Récit de la course : BRM 1000 - Le 1000 du Sud 2020, par poucet

L'auteur : poucet

La course : BRM 1000 - Le 1000 du Sud

Date : 7/9/2020

Lieu : Cotignac (Var)

Affichage : 1851 vues

Distance : 1000km

Objectif : Terminer

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1000 du Sud, le vélo vraiment autrement

 

1000 du Sud, le vélo vraiment autrement


L'aventure à vélo c'est tendance, le bikepacking s'est imposé dans le vocabulaire des cyclos au long cours, du touriste contemplatif au champion en quête de nouvelles sensations. La nouvelle vague fait preuve d'imagination pour dépoussiérer les vieilles recettes ou explorer les destinations exotiques, s'affichant sur papier glacé dans une calendrier en ébullition, faisant flamber au passage la CB des nouveaux adeptes. Chacun son truc.

Pas de barnum à Cotignac, pas de chrono et encore moins de live. Pour la modique somme de 30€ Provence Randonneurs offre une organisation spartiate qui assure l'essentiel : un parcours de qualité fignolé dans les moindres détails, ajusté jusque dans les derniers jours en fonction des travaux déclarés ici ou là. Le 1000 du Sud est avant tout un voyage intérieur, libre a chacun de le partager sur le vélo pour quelques kilomètres ou peu plus, ou bien de prendre le temps d’alimenter un écho virtuel  à destination des amis plantés devant leurs écrans. Dix ans déjà que cette épreuve de caractère régale les cyclos adeptes de défis musclés en autonomie, se renouvelant à chaque édition pour offrir d’inédites grimpettes sur les petites routes secrètes de Provence et des provinces voisines, s'aventurant parfois jusqu'au Nord de l'Italie. Sans fanfaronnade médiatique, Sophie Matter a forgé une randonnée à son image, envoûtante et redoutable à la fois, tout simplement authentique.

La réputation de cette épreuve emblématique s'est propagée bien au delà de nos frontières, rassemblant à chaque édition les roule-toujours de toute l'Europe, parfois même d'outre atlantique ou des antipodes. Les farouches bourlingueurs allemands en sont friands et sont généralement majoritaires au départ. Sauf cette année ou ce sacré virus a causé de nombreux désistements.
Depuis 2017 le 1000 du Sud n'est plus un BRM classique, Sophie ayant généreusement allongé le délais à 100h … Dans le même temps le dénivelle s'est envolé et quelques chemins se sont incrustés sur le parcours, suivant la tendance gravel  en vogue. Le challenge n'en est donc pas moins compliqué, bien au contraire. Après avoir bouclé 4 éditions « classiques » je me suis loupé avec cette nouvelle formule lors de ma dernière venue en 2018, vaincu mentalement par un plan de route trop ambitieux, au grand dam de Sophie qui me pensait plus téméraire … Au fond de moi j'avais une petite revanche a prendre. Le parcours 100% français et sans haute montagne de ce onzième opus m’inspirait. D'autant que quelques amis alsaciens étaient motivés pour faire le voyage en Provence ensemble. Avec Christophe Wolff, Régis Charlie Labéo, Laulau Bretzel Man et Alex Cyclotrailer la Dream Team Alsace avait belle allure !!!!

Nous avions réserves deux nuits pour l'aller et le retour à la Maison du Bonheur en plein cœur du village de Cotignac. De belles chambres joliment décorées dans un cadre charmant, une option qui s'est finalement révélé peu pratique, nos hôtes n'acceptant pas nos bagages en consigne le temps de la randonnée et se montrant plutôt crispés par la gestion des vélos … Ceci dit nous étions a deux pas de la grande place aux nombreuses terrasses et nous avons trouves une bonne table pour dîner, ou étaient déjà installés le duo normand Pascal Bachelard et Stéphane Gibbon. Une bonne partie de la troupe était déjà partie durant l'après midi. Pour nous tous les départ était fixé au lendemain. Il était temps car voilà déjà une page de balabla et je ne suis toujours pas parti …

Mardi matin, après avoir pris le temps d'un copieux petit déjeuner je rejoins le camping Les Pouverels un peu avant 8h ou les grands sourires de Bernard et Sophie nous accueillent. Tout est calme, paisible. La nature se réveille, l'instant respire la sérénité … Les randonneurs se présentent au compte goutte. Mais oui, je ne rêve pas, nous partons bien pour faire 1000 km à vélo. Les formalités sont vite réglées, un petit coup de tampon sur le carton et me voilà parti pour l'aventure.
J'aurai grand plaisir a partager ces premiers kilomètres avec Stéphane, le temps d'un papotage live bien plus complet que nos habituels échanges virtuels. Notre génial inventeur de la Diagonale du Vide a plein de projets dans sa musette, un enthousiasme inébranlable pour créer des parcours bucoliques et tranquilles. Il a la soquette légère aussi le Stéphane, je ne cherche pas a m'accrocher lorsque se présentent les premières pentes sérieuses. Je respire la Provence a plein poumons, m'enivre des vues sur le Lac de Ste Croix et m'engage dans une longue et intense dégustation sur la Corniche Sublime qui surplombe les extraordinaires Gorges du Verdon.

