Récit de la course : Saintélyon 2008, par vincentpoms

L'auteur : vincentpoms

La course : Saintélyon

Date : 7/12/2008

Lieu : St étienne (Loire)

Affichage : 3965 vues

Distance : 69km

Objectif : Terminer

5 commentaires

Partager :

573 autres récits :

Saintélyon 2008 attention c'est long...

 

Ma Sainté 2008 par Vincent

 

 

« Je veux finir, si possible bien, si possible en moins de 10 heures, et mon objectif secret que je ne pense pas atteindre c’est 8h30… »

 

Tout a commencé cet été au cours d’un apéro, et cette fameuse Saintélyon, pourquoi pas la faire cette année, de toute manière si je m’inscris pas je la ferai jamais. 10 minutes plus tard me voilà inscrit avec quelques mois de préparation pour gérer….

 

- Préparation

Et bien çà commence dés l’été avec pour objectif intermédiaire le Trail des Etoiles à Bagnères de Bigorre, 45km dans les Pyrénées cela devrait constituer une bonne base de travail. Malheureusement le Pape passe par Lourdes et réquisitionne tous les secouristes du département 65 : épreuve annulée pour raisons de sécurité.

Je me rabats alors sur le Trail de la Marcaoue et le résultat me rassure : 24 km en 2h00.

Puis je commence le plan d’entraînement spécifique à la Saintélyon.

Je vais bâtir mon plan en mixant des plans types récupérés sur Internet et dans les revues spécialisées en y incorporant des séances tirées des plans pour marathon en 3h30. L’objectif de cette modification est de développer un peu ma vitesse pour les parties de bitume (ce sera des séances à 12 km/h sur des longueurs allant de 6 kilomètres  jusqu’à un 20 kilomètres programmé à Seysses). Le plan se passe relativement bien dans l’ensemble, la sortie au Trail du Bourret et de la Colombelle est un peu compliquée après un fête mémorable avec Philippe à Paris 2 jours avant (ah le resto éthiopien m’est bien resté sur l’estomac, enfin il est pas vraiment resté…) Pour les connaisseurs c’est la méthode Yanis qui a déjà fait ses preuves en raid…Mais au final mon temps est meilleur que l’an dernier (- 7min) en 2h45 pour 29 km.

Par la suite j’enchaîne une épreuve de VTT road book de nuit de 25km (couché à 1h du mat…) et un 20km le lendemain matin couru en 1h36.

Pour ma vitesse je suis désormais rassuré, pour l’endurance c’et un peu le doute car le volume global de mes semaines me paraît light mais je me dis que j’ai l’habitude de la gestion des longs efforts. Parce que le gros point d’interrogation c’est : « quel temps viser ? »

L’objectif que j’avoue à tout le monde c’est comme d’habitude : à savoir 1 finir, 2 en bon état, 3 en moins de 10 heures je serai comblé. Intérieurement j’espère taquiner le symbolique 8h20 qui correspond au diplôme de la Saintélyon de bronze… Mais j’avoue que je ne sais pas si cet objectif est réalisable. 

Pour me rassurer j’essaie de trouver des témoignages sur internet, ceux-ci varient de 6h à 12h : il est difficile de se faire une idée…Un gars possède une formule empirique : ta moyenne ce sera 3km/h de moins que ton allure marathon…Je m’estime à 12km/h n’ayant jamais fait de marathon (bon promis Polo je vais y penser) ce qui ferait …9km/h soit à peu prés 7h33… Il est fou çà passera jamais

 

-         Semaine précédente

 

Une dernière semaine classique : je flippe à mort au début en me disant que je suis fou, que je suis pas assez entraîné, je ressens des petites douleurs ici ou là…surtout RE-LA-TI-VI-SER !

Côté nuit c’est un peu compliqué : ma petite fille Lili est malade, elle se réveille obstinément à minuit, 2h30 et 5h00… premier soir ok, deuxième cela se complique, et le troisième je suis sauvé part Gégé qui se sacrifie en dormant avec Lili pour que je puisse dormir en prévision des efforts… Merci mon amour…

Côté repas, je relativise le fameux régime dissocié scandinave qui doit faire de moi une « bombe à glucides » (hein John !!) et je m’essaie au Malto en complément glucidiques les 3 derniers jours pour éviter un gavage de riz et pâtes (çà m’empêche pas d’engloutir un soir 500g de riz au lait, si si c’est bien 500g c’est marqué sur la boite…GG est stupéfaite !).

