L'auteur : shef
La course : Ultra Trail du Mont-Blanc
Date : 30/8/2019
Lieu : Chamonix Mont Blanc (Haute-Savoie)
Affichage : 2701 vues
Distance : 171km
Objectif : Pas d'objectif
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Je suis un grand enfant. Rêveur et fier.
Depuis bien avant que je me mette à courir, cette course me faisait rêver. Alors plutôt alpiniste, j'enviais ces gens qui étaient capables de faire le tour de ces belles montagnes sans s'arrêter. Pour moi ça paraissait inconcevable et surhumain.
Et puis j'ai fait mon premier trail. Et avec les copains on continuait à regarder ça en rêvant.
Et puis j'ai bouclé la TDS. Et petit à petit, l'UTMB est passé de la case "rêves les plus fous", à "courses en projet", et finalement "inscrit".
Je dois bien assumer ce côté sombre du trailer en moi, j’aime aussi ce côté barnum. Honte à moi. Et puis encore plus honte à moi, j’aimerais bien pouvoir faire le kéké à la machine à café avec ma « petite équipe » de collègues que j’ai lancé en trail depuis environ 1 an, et qui a abouti à une course en relais sur l’UTCAM où nous avons vécu une super aventure humaine. Bref, les raisons pour moi d’être ici sont multiples, bonnes ou mauvaises, peu importe. Je suis présent, et je vais aimer.
L'entrainement à été plutôt correct. J'arrive avec 77.000D+ depuis le début de l'année et 1417km, ce qui est plus que l'an passé pour l'Echappée Belle. J’ai moins pu faire de grosses sorties en Juillet, un peu plus en Août. Je n'ai pas senti de grosse fatigue comme en 2018 fin Juillet après 4 gros week-ends, je pense du coup avoir moins d'effet rebond. D'ailleurs en prenant en compte uniquement les mois de Juillet/Août, j'ai plus de km en 2019, mais plus de D+ en 2018. Je me rassure en me disant que pour une prépa UTMB, il vaut mieux un peu plus de bornes par rapport à une EB. On verra bien, il est trop tard de toutes façons. Je prépare un roadbook basique sur base de 35h, qui me ferait arriver au petit matin et éviter la bise à Poletti ;) Tout le but sera d'arriver pas trop entamé à Courmayeur au pire, à Champex au mieux.
Côté logistique, nous louons le même chalet aux Houches que pour la TDS, charmant, tranquille et pas trop cher. La famille sera encore présente, et même élargie puisqu'en cours de semaine mes beaux-parents font savoir qu'ils vont débarquer avec leur camping-car.
C'est ma compagne Clémence qui se chargera de l'assistance, j'aurai droit à un confort exceptionnel. On décide de zapper le Val Montjoie, trop encombré sur le début de course avec ma position probable de milieu de troupeau (en particulier les Contamines). Je recommande également, à la lecture de plusieurs CRs, de zapper Courmayeur pour les mêmes raisons (trop de monde, pas pratique, traverser 2 fois le tunnel pour se voir 5 minutes). On convient d'un premier RDV avec tout le monde en fin de journée Samedi à Champex. Ils pourront ensuite se faire un resto, les suiveurs continuer sur Trient/Vallorcine et les non-suiveurs rentrer dormir avec la petite, faire une nuit "normale".
Le "coach" Vincent me prodigue des conseils très éclairés et pertinents. En particulier: oublier que la course est considérée facile, roulante, oublier tout objectif chronométrique ou de classement et simplement profiter.
Je vais donc reprendre le mantra de l'Echappée Belle l'an dernier "gestion, gestion, gestion" et le remplacer par "profiter, profiter, profiter".
La météo est annoncée superbe, pas de pluie, températures clémentes, bref, avec de telles conditions, impossible de se rater.
Côté physique les voyants sont presque tous au vert: légère douleur au pied gauche et patte d'oie au genou droit, un peu récurrents mais que je sais maîtriser sur la durée ; et juste avant de partir je me "coince" le cou, grosse douleur côté droit dès que je bouge un peu la tête. Il reste une semaine, ça devrait passer à coups d’auto-massages.