Fort de mes déboires de 2018 je m'étais fait un plan de route plus prudent. Mais ces 50 premiers kilomètres redoutables m'ont déjà rappelés qu'au MDS on rentre décidément dans une autre dimension … Au Tunnel de Fayet, second contrôle, j'étais à peine dans mes prévisions. La suite était un peu plus digeste, les petites routes se faufilant dans la garrigue vers les petites villages typiques de Trigance et Chateauvieux (Contrôle 3 km 86) . Un peu plus loin le parcours emprunte la Route Napoléon sur quelques kilomètres, j'y avais repéré et noté une boulangerie au Logis du Pin. Un bon plan, sauf que j'étais déjà bien à la bourre par rapport à mes estimations et que j'ai du taillé dans le temps de repos pour rattraper mon retard. J'étais tout juste installé sur la terrasse avec mon sandwich coca lorsque j'ai vu est passer notre Christophe parti 1h30 après moi, bien posé sur les prolongateurs avec un sourire jusqu'au oreilles, passer là en mode avion … Quelques minutes plus tard c'est Alex puis Régis qui s'installaient également pour se sustenter. Il manquait le 5ème larron, les copains m'ont expliqués appris que Laulau avait du faire demi tour s’apercevant qu'il avait égaré sa CB au camping ….

Sur un tel parcours le rendement de mon petit diesel m'interdit de musarder aux terrasses. Je suis donc reparti le premier, a mon rythme vers la superbe Clue de St Auban que j'avais découvert il y a quelques années à l'occasion d'un précédent MDS. La surprise du jour allait venir a la sortie de Brianconnet avec le final du petit mais redoutable Col du Buis. Pas décu d'ailleurs de l'aborder par là parce que de l'autre coté ce doit être un sacré chantier !!! La fin de journée était relativement tranquille par le Col de Felines (contrôle n°4 km 128), la dégringolade en lacet sur Entrevaux et la paisible remontée vers la Colle Saint Michel (contrôle n°5 km 166). Il était a peine 19h, satisfait d'être enfin en phase avec le plan de route je me disais qu'il devait être possible de rejoindre Barreme 52 km plus loin pour un dîner en règle avant d'aborder la nuit. J'avais noté quelques adresses préalablement repérés avec l'assistance de Mr Google.

Me voilà donc reparti en pleine confiance sur un profil plutôt descendant, snobant une petite épicerie de village du coté de Thorame ou s'étaient posés quelques compagnons d'aventure pour aller chercher le Contrôle suivant au Col du Defens (Contrôle n°6, km 195) à la tombée de la nuit. La température était encore clémente, j'ai simplement enfilé le gilet jaune et les manchettes pour reprendre la longue descente sur Barreme. La nuit était définitivement tombée lorsque que des lampions clignotants sont apparus au loin … Accident ou fiesta ? Un camion pizza s'était posé sur la gauche de la chaussée, un duo allemand s’empiffrait, debout, apparemment pas gêné par le petit vent frais qui s'était invité dans la vallée. L'estomac implorait l'arrêt d'urgence mais la raison me poussait a poursuivre, le type n'avait plus de coca, plus rien a siroter d'ailleurs et j'avais trop peur de prendre froid. Et puis dans ma tête j'avais prévu un vrai dîner, a table, au chaud.

Mardi soir 21h , et voilà enfin le panneau Barrême, un gros bourg ou j'avais noté 4 endroits possibles pour se restaurer. Mais là c'est la scoumoune totale, tout est fermé. A la dernière auberge l'équipe en congé festoie sur la terrasse, m'indique simplement la direction du camping ou il y aurait peut être une possibilité … Je sors donc de la trace pour tenter le coup, mais la encore les grilles sont fermées, cadenassées. Oups, l'affaire se présente mal. Dignes n'est qu'a un peu plus de 20 bornes et je n'ai pas d'autre choix de poursuivre ma route en espérant y trouver une gargote nocturne. Mais avant cela il faut se coltiner le coriace Col du Corobin . Peu avant le sommet j'ai reconnu une voie familière, celle de Laulau Bretzel revenu du diable vauvert après bien des déboires en début de parcours. Le champion semble facile, je le retrouve un peu plus tard au col (Contrôle n°7, km 232). Il me dépanne gentiment en partageant son pain bagna et repars promptement, je l’imagine à la chasse au grand Christophe.

