L'auteur : Fufanerunner
La course : La 6000 D
Date : 27/7/2013
Lieu : La Plagne (Savoie)
Affichage : 2117 vues
Distance : 63km
Objectif : Terminer
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Vendredi 26, mes filles sont en colo, Madame au boulot, je confie mon Loulou à sa Tata et je saute dans le train pour Aime.
Moral au beau fixe, super motivé, temps au beau fixe, on va cramer !!
J’arrive sur Aime, je pars récupérer mon dossard avec le package de bienvenu (porte-dossard, stylo souvenir, ticket pour la pasta, gourde de compote…)
Un petit tour dans le village exposant (ne pas craquer, ne pas craquer, …)
Et retour à la gare routière. Une navette me monte à Plagne centre, je me pose à l’hôtel, prépare mes petites affaires pour le lendemain, un petit tour au resto et dodo…
Jusqu’ici, tout va bien.
Samedi 27, 3h00, le réveil est rude et brutal.
Direction la salle de restauration de l’hôtel qui ouvre exceptionnellement à 3h30. P’tit dèj rapide mais consistant en compagnie d’autres zombies (à 3h30 du matin, on est tous des zombies !) et je remonte me préparer.
Il va faire chaud, très chaud, du coup je pars light : visière et lunettes de soleil sur la tête, maillot RL ultralight, manchette (au cas où) et mitaine (pour les bâtons), short et mes Mizuno Inspire aux pieds.
Pour subsister dans ces contrées sauvages, un porte bidon RL 800-45 avec une gourde de 900ml et de la bouffe pour tenir un siège.
J’ai rajouté une petite pochette sur le devant pour équilibrer le poids et pour y mettre le coupe-vent, la couverture de survie et le sifflet : matos obligatoire de base !
Et le porte dossard 6000D avec mon dossard n°559
Lecteur MP3 autour du cou (avec l’intégrale de Metallica !) Et je suis paré.
J’ai vraiment l’air d’un coureur ;-))
4h15, Départ de la navette qui nous emmène au départ.
5h00, arrivée à Aime, je vais poser mon sac à la consigne, préviens les bénévoles que je serais sûrement à la bourre pour l’apéro et pars rejoindre le sas de départ en compagnie de plus de 1200 autres fous !!
Petite pensée pour Messire Luc qui aurait dû être là avec moi mais qui n’a rien trouvé de mieux comme excuse que de se péter la cheville…J’vous jure ces marseillais alors…
J’entre dans le sas de départ, et soudain, alors que je discute de choses et d’autres avec mes voisins, tout le monde s’emballe, c’est parti !!
Je déclenche mon chrono, et l’aventure commence…Pour un certain nombre d’heures.
Si possible moins de 12 pour être finisher
(12h pour boucler les 63km ça nous fait du 5,2 km/h mini. Je pense tourner en 5,5…voire un peu plus si tout va bien)
[ALT 680m]
Le départ est très roulant, j’essaie de ne pas céder à l’allégresse générale et me cale autour des 11km/h.
Pour avoir fait le début du parcours en reco je sais que la première côte est assez loin et j’en profite donc pour augmenter ma moyenne qui va fortement chuter dans les grosses pentes.
On traverse Aime, longe l’Isère, démarrage cool, bonne ambiance, et il ne fait pas encore trop chaud.
Juste avant les Esserts, les choses sérieuses commencent, on attaque la montée vers Longefoy dans les sous-bois, au milieu des champs, superbe balade.
[ALT 1175m]
Longefoy est sous mes pieds. Je repère une fontaine et refais le plein de ma gourde déjà bien entamée.
Le premier ravito n’est que dans 12 ou 13 km et 900ml ça descend vite quand la température monte.
On continue de monter sur Montalbert, on repart dans les sous-bois, descente et remontée pour atteindre le début (l’arrivée) de la piste de bobsleigh
[ALT 1547m]
Donc, comment dire, la piste de Bob, du béton armé, a peine assez large pour doubler, 1,5km de long pour 125D+, des passages à 14% et au sommet l’impression que ça n’apporte rien à l’épreuve…
C’est un passage original, à faire une fois dans sa vie mais je m’en passe sans problème.
1er poste de contrôle, jusqu’ici tout va bien, pas de douleur, super motivé, super content d’être là…Je suis sur mon petit nuage
Et ça monte encore, direction Aime 2000. Dans les champs, les bois zé les prés (si ma Lilly me lit, elle sera obligée de faire la liaison !)