Les derniers jours se passent très bien en famille, avec la petite de 6 ans nous n'avons pas de grosses randos au programme, mais visites au parc Merlet, mini UTMB (fière la petite, fiers les parents). La pression monte petit à petit, je suis comme un gamin la semaine qui précède Noël (ce qui tombe bien car Chamonix a des petits airs de marche de Noël avec son salon du trail).
Le départ approchant, nous prenons le bus avec Clémence (option la plus simple, pas de bouchons, pas de problème de parking) avec pas mal d'avance, dépose du drop-bag puis nous patientons sur des bancs a l'ombre jusqu'à 16h30.
Nous rejoignons l'aire de départ déjà bien pleine. Je trouve une place environ au milieu et je m'assois en sirotant ma St Yorre. Clémence reste avec les supporters sur le côté, pendant que ça continue de se remplir. Je suis un peu étonné d’en voir certains rester au milieu des coureurs, et qui attendent le dernier moment pour quitter la place, ce qui occasionne de bonnes bousculades. Nous prenons une première puis une seconde petite averse orageuse, ça ne suffit pas à doucher l'enthousiasme général. L'heure H approchant, ça se tasse un peu. Avec les "collègues" autour de moi on se serre la paluche, je souhaite bonne chance a Ian Goodenough (Will you be good enough ? haha on a dû lui faire des millions de fois déjà, je suis le roi du calembour). Je reçois plusieurs SMS des copains, tout le monde est avec moi
Enfin, c'est la musique qui démarre, les speakers se taisent, et ce moment est à nous. Profite, profite.
Le gooooo est donné, et on passe l'arche tranquillement. Quelques mini bouchons et on peut très rapidement trottiner. Dans le même temps, Clémence saute dans le train direction les Houches pour nous y voir passer.
Le départ dans les rues a déjà été écrit maintes fois, mais il faut le vivre. Je trimballe ma bouteille d'eau vide pendant 3 kilomètres avant de pouvoir accéder à une poubelle tellement il y a de monde. Les gens nous encouragent, filment, les gamins tendent les mains. Je reste entre 10 et 12 kmh, en aisance, et j'emmagasine toute cette bonne énergie pour les futurs coups de mou. Les petites raidillons sont marchés, de toutes façons il n'y a pas la place pour passer à la course. Les deux averses avant le départ ont bien mouillé le terrain. Il y a quelques flaques, causant 1 ou 2 ralentissements, mais pas de vrais bouchons. En revanche l'atmosphère est très très humide, on est trempés. Il y a tellement de buée sur mes lunettes que je suis obligé de les enlever.
La foule s'éclaircit un peu pour quelques kilomètres, puis se densifie à nouveau: cela marque l'arrivée à la passerelle pour remonter aux Houches. Continuant à suivre les indications de Vincent, je fais la remontée à la marche. Je suis un peu surpris de trouver déjà des coureurs en forte ventilation, je me dis que la route va être longue pour eux (même si ce n'est pas 100% un signe de surrégime).
Dès l'entrée dans le village je cherche la famille au bord de la route. Il y a du monde et je ne voudrais pas les louper. Ils sont là, juste en face des tables de ravitaillement. Clémence a pu les rejoindre, je fais la bise à ma petite également, encore un peu d'énergie positive à engranger.
Nous finissons la traversée sous les encouragements. Petit moment cocasse quand un coureur se précipite dans un magasin de sport pour acheter une veste, qu'il a oublié de mettre dans son sac au départ. Puis c'est la bifurcation et la montée qui commence: une partie où il faut que je fasse attention à monter tranquillement, même si la foule m'agace un peu (par exemple le coureur que tu t'apprêtes à doubler qui zigzague et te fais involontairement 3 queues de poisson de suite). Vincent m'a dit de ne pas relancer dans cette montée, je m'exécute, sauf lors de la courte descente au col de Vosa.
Voici déjà les derniers lacets le long de la Kandahar (piste de coup de monde de ski) et nous passons sans même nous en apercevoir au Delevret. Peut-être avons-nous été distraits par la paire de fesses poilues en train de se soulager à 3 mètres seulement du chemin. On a ensuite une grande traversée plutôt plate, je reconnais l'endroit où nous avons randonné en début de semaine vers le Prarion, de bons souvenirs avant d'attaquer la descente.