Je ne suis pas plus veinard à Dignes. En suivant la trace je tombe sur une grande terrasse très animée. J'interpelle le serveur masqué qui désolé me répond qu'il n'a plus rien a manger et qu'a cette heure ça risque d'être compliqué dans la ville … Glups. Je dois faire un gros effort pour me remobiliser mentalement. Je sais qu'il n'y aura aucune possibilité de ravitaillement avant le lendemain matin à Gap, 120 km plus loin avec l’épouvantail Colombis et quelques babioles !!! La température est bien tombée maintenant mais je sais que ça va grimper un long moment et je préfère ne pas me couvrir plus. J'enfourne machinalement quelques victuailles piochées dans ma sacoche. Je sature un peu du gâteau de semoule mais il faut bien alimenter la chaudière. C'est ainsi que je m'enfonce a nouveau dans la nuit vers la Clue de Barles. Si j'ai bien ressenti la présence des immenses falaises de part et d'autre, je n'ai rien vu de ces fameuses gorges encaissées. Il faudra que j'y revienne. Par contre j'ai pu emprunter la route en travaux sans avoir a déchausser ni a pousser le vélo, au contraire des copains qui sont passés de jour.

Le Col du Fanget (Contrôle n°8, km 287) nous remonte jusqu'à 1459 m ou il fait résolument froid. J'enfile la totale, jambières, sur-chaussures, buff, coupe vent x 2, gant pour attaquer la longue plongée vers le Lac de Serre Ponçon. Alex et Regis me reprennent dans le bas de la descente et m’apprennent que Laulau à des soucis de santé et qu'il va bâcher en bas. Je n'en crois pas mes oreilles, ben merde alors … Il est un peu plus de 4h quand je passes le panneau Espinasse, je pense y retrouver le pauvre Laulau avec se vessie en déconfiture. Mais il a déjà été récupéré par un ami (un autre Christophe)) qui habite dans le coin, direction Embrun pour un retour en train vers l'Alsace, moral forcement en berne.

Je décide de me poser là une petite heure, il est trop tôt pour attaquer le Colombis, le plan c'est d'arriver en haut à l'heure ou le soleil se lève sur le Lac. J'avise un abri bus, m'introduit tout habillé dans mon bivy et m'allonge sur le banc qui doit faire 30 cm de profondeur … pas bouger sinon tomber … Alex et Régis sont arrêtés à peine 500 m plus bas. C'est bien la première fois que j'utilise ce bivy, j'ai toujours eu peur de le déballer rien qu'en pensant a la galère du repliage. Finalement j'ai du somnoler 40' et j'étais réveillé juste avant la sonnerie du portable. Effectivement ce fut une galère pour replier le machin et le bourrer dans sa petite housse. Dix minute plus tard j'étais a nouveau sur le vélo, apercevant les feux arrière des compères déjà partis à l'assaut de ce fameux Colombis.

Nous en avions eu l'écho par Bridou qui avait réalisé le parcours en solo quelques semaines plus tôt. La première rampe raide et linéaire nous met immédiatement dans l'ambiance. En levant les yeux les lumières du petit village de Theus semblent nous narguer. Il va falloir être patient … le village endormi nous accorde un semblant de répit avant que des pourcentages de folies s’empilent à nouveau au gré des lacets. J'ai la surprise de rattraper notre Régis bien mal en point mais qui puise tout au fond de son mental pour rester sur le vélo. Puis nous traversons plusieurs zones de travaux ou le bitume a disparu sous le gravier et la terre retournée. Par miracle je réussi a passer l'obstacle, bien calé sur la selle. Je devine la piste qu'il nous faudra emprunter dans la descente avant d'aborder le final redoutable. Un randonneur allemand pousse son vélo, un compatriote déjà dans la descente m'encourage au passage, et puis je croise Alex tout sourire qui m'annonce la fin imminente. Costaud le débutant du Val de Villé ...

 

Eole s'est levé en même temps que le jour, ça ventile grave et ça caille. Mais le spectacle qui se découvre sous nos yeux de la journée est conforme a ce que j'imaginais, sublime, récompensant les efforts qu'il nous aura fallu consentir pour se hisser la haut. Je prends quelques minutes pour respirer l'instant, m’imprégner de ce décor magique avant d'aller retrouver Super Alex qui s’était posé a l'abri dans une bergerie un peu plus bas.

