Récit de la course : Ironman de Roth 2006, par augustin
2 autres récits :
- Les récits de 2006 (1)
- Les récits de 2004 (1)
Ironman de Roth 2006
Nous y voilà. Enfin. Après 8 mois de préparation spécifique centrés sur cet objectif, enfin nous y sommes. Le fameux triathlon Ironman de Roth, mon objectif principal en cette saison 2006.
C’est celui qui est susceptible de me faire tomber la barrière mythique des 10 h (les miracles existent !) et qui constituera ma troisième expérience sur la distance: le Quelle Challenge de Roth, 5ème édition.
Ce triathlon n’a plus le label Ironman depuis quelques années mais peu importe, il a su se démarquer pour attirer sur la même distance des athlètes privilégiant l’ambiance aux qualifications pour Hawaii.
Il est vrai que la réputation de ce triathlon le précède: une ambiance incroyable (les germanophones sont les gens les plus enthousiasmés par le triathlon) avec un public connaisseur, une organisation parfaitement rodée (où il y a plus de bénévoles que d’athlètes!) et un coût d’inscription modéré.
J’y avais pensé dès la fin de la saison dernière après avoir participé en 2005 aux IM d’Autriche et de Hongrie. J’étais parti à la pêche aux infos via Internet (récits de courses, forum Onlinetri, etc.…) et mon choix s’est rapidement orienté vers Roth : la date, l’ambiance, les départs natation par vague, l’assistance Mavic en course et le prix m’ont persuadé de tenter l’aventure.
Dès lors inscription tôt (dès octobre) et lobbying pour convaincre mes potes de se joindre à moi dans cette douce et grande folie.
Cette année, j’ai décidé de me préparer –un peu- plus sérieusement qu’en 2005.
En 2005 les gens souriaient gentiment quand je leur annonçais que j’allais faire un Ironman avec 7 h d’entraînement hebdomadaires en moyenne, et surtout avec « seulement » 1100 km de vélo.
Cette année, gonflé à bloc, je suis arrivé avec une motivation intacte et le désir de bien faire.
On verra bien si ça passera, de toute façon pour moi c’est du bonus, je rêvais de participer un jour à un Ironman, or aujourd’hui c’est mon 3ème alors je savoure !
Ma prépa sera donc de 8 mois (au lieu de 6 l’an dernier) et j’attaque donc dès le mois de novembre. Mais pour comparer avec 2005 je ne garde que les 6 premiers mois de 2006, et cela donne :
Natation: 120 km (85 en 2005)
Vélo: 1191 km (1100 en 2005)
Home-trainer: 102h (55h en 2005)
Course à pied : 503 km (804 en 2005)
Au total cela représente 224 heures (contre 177 heures en 2005) c’est à dire presque 30% de plus !!!
Oui je sais ça fait sourire car pour beaucoup c’est peu (cela représente 9 heures par semaine en moyenne), mais pour moi c’est déjà beaucoup comme volume!
Je me réjouis de retrouver beaucoup de français là bas (surtout ceux du forum afin de mettre des visages sur des noms) car l’épreuve est celle qui attire le plus de « frenchies » : 524 cette année parmi les 4200 compétiteurs inscrits!
Le vendredi:
Départ en voiture de Budapest le vendredi matin avec le monospace maison que mon gentil employeur (et sponsor) a mis à ma disposition et arrivée à Roth 8h après (c’est loin la Bavière!).
Sitôt arrivé sur place, ma femme et moi retrouvons mon compagnon de galère, mon ex-collègue de club, Yvon. Il devait faire avec moi l’an dernier l’Ironman de Klagenfurt mais, blessure oblige, avait dû tout repousser d’une année. Il m’a d’ailleurs presque refait le coup en contractant une mononucléose l’hiver dernier !