Côté nutrition j’ai essayé un peu tout pour faire face en cas de besoin car on me prédit une aversion certaine au sucré en fin de parcours : test du sucré/salé (tucs et saucissons) et je prépare une stratégie à 3 arrêts ravitos digne des grandes écuries de formule 1 sur les lieux les moins fréquentées pour éviter les embouteillages décrits par certains…

Côté préparation : j’y vais cool avec 2 petites sorties histoire de voir… Sinon je soudoie mes amis de la météo pour savoir à quelle sauce je vais être mangé : terrain gras ? C’est acquis vu ce qu’il est tombé ces derniers jours dans la région, mais pleuvra ? Ou pas ? Neigera ? Ou pas ? Gèlera ? Ou pas ? Ventera ? Ou pas ?

Heureusement ma grenouille toulousaine se veut rassurante…

 

 

-         La veille :

 

Le matin les encouragements des collègues. La pression monte ! Départ 12h30 de Toulouse et nous voici partis pour 7 heures de route. Je m’endors sitôt mon repas englouti profitant de la sieste de Lili… Bon voyage (que je redoutai un peu comme tout bon compétiteur à H-24) tout va bien, arrivée dans ma belle famille, repas (pâtes jambon, riz au lait et gatosport…) petite discussion et c’est parti pour un gros dodo. Un peu coupé par ma chère Lili qui se rappelle à mon souvenir vers 3h du mat…

 

-         Le jour J :

 

Je me réveille, il est 9h, ouf merci Lili pour la grasse matinée, petit dèj, demain à cette heure là je serai en peut-être entrain de courir…J’espère que non…

Le matin est pris par la préparation de mon sac de voyage, je vérifie que je possède tout grâce à la check-list imparable que j’ai concocté avec tout ce qu’il faut pour toutes les situations… Consultation des dernières prévis météo : pas de pluie et 3 degrés : je signe !!! Ce sera donc la version light de l’équipement.

12h00 repas de famille : je ne partage pas les plats appétissants de la famille et me contente de mes pâtes et du jambon (à croire que je vole le repas de ma fille…) et le vin ce sera peut-être pour demain car je lui substitue ma boisson énergétique…Dessert (riz au lait et gatosport…) et il est déjà 15h00… Je ne la ferai pas la sieste que j’espérai…Vite vite les thermos d’eau chaude pour le repas et le premier plein du Camel (je préfère en effet avoir une boisson chaude pour affronter les frimas de la nuit…), derniers encouragements de la famille de GG au grand complet, merci à tous…

Me voilà parti chez M et Yvan pour un transport jusqu’à Lyon. Petit aller/retour suite à un oubli, et grâce à Yvan et son GPS implanté dans la tête me voilà à Perrache à 18h00 pour un train à 18h34, tout va bien.

Alors ce train il est où ? Et bien il n’y a qu’à suivre ceux qui semblent se rendre au même endroit que moi et des VTTistes qui feront visiblement le parcours. Dans le compartiment on est 6 coureurs me semble-t-il donc 3 Kikoureurs…Petit voyage de 45min, MP3, çà y est, je suis enfin dans ma bulle…

Arrivée à St Etienne, je fais mon petit « boulet » : je vois 2 gars qui prennent un taxi, je leur propose de covoiturer, ils me demandent pour où : ben comme vous le départ, Ah non ! Nous on va manger au resto!!! Et puis le parc c’est à 500 mètres à pied…Vu ce qui nous attend on ne va pas râler…

1/4h après me voilà au parc des expos accompagnés par mes compagnons de train. Mon sac pèse un âne mort, ils sont longs les 500m…

D’abord le retrait des dossards, je me trompe de queue dans un premier temps (et en ma défaveur…) et puis en discutant avec un de mes compagnons de voyage on s’aperçoit que notre file est juste à côté… et la nouvelle queue est …dérisoire. Ca se présente bien. Dossard 6770 en poche, je m’aperçois que chaque concurrent possède un gobelet plastique réutilisable avec un système simple d’accroche et ce afin d’éviter la consommation de plus de 80 000 gobelets jetables comme l’année dernière, il faut saluer cette initiative qui devrait être imposée sur d’autres épreuves…

Objectif frontale : je vais voir si la petzl que je cherche est en vente : le technicien Petzl m’oriente vers le stand running conseil et semble craindre la rupture de stock pour le modèle que je veux : Myo belt XP avec boîtier pile déporté. Mais alléluia il en reste une, avec 10% de remise… Il ne peut rien m’arriver ce soir...

