme un peu cette partie où on commence à être le nez dans les pompes ! Je dois être pas trop mal à ce moment là, car j’ai vraiment pris mes distances. Ceux qui me suivent sont à plusieurs centaines de mètres, les montées en lacets facilitant ce type d’observation. Sur la piste plus haut, y’ a un petit attroupement. Je lève la tête… et je vois qu’on m’appelle : tiens, mais c’est Vien. C’est chouette, elle est montée jusque là et c’est tout bon pour le moral ! Sans pour autant bomber le torse J j’allonge, pour filer vers eux…sauf que chuis pô rendu : ces lacets sont trompeurs, il me faudra encore 20 bonnes minutes pour parvenir jusqu’à leurs applaudissements. Avec Vien, y’a Mmes Poletti et Delebarre, ainsi que Cyril qui m’invective en me voyant m’arrêter : » bah alors je croyais que t’allais prendre le virage à bloc, dérapage etc. »
- Ben quoi, on peut pô taper la discute ?
J’ai droit à une petite photo, et le gars Cyril me dis de bien m’éclater, alors je repars de plus belle…
Il ne se passe pas 5 minutes avant que j’aie mon premier coup de moins bien, que je fais passer avec 1 gel et quelques gorgées de Saint-Yorre (c’est la 1ère fois que je tourne à la Saint-Yorre et je dois dire que j’en suis plutôt satisfait, sauf que je l’ai pas suffisamment « débulée ». Du coup, j’ai la sensation de porter 1 « Kärcher » sur le dos !)
On emprunte un chemin bordé une fois de plus par un ruisseau. Un coureur me talonne. Je m’arrête pour le laisser passer, mais il ne veut pas. A ce moment, on voit Katell Corne et une autre fille arriver à contre-sens : ce sont les 2 premières du 100 bornes, et franchement, elles décoiffent !
Puis passe le premier coureur, kenyan, du 50, suivi un peu plus loin par Vincent Delebarre, qui semble hésiter sur le chemin à suivre. J’aurai la même hésitation au même endroit…euh, comment dire…ben, pratiquement quelques 2 heures plus tard !
Ensuite, on descend une nouvelle prairie, façon Laura machin, J et là le gars qui me suivait me met une mine ! C’est à ce moment là que je me dis qu’il faudrait vraiment que je progresse en descente…
Puis, s’ensuivent des pistes pas faciles à négocier, et où le choix entre marche et course n’est pas des plus évidents. Au bout d’une de ces pistes, on aperçoit un gars qui nous dit « à gauche toute »…à gauche, y’ a une bosse qui matérialise le début de l’enfer !!!
En fait de bosse, c’est un mur qui se dresse devant nous. Ça y est, on est dans le vif du sujet : les mollets tirent, et le souffle se fait court. Chaque pas est une victoire, et si je dis ça, c’est pas une figure de style : on n’avance que très difficilement, c’est tout… La bosse fait plusieurs centaines de mètres, puis le sentier oblique à gauche. J’hésite. Le balisage à cet endroit est assez difficile à comprendre, à moins que ce ne soient les efforts que l’on vient de consentir qui nous ramollissent le cerveau ! J’hésite d’autant plus que celui qui file devant moi n’est autre que mon « orienteur » suisse de tout à l’heure ! Finalement, je me décide à le suivre et suis récompensé un peu plus loin par la vue de nouveaux balisages. Je me retourne alors et fait signe au loin que les autres peuvent nous suivre… ben oui, on est tous en train de « psychoter » depuis notre égarement de tout à l’heure…
Au bout du chemin, ça devient technique : on saute de rocher en rocher, on traverse des ruisseaux. C’est beau et varié, mais quand même, on dérouille ! On dérouille d’autant plus qu’un nouveau mur se dresse devant nous. Je m’entend même protester…c’est dire si la fatigue fait son œuvre.
Néanmoins, je grimpe plutôt à un bon rythme, et décramponne tout le monde sans pour autant l’avoir cherché et finalement revenir à la hauteur de Marco qui m’avait lâché depuis notre erreur d’aiguillage. Devant lui, le coureur aux batons qui m’a « dosé » dans la descente. Il commence à filer sérieusement, celui là…on ne le reverra pas.
