Récit de la course : Raid Total Centrale Paris 2008, par Liliputiengeant

L'auteur : Liliputiengeant

La course : Raid Total Centrale Paris

Date : 25/4/2008

Lieu : Biarritz (Pyrénées-Atlantiques)

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Distance : 215km

Objectif : Terminer

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Pas d'autre récit pour cette course.

Raid Centrale Paris 2008

 

Entre les récits d'anciens participants, les photos et les vidéos que j'avais pu en voir, le Raid Centrale Paris m'a toujours fait de l'oeil... C'est en septembre dernier que nous avons passé le pas, à trois potes super motivés. Il nous fallait encore trouver une coéquipière féminine, ce raid se courant par équipes de 4 obligatoirement mixte. Ce fut chose faite fin octobre. A partir de là nous avons entamé l'entrainement à 4 pour être fin prêt le 25 avril. A force de courir ensemble dans le froid tout l'hiver nous sommes aussi devenu une vraie équipe soudé, des amis plus que des partenaires, ce qui nous aura été bien utile.

 

Jour 0

 

Le rendez vous étant fixé à Biarritz à 15h le 25 avril, nous avions prévus de faire le trajet depuis Paris en voiture. Celle ci nous a laché deux jours avant le départ... A ce moment les deux cents autres participants ayant déjà remplis le seul TGV permettant d'arriver à l'heure, il ne nous restait plus qu'une solution : le train de nuit. Résultat on a très peu dormi et on s'est retrouvé à 6h du matin sur la place de la gare à Biarritz, transi de froid. Pas l'idéal...

 Heureusement le soleil s'est assez vite levé, et nous avons trouvé un superbe parc pour faire la sieste jusqu'à 15h. Au final cet imprévue aura été très sympathique.

15h, place de la gare, deux cents personnes avec des sacs de toutes les couleurs rentrent dans 4 bus, direction la montagne à St Engrâce. Deux heures de car quand même. Récupération des dossards, petit tour de 3 km pour tester les VTT, petits réglages et autres préparations pour le grand départ du lendemain. On en profite aussi pour monter la tente, découvrir les autres équipes et le staff qui sera aux petits soins pour nous pendant ces cinq jours. Repas tous ensemble le soir dans une salle où on tient tous juste. On est vraiment au coeur de la nature dans un tout petit village, c'est parfait! Ensuite présentation de ce qui nous attend, consignes pour le lendemain, récupération du road-book et au dodo à 10h.

 

Jour 1

 

Réveil à 7h, il fait très froid au sortir de la tente. Je ne parviendrai pas à me réchauffer avant le départ. J'avale un petit déjeuner assez conséquent avec des tartines, des bananes et du jus de fruit. On prépare nos poches à eaux, on s'équipe, on récupère la puce pour le chrono et direction la ligne de départ. Il faut marcher cinq minutes pour l'atteindre et c'est une procession bien calme de raideurs qui se forme. On découvre alors le départ, qui va permettre d'étirer le peloton directement. La ligne de départ donne directement sur un pré terriblement penché pendant 200m, avant d'arriver sur un chemin.

 

 Un peu de musique de la part de la fanfare de l'école, la pression qui monte, et ça y est, le départ est donné. Comme on pouvait le prévoir certains partent ventre à terre dans ce mur, nous serons plus raisonnable en commençant doucement la journée déjà avec l'aide des batons. 9km, 600m de D+ et autant de D- nous attendent avant le premier ravitaillement, le tout en course à pied. Très vite on suit la file des coureurs qui se forment, courant un peu dans les parties roulantes, mais marchant déjà la plupart du temps car ça monte assez fort. En cinq minutes la sensation de froid à disparu, on s'entraide pour enlever une couche sans s'arrêter alors que le soleil passe enfin au dessus des sommets sui nous entourent. Il fait grand beau et le paysage est magnifique. En une petite heure on arrive au sommet à 1100m d'altitude, et on plonge directement dans la descente.

 Jusque là on était un peu en dedans, mais dès que la pente nous aide on repart ventre à terre. On double pas mal de monde, en faisant attention tout de même. Le terrain est assez technique et un passage sur une crête fait un peu peur... A gauche comme à droite il ne serait pas bon de sortir de ce petit sentier. Assez vite on aperçoit une tente blanche au loin, synonyme de 10 minutes d'arrêt du chrono et d'un bon petit tas de victuailles.

Deux trois étirement en croquant un quartier d'orange et un bout de saucisson, le temps de remplir la poche à eau, et déjà on vient nous dire que le chrono repare pour nous dans une minute. On manque clairement d'expérience ici et il va falloir apprendre à aller plus vite dans les ravitaillement par la suite... Le temps de renouveller notre stock de barre céréalières et on repart pour 10 km et près de 1000m de D+.

La fraicheur est toujours présente, on s'économise un peu car on sait que ces 5 jours seront long. Le parcours est magnifique. On remonte sur un sentier de pierre sur lequel s'écoule un ruisseau. Pas le choix il faut suivre son cours et ça raffraichit les orteils. Puis bien vite on découvre les vertigineuses gorges d'Holzarté. Quelques minutes plus tard on entend des sons de fanfare au loin, puis au détour d'un virage on découvre une passerelle qui enjambe les gorges. Cette passerelle suspendue à 160m au dessus du vide nous offre une vue splendide, avec le son de la fanfare venue s'installer en pleine nature. Déjà on ne regrette pas d'être venue.

 


 

 

Ca continue de monter et petit à petit la végétation se fait moins dense. A la traversée d'un petit ruisseau on a encore la force de plaisanter en sautant à pied joint dedans pour s'éclabousser les uns les autres. C'est froid!

Puis petit à petit la fatigue commence à nous saisir. Les équipes sont maintenant bien éloignées les unes des autres et nous n'avons vu personne depuis un bon moment. La montée jusqu'au second check point devient de plus en plus raide et on ralentit l'allure, oubliant complètement le pas de course qu'on pouvait appliquer auparavant. Notre féminine commence à être à plat, et je suis bien content de ce ralentissement forcé car moi même je ne suis pas au mieux. On aperçoit un controleur qui nous annoncent que le check point est proche...mais que ça monte beaucoup. On débouche sur le haut d'une bosse, allant directement vers le sommet avec une vue dégagé tout autour de nous. Partout autour les sommets des Pyrénées et à l'avant on aperçoit au loin quelques équipes à flanc de montagne en train d'avancer au ralenti. Encore quelques bosses à passer à la peine, puis nous apercevons à nouveau une tente blanche au sommet d'une dernière butte de 30m de haut. Ils sont dur ces 30m, mais la délivrance est au bout.