Maintenant il s’agit de trouver un lieu pour manger et dormir, épreuve difficile car le parc est déjà très bien rempli... Un emplacement le long d’une barrière et à côté d’un des nombreux socles de poubelles à tri sélectif fera l’affaire. Il est 20h, je reconstitue mon repas déshydraté poulet purée (et dire qu’il distribue de l’eau chaude et que j’ai trimballé 2 thermos d’un litre…). Gatosport et riz au lait finissent mon repas pour changer un peu…

20h30, il est temps de dormir un peu, le speaker nous épargne jusqu’à 22h30 et ne parle que pour diffuser des infos pertinentes. Je m’endors un peu… 21h45, je mange ma collation avec le dernier morceau de gatosport, et je débute ma boisson d’attente.

Je me lève pour récupérer mon étiquette pour ma consigne bagages : c’est énorme !!! Je me suis couché on était nombreux, mais là c’est la folie…le Parc est blindé. Je me change tranquille, pas besoin  de vestiaires car tout le monde fait pareil : une cabine d’essayage géante !

Voici le détail de ce que j’emporte finalement :

BAS : chaussures Nike Trail Pégasus, chaussettes salomon trail, bas de compression booster, boxer odlo, cuissard court contention quechua raid, corsaire asics par dessus.

HAUT : t-shirt light odlo, carline millet manches longues, manchettes de vélo, un buff autour du cou, un buff sur la tête, ma lampe, mes gants de plongée étanches.

Sac : 1,5 de boisson, 3 sachets de boissons, 9 gels, 2 petits sacs de saucissons, la couverture de survie, la lampe de secours, le portable, le MP3 que mes sœurs chéries m’ont offert pour mon anniv anticipé (4GO de musique et 15h d’autonomie çà devrait le faire même en cas de très gros coup dur)la boite « au cas où » (doliprane, immodium, compeeds, pince à épiler, 10euros, sifflet), 2 buffs, un bonnet polaire et mon coupe vent.

Me voilà équipé, petit détour au toilettes, enfin petit. Il y a 10 minutes d’attente mais çà valait le coup : pour entendre un mec se « déchirer » littéralement sur les toilettes, il a bien fait rire tout le monde : çà sentait la peur !!!

23h00, je dépose mon sac à la consigne : c’est un peu le bordel car il s’agit de trouver le bon bus et d’y « déposer » son sac : en fait les bus sont complètement bourrés de sacs et il ne reste plus qu’un léger passage au milieu pour incruster son sac…mais bon, çà passe… 23h15, je déambule un peu avant de me placer sur la ligne : je croise Vincent Delebarre au stand Petzl, il s’équipe avec le phare maison (le modèle Ultra) il faut dire qu’à 15/16km/h il vaut mieux bien y voir, on fait pas tout à fait la même course, il sera 2éme en 5h04…

23h30, je vais sur la ligne (en fait à 50m car il y a déjà du monde). Je patiente tranquillement, coup d’œil à mon portable : toute la famille de GG réunie sur une photo transmises 10 minutes plus tôt : merci encore, çà me réchauffe.

23h50 arrivées de favoris qu’on nous demande d’applaudir, le cœur n’y est pas vraiment.

23h55 hommage à Laurence, de la communauté des Kikourou, qui a bouclé la Sainté l’année dernière et qui ne sera plus là, recueillement et salve d’applaudissement nourris…là le cœur y est…

23h58 extinction des éclairages publics et les lampes frontales s’allument à l’unisson.

23h59 : U2 à fond avec Ultra Violet, c’est trop bon, j’ai des frissons partout, çà y est j’y suis à ma Sainté !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

 

- Départ 00h00 :

 

Les fauves sont lâchés, on avale le bitume comme des assoiffés tellement on attendait tous çà… Coup d’œil au cardio, le GPS n’est pas parti, mercredi… Je le relance, il faudra que je rajoute 3 minutes à tous les temps de passage.

C’est parti, les premiers kilomètres défilent, je fais attention car on peut vite s’emballer, il en reste 68… Je me force à maintenir 160 pulses maxi, car le train actuel pourrait m’imposer un peu plus et j’ai pas de super sensations avec une légère douleur à l’aine droite, aussi je me laisse tranquillement décrocher, mais lorsque la pente s’élève un peu je garde mon rythme sans forcer et le flot des concurrents ralentit, je crois que je suis dans le juste… Premiers lacets, et voici Sorbiers qui annonce le début des hostilités, la pente s’élève plus franchement, ensuite on quitte le bitume et la lumière des éclairages publics, nous voici enfin dans la vraie Saintélyon comme je l’ai lu dans le road book…

Premier constat, il me faut modifier mon réglage de lampe : le niveau économique et le volet grand angle ne sont pas adaptés, alors niveau optimum et faisceau réduit seront désormais mes compagnons de route…

Côté terrain c’est assez agréable : la boue est là, mais je m’y attendait un peu, mais l’avantage c’est qu’elle est surtout liquide : donc les appuis sont bons et les chaussures ne s’alourdissent pas.