Le Mont Colombis (Contrôle 9, km 329) culmine à 1734 m. Gap centre ville 33 km plus loin à 731 m. Logiquement ça devrait glisser tout seul pour aller prendre le petit déjeuner … Mais non, et ce n’était pas une surprise parce que Bridou nous avait alerté. Après être revenu sur nos pas (sur nos roues en fait) il faut d'abord se coltiner la très mauvaise piste qui part en épingle sur la droite vers les prairies pour 4 km de navigation aléatoire entre les cailloux, les rigoles et les ornières. Dans nos discussions préalables personne ne voulait y aller mais aucun des copains ne s'est finalement lancé sur la rallonge d'une dizaine de km qui aurait permis d'éviter le traquenard. Sans réellement pouvoir suivre le rythme du duo Alex / Régis j'étais toujours pas très loin de leur sillage. L'urgence pour tous a ce moment était de rallier la boulangerie la plus proche au plus vite. Après avoir retrouvé le goudron au niveau du village d'Avançon (le bien nommé), il restait encore à gérer quelques menues bosses dont le Col de Tourron (Contrôle n°10, km 350) avant de rentrer enfin dans Gap. Quel choc de se retrouve en un instant au cœur du stress de la ville, du vacarme et d'une intense circulation. Mais les copains étaient tout excités, prêt a partir dans une chasse à la bouffe aléatoire. Je leur ai promis une boulangerie-superette pile poile sur la trace au niveau du dernier rond point à la sortie de ville (repérage préalable bien entendu chez le père Google, ça évite les jardinages inutiles ou l'on perd toujours beaucoup de temps). Et après un ultime raidard en pleine ville la fameuse boulangerie est enfin apparue. Avec la terrasse had hoc … Les copains ont trouves le vendeur pas bien sympa, moi j'ai trouvé les viennoiseries excellentes. J'ai avalé deux grands café et je me suis largement gloutonné pendant que le Régis retrouvait le sourire et le moral.

Vu le retard pris sur mon plan de route j'ai comme d'habitude déguerpi le premier. J'avais dans l'idée de récupérer le temps perdu avec un simple arrêt sandwich au Col du Festre, 35 km plus loin. Mais j'avais tellement fait l'article sur les délicieuses oreilles d’ânes locales que les copains m'ont convaincu de nous retrouver la haut pour une vraie pause déjeuner. Régis prenant le soin de réserver 3 assiettes pour assurer le coup.

A la sortie de la ville une nouvelle trouvaille à Sophie nous permettait d'éviter le premier lacet sur la nationale. Une petite route déserte qui coupe tout droit. Évidemment ça grimpe. On retrouve le trafic ensuite mais le profil est descendant jusqu'à l'embranchement vers le Col du Festre. Ce versant emprunté par le TDF il y a quelques semaines n'est pas très réjouissant, hormis les derniers kilomètres plus bucoliques sur le flanc du Devoluy. Le Col du Festre (Contrôle n°11, km 394) est un incontournable du MDS. Les randonneurs sont toujours les bienvenus à la Maison du Col du Festre. Surprise d'ailleurs puisque nous y retrouvons le grand Christophe avec une petite mine. Il est planté là depuis le petit matin avec l'estomac en déliquescence. Notre champion fini tout de même par repartir pendant que nous dévorons nos assiettes. A table il y a également le jovial Stutz Lorentz, un cyclo d'outre rhin habitué du MDS. D'habitude nos camarades teutons roulent en meute et carburent à la bière. Cette année le brave Stutz évolue en solitaire. Et carbure à la bière !!! Si à vélo je suis à la traîné derrière les jeunots a table je suis largement le plus rapide. Je m'engage donc dans la descente avant l'inséparable duo Alex / Régis après leur avoir indiqué que selon mes repérage le prochain point bouffe possible était un Sherpa situé au Col de la Morte, 76 km plus loin. Selon les indication du père Google la boutique ferme à 19h, il ne va pas falloir traîner en route  … Bonne chance et plus tard les amis.


Le versant nord du Col du Festre est bien plus réjouissant, à l’heure de la digestion cette descente en roue libre est bienvenue  Surprise de voir Stéphane me rattraper peu avant le Lac du Sautet, nous échangeons un moment sur nos péripéties. Évidemment le sujet bouffe s’invite dans la conversation, Stéphane envisage un arrêt à la petite épicerie de Valbonais. Je me souviens de cette adresse pour m’y être déjà ravitaillé et fait tamponner mon carton lors d’une édition précédente, ce pourrait être une alternative car je sens bien que cela risque d’être chaud patates pour le Sherpa à La Morte. Puis ce sont les compères Régis et Alex toujours parfaitement assortis (tenue orange a ce moment là) qui me doublent. Les costauds se sont déjà envolé lorsque je bifurque sur la droite en direction du Parquetout. Sophie a plutôt l’habitude de nous proposer ce col dans l’autre sens, plus court mais aux pourcentages redoutables. Ce versant est très joli, l’ascension par paliers est bien plus confortable, même si quelques rampes sévères se présentent dans le final pour justifier la réputation du Parquetout (Contrôle 12, km 433). D’ailleurs nous avons droit a un petit bonus pas piqué des hannetons puisque le véritable sommet se trouve 300m après le col !!!      