Marco semble chercher son second souffle. Il est peut-être 1 peu moins efficace dans les montées, mais reprend du poil de la bête dès qu’on est sur du plat. On arrive sur un névé, chuis tout content de glisser les mains dans la neige pour lancer un scoop : « c’est froid ! » J
Je gaze un peu et dépose Marco qui ne veut plus courir à cet endroit. On se dit qu’on va se revoir bientôt. Derrière, il va se faire reprendre par une anglaise qui navigue à proximité depuis le début. Ça se voit tout de suite : c’est une guerrière. Elle ne lâche rien, ni personne. Dans ces lacets grimpants, je les distance encore pour arriver au sommet avec une bonne avance, motivé par le ravito du 27e. On est à 2543m d’altitude, mais c’est pas encore le point culminant. Ce ravito est un vrai festin, je sais d’emblée que je vais y passer du temps. Voyons voir ce qu’on nous propose… : Fromage, jambon de montagne, viande de grison Vs boisson énergétique et gels…hum, y’a pas photo, pour moi, ce sera charcutaille & frometon énergétiques !!! Z’allez me dire que c’est pô bien sérieux tout ça, mais bon franchement à ce moment là, je m’en balance royal… et comme dirait le grand philosophe des montagnes –Jean-Claude Dusse- : « on sait jamais, sur 1 malentendu, ça peut passer ! »
A ce ravito, on peut égalemet récupérer le contenu de nos « drop bags », pour ceux qui en ont fait –ce qui n’est pas mon cas-. Y’a donc plein de sacs. Marco, qui m’a rejoint prend 1 barre et des gels. C’est au moment où il repose son sac que juste à côté, je vois un truc que me fait un peu froid dans l’dos : y’a 1 pochette transparente, avec plein de comprimés et pilules dedans… aaah ? on m’aurait menti ? moi qui pensait qu’y avait pas de ça dans notre sport ! Bon, après tout, c’est certainement moi qui ait l’esprit mal tourné : ça doit être des smarties… ou alors, p’têt’ bien qu’c’est du concentré d’charcutaille en cachets ? ouais, ça doit être ça.
Nan, mais aidez-moi, dites quelque chose, j’y connais rien, moi…Bref, passons.
Ce ravitaillement est l’occasion d’un regroupement à 5 ou 6. Le coureur espagnol repart le premier, puis vient mon tour, avec Marco qui me suis et « la guerrière ». Légère descente, puis il faut aborder de larges pistes en lacets qui mènent au point culminant. Rebelote : quand il faut marcher dans les côtes, je trace à petites enjambées et cadence élevée. Au premier virage, je m’aperçois que j’ai distancé mes compagnons et vais creuser un écart de plusieurs minutes jusqu’au sommet. Le sommet, c’est l’arrivée des télécabines. Y’a 1 gars qui nous attend pour le pointage. Quand il me voit surgir ( enfin presque, parce qu’à l’allure ou je vais, « surgir » est peut-être 1 terme 1 peu fort J ) au tournant, il me crie « come on, run, c’est bientôt fini ». Non mais, il veut que je me mette à courir là, maintenant, avec 30 bornes dans les pattes ! pfffiu… J’ suis pas encore cramé, m‘enfin faut pas non plus demander l’impossible…
Petit état des lieux justement : physiquement, les mollets sont durs et les cuisses en coton, mais ça doit passer ; moralement, le top… bref, je me suis pas mis dans le rouge, c’est une bonne course d’entraînement.
Comme on est au point culminant, il faut bien redescendre… et bien c’est l’moment !
Ouch ! Aie ! ça va pô être de la tarte, les descentes :
1- elles sont abruptes
2- je commencerai à manque un poil de lucidité, que ça m’étonnerait pas !
3- je suis pas c’qui s’fait d’mieux comme descendeur, surtout que là, ça va durer des kilomètres.
Voyons voir comment il va s’en sortir : mal ! J’allume pas la d’sus. Je dirai pas que j’me traine, mais disons que je pense qu’on peut trouver plus rapide. Alors je me retourne : tout seul de chez tout seul. Du coup, je sais pas trop quelle allure adopter, si ce n’est de ne pas aller trop vite. La vitesse prend très vite d’ailleurs, suffit qu’on se lâche 1 peu et zou…Tiens, j’ai un lacet qui se défait, ça va me permettre d’attendre mes poursuivants : rien. Toujours rien. J’ai pourtant pas torché tant que ça dans la monté et « la guerrière » + Marco + l’espagnol, ça fait une fine équipe de descendeurs, alors quoi ?