Je remonte pas mal de monde dans la côte, je suis bien, coup d’œil cardio : 170 !! Bon on va se calmer un peu, je redescends vers 160 et je remonte toujours mais plus cool. A droite 4 coureurs font une pause pipi collective, je n’aurai pour ma part personne à attendre, ou pour m’aider si besoin…

Je regarde devant : on voit une espèce de traîne phosphorescente, un peu comme le reflet de la lune sur un plan d’eau, et derrière c’est encore plus beau, un long ruban de lucioles en pèlerinage qui ondulent… je me retournerai quelques fois mais pas trop pour éviter d’éblouir tout le monde…Tiens un panneau arrivée à 55km, c’est une blague…

D’une manière assez paradoxale, on est bien seul… en effet le fait d’avoir une frontale ne permet pas trop de tourner la tête pour discuter, sinon votre partenaire n’y voit plus rien pendant quelques mètres… de plus la nature du terrain n’est pas propice à la course à 2 : gadoue, flaques , cailloux, montées/descentes, bitume/ou pas, chacun y trouve son terrain de prédilection…une descente le long d’un lac et nous voici déjà au premier poste de ravito.

 

-         Saint Christo : 15,5 km 1h34’

 

Le ravito est plein de monde, j’aperçois la camera au passage mais trop tard, j’aurai pu faire un coucou pour mon film… je poursuis sur ma lancée, pas d’arrêt prévu ici car je ne voulais, pas m’arrêter à cause de la « cohue » mais tout semble se passer sans problèmes…

Prochain objectif Moreau dans 6 km, le faisceau de ma lampe est vraiment sécurisant et je ne regrette pas cet achat, les progrès sur les ampoules sont étonnants, moins lourdes, moins gourmandes et plus puissantes, mais aussi plus chères…Donc mon faisceau est tellement bien que les coureurs ont tendances à l’utiliser et à dévier leur trajectoires, surtout dans les petites descentes ou je reprends constamment du monde… donc je double sur les bas-côtés…Ca continue de grimper et l’air se fait un peu plus frais, mais mes choix vestimentaires ont été judicieux, je rebaisse mes manchettes qui me tiennent un peu chaud.

 

 

Un gel antioxydant (oui, j’ai opté pour ce « concept » sensé limiter les crampes, on se rassure comme ou peut…) et quelques minutes plus tard et voici l’approche du deuxième ravito. Super je n’ai pas encore été rattrapé par les bombes des relais partis une heure après nous, je pensais les voir avant…Je dois faire un complément pour tenir 1h30 (je veux mettre 0,75 cl et un sachet de boisson). Normalement je dois bientôt être à sec…

 

-         Moreau : 22 km 2h18’

 

Un petit ravitaillement au milieu d’un hameau, je me fais une petite place auprès des bénévoles, je retire mon gant, dégrafe mon sac, ajoute mon sachet et demande le complément d’eau, le Camel est très vite rempli car je n’ai pas complètement sorti la poche, je pense que le sac compresse la poche. Je mets le gel dans la poche et c’est reparti… première erreur : j’ai retourné mon gant, et toute l’humidité qui était accumulée dans la douce chaleur du gant a pris le froid, c’est condensée et j’ai une main chaude et l’autre froide et humide… au prochain ravito penser à ne pas retourner les gants…

Une bonne côte après le ravito (c’est que le début…), un peu plus loin des spectateurs appellent un prénom (Jean-Yves je crois ?!!!) et tombent sur lui, il est à quelques mètres de moi…Joie, plaisanteries, j’imagine tous les concurrents qui ont entendus ce prénom, autant chercher une aiguille dans une meule de foin… et bien je suis témoin qu’on trouve parfois l’aiguille…

Nous découvrons alors les lumières de la vallée du Rhône sur notre droite qui ne vont pas nous quitter jusqu’au bout. Nous suivons un long chemin par les crêtes, celui-ci est gras collant et nous sommes nombreux à lui préférer la bordure du champ qui offre une meilleure adhérence à condition de prêter attention à ses appuis. Le vent souffle légèrement et je frissonne un peu, mais rien de grave car la température est largement supportable

Panneau arrivée 40km : me voici sur des distances connues, je sais que je passe ce genre de défi, mais avec 3h dans les jambe l’entreprise sera plus ardue… Comment ?! Cela fait déjà presque 3 heures. Je n’ai pas vu passer le temps! Effectivement pas besoin de café, on est bien réveillés. Un autre gel une belle descente et voici (enfin !) le premier relayeur qui nous dépasse. Il est très cool puisqu’il nous remercie et nous encourage, je ne pensais pas à un tel comportement venant de ce coureur sensé jouer la gagne à fond!!! Les autres suivent à quelques minutes, moins sympas mais courtois quand même et nous voici déjà à Ste Catherine lieu renommé de la course.