Nous filons gaiement au retrait des dossards et des puces puis réceptionnons le sac a dos de l’épreuve. On erre dans le village des exposants puis à 19h nous avons rendez-vous au stand « France » avec les forumeurs d’Onlinetri afin de faire connaissance autrement que « virtuellement » : eh bien c’est le bide, nous ne serons que deux…
Tant pis, nous nous dirigeons gaiement vers la pasta party qui a lieu de 19 à 21h et qui est très bien ficelée (il ne manque que la projection du dvd de l’édition précédente pour faire vibrer le public).
Et pour finir retour pas tard afin de récupérer de cette longue route, nous allons prendre possession de nos chambres d’hôtel à une dizaine de km à l’ouest de Roth et installons tout notre bazar.
D’ailleurs la recherche de logement, même en s’y prenant 7 mois à l’avance, n’a pas été de tout repos, car la plupart des hôtels à Roth et dans les alentours étaient déjà complets (succès de l’épreuve et coupe du monde de foot en Allemagne à ce moment là…)
Le samedi :
Après une bonne nuit réparatrice, nous remontons les vélos, bricolage divers et variés puis s’ensuit un petit tour de vélo histoire d’aller tourner les jambes pendant ¾ d’heure.
En somme, la météo est idéale, il fait beau mais avec pas mal de nuages et la température est de 25°. Pourvu que l’on ait la même chose demain !
A 11h a lieu le briefing en français, la tente est presque pleine car nous sommes plus de 500 français inscrits cette année! RAS si ce n’est que les gens commencent à s’agiter en mesurant qu’ils sont bien dans « l’usine à rêves » et de songer à ce qui les attends.
L’après midi nous filons déposer nos vélos au parc, on dégonfle les boyaux, on bâche nos spads et préparons nos braquets pour le lendemain. Nous laissons aussi sur place nos sacs de transition course à pied que l’organisation ira disposer dans le deuxième parc de transition.
Dans la foulée nous partons pour une reconnaissance du parcours en voiture : c’est long une boucle finalement (86 km) ! et casse-pattes avec ça….
En cette veille de course, la seule pression… est celle que nous buvons tranquillement tous les trois en terrasse avant le D-day, c’est cool on est contents d’être là.
Dimanche matin :
Lever 4h, on engloutit chacun une moitié du gateausport réglementaire et commençons à boire régulièrement. Toujours pas de stress mais une certaine hâte d’être au départ natation, depuis le temps que l’on attend ce moment !
Une fois sur place on abandonne ma femme sur le pont où déjà pas mal de spectateurs se placent pour profiter du spectacle à venir alors qu’il n’est même pas encore 6h du matin.
Au briefing la veille ils avaient dit que le public attendu était d’environ 150 000 personnes (et ce malgré la coupe du monde de football), on a peine à s’imaginer ce que cela représente.
Arrivée au parc, il est à peine 6h, on regonfle les boyaux, on dépose les barres énergétiques, bidons et consorts sur le vélo et faisons une petite prière pour tout que se passe comme prévu, et si possible mieux que prévu !
On se fait marquer notre numéro sur le bras et notre catégorie d’âge sur le mollet puis on enfile nos combinaisons et direction le sas de départ pour un petit échauffement.
La course :
Le départ natation a lieu à une dizaine de km de Roth dans le canal Main-Danube (et qui dit canal dit pas de courant) qui fait environ 40m de large.
A 6h20 le départ des élites (avec les féminines, les « Sub 9h » et les plus de 65 ans) est donné, il y a déjà un monde fou amassé sur les berges et sur le pont pour voir passer ces torpilles (qui d’ailleurs ont l’air de nager tout en force et non en glisse mais ça c’est une autre histoire).
Pour le commun des mortels, la natation se déroule en 6 vagues de 350/400 personnes chacune (avec un départ toutes les 5 minutes) puis 2 vagues de concurrents « relais » qui prennent la suite.
La mienne est celle de 7h pile (ayant déclaré un temps d’engagement de 9h50)….et mon objectif natation du jour est d’ 1h pile mais surtout pas plus ! Donc j’arbore un bonnet bleu pour l’occasion et partirai dans la 3ème vague.