Alors, ça ne peut être que ça : ils se sont plantés de chemin. Faut dire que c’était 1 peu vicelard car la descente repasse devant le chemin qu’on venait de monter… ils ont du faire un « tout droit ». (j’apprendrai plus tard qu’en effet, ils ont dû se recoltiner 100m de dev’. Mmm, y’a pas bon ! Fort heureusement, ça les a pas achevés, bien au contraire…
Pendant ce temps là, j’essaye de négocier au mieux ma descente…oup là ! ‘Tention, encore de la neige et pas moyen de poser le pied correctement, une vraie patinoire. Ouf, c’est passé…Aie, encore une descente, pfff… dites-donc, je sais pas si c’est la solitude ou la vitesse qui me pèsent, mais chuis plus bien du tout, là ! Tout mou et … les dents du fond qui baignent ( amis de la poésie, bonsoir )! Heureusement qu’il existe un forum ( vous connaissez peut-être ? J ), sur lequel on a causé des pastilles Vichy y’a pas très longtemps, ça m’a permis d’en avoir sur moi aujourd’hui, même si c’est pas forcément pour les nausées que je me les réservais… Allez, hop : 2 pastille dans la tronche. Slurp, slurp. Mouais, Mmmm, Mmmm, yessss. L ‘effet est pas mal du tout. Franchement, c’est reparti en l’espace d’une ou 2 minutes. Génial !
La suite du programme ?
Une longue descente dans les pierriers qui m’entame physiquement. Je me freine : je suis « assis », plus moyen de me motiver à me remettre dans le sens de la pente : je sais que ça irait trop vite et que je cours à la catastrophe. Donc, je me laisse dégouliner jusqu’en bas !
Jusqu’à un pylone, et là, je sais plus, les flèches vont dans les 2 sens !…Aaaah, mais si je sais : c’est là où Vincent Delebarre hésitait tout à l’heure…donc, on rejoint une portion empruntée à l’allée. Pas des plus facile, c’est du plat, des faux plats, des pistes longues et droites. Comme on croise des randonneurs et vététistes, ça rythme un peu, et puis ils sont souvent sympa : encouragements, applaudissements… alors, forcément, ça force un peu à se redresser, à pas se trainer comme une m… Mine de rien, le cagnard commence un peu à assommer. Je sais, ça va faire rire ceux qui se tapent les MDS et autres Desert Cup, car je sais même pas s’il fait 20° , mais moi, chuis plutôt du genre « esquimau » ( cf le film « un singe en hiver » avec Gabin).
Et allez, encore de la piste, pour rejoindre le croisement où il y avait Vien et Cyril tout à l’heure. Le gars qu’est au pointage me dit qu’il y a plus que 200 m avant le ravito…bon en fait c’était plutôt 500m, mais bon , on va pas chipoter…J’allume un peu et au tournant, j’ai la joie d’apercevoir un comité d’accueil qui met l’ambiance : applaudissement à tout rompre. Sympa, ça fait chaud au cœur. C’est le 35e et pratiquement 5 heures de course. Je suis bien. Pas au top, mais bien. J’ai envie que ça dure. Pour une première course en montagne, je suis bien tombé. Pendant que je sirote ce ravito, Cyril qui sent que je me laisse vivoter me dit de repartir dans la foulée de mon poursuivant qui prend plus de temps à prendre tout en photos qu’à se ravitailler …aaah, c’est mon photographe de début d’aventure ! Allez hop, je lui file le train. Il est malin et met juste ce qu’il faut pour que je doute. Faut dire que j’ai du mal à me relancer. Bon, au bout de 5 minutes, je suis revenu à sa hauteur. On discute, il s’arrête pour une photo, me rejoint et ainsi de suite. Ça dure bien ¼ d’heures…et puis plus rien : je coince. Comme ça, tout d’un coup ! Pour ne pas m’avouer la défaillance, je prétexte un arrêt pipi. Et un peu plus loin, un lacet qui menacerait éventuellement de se défaire si… bon, sois honnête avec toi même, bonhomme : t’es cuit ! Ok ?
Bon aller, un petit gel, un coup de flotte. Faut s’accrocher, maintenant ! Tant bien que mal, ça repart. Pour me relancer, je chantonne intérieurement « I’m still standing » chacun son truc, mais ça à l’avantage de donner la cadence (Chapatte, sur son vélo, il chantonnait l’air de Laurel et Hardy, quand ça allait pas, pour retrouver le rythme…).
A ce moment, on arrive à une curiosité : le chemin doit passer sous un tunnel. Le hic, c’est que le tunnel en question n’est pas du tout éclairé ! 200m dans la pénombre quand t’as déjà pas les idée claire,… c’est punition ! J’y devine un cycliste qui traverse à pied, on se salue, il m’a répondu, ça a pas l’air d’être un brigand, ouf ! J
Allez, faut relancer sur la piste, y’a un point de contrôle pas bien loin. « Le photographe » y est… puis, plus de photographe…a tiens, il est en contrebas. ça veut dire que je vais retrouver mes bonnes vieilles descentes !