 

-         Sainte Catherine : 28,5 km 2h52’

 

Et bien ce haut lieu est une belle Thalasso !!! De la belle gadoue liquide nous accueille dans une vaste aire de ravitaillement, il y a du monde (spectateurs, relayeurs qui s’échauffent) mais pas tant que çà, je me dis que j’aurai finalement pu ravitailler ici… je continue tout fringant car je dépasse beaucoup de mes compagnons qui ravitaillent et ceux qui reprennent la course y vont cool… j’ai l’impression de voler…Jusqu’à la côte qui arrive juste après (on continue…). Une fille qui me suit cherche obstinément à s’assurer que sa copine « Laurence » est toujours pas loin d’elle, au bout de 10 minutes c’est lassant d’entendre toujours le même prénom…après Jean-Yves…Un petit gel au goût miel pour changer (super !!!) je me dis qu’au prochain ravito je peux brancher le MP3 en récompense… Car j’avais prévu de ne pas m’en servir avant la moitié de la course.  On croise certains coureurs qui remontent la course !? La première fois çà va, puis 2, puis 3, bref tout le long de la course j’en croise et les remercie vivement pour leur lampe qui m’explose les pupilles… Et je me demande pourquoi ils font machine arrière… Cà restera un mystère…

 

Certains pestent contre la boue, j’ai alors une pensée pour Jean-Luc et Benoît avec qui j’ai couru le Trail des Citadelles cette année dans la neige et de la vraie gadoue version XXL !!! Ici, c’est de la gnognotte… Pas le temps de finir cette pensée prétentieuse que je patauge dans une flaque profonde et mon pied droit me rappelle que j’ai des Nike en Gore-tex sympa à la maison auxquelles j’ai préférés des chaussures plus roulantes mais moins étanches…

Puis voici une descente bien pentue et caillouteuse : c’est çà le bois d’Arfeuille ? En fait bois ou pas on ne sais pas trop : à force de regarder par terre ou on met les pied, on ne lève pas beaucoup la tête et du coup on ne voit pas si c’est une forêt ou un champ…C’est un peu étrange mais le monde se limite alors au faisceau de la lampe ou de celle de son voisin : un mec me rattrape avec une lampe de folie : mon ombre est plus forte que ma lampe !!! Il me dépose littéralement mais j’ai l’honneur sauf c’est un relayeur (dossard rouge…).

Suite de la descente et voici bientôt le ravito : cool j’ai couru jusque là ! Je commence à sentir des petits signes de fatigue mais rien de très grave et puis mon MP3 va bientôt arriver pour m’aider à poursuivre. Je continue toujours de courir et cela constitue déjà une preuve de satisfaction.

 

- Saint Genoux : 36 km 3h54’

 

A la faveur d’une petite grange le ravito surgit de la nuit, ils ont eu la bonne idée de répandre de la paille sur le sol et du coup c’est pas la gadoue !!! Enfin un endroit sec !

J’enlève mes gants, sans les retourner cette fois-ci ! Je sors ma poche à eau et là surprise, elle est presque pleine… En fait quand je l’ai remplie au ravito précédant elle était encore en grande partie pleine. Moi qui me vante de boire régulièrement là on peut dire que je joue les chameaux… Bon je recomplète avec de l’eau et n’ajoute pas de boisson énergétique (ou énergisante n’est ce pas John…).

Je mange un petit gâteau, je sors enfin mon MP3 je change mon buff qui est trempé et s’est reparti, j’ai fait plus de la moitié.

Je consulte le chrono, j’ai 20 minutes d’avance par rapport au temps de passage pour 8h30 c’est toujours un petit bas de laine de pris pour le moment où il me faudra marcher (j’en suis sûr). Je frissonne en sortant de la chaleur et la lumière réconfortante du ravito de St Genoux. Il fait froid, je relève les manchons, enfoui mon nez sous le buff que j’ai autour du cou et j’hésite à enfiler mon coupe vent, mais je lève la tête et vérifie le vieil adage : « A la Sainté, après chaque ravito tu monteras.. » et donc effectivement une belle montée m’attend et je me réchauffe rapidement…

Désormais la musique va me porter, merci mes sœurs chéries pour ce cadeau idéal… A moi ma playlist de folie. Arcade Fire et les Pixies sont mes premiers compagnons, d’autres suivront avec quelques moments de grâce…