A Valbonais l'épicerie indiquée par Stéphane est fermée, craignant de renouveler la mésaventure de la veille je laisse un message à Alex pour lui demander de me prendre un sandwich à n'importe quoi avant la fermeture du Sherpa du Col de La Morte, et de me le laisser visible dans un coin. Les derniers kilomètres d’ascension sont vraiment difficiles, je vois l'heure défiler, mais l'idée de trouver le sandwich magique me réconforte. Sauf que la station semble déserte … Finalement j'arrive a joindre Alex, les costauds sont attablés à l'Eterlou. A peine installé la serveuse m'amène une énorme assiettes de tagliatelles au saumon, avec un grand coca. L'ambiance est chaleureuse dans ce restau, un type raconte en boucle ces exploits du temps passé avec l'enfant du pays Thierry Claveyrolat, les sourires illuminent les visages, le virus ne semble pas être arrivé jusqu'ici. Est on encore dans le monde d'avant ? Déjà dans celui d'après ? En réalité les proprios se remuent pour faire vivre leur station au présent. Je déguste l'instant … Les pâtes sont délicieuses, pendant que je peine a terminer mon assiette Stéphane termine celles des copains et en commande une dose supplémentaire pour le petit déjeuner du lendemain. Impressionnant le jeune glouton. Le trio a dégoté une chambre d'hôtel à Vizille légèrement excentré du parcours me propose de les accompagner. Je décline, pas vraiment séduit de rallonger la distance. Mais pas l'allemand taciturne installé à la table voisine.

Nous sortons a regret de notre havre de paix, la bruine s'est invité, la nuit n'est plus très loin. Le quatuor me largue des les premiers lacets lourdement gravillonés. A Séchilienne la pluie a cessée, je débâche et j’enchaîne directement avec le Luitel. Celui là c'est un sacré morceau que j'avais découvert il y a deux ans avec Bridou. Pas d'autre choix que de mettre tout a gauche et de prendre son temps. Cette toute est absolument déserte, sur la fin j'encourage un concurrent qui pousse son vélo, lui promettant des kilomètres plus faciles après l'intersection vers Chamrousse (Contrôle 14, km 502) Malheureusement la bruine refait subrepticement son retour et c'est sous l'averse que j'engage la descente sur Grenoble après une opération bâchage intégral. La chaussée est détrempée, le freinage incertain sur les premiers kilomètres très rapides. Puis la petite route forestière que l'on emprunte sur la droite au lieu dit Les Seiglières nous dépose au cœur d'un véritable traquenard, le revêtement est complètement défoncé par endroit, c'est vraiment dangereux de nuit … Par miracle je sors de là sans dégât et je commence a rêver de la douche et du bon lit qui m'attend à Domène, 20 km plus loin. J'avais reversé une chambre airb@b , prévenu mon hôte de mon arrivée tardive et nous avions convenu des modalités d'arrivée. J'avais prévu minuit mais il était 1h du matin lorsque je suis arrivé a destination, le temps de donner quelques nouvelles via FB et Morphée m'avait déjà conduit au pays des rêves.

MDS Strava Poucet 1ere partie

 

Je n'aurai pas vu Christiane mais au petit matin tout était pret à la cuisine, il y avait juste a appuyer sur le bouton de la cafetière. Âpres avoir englouti le copieux petit déjeuner j'avais un moral au top pour entamer le long retour vers Cotignac. Même si j'ai un peu galéré pour revenir sur la trace ce nouveau départ par la banlieue Grenobloise était magique, l'approche vers St Nazaire les Eymes me remémorant mes épopées sur l'UT4M. L'estomac bien rempli j'ai snobé la boulangerie que j'avais noté sur ma feuille de route et j'étais sur le pont d'attaquer le Col du Coq quand j'ai reçu un appel de Christophe avec un genou en vrac et le moral en berne après une nuit de repos également à Domène, évoquant un retour en train … Oups, pas simple de trouver les mots pour essayer de remobiliser le champion. Par contre au Col du Coq (Contrôle n°15, km 15) j'ai balancé sur messenger une photo a destination des copains montrant le généreux ravito surprise tenu par le génial Luc Coppin. Merci 1000 fois Luc pour ta patience et le réconfort que tu nous a apporter là… Quelque temps plus tard une photo similaire était posté par Christophe, courageusement reparti pour tenter de boucler le périple.