Niveau physique et mental, je suis bien, mais au niveau chaleur, ça commence à peser, heureusement la côte est raide mais pas trop longue et j’entame la descente vers Plagne Centre et le 1er ravito.
[ALT 1980m]
Je m’arrête 30’’, un TUC, le plein de la gourde et je repars.
Depuis le départ je mange une barre de céréale ou une pâte de fruit toutes les 30 minutes et un coup de flotte très souvent.
Je m’étais arrêté là lors de ma reco, j’avais mis 3h30, là j’y suis en moins de 3h…Tout va bien j’vous dis, don’t panic !!
Et je m’attaque à la montée vers la Roche de Mio.
Je quitte les constructions des différents villages de La Plagne pour me retrouver enfin en pleine nature.
Ça ne fait que monter, mais le pourcentage de pente varie pas mal, je me force à trottiner dès que je peux mais ma surcharge pondérale m’oblige à marcher assez souvent. Je me mets en mode marche nordique et fais plus travailler mes bras que mes jambes ;-)
Les paysages sont magnifiques, je me pose 30 secondes devant le lac des Blanchets…C’est beau.
Quand ma femme, qui me prend pour un fou, me demande pourquoi je cours, je voudrais la poser là, devant ce panorama. Elle aurait un début de réponse ;-)
Bon, c’est pas tout ça mais j’ai encore 45 km à faire, hop, hop, hop, on arrête de rêver, on se sort les doigts et en avant Lorient !!
(Ouais, je sais, mais j’en ai marre de Guingamp, alors s’il vous plait…)
J’attaque la dernière montée avant la Roche de Mio dans la caillasse, sous un soleil de plomb et toujours avec la même envie.
[ALT 2700m]
La Roche de Mio est là, blindée de monde. Les télésièges sont gratos aujourd’hui et y’a pleins de supporter pour les coureurs. Petite pensée pour mes 2 filles en colo, je vais les chercher le lendemain, c’est cool !!)
Je laisse la Roche de moi derrière Mio, à moins que ce ne soit l’inverse, et je commence la descente vers le col de la Chiaupe, première barrière horaire de la course.
Je range les bâtons (Un dans chaque main puisque je n’ai pas de sac, suivez un peu !!) et je relance autour des 10 km/h, la route est encore longue.
[ALT 2492m]
Col de la Chiaupe, épisode 1
Ravito avant la montée au glacier, je refais le plein, banane, raisins secs et
Go, go… go Johnny go, go, go
Sur la première partie de la montée, on croise ceux qui ont déjà fait le tour et qui du coup redescendent.
Je me dis que quand j’en serais là…Eh ben je ne serais pas encore arrivé !!
D’entrée, la pente est raide, belle mais raide, mes bâtons m’aident bien, mes bras aussi. Je suis concentré, je regarde la plupart du temps juste devant mes pieds, mais après un virage, je fais l’erreur de lever la tête…
Et là, je le vois…
The Raidillon de la mort qui tue…
De la caillasse, une pente monstrueuse, et un monde…On dirait le premier jour des soldes chez Tati.
L’enfer commence ici donc, je rentre dans la queue et commence l’ascension (qui d’habitude tombe un jeudi…Ne dit-on pas le jeudi de l’ascension ??!!)
Il fait beau, il fait chaud, j’ai la tête au niveau du postérieur de mon prédécesseur qui a lui-même la tronche au même niveau vis-à-vis du coureur, pardon, du marcheur, de devant, et c’est long.
Forcément, à 1,5 km/h tu ne vas pas très vite
Et dès que tu t’arrêtes, tu recules, comment veux-tu…
En plus y’a pas d’oxygène, qui a coupé l’oxygène…
[ALT 2994m]
Contrôle, secours, flotte, plein de gens qui encouragent les malades et enfin de la fraîcheur, forcément, on patauge dans un mélange de neige et de glace depuis un moment.
Je repars dans la piste verglacée. Encore quelques mètres à gravir pour atteindre le point culminant et basculer du côté obscur de la montée…La Descente ;-)
[ALT 3047m]
Yes, I did it…
Petite pause pour enlever les cailloux de mes godasses et c’est parti pour la descente. Il y a encore plein de neige, ça glisse, ça crisse et je me vautre.
Enfin un peu de fraîcheur me dis-je en avalant quelques flocons et en essuyant mes bras trempés par la poudreuse !
C’est le seul moment de la course où je vais regretter de ne pas avoir mis mes chaussures de trail…
La descente est assez technique, très raide par moment, et les cuisses commencent à chauffer un peu malgré la neige.