Vincent m'a promis du bien raide qui éclate les cuisses, je sais à quoi m'attendre. Je descends prudemment, parfois même à la marche. J'ai très peur de me brûler les quadris trop tôt, comme à la Montagn'hard début Juillet. Je me fais bien sûr copieusement doubler. Patience, patience. On entend au loin l'ambiance du ravito, ça chauffe là-bas ! Puis nous entrons dans les bois et il fait de plus en plus sombre. Je finis par sortir la frontale peu avant d'entrer dans le village. C'est de nouveau l'étape du Tour de France, les high-five aux gamins, les gens qui applaudissent et encouragent. Je comprends qu'il est effectivement très facile de se prendre pour un champion et laisser déjà pas mal de forces dans la bataille. En ce qui me concerne, je profite à fond :)
Le ravitaillement est grand et plutôt bien organisé. Je m'attendais à la cohue mais honnêtement, aucun problème pour accéder aux tables. Je remplis les flasques, pique une barre de céréales salée, tucs, chocolat, petit sandwich pain/fromage etc. Je repars après 5 minutes environ, à la marche, et je termine mon sandwich en plaisantant avec les supporters, j'applique mon mantra. La suite du parcours semble à un faux plat sur le profil, mais c'est une succession de relances avec quelques beaux raidillons. Sur cette portion qui ne paye pas de mine, on prend quand même 550m de D+. Je trottine tous les plats et marche des que ça monte un peu. Je croque la barre salée que j'ai récupéré à St Gervais, elle est hyper épicée !! Direction prochaine poubelle croisée, dommage. Le peloton n'est plus très compact, de petits groupes se forment. Je me retourne de temps en temps pour admirer la guirlande de frontales. Comme le tracé ne passe pas très loin du fond de la vallée et traverse des zones habitées, nous avons encore de nombreux encouragements.
Je suis encore une fois surpris de voir un ou deux coureurs en train de vomir au bord du chemin. Partis trop vite ? Mal digéré le ravito ? Pour eux aussi la route sera longue.
Je trouve ce ravitaillement un peu sous-dimensionné, sachant qu'il est sensé recevoir l'assistance. Je fais le plein en liquide/solide dans la tente réservée aux coureurs, puis il faut traverser la tente "assistance" (ou alors j'ai raté un raccourci) et c'est un joyeux bordel. Environ 7 minutes de stop ici. Dehors, à nouveau ambiance kermesse. Comme à Saint Gervais, je marche un peu pour terminer mon ravitaillement. Cette portion est moins accidentée que la précédente, elle est courable intégralement jusqu'à Notre Dame de la Gorge, donc j'y trottine tranquillement, toujours en aisance respiratoire. J'essaye de reconnaitre les endroits croisés lors de la TDS en 2017 et la Montagn'hard cette année. Du coup ça passe relativement vite. Je fais aussi un premier check-point: pas de douleurs particulières, muscles ok, torticolis ok, alimentation/hydratation bien. Ça semble bien parti cette affaire :)
Après environ 3 ou 4km, on arrive à Notre Dame de la Gorge, que j'attends avec impatience: le grand feu de bois et la foule en délire. Tout est là, le grand pied !
On attaque la montée vers la Balme sur les grandes dalles. Je me souviens avoir souffert du genou ici en descendant du Joly, lors de la TDS 2017. Cette fois ça passe crème. Vincent m'avait prévenu que la montée amenait un changement de rythme, il est pour moi bienvenu de monter enfin un peu plus sérieusement ! Ensuite le chemin se fait un peu moins pentu, j'hésite à relancer plusieurs fois mais me force la majorité du temps à rester à la marche. Je me retourne encore souvent pour voir la file de lumières: toujours profiter. Pendant ce temps les copains pensent à moi : « On s’est tapé un super cassoulet avec une bouteille pinard :P » ou autres « je prends une bière de solidarité ! ».
On arrive assez vite à la Balme, et on sent qu'on entre dans le cœur de la nuit, celle que j'aime, avec cette atmosphère très feutrée presque intime (même si ce mot peut paraitre un peu inapproprié au milieu de 2000 coureurs et leurs effluves diverses). Disons que chacun s'installe et s'isole un peu dans sa bulle.