Elle était musclée l'incursion en Chartreuse et j'ai adoré. Même si je me suis demandé un moment comment j'allais pouvoir en sortir en arrivant sur une zone de travaux lourdement barricadée dans la descente du Col de Porte (Contrôle n°16, km 570). Sophie avait évoqué hypothèse d'une telle situation, conseillant d'emmener une carte pour trouver la déviation adéquate … Finalement j'ai un peu forcé les barrières de chantier et j'ai traversé la zone de travaux à pieds, discrètement, sans que les ouvriers ne s'en aperçoive. Ouf ... Je suis arrivé en bas à St Aggreve très en retard sur mon plan de route. Mais bon puisqu'il y avait une boulangerie et qu'il était midi, la pause casse croûte allait de soi.
Après ça nous avions 30 km de piste cyclable toute plate le long de l'Isère jusqu'à St Gervais le Port pour entrer dans la forteresse du Vercors par le Tunnel des Ecouges et Col de Romeyre (Contrôle 17, km 632), une région que j'avais découverte a l'occasion de deux séjours CCK magiques organisés par notre Maestro Bridou.

Le Col du Mont Noir initialement prévu étant inaccessible en raison de travaux, Sophie avait trouvé une alternative de dernière minute par une petite forestière jusqu'au secret Col de Pré l'Etang (Contrôle n°18, km 637) emprunté en sens inverse avec Bridou. Je savais que le meilleur était a venir avec l’extraordinaire route en balcon qui dégringole sur Pont en Royan. C'est là que nous avions posés nos valises lors du séjour CCK, j'avais prévu de m’écarter légèrement de la trace pour aller jusqu'à la boulangerie, au cœur de la bourgade. Une part de pizza et un coca plus tard je croisais le grand Christophe attablé a un troquet un peu plus haut. L'après midi touchait a sa fin, j'ai déguerpi rapidement avec l'espoir de pouvoir passer à Combe Laval avant la nuit. L'ascension n'est pas difficile, régulière et j'étais la haut juste a temps pour profiter de la corniche au soleil couchant. Il était temps de passer le gilet fluo et d'allumer les lumières au Col de la Machine. Christophe m'a doublé peu de temps après, me fixant RV en haut ou il pensait mettre une plombe pour enfiler les fringues pour la nuit. C'est dans ce secteur que j'ai commencé a ressentir quelques douleurs au niveau des cervicales ...

Lorsque j'ai retrouvé le champion affairé sous un petit abri simplement éclairé a la frontale je n'ai pas du tout reconnu Font d'Urle (Contrôle n°19, km 687) ou j’étais passé également avec le CCK. Dans mon esprit la station était plus loin. J'ai prêté mon téléphone a Christophe qui voulait rassuré sa douce et me voilà reparti pour aller faire la photo contrôle, pensant voir Christophe rappliquer prestement. En fait j'étais engagé dans la descente … Je n'ai pas eu le courage de remonter les 3 kilomètres pour retourner faire la photo, je me suis dit que Sophie aurait pitié et accepterait une photo plus jolie de Combe Laval et je me suis mis en roue libre en attendant Christophe. Les kilomètres défilaient dans cette longue descente, je me retournais régulièrement sans apercevoir de feux …

Évidemment impossible d'appeler le champion puisqu'il avait mon téléphone. Les lacets se sont enchaînés de plus bels après le Col du Rousset. Là j'ai vraiment eu un moment de doute, consterné d'avoir fait preuve d'autant de négligence. Finalement je me suis posé dans un abri bus a Chamaloc … Les minutes m'ont parues une éternité et puis le grand Christophe encore plus inquiet que moi est apparu !!! Ouf !!!

Nous sommes reparti ensemble et j'ai bien profité du sillage pendant toute la partie descendante et puis j'ai laissé le champion lorsque la route s'est remise a grimper vers St Nazaire le Desert. J'avais besoin de détendre ma nuque et pas vraiment d'autre choix que de rouler a un rythme moins élevé. Je me suis traîné durant la nuit par les Cols de Planlara (Contrôle n°20, km 767), la vallée de l'Oule et ses villages endormis, réduits a quelques pauses pour fermer les yeux quelques minutes, et enfin le Col des Tourette. Alors qu'on devinait poindre le jour, Christophe est réapparu dans la descente rapide et froide. J'avais réserve une chambre d'hôtes à l'Epine, Christophe a préférer poursuivre plutôt que de m'y accompagner. Il était 6h30 alors que j'avais prévu d'y être à 2h. Tout était parfaitement calé, Denis mon hôte était informé de mes pérégrinations nocturnes, l'accès a la chambre était facile grâce a une boite a clé …

MDS Strava Poucet 2ème partie

Quel soulagement de pénétrer dans cette chambre confortable et joliment décoré, au RDC d'une belle maison en pierres. Comme prévu un plateau de charcuterie avec une miche de pain et une bière m'attendaient. Quel bonheur de sentir l'eau chaude ruisseler sur ma vieille carcasse déglinguée. Je suis resté planté sous la douche pendant de longues minutes avant de m'enrouler dans la grande serviette moelleuse pour attaquer la charcuterie et me glisser sous les draps, repu. Pour une nuit bien trop courte évidemment. Une heure et demi plus tard c'était déjà l'heure du petit déjeuner. J'ai englouti les tartines, largement profité du café et je me suis préparé des sandwichs avec le reste de la charcuterie. Puis j'ai pris le temps d'aller remercier Denis pour cet accueil royal avant de reprendre la route.