Maintenant c’est la longue descente, je sais que je peux prendre encore un peu de marge car je crains de souffrir sur la fin, alors je relance dans cette portion relativement facile et roulante. Une côte me surprend : mais çà devait pas faire que descendre… Heureusement ce faux plat est bref et je reprends la descente : Bashung me transporte avec « Comme un lego » suivi d’un « Madame rêve » avec en fond les lumières de la vallée, elle est pas belle la vie…La descente se poursuit et « Marjon le bas » succède à « Marjon le Haut » donc on descend bien… Je me dis que tous ces kilomètres courus constituent un objectif réalisé. Je ne vois pas trop passer le temps et c’est déjà Soucieu que j’aborde relativement frais, un peu entamé mais pas de douleurs trop fortes dont je crains l’apparition à l’approche des 5 heures de courses...

 

 

 

 

 

-         Soucieu en Jarrest : 45 km 4h50’

 

Un ravito surprenant : les relayeurs s’échauffent autour d’un anneau pendant que nous on boucle notre 45éme km, il y a un vrai décalage… On fait le tour complet de leur anneau de vitesse… avec leurs encouragements, merci les gars c’est bon pour notre moral, on passe par un trottoir étroit derrière un bâtiment et je me demande pour la première fois si c’est le bon chemin, mais oui, le ravito est là. On est peu nombreux, l’ambiance est calme, je ne prends pas d’eau…Je me fait plaisir avec 2 carreaux de chocolat et j’essaie 2 tucs, mais y renonce juste après avoir goûté l’un d’eux : ils sont vraiment un peu trop salés et j’ai peur de ne pas les digérer (mon expérience du Phoebus Trail me vrille encore les intestins…). Je me force alors à avaler un gel fruits rouges, mais je n’avale que la moitié. Allez prochain ravito dans… bigre 12 km. C’est le plus long intervalle… mais je sais qu’à celui-ci j’envoie un texto à ma GG qui viendra me chercher à l’arrivée, on a tablé sur 1h30 pour que j’ai le temps d’effectuer un ravitaillement et 12 km, çà me semble bon…

Tiens donc, on repart du ravito en descendant, c’est là l’exception qui confirmera la règle. Je reprends une foulée paisible et j’ai désormais 40 minutes d’avance, Voilà un joli capital ! Je me concentre sur mon objectif : courir le plus possible et m’économiser dans les côtes.

Pour l’heure c’est la fin de la descente, celle-ci est relativement difficile avec de grosses marches et beaucoup de pierres. Je ne veux pas finir comme beaucoup de coureurs que j’ai doublé : certains trottinaient avec difficulté ou boitaient bas, d’autres marchaient avec un bâton : de nombreuses chevilles ont souffert et il doit y avoir du boulot pour tous les kiné et osthéo de France dans les prochains jours…alors la vigilance est de mise. Je sais que l’on se croit frais et que c’est là qu’on se gaufre (CF le vol façon superman que j’ai effectué dans la descente des 3000 ariégeois ou j’ai fini la tête posée à 10cm d’un gros caillou) alors piano, piano…

Nous voici au passage de la passerelle du Garou, arrivée en bas j’ai une curieuse illusion d’optique avec un changement de couleur du sol qui me laisse perplexe : de la neige, à l’endroit le plus bas du parcours…mais en fait c’est du sable, çà commence à sentir la fatigue… La remontée est assassine, caillouteuse et glissante et c’est là qu’un gros boulet de relayeur (pour pas dire CON mais je le pense vraiment) me bouscule et s’appuie littéralement sur moi pour passer, je suis tellement surpris que je gueule même pas… deuxième bosse et nous voilà dans la traversée de Chaponost, c’est surprenant de traverser un village sans s’arrêter au ravito, on longe un parc, puis un ruisseau que l’on enjambe par une passerelle de fortune qui a supporté tous les autres, alors je me pose pas de question, et il fallait pas s’en poser…

Illusion d’optique numéro 2 : la forme du faisceau de ma lampe me fait penser à un masque de plongée… et je perds un peu mes repères auditifs et sensoriels l’espace de quelques secondes… Je modifie l’inclinaison du faisceau et cette désagréable sensation s’évanouit… la nuque devient un peu raide à force de regarder par terre, et je me masse un peu les trapèzes pour me délasser…

On remonte un peu…

C’est long, puis c’est plat …

C’est long…

C’est quand qu’on descend ?…

C’est long et çà commence à durer un peu tout çà, vivement le ravito…

Petite douleur à l’aine, peut-être un besoin pressant ? Je verrai à Beaunant… Là je me rends compte que j’ai dépassé toutes les distances que j’ai déjà courues…Et je suis frais, enfin presque frais… Bon elle vient cette descente ! Enfin voilà un petit chemin qui nous fait descendre ! Puis c’est la ville, un petit zigzag et c’est une station service qui surgit transformée pour l’occase en ravito.