30 minutes d'arrêt chrono, un verre de coca et une assiette de salade de pâte. C'est royal. Beaucoup de concurrents sont là et il est difficile d'évaluer notre performance. Peu importe. Notre objectif est d'arriver ensemble au bout de ces 5 jours, sans blessure. Alors pour ce premier jour le mot d'ordre c'est gestion de l'effort. Nous avons mis 3h32 pour arriver ici et nous sommes bien content de pouvoir souffler un peu. Mais le temps passe bien vite et déjà il faut repartir. On remplit les sacs, on récupère les VTT, on met les casques et c'est parti pour 12km, dont les 5 premiers avec 200m de D+, puis une longue descente de 700m D-.

Notre allure est un peu poussive sur ce faux plat montant, mais nous sommes ravis de voir que la hauteur est suffisante pour pouvoir admirer quelques plaques de neige sur les abords du chemin. Sur cette partie on s'oriente à la carte, et bien vite on s'arrête avec une autre équipe pour comparer l'itinéraire. C'est aberrant, mais nous n'avons pas le même chemin sur nos cartes! Nous perdons donc 5 bonnes minutes à essayer de comprendre, pour enfin repartir avec l'équipe suivante qui nous a rejoint et qui a également l'itinéraire de l'autre équipe. Nous allons donc les suivre jusqu'à un controleur, qui nous montrera qu'on regardait juste au mauvais endroit sur la carte, le tracé que l'on essayait de trouver étant celui du lendemain. On a bien ri de notre bétise, puis on est reparti, lentement mais surement.

Passage au point culminant de la journée à 1400m d'altitude, le paysage est désertique et on est bien content de s'élancer dans la descente. Ces 7 kilomètres seront bien vite parcouru, et on fonce car l'arrivée est au bout. Enfin on aperçoit l'arche en contrebas et on passe la ligne en 4h43 pour ce premier jour. Fin du chrono pour aujourd'hui. Il reste néanmoins une épreuve de canyoning non chronométré mais obligatoire, puis le retour au camping en VTT, également non chronométré mais qu'il faudra bien effectuer avec quand même 5km à parcourir. Le soleil est toujours là, et notre place dans le ventre mou du classement nous gratifie d'une petite heure d'attente avant de pouvoir se lancer dans le canyon. Etirement et sieste au soleil, tout en pillant le stand de nourriture, la vie est belle et on est content d'être arrivé là sans difficulté majeure.

On enfile ensuite les combinaisons pour le canyoning et, horreur, il faut marcher près d'un km jusqu'au départ du canyon. En plein soleil, la combinaison noire est un enfer et on n'attend que de pouvoir se jeter à l'eau. Une fois arrivé on attaque par un rappel de 12m dans une cascade.

Il y en aura 4 en tout, et chaque passage est un plaisir. L'eau nous raffraichit comme il faut, et on avance avec méfiance pour ne pas se faire de blessure ici. Chaque saut est une découverte avec souvent peu d'eau à l'arrivée, mais on arrivera au bout avec rien de plus qu'un ou deux bleus par ci par là. Au bout d'une heure de descente, il faut remonter à pied pour sortir du canyon et à nouveau on meurt de chaud. Enfin on peut enlever les combinaisons et reprendre nos vélos pour rentrer tranquillement au camping.

 Une douche puis un massage, c'est royal. Pas le temps de faire autre chose, il est déjà 19h et donc temps d'aller manger tous ensemble. Chaque soir nous serons tous ensemble dans une salle pour manger, puis pour assister au classement du jour, au remise des récompenses, à la présentation de certaines équipes et sponsors. Vient ensuite le film de la journée qui permet en une vingtaine de minutes de vidéo de revivre de fort belle façon ce qu'on vient de traverser. Suit ensuite le briefing pour le lendemain, la remise des road-book, et enfin nous pouvons regagner nos tentes. Ce soir nous sommes 28ème sur 50 équipes. Ces soirées de près de 3h chaque soir sont très sympathiques, mais elles empêchent de se coucher tôt. A terme le sommeil va manquer et ajouter sa touche de difficulté. On prépare les sacs pour le lendemain et au lit, réveil programmé à 6h15. 

 

Jour 2

 

6h15, le réveil sonne, trop tôt à mon goût. La sortie du sac de couchage est un calvaire et c'est de nouveau en grelottant que je vais prendre mon petit déjeuner. Ca passe un peu moins bien que la veille et j'ai du mal à finir ma tartine. Je me venge sur les fruits et je songe déjà que je mangerai des barres en route. Contrairement au confort de la veille on ne reviendra pas au même camping ce soir. Il faut donc plier la tente et amener toutes nos affaires au camion qui les acheminera à Tardets. Pour nous la route sera un peu plus longue...

Comme la veille, départ en masse sur une grosse pente. On adopte la même technique en laissant partir devant tous ceux qui le veulent et en allant à notre rythme. Pour commencer la journée 12km de course à pied avec 1200m de D+. Ca monte et très vite je suis à plat. Le contre coup de la veille, je n'aurai même pas eu la patate une demi heure. Ca va bien pour les deux autres mecs qui en prenant exemple sur les autres équipes poussent un peu notre héroïne dans le dos. Moi j'en suis incapable et déjà à la peine pour suivre ce rythme. Je me contente de lutter et je sirote sans arrêt dans ma poche à eau, en espérant un effet de la part de la poudre énergétique qui y est dissoute. Je passerai encore une heure en étant complètement à plat, sans réflechir n'y regarder autour de moi. Je ne faisais qu'avancer.

Enfin j'ai commencé à prendre le rythme et à retrouver un peu de tonus. Nous étions presque en haut de cette partie course et j'ai pu à mon tour pousser un peu notre partenaire. Le mal était passé et déjà je ressentais tout le bénéfice d'être avec une équipe vraiment soudée. Après quelques traversées de forêt et quelques plaques de neige qui restaient encore, nous avons fini par entendre le son de la fanfare dans le lointain. Motivé par l'espoir de la proximité du premier check point, nous avons recommencer à courir. Bien vite nous avons aperçu les musiciens perchés sur un énorme rocher et surtout les stands de ravitaillement à leurs cotés. Une petite descente pour y arriver dans laquelle nous sommes presque au sprint, puis dix minutes d'arrêt chrono.