Une fois avalé le petit Col de Serre Larobe (Contrôle 21, km 810) il fallait rejoindre Sisteron 40 km plus loin sur un profil descendant. Facile normalement. Sauf que les tiraillements dans la nuque se sont fait plus sensibles et que l'estomac manifestait son embarras suite aux agapes de L'Epine. Le moindre talus planqué au milieu des interminables étendues de fruitiers me mettait a l'agonie. Au bluf j'ai néanmoins pu faire glisser un riz au lait au passage à Sisteron, ou malheureusement toutes les pharmacie avaient baissées le rideau à l'heure de la pause méridienne. J'ai remis a plus tard l'hypothétique pommade miracle pour soulager mes cervicales.

Je n'ai guère été plus flamboyant l'après midi dans la Montagne de Lure. Cette ascension n'est jamais bien difficile mais c'est long et un peu monotone. J'ai eu la désagréable sensation d'être collé au vieux bitume râpeux, j'ai eu droit a quelques coups de bambous carabinés qui m'ont obligés par deux fois à m'allonger dans l'herbe quelques instants. Et puis le ciel incertain avec un petit crachin par instant ne me mettait pas le cœur en joie. Jusqu’au ce que je sorte enfin de la forêt pour profiter de la beauté sauvage d'un final bien plus agréable vers le sommet de Lure, qui m'avait déjà réjoui lors de l'Ultra Trail de Haute Provence 2018.

La dégringolade sur St Etienne les Orgues a été une vraie torture, mais j'ai pensé y trouver la délivrance en rentrant dans la pharmacie du village. J'en suis ressorti avec un baume a base de plantes dont la jolie au sourire masqué m'avait fait l'éloge. J'ai immédiatement entrepris de masser largement la zone douloureuse. Si la sensation de chaud et l'odeur étaient agréable, l'efficacité du produit n'a pas fait illusion bien longtemps. Les douleurs persistantes m'ont obligées a stopper plusieurs fois mais les massages répètes se sont montrés vains. Mon plan de route me paraissait réaliste et tablait sur un retour aux alentours de 21h. Trop ambitieux encore … En arrivant sur le plateau de Valensole j'ai du passer une nouvelle fois la tenue nocturne pour 60 kilomètres tout en relances sur un profil en dents de scie qui ont pris la tournure d'un laborieux chemin de croix. Mon entêtement a vouloir renter le Vendredi soir ne m'a pas permis de profiter de ce retour sur Cotignac. Clairement c'est très nul. L'an prochain il faut corriger ça, je ferai en sorte d'utiliser l'intégralité du délais accordé de manière a optimiser la récupération en dormant plus.


MDS Strava Poucet, le final

Finalement j'ai déposé mon carton de route dans le boite à lettre du camping Samedi à 0h30. Selon Strava j'aurai parcouru 1027 km pour 20116 mD+ . A vrai dire je ne m'explique pas bien l'écart avec les 1003 km théoriques de la trace Openrunner. Il n'y a qu'a Domène ou j'ai un peu jardiné pour me remettre sur la trace après ma nuit airb@b, mais pas jusqu'a faire 20 bornes de rab. Bizarre ...

En rejoignant la Maison du Bonheur j'ai été joyeusement interpellé par quelques gaillard teutons fêtant comme il se doit le retour au bercail sur la place du village. Christophe m'attendait quelques ruelles plus loin, nous avons profiter du confort de notre chambre d'hôtes et d'un agréable petit déjeuner dans la cour au petit matin. Et puis après avoir fait quelques emplettes à la cave de Cotignac nous sommes allé a la rencontre d'Alex et de Régis qui ont terminés Samedi en fin de matinée dans de bien meilleurs conditions. Comme dans les aventures du petit gaulois à moustache les héros du Team Choucroute (AOC Gilles Rodier) se sont retrouvés autour d'une bonne table sur la place du village !!!


ALBUM PHOTOS MDS 2020

 

MERCI SOPHIE pour ce super parcours, la précision et la qualité des traces et feuilles de route.

MERCI de faire vivre la légende du 1000 du Sud, RV est pris pour le 6 Septembre 2021 

18 commentaires

Commentaire de banditblue29 posté le 14-10-2020 à 20:49:09

Merci pour la balade :-).