Ravito très agréable et bien agencé. Ca ne doit pas être la même par 0°, sous la pluie, le vent etc. Je ramasse cette fois la barre overstims a la myrtille, encore du chocolat, double soupe au riz, cookies tout choco (ceux-là, ça sera la razzia à chaque fois)... Et je repars après environ 5 minutes de stop. On entre maintenant dans la vraie montagne. Le passage du prochain col bouclera l'interminable remontée du Val Montjoie. Nous avons quitté le fond de vallée et les lumières sont loin, on ne voit plus que les frontales qui dessinent le sentier, loin dessous et au-dessus, comme dans les photos, mais cette fois nous sommes dans le décor.
Je suis reparti de la Balme avec une toute petite Brésilienne qui monte un train plutôt correct, je la suis sur une bonne partie de la montée et on double pas mal de monde (encore d'autres coureurs déjà pas loin de l'agonie). Je teste la barre aux myrtilles, qui est surtout une barre aux dattes. Caramba ! La plupart de mes barres perso sont également à la datte, ça va se finir en overdose. La température est plutôt clémente mais en montant vers le col le vent forcit, je finis par mettre la veste pour ne pas attraper froid prématurément, j'enfile même les gants (qui sont encore humides du départ dans la vallée). Je fais d'ailleurs bien car une fois le col passé... on ne redescend pas ! Je le savais donc je ne suis pas surpris, mais ça souffle bien sur ce haut un peu plus plat. Le sentier est chouette sur cette partie, ça n'est pas l'autoroute décrite. Il y a quelques marches, des feuillets à passer, c'est plutôt caillouteux.
En passant près du refuge on y devine un peu de lumière. De quoi se rappeler les déjeuners matinaux avant de partir en course en haute montagne, pas bien réveillés après une trop courte nuit d’excitation mélangée d’appréhension. La descente sur les Chapieux n'est pas très technique, un poil raide cependant. C'est seulement la deuxième depuis le départ et nous sommes déjà à 45 kilomètres ! J'ai toujours cette crainte de me cramer les quadris prématurément. Du coup c'est encore frein à main, et je me fais déboîter plusieurs fois, mais tout de même moins qu'à Saint Gervais. En levant un peu la tête du sentier on voit bien les frontales qui remontent vers la Ville des Glaciers jusqu'au col de la Seigne, il y a encore du chemin ! Assez rapidement je quitte veste et gants, une fois le vent retombé. A l'arrivée en bas dans le hameau, malgré l'heure tardive, il y a de l'animation.
Petit contrôle de matos (veste, téléphone, couverture de survie) et c'est le ravito, avec bénévoles aux petits soins. Je bricole un peu, fais le plein, il y a aussi des compotes. Je me dirige vers la soupe "Elle est comment votre soupe ?" (je voulais plutôt savoir si elle était bouillante) "Elle est merveilleuse" qu'on me répond. Allez, va pour une soupe merveilleuse. Vincent m'a prévenu, et le roadbook le confirme, que la portion qui suit est la plus longue entre 2 ravitos. Je prends donc un peu plus de temps (10 minutes environ) pour me reposer et être bien sûr que j'ai fait le plein et ai de quoi assurer niveau nourriture, notamment autre chose que des barres aux dattes -je vous ai déjà dit que je frisais l'overdose ?.
La suite, on commence par quelques kilomètres de route que je marche (à vrai dire pas vraiment besoin de se forcer, ça ne donne pas trop envie de s'arracher ici pour gagner quelques petites minutes), puis on la quitte pour un chemin mais qui reste plus ou moins ascendant à flanc de montagne. Ça finit quand même par monter un peu plus fort en lacets. Le vent revient, je remets la veste. Le col est quand même un peu long à arriver (euphémisme: ça n'en finit pas de finir).
Arrivés au col, et grâce aux frontales des plus rapides que soi, on voit à nouveau très bien le cheminement qui nous attend: tout droit, en direct à quelques kilomètres de sentier facile: le lac Combal. A gauche: notre chemin. Je pensais qu'on montait direct au col, mais j'avais calculé dans la montée de la Seigne que ça plaçait les Pyramides calcaires à 2900, or il me semblait bien que le point culminant de la course se trouvait aux alentours des 2600. Et donc c'est bien ça: on descend d'abord pas mal, avant de remonter assez sec. Les frontales dans la nuit, on a toujours du mal à évaluer leur distance, du coup on a l'impression que c'est un mur qu'on va devoir monter.
En fait, ça se monte plutôt bien, ce n'est pas Belledonne. C'est même plutôt la descente qui va corser la chose: pas mal de pierre roulantes et avec l'humidité du petit matin qui pointe son nez, c'est un peu glissant. Je me fais un peu bouchonner mais je ne peux pas doubler dans ces conditions: trop risqué de passer hors du sentier. Je patiente un peu, et les coureurs étant pour la plupart sympa, ça se pousse aux épingles ou quand il y a un peu de place. Bon an mal an, on rejoint la trace originale sous le refuge Elisabeta, puis rapide descente vers les tentes au Lac Combal.
C'est un bon trou froid, donc mieux vaut ne pas traîner. Je dois quand même remplir un peu les accus: on vient de se faire une étape de 2h40, et surtout il reste à remonter l'arête du Mont Favre avant de plonger sur Courmayeur, sans parler de la suite. Je vais donc au stand soupe "Alors, vous avez de la concurrence parce que vos collègues des Chapieux ont une soupe merveilleuse" "Ah mais ici, notre soupe, elle est extraordinaire". Va pour une soupe extraordinaire alors ! Environ 8 minutes de stop et je repars. C'est une des rares portions que je connais (empruntée en rando et pour la TDS), je sais qu'on peut trottiner jusqu'au pied de la montée. Quelques stops photos et pour répondre aux SMS « Un peu de fatigue. Bonne pause à Courmayeur ». Le jour commence à se lever, mais c'est encore un peu limite.
Puis c'est l'attaque de l'arête du Mont Favre qui passe plutôt bien rapidement, il faut dire que l'aube majestueuse sur les piliers S du Mont Blanc y est un peu pour quelque chose. On en prend plein les mirettes. Profite, profite. Je reçois un SMS de Clémence: ""Je suis garée près du centre sportif. On devrait dc s y retrouver". Ca fait super plaisir, ça ! De quoi donner un petit boost de motivation pour terminer la montée.
J'attaque la descente vers Courmayeur. Je sais que les premiers kilomètres sont plutôt roulants et pas très raides, ça devrait aller pour mes quadris. Je peux aussi admirer le paysage, car lors de la TDS 2017 on était là en plein brouillard Londonien. C'est vraiment un joli coin, assez sauvage. Après quelques minutes, je rencontre un groupe de percussionnistes qui met l'ambiance au bord du sentier, sympa. Un peu plus loin un autre groupe de musiciens. Jusqu'à la grande harpe, peu avant Checrouit. Incroyable de voir ce que certains imaginent pour venir nous donner du baume au cœur, ça parait encore plus fou que de faire le tour d'une montagne en 2 jours !
1 minute de "pause" à ce ravitaillement. Je suis pressé d'en finir avec la descente, puisque je vais retrouver Clémence en bas. Je sais que la suite va être difficile et mon roadbook mentionne clairement de faire la descente en marchant. C'est finalement un peu moins pire que ce que j'imaginais, mais il y a quand même quelques sections franchement raides. Quand j'arrive en bas dans Dolonne, je sens mes cuisses un peu entamées, et je trouve que ça fait un peu tôt, on n'a pas fait la moitié du dénivelé. Malgré ça j'arrive encore à bien trottiner, et sur ce plan c'est plutôt motivant. Je ne sens pas de sommeil ni de douleurs articulaires. Un petit tour du complexe sportif, et c'est l'entrée dans cette première (et unique) base vie, Clémence est là, je suis super content.
J'ai prévu 1h de pause au roadbook. Je suis tout de suite rassuré à l'entrée: pas trop de monde, alors que de nombreux CR laissaient anticiper un joyeux bordel, et surtout la zone assistance est au même étage que le buffet coureurs, donc on va pouvoir rester ensemble pendant toute ma pause ou presque. On trouve de la place sur un bout de table tout de suite. Je sors la check-list du drop-bag, et fais les choses calmement et dans l'ordre: brancher la montre, changer la batterie de la frontale, change complet, check des pieds: j'ai eu des échauffements et je vois même une mini ampoule se former sous le gros orteil. Il reste 100 bornes, ça n'est pas le moment de se dire "je verrai pour traiter ça plus loin".