Le col de la Chiaupe n’est plus très loin, au niveau barrière horaire je suis large, je ne prends donc pas de risques zinutiles (ma Lilly, c’est pour toi ;-))
Dans le passage à double sens juste avant le col, je croise quelques coureurs qui commencent la montée, je les encourage tout en pensant que ça va être chaud pour qu’ils passent la BH.
Col de la Chiaupe, épisode 2
Au niveau BH, je suis large ;-)
Mais mes ravitos sont monotones, plein de la gourde, 2-3 fruits et en avant Sedan (y’a pas que la Bretagne dans la vie !)
J’ai bien étudié le parcours (c’est ce que je crois à ce moment là !) et je sais qu’il y a une longue descente jusqu’au Dérochoir avant d’attaquer la dernière montée du parcours, je commence à être un peu fatigué, j’allume le MP3 et me colle sur le rythme de Metallica qui m’annonce qu’un champ de mine leur a pris la vue, les bras, les oreilles…. Très joyeux comme ambiance (One sur l’album « and justice for all)
Je trottine. De temps en temps je jette un œil (pas trop fort) sur mon GPS, je tourne autour des 8-9 km/h mais je sens que je ne peux pas faire beaucoup mieux.
Comme dirait Laurent, le soleil donne, la même couleur aux gens, le soleil donne.
On est tous rouge vif, crétin de soleil de m****, je commence à sentir les coups de soleil sur les bras, les cuisses et pire, derrière les mollets mais j’ignore la douleur et j’avance. Doucement certes mais sûrement.
Les paysages sont magnifiques, il fait beau, il me manque juste un transat un bon bouquin et un panach’.
[ALT 2025m]
Au lieu de ça, on attaque la dernière grosse montée du parcours, pour atteindre le col de l’Arpette via le Chalet du Carroley. Mes petites jambes qui avaient bien pris le rythme de la descente font un peu la gueule, mais ça passe, je monte tranquillou mais j’atteins le sommet vidé.
[ALT 2337m]
Col de l’Arpette, je suis vidé je vous dis, surtout à cause de la chaleur.
Je m’accorde une pose vers le point de contrôle, les GB (gentils bénévoles) me passent une bouteille d’eau, quelques autres coureurs se sont posés aussi, on a tous le regard un peu dans le vide de l’animal blessé qui sait qu’il ne va pas tarder à mourir, vous voyez l’ambiance !??!!
Après avoir récupérer un peu mon souffle, mes jambes et fait chuter ma température corporelle de quelques degrés, je me relance dans la bataille, encore 23km, et à la vitesse où je me traîne ça fait dans les 4h…
Ou plus si affinités !!
Il ne va falloir rien lâcher pendant cette longue descente qui s’annonce.
Je trottine encore et toujours, mon GPS oscille entre 7 et 9 km/h, rarement j’aperçois un nombre à 2 chiffres mais il ne reste jamais longtemps.
Ma vitesse moyenne est de 5,4 km/h, je suis limite mais je ne veux rien lâcher malgré le soleil de plomb et les jambes…de plomb aussi tiens !!
On commence à retrouver la civilisation, traversée de Belle Plagne et en dessous j’aperçois Plagne Bellecôte et sa 2ème BH. Ça va le faire.
[ALT 1930m]
Je passe le contrôle de Bellecôte à 14h30, 30 minutes d’avance sur la BH, tout va bien, il reste 18km, je suis motivé comme jamais pour finir cette belle course mais je fais une petite pause à l’infirmerie.
Je n’ai pas mis de NOK (crème anti frottement) sur mes tétons avant le départ et le frottement du maillot commence à m’irriter sérieusement.
Pour avoir fini une fois en sang, je préfère prendre le temps de poser 2 bouts de strap et c’est reparti.
En arrière Quimper !! (Oùlala, ça devient grave là !!)
Direction Montchavin, je me remets en mode trottinette, j’essaie, parce que les jambes commencent à être vraiment lourdes. Et je sens bien qu’une petite crampe aimerait bien s’inviter à la fête juste au-dessus de mon genou droit…Y’a pas moyen !!!
[ALT 1200m]
Montchavin, passage très sympa au milieu de la station, plein de gens qui vous encouragent, je suis bien. Il me reste 10 km à peu près.
Mais ça c’était avant le drame !
Sortie de Montchavin, et là, stupeur, une montée !!!!
Bon alors les montagnards vont rigoler parce qu’on se prend seulement 50m de D+…
Mais quand tu t’attends bêtement à 10km de descente eh ben ça plombe un peu le moral….