Celle-là, c’est le must dans son genre : une rigole en guise de chemin, avec les caillasses et les broussailles qui vont bien… à la réflexion, c’est pas si mal : assez technique et plutôt ludique. En revanche, mon corps, il aime moins ! J’entends déjà des voix dans mon dos : mon orienteur suisse qui passe, « salut »…puis « la guerrière », chapeau bas, madame…et enfin l’espagnol. Et béh, c’est la descente de trop… va falloir travailler ç a à l’entraînement !
Enfin, on reprend une portion déjà empruntée au début : le petit pont, la p’tite descente dans la prairie, les souches sculptées… tout pareil, vous dis-je, sauf l’état du bonhomme ! En même temps, je me rassure : ça sent le bercail. Je le connais par cœur ce chemin. Mais si, mais si ! Tiens regardez, la preuve : on arrive au pointage et là, au lieu d’aller tout droit comme tout à l’heure, ils vont nous faire descendre par le chemin de droite.
- bonjour, nous revoilà, c’est par là, hein ?
- non, il faut aller en face, y’a un aller-retour à faire sur 2 km…
Aaaaaarrrgh ! Noudoudiuou, c’est l’bouquet. Dur dur… bon ben puisqu’il faut y aller, on va pas traîner, hein ? C’est cruel ces aller-retour, parce qu’il y a toujours 1 moment où tu vas croiser ceux qui ont de l’avance sur toi. T’as beau te conditionner, ça fait quand même Ch… !
Tiens, en voilà déjà 1. Oh, il va vite celui-là… ah bah oui, forcément, c’est Jacquerod, qu’est en train de gagner le 100 bornes ! « Allez Christophe ».
Et voilà les 3 qui m’ont grillé dans la descente. « Salut »
C’est une partie hyper technique avec que des bosses et des dévers. J’avance au radar ! Chuis tout seul de chez tout seul, alors je me met pas la pression, j’essaye de goûter les derniers instant de courses, car j’ai beau être un peut « taquet », cette course, je sais déjà qu’elle va me manquer avant de l’avoir finie !
Une petite cascade ? je fais une pause pour m’asperger d’eau.
Des passants : - vous faites combien de km ?
- 50
- la vache …et vous en êtes à combien ?
- Pfff… 45
- Hein ?
Un petit caillou dans la chaussure ? et encore une petite pose !
Bref, vous l’avez compris, tout est bon pour faire durer le plaisir.
Enfin, le dernier ravitaillement arrive, on est au 46e. ça veut dire 4 km. 4 Km !
2 km accidentés, puis plus que de la descente sur des larges pistes. De quoi dérouler « à donf » ! Je profite un peu du ravitaillement, si bien que quelqu’un me rejoint. Il porte un bob, mais n’est certainement pas un joueur de pétanque égaré : on sent le montagnard. On sent aussi le compétiteur : il prend 1 verre et repart aussitôt… ben mince, alors ! Il m’a pris 100 m et je sais que c’est mort … bon voyage, « Bob » !
La suite, vous la connaissez, c’est une fin de course : on donne ce qu’il reste de patate, la proximité de l’écurie ayant ce don d’enlever les douleurs. On quitte la piste. Sur l’asphalte, y’a écrit « bravo », alors j’en remets une couche. ça sert strictement à rien et c’est ça qu’est beau, non ? Traversées de Verbier, sur la chaussée, pour pas gêner les passants, un peu froids sur le coup, comparés à tous ces encouragements tout au long du parcours…enfin , la ligne d’arrivée est en vue. Bravos et applaudissement accueillent chaque coureur, « à l’américaine ». ça flaire la bonne ambiance. Betsy se jette vers toi pour te féliciter et prendre tes impressions. Que lui dire…bis ?
2 commentaires
Commentaire de le_kéké posté le 21-07-2006 à 20:00:00
Du bonheur ce CR, merci pour tout ...
Commentaire de Kiki14 posté le 24-07-2006 à 11:46:00
Doublement content de relire ce magnifique récit ....oui je l'ai déjà lu sur forum normandiecourseapied ....vraiment ça fait du bien il est avec plein d'humour et de courage
et tellement vivant et puis 50 kms c'est déjà tout un roman.......
je réitère donc mes BRAVOS et mes MERCI
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