Commentaire de poucet posté le 15-10-2020 à 12:03:10

Merci banditblue29

Commentaire de MULTISPORTS74 posté le 14-10-2020 à 22:06:07

MERCI GILLES pour cet excellent résumé qui nous fait réver bien amicalement YVES PAILLARD

Commentaire de poucet posté le 15-10-2020 à 12:02:09

Merci Yves

Commentaire de la buse de Noyarey posté le 15-10-2020 à 16:14:24

1000 bornes comme ça , d'une traite , bravo . Surtout que connaissant les cols empruntés autour de Grenoble genre le Luitel ça n'a pas l'air d'etre un parcours des plus facile . Par contre les liens vers strava n'ont pas l'air de fonctionner . Dommage j'aurais bien jeté un oeil plus attentif au parcours

Commentaire de poucet posté le 15-10-2020 à 17:30:01

Voila le parcours https://www.openrunner.com/r/10302386

Oui,oui le Tour de Grenoble était plutôt costaud.

Commentaire de ch'ti lillois d'vizille posté le 15-10-2020 à 17:50:13

Après Strava, je te dis encore bravo pour ce 1000 et ce super récit.
A l'avenir, sur un passage au Luitel, la maison n'est qu'à 7km là où tes copains ont pris l'hôtel (c'est pratiquement plat pour y venir).

Commentaire de poucet posté le 15-10-2020 à 20:32:15

Merci encore Manu. Avec un pseudo comme ça,t'es forcement pas loin ... Il serait étonnant que je ne repasse pas par là un de ces jours, c'est bien noté

Commentaire de philkikou posté le 17-10-2020 à 22:42:24

coché pour prendre ta roue demain et lire ton récit ;-)

Commentaire de philkikou posté le 18-10-2020 à 11:47:58

-Bike packing : randonnée légère ? ( en français )

-Sophie Matter a forgé une randonnée à son image, envoûtante et redoutable à la fois, tout simplement authentique. => Belle approche

-Une trace de ton parcours, pour de prochains parcours en mode rando ;-) ?

-Bivy ? sac couchage léger?

-"j'ai balancé sur messenger une photo a destination des copains montrant le généreux ravito surprise tenu par le génial Luc Coppin" il porte bien son nom ;-)

-Le parcours 100% français et sans haute montagne : après lecture de ton récit même si ce n'est pas de la haute, il y a de la belle montagne sur le parcours, et pas qu'un peu !!!

-" avec l'espoir de pouvoir passer à Combe Laval avant la nuit. L'ascension n'est pas difficile, régulière " : régulière oui, pas difficile !! Ca grimpe bien surtout avec les kms que tu avais au compteur et dans les cannes !!!

-Chapeau à toi et les autres baroudeurs ! Une bonne préparation physique, reconnaissance virtuel du parcours ou déjà connu pour choisir la bonne stratégie, un sacré mental pour gérer les moments dans le dur !!!... Vous êtes des doux dingues... Encore bravo et merci pour le récit qui nous permet de faire le 1000 du Sud sur ton porte-bagages version "randonnée légère et au long cours"

Commentaire de poucet posté le 19-10-2020 à 16:16:13

Toujours le mot pour sourire Philippe.
La trace opunrunner donné sur le site : https://www.openrunner.com/r/10302386 (le lien de ma trace perso Strava ne fonctionne pas)
Oui, bivy … très très leger !!!
Non, pas de haute montagne cette année mais plus de 20000 d+, ça cause !!! La haute montagne devrait être de retour l'an prochain !!!

Commentaire de la buse de Noyarey posté le 19-10-2020 à 10:45:32

Merci pour la trace openrunner ; je la mets de coté pour de prochaines ballades

Commentaire de Bikoon posté le 21-10-2020 à 12:33:06

Je vais prendre le temps de lire attentivement ton récit, à quelques jours de mon premier BikingMan, c'est certainement très instructif ;o)

Commentaire de poucet posté le 21-10-2020 à 20:37:01

Bon courage pour ce BikingMan ... J'espère qu'on aura droit a un récit !!!

Commentaire de Bikoon posté le 23-10-2020 à 14:34:50

BikingMan annulé avant hier soir :o((
+ couvre feu dans toute la Corse, ça va se transformer en 4 étapes, mais silloner cette magnifique île me réjouit tout de même :o)

Commentaire de poucet posté le 23-10-2020 à 22:19:48

Oups ... En 4 étapes tu vas encore plus te régaler !!! Magique Corsica !!!

Commentaire de Bikoon posté le 02-11-2020 à 18:17:32

Bon finalement l'annulation du BikingMan a été annulée :o) et l'objectif 3 étapes a été tenu, reste plus qu'à faire un CR pour raconter ce périple exceptionnel ;o)

Commentaire de poucet posté le 02-11-2020 à 20:56:57

Super, on attend le récit alors. Tu as du croiser Jacques Barge ?

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

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