Et ce n’est que le début du chemin de croix.
Les 7 prochains kilomètres vont se passer dans la forêt, une belle forêt certes, mais après les points de vue grandioses qu’on a vus là-haut, ça le fait moins.
Et le chemin est une torture pour le mental, une succession interminable de petites descentes suivies d’autant de petites montées qui cassent les pattes.
J’ai l’impression de ne jamais descendre alors qu’il faut encore que je perde 300D- (et quelques kilos, mais le sujet n’est pas là !!)
Les rares compagnons de route que je croise sont dans le même état : On en a marre !!
C’est long, beaucoup moins motivant que les sentiers vertigineux où l’on se promenait il y a quelques heures.
Et je vois le temps qui défile…La barrière des 18h approche à grand pas.
P***** de M***** je ne vais pas craquer maintenant me crie-je en mon for intérieur !! Et malgré les protestations de mes mollets et de mes genoux je relance dès que je peux.
Enfin, relancer est un bien grand mot pour dire qu’au lieu de marcher à 4,5 km/h je me mets à gambader tel un hippopotame unijambiste hors de l’eau à 6km/h…
Je débouche enfin sur les berges de l’Isère, moins de 3km… mais aussi moins de 50 minutes…
Ouais, je sais ça paraît large maintenant, mais sur le moment je vois les minutes défiler très vite et les kilomètres très lentement et la pression monte !!
L’avantage de la rivière est de m’apporter pas mal de fraîcheur, ça fait du bien.
Je traverse enfin le pont qui me ramène dans Aime, un marquage au sol indique 800m…Qu’est-ce que c’est long 800m !!!
Je vois enfin l’arche d’arrivée…je regarde le chrono officiel, et je vois juste 11h4 ?
Je passe cette ligne d’arrivée, récupère un bon pour le maillot finisher, récupère le maillot, et après avoir dépassé la tente des secouristes pleine à craquer je m’allonge sur un bout de trottoir.
C’est fait, je suis un géant !!! Un petit géant vu le temps mis, mais un géant quand même !!
Je reste allongé un long moment, ça fait du bien de ne pas bouger.
Quand je me décide à me relever j’ai mal (presque) partout. Les bras, les épaules, la ceinture abdominale, ne parlons pas des jambes… Je réussis quand même à me relever. Je n’ai qu’une seule envie : aller dans ma chambre d’hôtel pour dormir ;-)
Je passe récupérer mon sac à la consigne et je repars en stop direction La Plagne (je suis arrivé trop tard pour la dernière navette !)
Voilà, ça, c’est fait !!!
Je suis finisher de la 6000D 2013 (825ème en 11h42’38’’, vitesse moyenne : 5,4 km/h)
2ème objectif de l’année atteint.
Un peu de repos, les vacances en famille
Et on s’y remet avec l’objectif 3 : La Grand Trail des Templiers fin octobre !!
A+ les traileurs, éclatez-vous, et pas seulement les genoux !!!
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5 commentaires
Commentaire de Jean-Phi posté le 02-08-2013 à 14:41:30
Bien, très bien ! Un premier CR avec de l'humour et une fin qui se termine bien ! Bravo à toi !
Pour madame, si elle n'a pas passé ses WE d'enfance en montagne (même moyenne), elle ne peut pas comprendre ! Si elle l'a fait ? ALors c'est moi qui ne comprend pas...
Belle course, le meileur est à venir. A +
Commentaire de Yael posté le 02-08-2013 à 17:22:44
En avant en bavant, mais en avant fringant, parfois en avant en vacillant mais toujours vaillant. Bravant, ou plutôt bravo pour l'exploit et le récit. Merci .
Commentaire de fildar posté le 02-08-2013 à 18:12:21
Objectif réussi vivement le prochain défi et le prochain CR toujours plein d'humour.
Commentaire de coco38 posté le 03-08-2013 à 10:35:02
Chouette Compte rendu. J'ai eu l'impression de revivre mes 6000D. Certains passages de ton CR sont identiques au mien... le passage à l'Arpette et surtout le tobogan final en sous bois, ou à l'impression de ne jamais atteindre la route en bas. En tout cas Bravo ! car le facteur Chaleur était certainement très pénalisant.
Commentaire de a_nne posté le 04-08-2013 à 14:09:36
Moi aussi les 10 derniers km m'ont plombés...dur dur, je pensais que ça descendrait tranquillement jusqu'au bout...
Beau compte-rendu et belle course qui se mérite !
Bonne prépa pour les Templiers.
Bravo !
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