 

-         Beaunant : 57 km 6h10

 

Je sors mon téléphone et envoie le message à ma chère GG. Je découvre alors qu’elle m’a envoyé 2 SMS dans la nuit, et que M & Yvan ont fait de même… une petite émotion m’envahit… je m’assois un peu car là c’était un peu dur, surtout dans la tête…

Bon un bon thé la dessus avec un gâteau, çà fait du bien, voyons où j’en suis, 6h10, j’ai presque 55 minutes d’avance, 2h20 pour 12 km, çà passera même s’il faut finir avec les dents. Je m’étire un peu, reprends un thé (vraiment excellent) et un gâteau pour repartir car je sais que le parcours doit remonter après (on reprend les habitudes…).

J’ai lu dans différents récits que la côte était terrible : coup d’œil devant et je vois le mur !!! Ils ont du prendre la côte qui n’existait pas au sortir du ravitaillement précédant et y ajouter celle de ce ravitaillement !!!

Tout le monde marche à part quelques relayeurs fous qui sont bien plus frais que moi… Je marche en zigzag et sirote mon thé, mais après 150 mètres je m’étire un peu le dos… Surtout donner un semblant de justification à cette pause… Bon il faut s’y remettre, la pente s’adoucit doucement et à la faveur d’un dépassement moins rapide par un coureur je me glisse dans sa foulée, finalement ce n’est pas si difficile et je me calle dans son rythme.

On croise alors les premiers joggeurs du dimanche matin, ils sont matinaux à Lyon ??? Petits encouragements ou sourires de circonstances…merci pour le moral…

Panneau arrivée 10km : déjà !!! Je ne pensais pas y être si vite, cool ! Coup d’œil au chrono, il me reste 1h10 pour faire çà en 7h30 !!!

Pour la première fois je comprends le rythme que j’ai tenu jusque là et j’en ai presque les larmes au yeux... Gardons cela pour le final…En plus je sais qu’il reste de la descente et du plat, alors en avant !!!

La descente se passe très bien, décidemment  ce cuissard de compression Quechua est une merveille car j’ai même pas de tension dans les quadris…Quelques escaliers et voici le panneau 5km, 6h48 il me reste donc presque 40 minutes… Tu vas y arriver, tu vas y arriver, accroche toi !!! Une dernière volée de marches et c’est le pont sur la Saône, j’encourage un gars qui marche…On passe à proximité de Perrache où j’ai pris le train quelques heures plus tôt…

 

- Lyon Carnot : 63,5 km

 

Passage place Carnot, lieu du marché de noël, je boirai bien un vin chaud moi… Et c’est également le dernier ravitaillement que je snobe allégrement…Une fusée lancée à fond…En réalité « à fond » à ce moment là cela signifie à 10km/h…

Je ne calcule plus s’il faut boire ou manger je dévale les dernières marches qui nous mènent sur les quais du Rhône... Toujours pas mal aux jambes et aux articulations !!! Mais une certaine fatigue générale tout de même…Et là c’est une longue ligne droite de 3 km qui m’attend. C’est long… Au début je relativise mais j’attends un peu trop ce moment où on va s’éloigner du bord du fleuve car ce sera alors synonyme d’une arrivée très proche. Je cherche les panneaux qui doivent sonner le glas des 4, 3, 2 et du dernier kilo ? Mais rien ne vient car ils n’ont pas été posés… C’est tout bête mais ce détail me démoralise à un point…La fatigue accumulée se révèle à ces variations brusques du moral qui passe du bonheur à la lassitude extrême en quelques secondes (on dirait la bourse…). C’est assez paradoxal mais en dépit des quelques 60 bornes que j’ai déjà faites  j’ai l’impression que l’arrivée est très loin…

Allez je m’accorde 1 minute de marche… et puis 7h25 ou 7h35 c’est pareil, c’est tellement mieux que ce que je voulais faire…

 

 

 

Je repars quand même, poussé par ma fierté, ma playlist est moyenne avec quelques morceaux égarés…mais je reprends courage en suivant le rythme des autres, ils vont vite bon sang (je m’apercevrai en regardant les vidéos que ce sont des relais…) mais je m’accroche, une personne nous crie que l’arrivée c’est 200m tout droit puis c’est 300 m à gauche… Je l’adore cette personne !!! Après 500m on bifurque effectivement à gauche, puis encore à gauche un peu plus loin, on voit la silhouette du parc des Sports et là les panneaux surgissent : 250 m, des encouragements, 200m, des bravos, 150m,  je plane, 100m, je vois la lumière de l’entrée du parc des expo, 50m je vois le tunnel, je m’engouffre dedans, la ligne est là….