L’eau est déjà chaude (22,5°) et les combis sont autorisées. Par contre il n’y aucun nuage dans le ciel et cela me fait craindre la canicule pour le reste de la journée…Petit échauffement rapide car notre départ a lieu à peine 5 minutes après celui de la vague précédente (qui regroupait notamment les inscrits au championnat d’Allemagne ainsi que les pompiers) et la mise a l’eau a lieu 70 mètres avant la ligne de départ.
Que dire de ces derniers moments de calme avant la tempête…chacun est concentré et la tension est palpable dans les rangs, ce sont des moments magiques que nous sommes en train de vivre et nous en sommes bien conscients…
Nous sommes déjà dans l’eau et attendons fébrilement le coup de pistolet libérateur. Je me place en deuxième ligne, paré à bondir et concentré au possible, la main prête à déclencher le chrono.
A pile 7h c’est à nous, les 400 fauves avec des bonnets bleus sont lâchés, le début bastonne un peu puis on se positionne mais rapidement nous formons un groupe de 5/6 nageurs et commençons à reprendre les bonnets de la vague précédente (jaunes, partis 5 min avant) et même des bonnets (roses) des femmes parties…40 minutes avant nous.
Cool pas de problème d’orientation, avec des bouées orange pour s’orienter et des bouées bleues pour faire demi-tour, mais il faut slalomer entre les bonnets jaunes sans arrêt, ce n’est pas idéal.
La prochaine fois je m’arrangerai pour être dans la 1ère vague, juste derrière les pros !
Je me concentre sur ma technique et donc sur la glisse, respiration en deux temps au début puis en trois temps dès que je peux. Au premier demi tour sous le pont (1440m ont-ils dit au briefing) j’en oublie même de regarder mon chrono et m’applique pour la longue partie du retour.
Sous le pont un peu avant le deuxième et dernier demi-tour je passe en 47’. On aperçoit la foule amassée au dessus de nous et on les entend, c’est vrai qu’ils sont nombreux à être amassés au dessus et sur les rives du canal.
Dernière ligne droite vers l’arrivée, il reste 300 m, j’accélère pour m’extirper d’un petit groupe et je sors de l’eau en 58’56. Yes ! Premier objectif rempli, moi qui rêvais de casser la barre des 1h en natation, c’est bon pour le moral !
Première transition en vitesse, je cherche le sac « 844 », l’attrape et file sous la tente pour adopter une tenue cycliste complète. Je me change seul et 3’33 plus tard me précipite en trottinant vers la sortie avec mon fidèle Orca, prêt à en découdre. Deuxième objectif rempli car je voulais réaliser moins de 5 minutes dans cette première transition et c’est fait. Jusqu’ici tout va bien !
C’est parti pour le plat principal, qui n’est pas vraiment ma tasse de thé mais que j’apprends à aimer progressivement : la partie vélo. Le parcours est composé de deux boucles de 84 km puis d’une ligne droite pour rejoindre Roth. Le dénivelé total est d’environ 1385 m (mais personne n’a les mêmes infos) donc pas facile !
Comme prévu, ma modeste expérience sur la distance me dit que le danger est de partir sur des bases trop élevées. Du coup, je me cale bien, mouline comme il faut les jambes à 35 km/h sur le 39 et garde en tête mon objectif de 5h28 (soit 33 km/h de moyenne). C’est déjà ambitieux pour moi et je serai super content si je pouvais le réaliser.
Je surveille mon compteur mais il a dû délirer un peu car il m’annonce une vitesse maxi de 133 km/h…J’ai comme l’impression que l’enclenchement dans le parc ne lui a pas trop réussi !
Je jette un coup d’œil à ma montre, il est à peine 8h du matin et la journée ne fait que commencer….Pas besoin de se soucier du cardio, je ne l’ai pas emmené car ça me saoûle rapidement et je préfère tout faire au feeling. Roulez jeunesse !
Le départ est en faux plat, on passe sur le pont mais je ne vois pas ma femme (je suis arrivé trop vite me dira t’elle après, c’est bien la première fois que ça m’arrive)
J’avale un Gel vite fait pour reprendre des forces (j’avais déjà faim pendant la natation) et essaie de rester concentré au milieu de ces nombreux spectateurs enthousiastes.
Même à bonne allure (enfin, pour moi !) à 35 de moyenne sur le plat, je me fais allumer non stop par des mecs qui sont déjà à tirer des braquets de folie à plus de 40 km/h…
Bon l’an dernier en Autriche c’était pareil donc je ne m’en fais pas, moi mon but sera de gérer cette journée et de rattraper tout ce petit monde sur le marathon.
La qualité de la route incroyable, le revêtement est un vrai billard (ça change de la Hongrie !) et le public, connaisseur, est très enthousiaste et nous encourage bruyamment avec leurs « Hop hop hop » et « szuper ! ».
Dans le premier village nous passons à un endroit appelé le « Beer Mile » car les gens sont attablés le long de la route, sous les parasols et trinquent à notre santé avec une bière à la main et une crécelle dans l’autre. Bonne entrée en matière !
Arrive la première difficulté avec une bosse à 10% au 16ème km, assez raide mais ça passe bien. Sur les portions de faux-plat suivantes le vent de face est déjà présent et ce n’est pas de bonne augure pour la suite (normalement le vent se lève dans le deuxième tour, donc s’il se renforce ça va pas être triste).
Puis au 38ème km nous entrons dans le village de Greding, synonyme de la principale côte (à 12% pendant 400m) et qui constitue la plus grosse difficulté du parcours. Beaucoup de monde, un speaker au taquet qui nous nomme mais comme je parle pas allemand je capte presque rien et on monte ça tout sourire sous les encouragements des spectateurs. D’ailleurs je suis surpris car en fait les côtes difficiles j’aime bien, sûrement parce que mon gabarit me permet de doubler beaucoup dans les montées (bon, après en descente je me fais allumer aussitôt…)…hum…peut être Embrun à noter dans un coin de la tête ?
Rebelote une fois en haut les faux-plats sont exposés face au vent, la tuile normalement c’est sur ce genre de portions que l’on peut augmenter sa moyenne mais là c’est une autre paire de manches. Au 71ème km apparaît alors le –célèbre- village d’Hippolstein avec sa fameuse ascension en forme d’entonnoir : le Solarerberg !!! (400 m à 9-10%) avec 20.000 spectateurs, oui 20.000 !!!
Cette montée est un goulot d’étranglement, il y a des barrières au début mais après plus rien, les spectateurs se poussent au dernier moment pour nous laisser passer en file indienne (pas la place de doubler !) et le tout dans une ambiance de feu, avec crécelles, mains en cartons et sono bien fort, brrr ça donne la chair de poule! On se retrouve porté par cette foule et nous voilà déjà en haut. Ce passage est à proprement parler hallucinant, rien que pour ce moment là cela vaut le coup de participer à ce triathlon.
Puis longue et sinueuse descente où même à plus de 60 km/h je me fais doubler (il faut vraiment que j’apprenne à descendre proprement) et passage à côté du point de départ. De là on attaque la deuxième boucle et au 91ème km, à Eckersmühlen, ma femme et fidèle supportrice me tend mon ravito perso (2 sandwiches salés auxquels je ne toucherai finalement pas).
On commence alors le deuxième tour et je me méfie encore plus du vent, qui redouble d’habitude à ce moment de la course.
Sauf que cette année l’ayant eu dès le début j’espère qu’il ne va pas encore se renforcer…Pas de bol il sera bel et bien présent et s’obstinera à faire baisser notre moyenne, sur le plat avec la plaque et rivé sur le prolongateur je lutte pour maintenir mes 32 km/h de moyenne! Pour un parcours « roulant » je m’attendais à plus simple, en fait il est assez usant et même plutôt plus difficile que son homologue Autrichien (sauf peut être pour les cyclistes puissants qui passeront en force).
Je double beaucoup de concurrentes et encourage par leurs prénoms (les prénoms sont inscrits sur nos dossards) celles qui arborent un petit drapeau français sur leur vélo mais par contre chez les hommes français qui me doublent (et ils sont nombreux), pas un regard, pas un encouragement, c’est dommage ! Ok les gens sont peut être pas aussi bavards que moi mais quand même !
Il y a toujours énormément de monde (trop à mon avis) et inévitablement des groupes se forment, respectant surtout moins que plus la règle qui limite le drafting. Et les motos des arbitres n’y changent pas grand-chose, ils doivent avoir des consignes « souples » car je ne les ais jamais vus sortir de cartons alors qu’il y avait des situations litigieuses à plusieurs reprises. C’est dommage mais bon moi je fais ma course pour moi et puis comme je suis pas un fortiche à vélo, je me fais souvent doubler et c’est chacun son niveau !
Par contre c’est étrange d’habitude j’ai un coup de « moins bien » vers le 120ème km, sensation de raz le bol du vélo et du sucré par la même occasion, eh bien là rien du tout, pas de lassitude ni de la distance, ni de tout ce que l’on ingurgite de sucré.
Devant moi je vois à plusieurs reprises des concurrents balancer leurs bidons vides ou leurs emballages de barres énergétiques dans les bas côtés quand ce n’est pas directement sur la route, en dehors des zones des ravitos. Ca me sidère, non seulement ce n’est pas très sioux comme raisonnement (merci pour ceux de derrière) car qu’on ne me dise pas que c’est un surplus de poids (surtout quand on a un porte bidon vide) ou qu’on n’a pas de place dans une poche du maillot pour caser un emballage vide! Mais c’est carrément se foutre du monde et des gentils organisateurs qui devront quand même passer derrière nettoyer ces merdes ! Heureusement ce n’est que ponctuel, mais quand même, ça m’énerve.
Passage dans le village de Greding au 124ème km pour la deuxième bosse qui fait bien mal aux jambes à ce moment là puis au 140ème kilomètre je passe en 4h30 alors que mon plan de course prévoyait d’être au 150ème à ce moment là…ben dommage pour moi!
Je passe le Solarberg pour la deuxième fois mais comme prévu beaucoup de gens ont déserté pour aller rejoindre le site de l’arrivée, peu importe l’émotion reste forte et en deux temps trois mouvements je me retrouve en haut de la bosse. Magique.
Je fais un rapide bilan énergétique: j’ai ingurgité un bidon de boisson énergétique, 4 bidons d’eau, presque 2 PowerBars et 2 PowerGels. Avec le recul ce sera insuffisant ! (pas de pause pipi à vélo = mauvaise hydratation !)
On repasse pour la troisième et dernière fois devant le « Beer Mile » et peu avant l’arrivée, je fais attention à bien faire tourner les jambes en vue de la transition, déchausse rapidement et pose les pieds sur les chaussures peu avant l’entrée dans le parc. Comme un pro, quoi !
Arrivée dans le parc après 5h41 de selle, je confie le vélo à un bénévole, puis pars en courant vers la tente de changement.
Organisation vraiment impeccable (à noter, il y a plus de bénévoles que de concurrents !) où à mon arrivée un bénévole crie à un autre mon numéro de dossard, du coup avant de rentrer sous la tente j’attrape à la volée mon sac de transition que ce dernier bénévole me lance.
Là je me change et adopte la tenue « club » avec singlet et shorty, une nouvelle paire de chaussettes, chausse mes fidèles New Balance pendant qu’un bénévole me tartine ce qu’il peut de crème solaire, attrape ma casquette au vol et me précipite vers la sortie du parc.
Machinalement je regarde mon temps passé à la transition (2’32), sachant que je visais 4 minutes. Cool 3ème objectif rempli dans la journée (l’essentiel c’est de se fixer des objectifs modestes comme ça c’est bon pour le moral !)
C’est parti pour les quelques 42,195 km qui me séparent du but, le parcours est réputé difficile et n’est pas tout plat (environ 150m de D+). Même pas peur, c’est une distance que j’aime et d’ailleurs ce sera mon 10ème marathon. Yeah !
Bon je m’élance avec pour objectif de courir ce marathon en 3h10/15 (l’essentiel c’est d’y croire !) c'est-à-dire en restant régulier à 4’30 au kilo. Tendu comme objectif, mais ça se tente.
Le parcours est constitué d’une ligne droite de 7km (en aller et retour) le long du canal après être sorti de la ville de Roth (4 km en légère montée) puis de 2 looooongs aller et retour.
Les panneaux le long de la route indiquent chaque kilomètre, je prends garde à rester dans le tempo prévu et compte sur la régularité pour réaliser mon rêve (c’était ma tactique au marathon de Florence en 2005, je n’ai jamais dévié de la fourchette 4’34 - 4’42 au kilo pour un temps final de 3h18 alors que j’y allais sans entraînement adapté).
A l’inverse lors de mes deux précédents Ironman j’étais parti sur des bases trop élevées (3h au marathon) et avais décliné ensuite: que ça me serve de leçon !
Le 1er kilo est passé en pile 4 minutes, bon comme d’habitude je m’enflamme et j’en profite pour faire un arrêt pipi rapide afin de me retrouver au 2ème kilo en 9 minutes.
Je discute avec un allemand qui court à mes côtés depuis la tente de transition mais rapidement je dois m’arrêter aux premiers ravitaillements, j’ai une pointe de côté qui m’agace et je veux me ravitailler convenablement (signe qu’à vélo je ne me suis pas alimenté suffisamment).
Peu avant le 4ème km j’aperçois ma femme qui m’encourage et prends des photos, ça me fait plaisir et je la trouve bien courageuse d’être là car la journée doit lui paraître sacrément longue !
Puis, patatras: gros coup de barre, mes jambes sont lourdes et ne répondent pas comme elles le font d’habitude, j’ai les symptômes du 30ème km alors que je n’en suis qu’au 4ème ….et il me reste la bagatelle de 38,195 km à parcourir.
En plus je me rends vite compte qu’avec ma forme et les températures caniculaires (toujours pas de nuages, il fait désormais entre 30 et 32° selon les riverains) je suis KO pour mon objectif de « Sub 10h ».
Quand je regarde au loin devant moi je vois une longue ligne droite le long du canal en plein soleil qui ne me motive guère mais…je n’ai pas vraiment le choix.
Coup au moral donc, tant pis j’ai ce que je mérite et manifestement j’ai voulu être trop ambitieux. D’habitude la course à pied est ma spécialité et c’est là où je prends le plus de plaisir, et bien aujourd’hui ce sera mon chemin de croix. En 6 mois je n’ai couru que 500 km en entraînement, eh bien il semblerait que c’ait été insuffisant et que j’en paie le prix aujourd’hui.
Je ferais donc ce marathon sans plaisir en alternant les parties ou je courre et celles où je marche.
Ce sera un marathon cata, tant pis, mais au point où j’en suis je ne veux pas me mettre dans le rouge pour grappiller quelques minutes. Foutu pour foutu autant ne pas être cramé à l’arrivée !
Il y a beaucoup de ravitos (ils sont disposés tous les 2 km), et ils sont très bien fournis (eau, coca, fruits, etc.) et aussi beaucoup d’éponges car en plein soleil on cuit, surtout après le vélo où l’on a pris de bonnes couleurs. Je me gave de pastèques, eau et coca à chaque ravito mais tarderai à retrouver une meilleure forme.
Le 10ème km est passé en 52 minutes (contre 45’ comme objectif) et je lutte pour avancer.
Le premier demi-tour a lieu au bout du canal dans un village appelé Schwand, là où se trouve l’écluse, et nous ne sommes qu’au 12ème km…Heureusement il y a beaucoup de gens qui nous encouragent alors on ne peut pas se permettre de les décevoir, du coup, je cours . Pas vite, mais je cours.
La suite est identique, je suis devenu un robot qui avance difficilement (au 20ème je dois passer en 2h…). Un petit passage dans les bois, en descente à l’aller et surtout à l’ombre (bonheur !), mais qui sera en montée au retour (forcément !) puis c’est le demi tour au km 29. Ca sent la fin mais que c’est long ! Avec cette chaleur on croise des ambulances le long du parcours pour intervenir sur ce que j’imagine être des insolations ou des cas de déshydratation, pas cool.
A noter quand même un petit coup de mieux entre les 34 et 36ème kilomètres ou je courre sans m’arrêter mais ce sera un bonheur de courte durée car les jambes abdiquent de nouveau. La fin se profile, je passe laborieusement en ville au 40ème km en 4h puis arrive dans le stade et franchis le portique après 4h14 au marathon, sans avoir profité du tout de ce marathon.
Je franchis cette ligne en 11h00’40. Bon le temps affiché sur le portique ne veut pas dire grand-chose vu que nous sommes tous partis par vague mais permet au public, nombreux, de s’y retrouver.
Je ne profite pas de ce finish car je suis déçu de ma prestation. Dommage j’aurai aimé qu’il en soit autrement mais c’est la règle sur Ironman : une course n’est jamais gagnée, il faut rester humble jusqu’au bout !
Je récupère médaille et polo de Finisher au passage. C’est cool je ne suis pas mort, certes j’ai les jambes dures mais ça va, je me dirige vers la tente qui accueille les massages et le banquet pour reprendre des forces, l’organisation a pensé à tout et c’est fait avec le sourire.
Un massage pendant un bon quart d’heure et près d’1,5 l de coca plus tard (signe que ma gestion des ravitaillements est perfectible…) me permettent de repartir du bon pied.
Je souris en pensant à l’adage « jamais 2 sans 3 » car il s’est encore vérifié, moi qui l’an dernier déclarait que je ferai un Ironman, juste un, « pour voir »…
Le lendemain matin a lieu le petit déjeuner pour les français et francophones (524 français inscrits cette année !) avec animation par les organisateurs et la présence de quelques pros (Gaël Mainard, Cyrille Neveu, Christophe Bastié, Damien Favre-Félix). J’ai notamment l’occasion de discuter avec Gaël (que j’avais rencontré l’an dernier à l’Ironman d’Autriche) et qui pour un pro sait rester simple et accessible pour les amateurs que nous sommes. Vraiment sympa.
Conclusion :
Malgré tout ce que l’on peut lire ou entendre, l’ambiance est encore un cran au dessus, et tout bonnement HALLUCINANTE (rien que la montée du Solarberg vaut le détour).
C’est un évènement national et même international mené de main de maître par les organisateurs et rien n’est laissé au hasard : l’organisation y est impeccable, les bénévoles, les ravitos, le public est bruyant, connaisseur et enthousiaste bref tout est bien ficelé et c’est un régal à vivre.
Mais attention les parcours vélo et course à pieds sont difficiles (et ce d’autant plus si les conditions météo sont défavorables), et le niveau y est incroyablement élevé.
C’est vraiment une distance extra que j’adore même si je suis passé complètement à côté de cette course. Tant pis je veux positiver et non me morfondre, ce n’est que du sport après tout, et c’est un hobby qui doit donc rester un plaisir !
Merci à tous pour vos encouragements et vos conseils avisés. Et surtout merci à ma première supportrice, la femme de ma vie, pour m’avoir soutenu et supporté dans ce challenge.
1 commentaire
Commentaire de Cyrille posté le 15-07-2006 à 08:47:00
Bravo Augustin,
Ton récit donne vraiment envie de goûter au triathlon.
Juste une queston : combien coûte l'inscription à Roth ?
Cyrille.
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