Tirant partie de l'expérience de la veille, nous mangeons tout en remplissant nos poches à eau et en nous étirant. Les dix minutes sont maintenant bien mieux optimisées! On récupère alors nos VTT pour s'élancer dans un parcours de 12km avec 1000m de D- et 100m de D+. La veille une personne s'était présenté au repas en disant avoir tracé ce parcours de VTT. C'était visiblement une pointure du sport nature puisqu'il avait déjà monté l'Everest. Il nous alors dit qu'il trouvait le parcours très technique et la descente difficile. Venant d'une telle personne nous avons pris ça très au sérieux et nous n'avons pas été déçus!

A plusieurs reprises il a fallu descendre du vélo pour franchir des pierriers et malgrès de nobmreuses précautions l'un de nous a fini par faire un soleil, heureusement sans gravité. Quelques centaines de mètres plus loin je cassai ma chaine, puis mon dérive chaine en tentant de réparer. Heureusement une équipe nous a dépanné en nous prêtant le sien et nous avons pu réparer. Nous sommes donc reparties en ayant déjà perdu un temps précieux. 500m plus loin, CRAC, je recasse. Nous avions probablement mal réparé et nous avons pu recommencer, cette fois en prenant garde à ce qu'on faisait. Ces évènements nous aurons bien fait perdre 20 minutes... La suite de la descente c'est révélé tout aussi technique, et je n'étais pas loin des crampes dans les doigts à force d'être crispé sur les freins. Cette descente a vraiment été épuisante, sans parler de la côte de 100m de D+ qui nous attendait ensuite. Enfin nous avons atteint le second check point, épuisé. Nous avons mis 1h36 pour faire ces 12km de descente en VTT. A pied nous aurions surement fait mieux... 

Un peu déçu d'avoir vu beaucoup d'autres équipes nous passer devant alors qu'on était impuissant, en train de réparer, nous étions quand même content d'en avoir fini avec cette portion de VTT et nous avons bien profité de la demi heure d'arrêt chrono pour récupérer. Après avoir manger un bon morceau et fait le plein des sacs, on a récupérer une carte pour une course d'orientation de deux heures. Deux heures était autorisées pour rallier le lieu d'arrivé en ayant trouver le plus de balises possibles, celle ci apportant une bonnification en temps. Après un début difficile et quelques problèmes pour trouver la première balise, nous avons choisi un itinéraire nous permettant de prendre pas mal de balises sans trop s'éloigner. Au final on a bien tenu le coup physiquement puisqu'on a réussi ce parcours en arrivant en tout juste moins de deux heures et donc sans la moindre pénalité. Notre course d'orientation a au final été ramené à 1h36.

C'est ensuite un rappel de 40m sur une falaise qui nous attendait, suivi d'une épreuve d'escalade pouvant donner lieu à des bonifications en temps selon la voie réussi. Malheureusement le passage sur ces épreuves n'allant pas aussi vite que prévu, un bouchon s'est créé engendrant près de deux heures d'attente. Par conséquent les organisateurs ont rendu ces épreuves facultatives et ceux qui le souhaitaient pouvaient passer directement à la suite. Mais comme la plupart des autres équipes nous avons préféré attendre, même si au final cela pouvait ne rien rapporter en temps. Nous sommes venus pour tout faire, et on a tout fait. Après un rappel bien sympathique qui a donné des frissons à certains, il a fallu choisir le membre de l'équipe qui nous représenterai en escalade, un seul membre pouvant grimper. Etant le seul a en avoir déjà fait, le choix fût assez logique... 

Trois voies étaient proposées, une 5a, une 5c et une 6b, ramenant respectivement 5, 10 ou 20 minutes de bonus si on arrivait en haut, à près de 15m. N'ayant tout de même pas une grande expérience de grimpe et la fatigue pouvant jouer, j'ai choisi la voie la plus simple pour essayer d'assurer. Après 5 premiers mètres faciles les difficultés ont commencé. Je ne trouvais plus de prises et mes appuis devenait de plus en plus incertains. Chaque poussée sur les jambes était un énorme effort et sans les encouragements des autres restés en bas, ainsi que des membres des autres équipes, j'aurai surement laché... Un peu plus haut j'ai trouve une position me permettant de me reposer un peu avant les derniers mètres. Après une petite minute sans bouger je me suis donc lancer sur ces derniers mètres, très crispés et peu sur de mes appuis. Encore 50 cm et je pourrai toucher le crochet cible. Encouragé à fond, j'ai bien tenu et dans un dernier effort j'ai gagné les 5 minutes du bout des doigts!!

Cette épreuve d'escalade a été très forte et toutes les équipes s'encourageaient à tour de rôles dans une superbe ambiance. Une fois passé, le chrono repartait pour les 12 derniers kilomètres de la journée, en VTT. Globalement en descente, cette portion nous réservait tout de même une belle côte d'un peu plus de 100m de D+ pour achever nos cuisses. En jetant nos dernières forces dans la bataille et en poussant notre féminine dans la côte nous avons pu doubler quelques concurrents et finir de belle manière. Cette dernière portion a été assez agréable, très roulante avec de grandes flaques de boue qui sont toujours sympa à traverser en VTT.

Nous avons donc passé la ligne d'arrivée en assez bon état. Un peu déçu certes d’avoir perdu du temps sur un problème mécanique nous pensions avoir fait une performance en dessous de ce que nous avions réalisé la veille. Quelle ne fut pas notre surprise quand nous avons découvert que nous finissions en 27eme position ! Visiblement la journée a été rude pour les autres concurrents aussi et nous avons donc gardé avec joie notre 28eme place au général.

L’attente avant l’escalade ayant rendu la journée très longue nous avons tout juste eu le temps de prendre une douche et de monter nos tentes avant de manger. Puis cérémonie et briefing pour le lendemain passé nous étions libre à 22h de rejoindre nos tentes ou les kinés pour une séance de massage. La fatigue était bien là, mais nous avons quand même choisis avec plaisir d’empiéter un peu sur notre sommeil pour aller nous faire masser les jambes. Ensuite un gros dodo,  et bizarrement pas le moindre problème pour trouver le sommeil…

 

Jour 3

 

Ce matin c’est départ échelonné en run and bike, deux vélos pour quatre équipiers. Comme tous les matins, je suis gelé au réveil… Je tente un nouveau type de petit déjeuner avec uniquement des barres de céréales et à boire. Ca passe plutôt bien. On démonte la tente, on s’équipe et peu après 8h on s’élance pour cette troisième journée, sans le soleil qui nous a quitté hier soir et ne semble pas vouloir revenir aujourd’hui.

On peine un peu au début, puis bien vite on trouve notre rythme. Les deux coureurs se donnent à fond pendant que les deux autres à vélos dépassent et déposent les vélos quelques mètres plus loin, s’élançant en courant à leur tour. Les rotations fonctionnant bien, ces 9km sont vraiment très plaisant car on peut vraiment aller très vite malgré les 200m de D+ et -.  Nous bouclons cette partie en 43 minutes et en ayant rattrapé deux équipes parties 2 et 4 minutes avant nous. A ce premier check point il n’y a pas d’arrêt chrono et nous repartons donc directement, gonflés à bloc par la performance que nous venons de réaliser.

L’étape suivante est assez courte en distance puisqu’elle ne fait que 7 km, mais avec 800m de D+, ce n’est pas une partie de plaisir. Pour compliquer encore un peu plus la tache il n’y a aucun balisage sur cette partie et tout se fait à la carte. On se retrouve bien vite à former un petit groupe de 3 équipes pour échanger nos talents en orientation. Résultat on a fait un détour sympa et on est arrivé à bon port en même temps que les équipes qu’on avait rattrapé en début de journée…

Pour ce check point nous avons droit à un arrêt chrono, mais le vent souffle fort et rester sur place n’est pas très agréable. Nous repartons donc assez rapidement pour une épreuve de spéléologie, impatient de trouver un abri au cœur d’une grotte. Pour y accéder nous devons marcher un bon moment à flan de montagne sur un chemin qui descend beaucoup et qu’il faudra malheureusement remonter… Après quelques minutes nous arrivons à un grand auvent de roche au sein duquel se cache un petit boyau. Nous sommes arrivé à la grotte des mille vache.

 

Casque et frontale sur la tête et c’est parti. L’entrée se fait donc par un petit boyau. Sur 5-6 mètres c’est quasiment de l’escalade, sauf qu’on est à plat ventre et qu’on ne peut soulever aucune partie de notre corps sans se cogner au plafond. C’est assez stressant, mais on débouche rapidement dans le corps de la grotte qui est au contraire un énorme tunnel. Plus de problème de place donc, mais l’impression d’être au centre de la Terre avec juste nos petites lumières de frontale pour nous éclairer. Il faut maintenant parcourir quelques centaines de mètres qui montent bien, en évitant de créer trop d’éboulements et en ne tombant pas soi même dans un trou. Au fond de la grotte un petit coucou à un contrôleur puis on reprend le même chemin en sens inverse. Chapeau pour lui au passage pour avoir jouer l’ermite pendant une bonne partie de la journée. On croise quelques personnes dans une ambiance bon enfant même si le lieu est complètement hors du commun, puis on arrive à nouveau au boyau pour sortir.

Là les choses vont se compliquer, il va falloir se laisser glisser dans ce trou et la perspective n’est pas très réjouissante. Comme des personnes sont en train de monter on a le temps de cogiter et notre équipière à un énorme coup de stress. Elle doit prendre énormément sur elle-même pour pouvoir ressortir et ces quelques mètres seront les plus durs de la journée pour elle. Au final on est quand même bien content de retrouver la lumière du jour, mais il pleut maintenant à grosses gouttes.

Il nous faut alors remonter au check point par le petit chemin escarpé qui nous avait menés à la grotte. Avec la pluie ça devient très glissant et vraiment épuisant. Une fois en haut on prend le temps d’avaler deux trois bouts de gâteau et des fruits secs puis il faut repartir. On déclenche le chrono avec la puce et on démarre pour 3 km à pied avant de récupérer nos VTT. Ca monte toujours beaucoup et le terrain en devers éveille en nous les premières douleurs sérieuses au niveau des chevilles. Continuer en vélo ne serra pas un luxe…

Enfin on prend les vélos pensant s’élancer dans une descente. Ce ne sera malheureusement pas le cas, nous avions mal regardé le profil… Devant nous 25km dont 1000m de D-. Mais ça commence en fait par 8km de faux plat montant. Sous la pluie ça devient vite très dur et c’est là que nous allons vraiment commencer à tirer parti de toutes les forces de notre équipe. On s’organise en relai pour se placer au coté de notre féminine et la pousser à tour de rôle. Après 100m à pousser on a les cuisses en feu, on se place à l’arrière et on passe le flambeau au suivant. On a tenu tout le long comme ça, réalisant du coup une superbe performance puisque nous signerons le 13eme temps sur cette portion.

Enfin on attaque la descente et on se dit qu’on va pouvoir souffler. Mauvaise estimation ! Descente à toute vitesse en vélo sous la pluie, on est transi de froid en quelques minutes malgré nos vestes imperméables.      Les gants résistent mal à l’eau et les doigts sont tellement froids qu’il est difficile de freiner. Les muscles sont au repos, mais on déguste vraiment et moralement c’est très dur avec la fatigue qui s’accumule. On apprendra plus tard que les médecins ont du intervenir dans cette descente pour des cas d’hypothermie et on est bien content d’avoir emporté de quoi se couvrir. Au bout de la descente on arrive au dernier check point, pas d’arrêt chrono. On fait une halte éclair avant de repartir vers les 10 derniers kilomètres.  « Vous en faites pas, c’est plus que du plat ! »

Le plat du pays basque on a appris à le connaitre ! Ca signifie en fait 200m de D+ et autant de D- et en fin de journée ça fait mal aux cuisses sur le vélo… L’avantage c’est qu’on a plus froid, et en progressant toujours en relai on tient un bon rythme. Mais les prises de relai deviennent de plus en plus courtes avec les jambes qui brulent plus à chaque fois. Finalement on arrive à St-Jean-Pied-de-Port où nous attend une belle surprise. L’arche d’arrivée est située en haut d’une dernière côte de 200m, avec quelques personnes pour nous encourager. Les jambes ne tiennent plus le coup pour pousser notre partenaire et elle est obligée de descendre du vélo. Des photographes et du public étant placé à l’arrivé,  porté par l’esprit de la course je descends de vélo et prend le sien pour courir en poussant les deux pendant qu’elle court seule. Je finis de m’allumer les jambes dans ce dernier effort pour gagner 5 secondes biens inutiles mais en passant la ligne on est bien fier de tout donner. Résultat de cet élan de bravoure, on a eu droit à une interview et à un article sur nous dans Sud Ouest. Ca valait le coup !

Malgré les conditions difficiles et la longueur de la journée on est bien content de ce qu’on a fait puisqu’on a une fois de plus gagné des places au classement, finissant 25eme de la journée et passant du même coup au 25eme rang du classement général. Une douche (froide…) puis un massage, le moral est vraiment bon. On est arrivé tôt et on a le temps de monter la tente tranquillement tout en dévalisant le buffet en attendant le repas. On a passé le cap de la moitié de la course et jusque là ça va. La soirée passe comme d’habitude et on part se coucher à 10h en se disant que ça allait aller de mieux en mieux maintenant et passer tout seul. L’avenir prouvera le contraire…

 

Jour 4

 

 

Ce matin c’est à nouveau départ échelonné mais en sens inverse du classement général. Il faudra donc s’attendre à se faire doubler par des bolides lancés à toute allure sans pour autant se miner le moral. Moral qui est assez bas au matin car j’ai toujours mon problème de frilosité aigu au sortir du sac de couchage. Malgré tout on commence à prendre le rythme, on avale quelques petites choses, on range le matériel et on récupère les vélos pour 12 km de plat basque…

 

Contrairement à la veille, le soleil fait rapidement son apparition au dessus des montagnes et on se réchauffe rapidement. Cette première portion de course passe relativement bien et nous ne sommes pas rattrapés pour l’instant. En 40 minutes nous atteignons le premier check point où nous n’avons pas le droit à un arrêt chrono. Nous prenons tout de même le temps de faire le plein d’eau avant de nous lancer dans la plus grande portion sans ravitaillement du raid. Les crêtes d’Iparla.

 

15km, 1000m de D+ et autant de D-, les secouristes ayant bien pris soin de nous préciser qu’une fois au sommet il était impossible d’intervenir autrement qu’en hélicoptère. Très rassurant… Nous nous élançons dans la montée avec beaucoup d’autres équipes, formant une file indienne d’une vingtaine de personnes. Le rythme est très rapide et assez vite des équipes nous lâchent. Nous aurons néanmoins le plaisir de les retrouver quelques minutes plus tard alors qu’ils rebroussent chemin… Une erreur d’orientation et près d’un kilomètre parcouru en supplément pour tout ce petit groupe, à ce moment on est content de ne pas avoir été tout devant…

 

Malheureusement, de retour sur le bon chemin la pente est encore plus raide. Nous nous relayons pour pousser notre partenaire et marchons à un bon rythme quand les premiers du classement général nous doublent en courant ! Nous ne les reverrons plus… Plusieurs équipes suivent et c’est assez dur de rester motivés. Heureusement le paysage est là pour nous aider et en y pensant bien, assez peu d’équipes nous ont doublés pour l’instant.

 

Après une bonne dose d’efforts nous arrivons sur les crêtes, à cheval entre la France et l’Espagne. Derrière nous se dressent les Pyrénées d’où nous venons et au loin on aperçoit l’océan, objectif final du raid. Quelques rapaces planent au dessus de nos têtes alors qu’on s’élance sur ce chemin sinueux et escarpé. Hors de question de dépasser ici. De toute manière mieux vaut prendre le temps d’admirer le paysage.

 

 

Ce petit bonheur passera assez vite car ça monte toujours beaucoup. Il y a de nombreux rocher qui oblige à faire travailler les cuisses un peu trop à mon goût. Le terrain devient suffisamment technique pour qu’il soit compliqué de rester proche derrière notre fille pour la pousser. Plusieurs fois nous faisons des petites glissades et le cerveau c’est mis en mode OFF. Les yeux fixés devant moi, j’avance machinalement sans penser à rien, même plus à la fatigue.

 

Après plusieurs faux espoirs nous passons enfin un sommet. Devant nous le chemin repart à plat et nous pouvons recommencer à courir un peu. Nous croisons des chevaux en liberté, ce que je trouve magnifique, et nous courrons à un bon rythme, suspendu entre ciel et terre. Bien vite ça recommence à descendre et on doit se remettre à marcher pour ne pas tomber entre tous ces rochers. On sait également que ce n’est pas la descente finale et que ça va remonter. Quelques minutes plus tard on reprend notre marche vers le haut. Plusieurs montées et descentes s’enchaînent ainsi, achevant nos dernières forces sur quelques kilomètres.

 

 

 

 

C’est à ce moment que je réalise qu’on se rapproche vraiment de la fin du raid, qu’on a déjà accomplie beaucoup de route et que, au bout de nous même, nous étions toujours encore en train d’avancer, en train de lutter de toutes nos forces dans ce décor de rêve. Je vois mes trois coéquipiers devant moi, concentrés sur leur effort, et je suis tellement fier de ce que l’on fait que les larmes me viennent presque aux yeux. Enfin nous apercevons au loin deux contrôleurs au sommet d’une bosse, synonyme de la vraie descente qui va commencer derrière eux.

Retrouvant un peu de vitalité, nous courrons quand le terrain le permet, rattrapant ainsi quelques personnes. Nous croisons des randonneurs en train de faire le chemin inverse et qui nous encourage alors que nous dévalons la pente. Nous devons néanmoins ralentir de nombreuses fois pour descendre entre des rochers. Par moment c’est presque de l’escalade et on je me dis qu’il ne faut pas baisser notre vigilance maintenant après 4 jours de courses. Une blessure ici serait terrible.

 

Quelques centaines de mètres plus bas, le danger que j’entrevoyais à finis par trouver une victime. Une pierre mal intentionnée a fait une prise de judo à la cheville d’une concurrente. Nous arrivons les premiers au niveau de cette équipe à l’arrêt qui est en train d’appeler la direction de la course. Ils n’ont pas de matériel de soin sur eux et nous nous arrêtons donc pour les aider. Afin de ne pas trop nous pénaliser nous nous séparons en deux groupes de deux. Les deux plus fatigués continuent à descendre pendant que moi et mon partenaire tentons tant bien que mal de faire un strapping efficace à cette demoiselle dont la détresse fait mal au cœur.

 

Cinq minutes plus tard, ayant fait notre possible, nous repartons à la poursuite de nos équipiers. Plusieurs équipes sont passés pendant ce temps, sans s’arrêter car ne pouvant rien faire de plus. Nous apprendrons plus tard que les secours n’ont pas pu monter aussi haut même en quad, et que porté par ses équipiers et par les caméramen montés jusque là qu’elle fera les 2 kilomètres la séparant des secours. De notre coté nous avions à cœur de rattraper le temps perdu et nous nous sommes lancés dans cette descente comme des morts de faim. Ventre à terre nous avons rattrapé un à un tous les concurrents qui nous avaient dépassés, et à la limite de la rupture nous avons fini par rejoindre nos deux équipiers en une dizaine de minutes. Ils avaient finis par lever le pied et quelques concurrents les avaient également doublés.

 

Encore en pleine euphorie de cette descente, et content d’être à nouveau tous les quatre, nous avons continué de plus belle, maîtrisant parfaitement le terrain. Nous avons rattrapé toutes les équipes qui nous avaient doublés et rapidement nous avons vu au loin le village où nous attendait le second check point. La descente étant à présent assez facile, nous étions toujours en train de courir lorsque nous avons été bloqués par… un troupeau de moutons ! En train d’être mené dans un pré, ils empruntaient le même chemin que nous, nous immobilisants de manière fort drôle pendant une petite minute. Nous somme repartis de plus belle derrière eux, atteignant enfin le ravitaillement à une très bonne allure.

 

Ici, quel bonheur, nous avons droit à deux heures d’arrêt chrono. En effet c'est aujourd'hui la journée « VIP » : les DRH des entreprises partenaires du raid viennent rencontrer les concurrents, et comme c’est aux qui financent tout ça on a droit à un régime de faveur. L'accueil est soigné, avec un buffet froid à base de jambon de pays et de salades. Ce qui change des sempiternels quatre-quarts, quartiers d'orange et autre fruit sec, mais n'est pas forcément très digeste. Tant pis, c’est trop tentant et on prend le risque de s’alourdir un peu.

Pendant ces deux heures d’arrêt il nous faut aussi participer à 4 jeux de force basque, ceux-ci amenant des bonifications en temps. Pour commencer, un match de tir à la corde contre l’équipe arrivée juste après nous, et que nous vaincrons à grand coup de reins bien en rythme. Viennent ensuite trois épreuves individuelles pour lesquelles nous devons désigner un membre à chaque fois. Un jeu de quilles basque avec une énorme boule de bois nous rapportera un peu de temps. Ensuite, un jeu très adapté au physique des coureurs de fond, le transport de bidons de lait. Deux bidons de 36 kg chacun doivent être pris dans chaque main pour parcourir la plus grande distance possible. C’est l’homme le plus chétif (mais qui court le plus vite) de notre équipe qui s’y est collé, et il a réalisé un aller retour et demi sur la distance imposé, le maximum de temps étant attribué pour deux allers retours. Une belle performance.

 

 

Pour ma part j’ai participé à un jeu qui compte parmi les plus intellectuels, le lever d’enclume ! Une enclume de 18 kilos devait être montés le plus de fois possible au dessus de la tête en 30 secondes. J’ai fait un peu plus de 20 levées, nous rapportant ainsi les trois quarts de la bonification maximale. J’ai par contre beaucoup travaillé avec le dos dans ces 30 secondes, et je le payerai plus tard… Restait alors à profiter du soleil, des autres concurrents et de l’ambiance mise par la fanfare sur cette magnifique place de Bidarray. Un vrai régal !

 

Quand vient le moment de repartir, j’ai le bas du dos endolori et les bras un peu vidés alors que nous attaquons une descente de 12km en kayak biplace sur la Nive. Ayant déjà pratiqué un minimum nous passons les quelques rapides sans problème pour une épreuve vraiment très plaisante. Nos bras ne nous permettent pas d’aller très vite, mais porté par le courant cette portion est vite avalée et après une petite heure de ballade sur l’eau, nous quittons la rivière pour une dernière portion de VTT.

 

 

Il reste alors 6km de ce plat basque dont nous apprécions tant les bosses. Nos jambes vont bien et nous jetons nos dernières forces dans la bataille, toujours avec notre même tactique de relais et nous arrivons rapidement à Espelette, l’arrivée. Nous avons été accueillis par une troupe de danseuses folkloriques, et ceux qui en avaient encore la force en pu faire quelques pas traditionnels basques. A cette occasion il est bon de rappeler à quel point les gens de cette région ont été accueillants. Même lorsque nous étions par moment côte à côte en train de se pousser en vélo sur la route, les voitures n’ont pas manifestés d’agacement. Bien au contraire, ils baissaient volontiers leurs vitres pour nous encourager, et ça fait chaud au cœur. Chapeau bas…

 

 

Après ce superbe accueil dans la ville du célèbre piment, une deuxième surprise nous attendait avec le classement. Malgré la difficulté de la journée nous finissons 14eme de la journée ! Cette performance est complètement inattendue pour nous et montre que nous avons probablement mieux géré notre effort dans la durée que les autres équipes. Nous avons également beaucoup progressé au niveau de la stratégie d’équipe et cela paye avec encore deux places gagnées au classement général.

 

Je file me faire masser le dos de plus en plus douloureux et je sais déjà que je payerai ma fougue à l’enclume demain. Enfin après le repas nous filons rapidement nous coucher car pour le dernier jour le départ ce fait de nuit, à 3h30. Réveil programmé à 2h30, il est 22h et la nuit sera courte alors que nous tombons tous de fatigue…

 

Jour 5

  

4h30 de sommeil seulement étaient donc prévues. Mais la fanfare de Centrale Paris, très professionnelle, a veillé à ce que personne ne manque le départ ce dernier jour en éveillant tout le campement par de beaux sons cuivrés à 2h… On ne s’est même pas rendu compte qu’on a dormi, il fait froid et pour améliorer la situation, une pluie fine accompagnée de vent tombe sur les tentes. C’est véritablement une armée de zombies équipés de lampes frontales qui est en train de se préparer à prendre le départ. Ce sera un départ groupé en run and bike pour 18km et 400m de D+, ça promet un joyeux bordel jusqu’au levé du soleil…

 

Un de mes coéquipier se sent mal et va vomir avant le départ, les organismes commencent à être à bout. Equipées de petit bracelet fluorescent nous nous plaçons sur la ligne en se donnant comme consigne de na jamais déposer un vélo sans avoir prévenu la personne qui va le récupérer. Ce fut une très bonne idée étant donné le nombre de VTT qui ont été égaré par des équipes sur le parcours… Le coup de pistolet est donné et la caravane démarre avec difficulté dans cette atmosphère humide et froide.

 

 

Cette portion de run and bike va se révéler extrêmement dure. Pas par sa nature, mais bien à cause des 4 jours d’épreuves que nous venons de passer, du manque de sommeil accumulé, de la pluie et de l’obscurité. Un véritable calvaire. Bien vite de belles pentes nous obligent à être tous les 4 à pied, et mon dos me fait souffrir le martyre quand je dois pousser le vélo. Les descentes qui devraient nous permettre de gagner du temps sont en fait très dangereuse à la faible lueur de ma frontale. C’est décidé, je vais investir dans une lampe halogène et un groupe électrogène… Après une heure de course nous n’avons pas réussi à nous réchauffer et un amas de concurrent se forme alors que nous avons un premier doute sur les indications du road book…

 

Nous repartons quelques minutes plus tard sans nous tromper de chemin, mais on continue d’en baver… A 5h nous cassons une chaîne. N’ayant pas très envie de la réparer sous la pluie et dans le noir, nous décidons de continuer en poussant le vélo. Le premier check point doit être proche et on à déjà de toute manière deux personnes à pied alors… On profite bien sur des descentes pour remonter sur le vélo, mais on va devoir pousser beaucoup car le check point est en fait encore loin. Vers 5h30, nouvelle hésitation sur la route à prendre. Nous partons dans plusieurs directions et les équipes font des allers retours en vain. Il fait toujours aussi froid et pas le moindre signe du soleil. Sans la perspective de l’arrivée finale quelque part au fond du crâne nous aurions sûrement craqué…

 

Après quelques recherches infructueuses une voiture de l’organisation finit par pointer le bout de son nez. Plusieurs équipes se sont perdues et ils réorientent les concurrents vers le parcours. Demi tour, il faut remonter les 500 derniers mètres que nous venions de descendre et repartir. Moralement c’est dur, et on ne voit toujours pas le bout de cette épreuve de run and bike. Nous arriverons finalement au check point à 6h30 avec les premières lueurs de l’aube. Les équipes arrivent dans le désordre et nous nous jetons sur du café. Notre autre coéquipier masculin est maintenant pris de maux de ventre et une première halte toilette s’impose pour lui.

 

Les dix minutes d’arrêt chrono sont écoulées et nous prenons quand même encore du temps avant de repartir. La motivation est au plus bas pour se lancer à pied cette fois ci dans l’ascension de la Rhune, 12 km et 800m de D+ et – nous attendant. On repart donc en marchant, en emportant tous un gobelet de café. En route nous discutons avec une autre équipe qui comme nous n’a plus la motivation pour accélérer et veut seulement aller au bout. Buvant nos cafés, on plaisante sur cette attitude très sportive qui montre bien qu’on arrive au bout du raid.

 

Quelques minutes plus tard, le soleil s’étant maintenant levé et la pluie ayant cessé, l’énergie va revenir par le biais de notre féminine. Après deux jours passé à la pousser et l’épreuve de run and bike ou nous l’avons beaucoup aidé, c’était à notre tour de craquer et à elle d’imposer le rythme. Fort heureusement pour notre résultat elle marche à un très bon rythme et nous luttons pour la suivre, l’esprit sportif reprenant petit à petit le dessus sur la morosité.

 

Au milieu de l’ascension nous arrivons au niveau d’un contrôleur où il est possible de se rajouter une boucle supplémentaire pour monter tout au sommet de la Rhune. Cette partie n’est pas obligatoire puisqu’elle rallonge le parcours, mais elle donne lieu à 50 minutes de bonification. Vu notre état il nous faudrait sûrement plus de 50 minutes pour parcourir cette boucle et nous voulons juste en finir. Dans tous les cas il y avait une barrière horaire pour s’élancer dans cette partie et nous l’avions dépassé de 15 minutes. Nous avons donc continué sur l’itinéraire normal.

 

Quelques minutes plus tard nous passions la ligne de crête pour redescendre sur l’autre versant. L’orientation se fait ici à la carte, excepté les indications des deux contrôleurs croisés. Nous continuons donc avec une équipe que nous avons rattrapée et qui se débrouille apparemment bien pour trouver leur chemin. Malheureusement nous devons les laisser partir au bout de deux minutes, les troubles gastriques de notre partenaire nous imposant une nouvelle halte. La journée nous pousse vraiment à bout, on n’est plus dans le coup mentalement et on veut en finir. A peine repartie nous devons nous arrêter car nous avons de gros doutes sur l’orientation à prendre, les indications du contrôleur semblant maintenant assez lointaine… C’est une grande déception de voir le temps que les éléments nous font perdre après les efforts consentis dans la montée…

 

Au bout de 5 minutes notre choix est fait. On repart vers le check point à bonne allure dans cette descente ou nous pouvons enfin courir correctement. Nous n’aurons plus de problème d’orientation et nous ne verrons pas la moindre équipe, ce qui laisse présager qu’on a perdu beaucoup de temps sur tous ceux qui étaient devant. Enfin aux environs de 9h nous arrivons au check point. Aucune équipe n’y est arrêtée et le staff nous acclame. Epuisés, nous ne comprenons pas ce qui se passe. « Vous êtes troisième !!! » Quoi ??

 

C’est bien vrai ! Nous pouvons remercier les faiblesses d’estomac de notre coéquipier qui nous ont empêchés de suivre l’autre équipe et qui nous ont obligés de nous réorienter. En effet quasiment toutes les équipes se sont trompées et sont redescendus de la montagne dans la mauvaise direction, filant tout droit en Espagne et perdant un temps précieux avant d’être réorienté par le staff. D’un coup le moral quitte le fond de nos chaussettes pour s’élever au dessus des nuages. Vite on se ravitaille et on en finit avec ce Raid, en donnant tout ce qui nous reste !

 

Avant de repartir nous voyons aussi que plusieurs concurrents ont abandonné après l’épreuve de run and bike. Epuisés ils attendent maintenant assis contre un mur enserré dans des couvertures de survie et reprenant des forces. Nous allons au bout et finir la tête haute, pour nous et pour tout ceux qui n’ont pas pu. On reprend les vélos et on repart pour 12 km un peu bossus en direction de St Jean de Luz. Grand merci au staff qui a réparé la chaîne de vélo cassé pendant qu’on était en train de crapahuter.

 

Puisant dans nos dernières réserves on roule à un bon rythme en reprenant nos relais habituels. Cette troisième position est une bénédiction pour nous. On sait que neuf équipes ont fait le choix de parcourir la boucle supplémentaire, et certains peuvent donc nous passer devant au temps. Mais deux de ces équipes sont déjà devant, ce qui nous assure au moins la dixième place si nous ne sommes pas rattrapés ! Alors on fonce et cette portion sera bouclée en 55 minutes sans avoir vu personne.

 

La baie de St Jean de Luz s’étend maintenant devant nous et nous avons dix minutes d’arrêt chrono avant de nous lancer dans la dernière épreuve, une course d’orientation maritime et kayak de mer. Nous avons une heure pour rejoindre la ligne d’arrivée sur la plage et il y’a 3 balises en tout. Nous prenons la première qui se trouve sur notre chemin à la sortie du port, puis nous décidons de laisser tomber la plus éloigné pour s’assurer de rentrer dans les temps. La navigation est difficile car il y a beaucoup de houles, mais nous sommes encouragés par les médecins qui sont là en bateau à moteur. Ca fait vraiment plaisir.

 

Nous arrivons à la seconde balise mais impossible de la trouver. Nous allons voir plusieurs bouées et nous les tirons même hors de l’eau pour regarder si la balise ne serait pas attachée à la chaîne. Rien… Tant pis, on arrive au bout de l’heure impartie et on ne veut pas prendre de pénalité alors direction l’arche d’arrivée. Une autre équipe arrive avant nous mais peu importe, ils sont entrés dans l’eau après nous et ne nous reprennent de toute manière pas de temps sur cette partie. Nous apprendrons plus tard que la balise était bien accroché à la chaîne sous une bouée, mais que la houle a du la détacher car seules les deux premières équipes l’ont trouvé.

 

 

Alors que nous approchons de la plage les vagues commencent à former des rouleaux et ce qui doit arriver arrive… Nous sommes submergés et trempés par cette eau gelé. Pas grave. La ligne est devant nous, nous avons bien géré le temps sur la course d’orientation et il nous reste plus de 5 minutes pour faire les 10 mètres qui nous séparent de la fin du raid en portant nos embarcations. L’émotion est trop forte, ça y’est, sous les applaudissements du staff et de quelques supporters, nous venons d’en finir. Nous tombons dans les bras les uns des autres, c’est un instant magique. Les images de ce qu’on a traversé défilent devant nos yeux et alors qu’on s’embrasse on n’est pas loin de tous fondre en larme.

 

L’eau et le vent nous frigorifiant nous revenons vite sur terre et partons nous changer avant de savourer cette joie un café bien chaud à la main. Il fait maintenant très beau et nous n’avons plus qu’à attendre la cérémonie et le classement final ainsi qu’un bon repas. Nous avons amélioré notre performance chaque jour, nous sommes allés au bout ensemble, sans blessure et en donnant tout ce qu’on avait pour cette fin en apothéose. C’est parfait !

 

Quelques temps après, le classement amènera une petit déception. Une partie de la course à pied du jour est court-circuité car ce sont les indications d’un contrôleur qui ont induit les équipes en erreur et les ont fait partir en Espagne. Nous, nous nous en sommes sortis mais nous ne figurerons tout de même pas dans le top 10 du jour. Pas grave ! On n’est pas venue pour le classement ! Que ce soit sur le plan humain ou sportif, ce raid est une réussite pour nous d’un bout à l’autre, alors on ne va pas bouder notre plaisir pour quelques lignes sur une feuille avec le nom des équipes… 15eme du jour, c’est quand même notre meilleur résultat et on finit 21eme au général en 26 heures et 21 minutes, avec deux équipes en quatre minutes devant nous.

 

Vient alors la cérémonie de fin avec ces remerciements pour le staff et pour les concurrents. Ils ont tous été fantastique et nous avons vécus des moments inoubliables. Les applaudissements n’en finissent plus et nous sommes tous debout. L’émotion est trop forte et une petite larme pointe au coin de mon œil. En regardant autour de moi je vois que certains sont littéralement en pleurs. Bravo à tous et merci, merci pour tout !

 

Le soir nous faisons un dernier repas avec tout le staff et les coureurs qui sont restés. L’ambiance est relâchée, cacahuète, bière et pizza réveillent des sensations magiques au fond de nous. Nous ne ferons pas long feu et nous passerons les deux jours qui suivent à dormir, sous la tente, dans le train, dans un lit, partout où c’est possible. Au réveil on regarde en arrière cette aventure qui est passé au final bien vite et déjà, on a envie de repartir…

 

3 commentaires

Commentaire de hellaumax posté le 02-09-2008 à 21:19:00

Waouh! Depuis 4 jours sur Kikourou et déjà un récit très haut de gamme!
Bienvenue et surtout bravo pour ce récit!

Commentaire de langevine posté le 03-09-2008 à 10:35:00

je n'aurais pas dit mieux!! bienvenue sur kikourou et continue à nous faire partager tes aventures!!

Commentaire de Lucien posté le 10-06-2009 à 21:45:00

Oui, je sais je suis en retard de lecture mais je voulais savoir qui tu était car tu vas participer aux Crêtes Vosgiennes 2009. Bravo pour ce récit que j' ai lu jusqu'au bout car très instructif et incroyabble. Vous avez un énorme courage et je vous tire mon chapeau, votre coéquipière est merveilleuse de bravoure. Très belles photos, je me suis bien évadé, merci. Salut et bonne Crêtes... si on ne se voit pas (on sera très nombreux).

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