 

- Lyon Gerland Arrivée : 68 km 7h24’42

 

Je serre le poing droit plusieurs fois… passe la ligne… pense à ce que j’ai fait… me tiens la base du nez quelques secondes pour stopper un peu tout ce qui veut sortir.

Un bénévole m’indique que je peux récupérer mon t-shirt finisher contre la restitution de ma puce électronique : FINISHER !!!

J’éteins mon cardio… il indique 7h21, avec mon forfait 3 minutes çà fait maxi 7h25 …

YESSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSS !

J’ai peine à y croire… je pense alors à éteindre ma frontale, je déguste le thé, mange un peu, et cherche GG du regard, en vain… je l’appelle, elle est toute proche mais je suis déjà arrivé : en fait j’ai mis 1h15 depuis l’envoi du SMS… Je vais récupérer mon sac qui est super bien rangé (bravo l’organisation quand on voit comment on les a « rangés » dans le bus).

Je retire mon sac, profite de la douce quiétude de cette salle peu peuplée et m’allonge un peu… Moins d’une minute après les bénévoles de la Croix Rouge sont là pour vérifier si je ne fait pas un malaise, merci de votre bienveillance, tout est ok, merci les gars, tout va bien… je viens juste de faire 68 km alors je souffle un peu…

 

- Après

 

Je me change, retrouve ma GG au sortir des vestiaires, renonce au repas chaud vu le nombre de convives… et on rentre à Montcet, le jour se lève…GG me propose un détour par une boulangerie, je négocie des œufs au plats avec un bout de fromage à l’arrivée en échange…

Arrivée triomphale dans la famille de GG qui a suivi mon arrivée en différé sur le site internet, c’est trop cool. Merci à eux car cela me fait vraiment chaud au cœur, j’ai eu l’impression d’avoir gagné la course… Je prends une douche bien méritée, j’engouffre le pt’i dèj de ma chérie… et puis c’est l’heure des comptes : Séverine gagne le concours de pronostics avec 7h30. J’avais entendu en souriant ce pronostic la veille en me disant qu’une telle performance était bien présomptueuse pour moi…

10h30 : je quitte tout le monde pour une sieste de 1h30. Enfin dormir un peu…

13h00 : le journaliste annonce un reportage sur des fous qui ont courus cette nuit entre St Etienne et Lyon… Le vainqueur est très fatigué, je ne le serai pas moins avec un tel temps de  5h et 10 secondes…

Mardi soir : je recours un footing de 45 minutes avec ma GG, bonne récupération, merci les gels, merci l’entraînement, merci les fringues compressives, merci à tous… Qu’est ce qu’on récupère bien quand on est aussi satisfait se soi…  

 

« Je l’ai fait, j’ai fini, je suis pas cassé, j’ai fait moins de 10 heures, j’ai fait moins de 8h30, j’ai fait moins de 7h30… »

 

 

5 commentaires

Commentaire de binoclard posté le 18-12-2008 à 16:21:00

Merci pour ce, si haletant, récit. On se dessinait ta perf. à fur et à mesure de la lecture.
C'est une super perf.
Bonne récup. et profites, au maximum, avec ta petite famille.
Comment va lili???

Commentaire de intuitiv posté le 18-12-2008 à 17:35:00

ca c'est de la course !!
bravo tu as vraiment assuré.

Commentaire de Mamanpat posté le 19-12-2008 à 11:26:00

Et à 4 mn près c'était la sainté d'argent...

Bravo pour ta course et merci pour ce récit ! j'ai l'impression d'avoir "lu" ma course avec les mots d'un autre ! Avec 24 mn de moins par contre !

Pat

Commentaire de sarajevo posté le 19-12-2008 à 21:28:00

pareil que mamanpat ....j'ai relu ma course.
Tu écrit sacrément ... merci pour ton récit et felicitations pour ton temps ....
a+
pierre

Commentaire de nic2wall posté le 12-10-2009 à 22:08:00

Un peu short sur ma prépa physique (1 ère séance d'un plan en 8 semaines commencée ce jour), je complète par une bonne préparation mentale. Ton récit est top pour ça. Il faudra juste que je pense à ajouter 2 Heures en plus pour me visualiser au mieux !

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Votre annonce ici !

Accueil - Haut de page - Aide - Contact - Mentions légales - Version mobile - 0.17 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !