L'auteur : Khioube
La course : La Route du Louvre - Marathon
Date : 11/5/2014
Lieu : Lille (Nord)
Affichage : 1971 vues
Distance : 42.195km
Matos : Mizuno Sayonara
Objectif : Se dépenser
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A six semaines du Marathon du Mont-Blanc, me voilà parti pour mon deuxième marathon sur route ! Après Run in Lyon, à l’automne 2013, celui-ci m’entraîne sur les routes du Nord-Pas-de-Calais, puisqu’il s’agit de la route du Louvre, qui a pour point de départ le centre de Lille et nous conduit tout droit à Lens (où une annexe du musée du Louvre a récemment ouvert ses portes). Je n’aurais évidemment pas décidé de prendre un dossard pour cette course sans que mes amis de quinze ans, Estelle et Matthieu, m’aient invité à me joindre à eux pour ce qui serait respectivement leur septième et huitième marathon.
Ayant surtout à cœur d’améliorer mon chrono au MMB par rapport à l’an dernier, j’aborde cette course avec grande sérénité. Je n’ai pas vraiment fait de préparation spécifique, j’ai fait un peu de fractionné à l’occasion de la découverte du tunnel de la Croix-Rousse avec les fous furieux de l’amicale du Parc de la Tête d’Or (plus connus sous le nom de la Golden Head Team) et me suis efforcé de faire quelques sorties longues d’environ 25 kilomètres le long du Rhône. Cela étant dit, ma première expérience du marathon sur route a été plutôt décevante (en un mot, j’ai eu des ennuis gastriques dès le 25ème et ai traîné ma peine jusqu’à la ligne d’arrivée, que j’ai franchie en 4h13). Je me fixe donc un double objectif, à savoir passer sous la barre des 4 heures (si possible 3h45) et réussir à éradiquer ces maux de ventre qui ont trop souvent tendance à me gâcher le plaisir).
Contrairement à nombre de coureurs sur route, je n’ai pas vraiment envie de passer la course les yeux rivés sur ma montre. À vrai dire, je m’étais préparé psychologiquement à courir au feeling, ayant été contraint de renvoyer ma chère Polar RC3 GPS au service après-vente. Finalement je l’ai récupérée juste à temps pour la course, mais je n’ai pas envie de m’astreindre à respecter une allure précise. Advienne que pourra !
Nous profitons pleinement de notre séjour à Lille pour découvrir la ville (ou la faire découvrir à ma douce et tendre, puisque j’y ai grandi), jouer avec les enfants et débattre de la tenue adéquate pour dimanche matin. La météo sera assurément un facteur déterminant cette année : on annonce un cocktail détonant de vent, de froid (8 petits degrés en ressenti), de pluie et même de grêle !
Après un bon petit déjeuner à base du riz au lait délicieux dont ma compagne a le secret et que mon estomac avait bien supporté lors de l’Urban Trail, nous nous rendons sur le site de départ. Estelle et Matthieu, qui visent les 4h30, se mettent en fond de peloton, je me place auprès du meneur d’allure de 3h45, ma concubine (oui, je vais faire tous les synonymes) prend le train pour Lens, histoire d’aller visiter le musée avant de nous rejoindre à l’arrivée. Il fait plutôt beau, malgré le vent, je ne regrette pas avoir opté pour des manches courtes (avec une sous-couche, tout de même, et un coupe-vent dans le sac au cas où). Le départ est lancé, nous traversons rapidement les rues sinueuses près de la gare en faisant attention aux nombreuses bordures un peu vicieuses. Au bout d’un kilomètre, je décide de prendre un peu d’avance sur le meneur d’allure : même si l’objectif de 3h45 me paraît correspondre à son niveau, j’ai envie d’aller un peu plus vite et de me faire plaisir tant que j’ai de l’énergie. Le parcours est assez agréable, on quitte les longues avenues lilloises au bout de 6 ou 7 kilomètres pour entrer dans des communes à taille humaine où les habitants nous saluent avec enthousiasme malgré le froid. La Route du Louvre m’a été présentée comme une course festive, je ne suis pas déçu : fanfares, danseuses tahitiennes (allez comprendre), tableaux humains en clin d’œil au musée, cors de chasse…
Tout se passe au mieux pendant la première heure, les nombreux ravitaillements liquides (il y en a un tous les 2.5 kilomètres en moyenne) me permettent de m’hydrater régulièrement sans avoir à m’encombrer d’une gourde ou d’une poche à eau, ce qui constitue un changement agréable par rapport au trail. Contrairement à la grande majorité des coureurs, je m’efforce de jeter mes déchets dans les poubelles prévues à cet effet et, vu l’état des trottoirs, décide que je préfère finalement les courses en semi-autonomie… Autour du 15ème kilomètre, je rattrape le meneur d’allure des 3h30, qui doit être suivi d’une bonne soixantaine de coureurs. Ils forment un peloton très serré pour se protéger du vent, je décide de me joindre à eux. Il serait sans doute raisonnable de rester avec eux pendant quelques kilomètres, me dis-je, au moins jusqu’au 30ème; ensuite, selon l’état de forme, on aura le temps d’aviser. C’était sans compter sur le fait que je suis un gros nigaud et que je suis maître dans l’art de ne pas écouter mes propres conseils avisés ! Dès le 17ème kilomètre, soit après avoir passé une dizaine de minutes au chaud, je m’échappe du peloton et tente une échappée fulgurante – en sachant très bien ce qui se passe lorsqu’un coureur français tente une échappée, si loin de la ligne d’arrivée…
Je parviens à la mi-course au bout d’1h41 et quelques secondes – améliorant de ce fait mon meilleur temps sur semi de plus de 5 minutes (ma seule tentative datant de Run in Lyon 2012). Je ne peux évidemment pas m’empêcher de penser que je suis parti sur de très bonnes bases, par rapport à mon niveau ; en même temps je me suis tellement motivé pour faire une bonne première moitié de course que j’ai une petite baisse de motivation, j’ai envie de faire une pause, de savourer. On imagine facilement les dégâts que peuvent engendrer un tel état d’esprit lors d’un marathon…
Au bout de 22 ou 23 kilomètres, le parcours change radicalement : nous ne courons plus en ville mais le long des berges de la Deûle. Et là… c’est le drame. Des rafales à 65 km/h (et encore, le terme « rafale » suggère un vent discontinu, je ne suis donc pas sûr qu’il convienne), de face, évidemment ! Je n’avance pas, je me refroidis, il n’y a plus de peloton derrière lequel se cacher. Avec le petit coup au moral, je commence à écouter mes douleurs un peu plus et décide de m’arrêter une minute au 25ème kilomètre pour m’étirer un peu. Je vois rapidement fondre sur moi le groupe des 3h30, je décide donc en toute logique de prendre le train en marche. Je ne regrette pas les avoir abandonnés une première fois, cela m’aura au moins permis de faire une pause. Malheureusement, la reprise est plus difficile que prévue. Aux douleurs musculaires s’ajoutent un point de côté, probablement dû au fait que je sois reparti un peu brusquement. À mesure que la motivation et l’envie baissent, la durée des contrats que je me fixe baisse aussi : « allez, tu les suis au moins jusqu’au 30ème. Jusqu’au 29ème, en tout cas ». Nous quittons enfin les berges de la Deûle, le vent se fait un peu moins violent ; je laisse tout de même le meneur d’allure partir un peu avant le 29ème et commence à marcher. Les coureurs qui me doublent ont tous un mot ou un geste d’encouragement à mon égard, j’apprécie mais cela ne suffit pas à me relancer. Après avoir alterné course lente et marche jusqu’au 30ème kilomètre, je décide de passer un petit coup de fil à ma dulcinée (ça devient compliqué, là) pour lui dire où j’en suis. Au moment où je m’apprête à raccrocher, nous débarquons au milieu d’un champ, le vent est affreux, je n’entends plus rien. Ça risque d’être long ! Au bout de quelques kilomètres, sans doute vers le 34ème ou 35ème, je me fais rattraper par le groupe des 3h45. À nouveau, je n’ai aucun regret, je pense que je me serais senti frustré de courir à leur rythme pendant la première moitié de la course. Mais bon, il n’empêche que mon objectif initial s’éloigne en même temps qu’eux. Autour du 37ème kilomètre, nous quittons les derniers villages du parcours, j’aperçois le terril qui marque l’arrivée de la course. Pour le rejoindre, une longue ligne droite à travers champs. Le vent est affreux, il souffle de côté, cette fois, j’ai du mal à marcher alors je me dis qu’il est inutile de m’acharner à courir ! Visiblement je ne suis pas le seul à suivre ce raisonnement, la majorité des coureurs alternent vaguement marche et course. Toutes les cinq minutes je rattrape un coureur qui m’a doublé un kilomètre plus tôt et qui me redouble dès que je ralentis. Mon seul objectif est désormais de finir en moins de 4h. Il me reste cinq kilomètres à faire et j’en suis à 3h30 de course. Le calcul est donc facile à faire, il va quand-même falloir courir un peu si je veux y arriver ! Je me connais, je sais que lorsque la ligne droite ne sera plus trop loin je retrouverai du jus. Je tâche donc d’arriver au 40ème kilomètre en 3h50 et passe la vitesse supérieure. Comme prévu, le dernier kilomètre est en côte. Elle est faible mais pénible. Il y a un pont, juste avant un virage, environ 400 mètres avant la ligne d’arrivée. Je me dis que si j’arrive à courir vite jusque-là, je pourrai enfin me relâcher un peu, le pari sera gagné. Je tiens jusqu’au pont, je marche quelques mètres, les nombreux spectateurs m’encouragent, me disent de ne pas lâcher. Même si je sais que j’ai tenu mon pari et que je pourrais désormais faire des roulades jusqu’à l’arrivée, je prends sur moi et accélère pour finir dignement en 3h57 et une vingtaine de secondes.
Je récupère vite ma médaille, mon coupe-vent cadeau et tente de me mettre à l’abri en attendant mes amis (qui finiront autour de 5h de course) et ma p'tite chérie. Avec grand bonheur nous découvrons qu’il y a une friterie Sensas (les mêmes qu’au stade Bollaert, les meilleures frites de la région !) près de l’arrivée. Inutile de dire que je ne me suis pas gêné pour m’empiffrer…
Quel bilan tirer de cette Route du Louvre… La première satisfaction, c’est que je n’ai pas eu de problèmes d’ordre gastrique. Le cocktail magique zéro gluten, riz au lait et Smecta a donc marché ! Je dirais même, en citant un ami cher, qu’il a donné des résultats smectaculaires. Ho ho ho…
Sur le plan chronométrique, on va dire que j’ai gagné un quart d’heure en quelques mois. Vu les conditions de course, je ne peux vraiment pas me plaindre. J’ai constaté que j’ai progressé au niveau de ma vitesse de croisière, je n’ai aucun mal à tenir une allure de 4.45 minutes au kilomètre pendant 25, 26 kilomètres. Par contre il faut bien reconnaître que je manque encore de caisse sur la distance. Il va falloir allonger les sorties, travailler sur des jambes fatiguées, aussi… et surtout sur le mental : je dois arrêter de penser qu’un marathon est un semi et plus si affinités !
Maintenant, place à la récup, j’ai un tournoi de football gaélique samedi et je dois me remettre au travail de côtes pour préparer le kilomètre vertical et le marathon du Mont-Blanc. En espérant que les efforts fournis lors de la Route du Louvre me servent ! Cela étant dit, la récup a commencé dès dimanche soir avec une tartiflette et des pâtisseries et s’est poursuivie ce lundi avec un bon gros welsch-frites suivi d’un merveilleux en dessert !
Merci encore à ma coach personnelle pour son soutien indéfectible et à mes camarades lillois pour avoir rendu cette expérience inoubliable ! Je ne sais pas si je reviendrai courir la Route du Louvre, mais c’est une très jolie course, indéniablement…
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12 commentaires
Commentaire de Vivien (100bornard1022) posté le 13-05-2014 à 22:05:00
Bravo pour ta course. Je me reconnais dans tes ressentis: ce foutu vent qui nous a posé tant de problèmes. Moi aussi, j'ai longtemps été sur les bases de mon record perso sur marathon. Avant le 31ème kilomètre et la base de loisirs de Wingles, où le vent a commencé à avoir raison de nous ... Mais quelle fierté de l'avoir fait sous ces conditions ... (même la fameuse frite s'envolait à l'arrivée !) Bonne continuation à toi.
Commentaire de Khioube posté le 13-05-2014 à 22:43:36
Merci ! C'est vrai que c'était épique ! Quand je pense que je m'étais plaint du vent en remontant les quais du Rhône, lors de mon premier marathon... tout est relatif ! Bonne continuation à toi aussi ! La copine qui m'a convié à la Route du Louvre a l'air motivée pour tenter les 100 bornes de Steenwerck... il se pourrait que je revienne sur tes terres un jour ! :)
Commentaire de benlacrampe posté le 14-05-2014 à 07:27:50
Une course pittoresque et pas très académique et un récit franchement très sympathique à lire ^^
Bonne course au MMB
Commentaire de Khioube posté le 14-05-2014 à 08:05:11
À l'arrache, même, on peut dire... :)
Merci pour tes encouragements !
Commentaire de Jean-Phi posté le 14-05-2014 à 08:29:43
Premier constat : tu as la possibilité de réaliser bien mieux que tes 3h57, c'est sûr.
2° constat : Tu es parti beaucoup trop vite, prenant même la peine d'accélérer en cours de route. N'oublie pas cet adage : Si tu te sens bien c'est que tu vas trop vite (sic Bubulle qui a raison !) !
3° constat : C'est une belle progression néanmoins et tu as beaucoup appris sur cette course, on le lit dans ton CR. Prochain marathon autour des 3h30 (3h35-40)si tu es sage jusqu'au 25°.
Bravo pour ton courage sur la fin et pour avoir pulvérisé ton record !
Commentaire de Khioube posté le 14-05-2014 à 08:54:18
Merci pour les conseils avisés ! Effectivement, j'avais manifestement plus envie de faire un bon premier semi qu'un bon marathon... La prochaine fois je tenterai de rester dans un rythme raisonnable (ou même avec le meneur d'allure) et j'aviserai une fois la barre des 30km en vue !
Commentaire de Arclusaz posté le 14-05-2014 à 16:46:57
bon, ben voilà, Jean-Phi a tout écrit ce que j'avais prévu !!!!!!!!!
Tu feras beaucoup mieux sur marathon si tu t'y recolles : mais, priorité au Marathon du Mont blanc où tu vas exploser ta marque de l'année dernière.... si tu ne pars pas trop vite !
Commentaire de Khioube posté le 14-05-2014 à 17:01:47
De toute façon, je sais depuis belle lurette que tu es extralucide, au moins en ce qui me concerne... Effectivement, je vais tâcher de partir prudemment à Chamonix, comme ça je pourrai sprinter jusqu'au sommet des Posettes, faire un petit somme et repartir tout frais ! Non ? Allez, 2014, l'année de la sagesse...
Commentaire de Yvan11 posté le 15-05-2014 à 15:43:32
Récit très sympathique et un bel exemple de ce qu'il ne faut surtout pas faire sur marathon, sauf si comme toi on privilégie le plaisir du moment à la performance finale !
Commentaire de Khioube posté le 15-05-2014 à 15:55:51
Effectivement, Yvan ! Cela étant je suis content de l'avoir fait, j'ose espérer que cette expérience me servira plus tard - d'où l'utilité d'en faire le récit avant que je ne l'oublie... :-)
Commentaire de Seydoublen posté le 15-05-2014 à 16:12:00
Superbe récit Guillaume, effectivement je pense que tu as fait un très bon bilan. Je n'ai jamais fait de marathon sur route et un trail est beaucoup plus facile à "découper" en étapes. Pour le MMB, si jamais on est dans le même rythme, j'essaierais de faire la voix de la sagesse (si j'arrive à parler ;))
Commentaire de Khioube posté le 15-05-2014 à 17:00:23
Merci Bertrand ! Je pense que j'aurai moins la tentation de m'enflammer, mais je ne suis pas à l'abri d'une envie de tout donner jusque Vallorcine... C'est une bonne expérience, en tout cas, le marathon, même pour un traileur ! Bon, à petite dose, au moins...
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