Je file donc au poste de secours, qui se trouve être très calme (1 seul patient pris en charge). Je demande donc également un petit massage de cuisses, en même temps que de percer le début d'ampoule (comme elle n'est pas encore bien formée, pas besoin de bandage, ce que je préfère car en général ça me crée d'autres points de frottements). Nokage de pieds, avec allégresse :D Sauf que je ne peux pas repartir, je suis venu pieds nus ! La gentille podo va retrouver Clémence dans la salle, sans mal avec ma description, c'est que je suis encore bien lucide !
Retour au banc, Clémence me passe le gant de toilettes sur les jambes (ça fait peu impotent mais elle insiste). Petit repas, j’échange mes impressions avec Clémence, je remplace une partie de barres aux dattes par des pates d'amande a la fraise, je récupère aussi un sac de noix de cajou au curry/sauce soja. Je me sens bien. Profite, profiteJusqu'au message de Vincent "Tu bivouac ou quoi ??" suivi quand même d'un encouragement déguisé "T'es dans un super timing pas trop rapide mais pas lent du tout".
Je me remet donc en route, dernier bisou et on se revoit a Champex (53 minutes de stop ici). Dans Courmayeur juste avant le pointage je vais m'installer devant l'écran géant pour regarder la retransmission de la tête de course, sous l'œil hilare des quelques passants. Trêve de clownerie, maintenant il faut monter. Ça tombe bien, j'aime ça !
C'est le début de journée, on croise vraiment pas mal de randonneurs qui vont à Bertone, on s'encourage, je discute un peu quand ils sont francophones. J'entame une bonne période d'euphorie. La montée me fait oublier mes quadris à la peine en descente. Je finis la montée avec un bon lièvre Italien (plus de 700m/h, ma plus rapide montée de la course), Francesco, merci à toi !
5 mins de stop ici, avec un peu de solide et comme d'habitude 2 soupes au riz. Juste après le refuge, on franchit une petite épaule et on rejoint l'un des passages les plus photogéniques: le balcon Bertone-Bonatti. La vue sur toute la face S du Mont Blanc jusqu'aux Jorasses s'étale sous nos yeux, à peine pris dans quelques nuages. C'est grandiose, on est venus ici pour ça aussi, et on n'est pas déçus.
De manière amusante, c'est sur cette portion pourtant relativement facile et très jolie que je vais entamer un premier petit coup de mou. J'arrive à trottiner presque partout, mais au bout de quelques kilomètres je commence à trouver le temps long et le refuge Bonatti ne se montre pas. On franchit un puis deux puis trois petits vallons. Quand il y a des bouts descendants, mes quadris me rappellent qu'ils ont l'air au bout du rouleau, et ça me mine un peu: il reste encore tellement à faire ! Le refuge arrive finalement, mais la fatigue commence à être là. A posteriori, peut-être suis-je allé un peu trop vite (j'ai pris 18 minutes sur mon roadbook sur cette section) et grillé un peu trop d'énergie sans m'en rendre compte.
Encore 5 courtes minutes de stop ici, mais le ravitaillement est léger, Arnuva étant juste à portée de pied. Enfin, ça c'est la théorie. En pratique cette descente entérine mon premier vrai coup de mou, commencé juste avant. J'ai mal aux cuisses, je n'avance pas terrible, et je commence un peu à broyer du noir. Le moral est vraiment volatile. Et puis je sens aussi un bel échauffement au talon. C'est une première section ou je ne profite pas franchement, dommage, alors que l'environnement est grandiose.
A l'arrivée aux tentes, je file direct voir les podologues. Même tarif qu'à Courmayeur: mini ampoule au talon. On perce, pas de pansement, et on nok à fond (pied et chaussette !). Bizarrement ces quelques minutes me remettent sur pied et mon moral revient. Reste la fatigue quand même bien présente. Je fais à nouveau une pause plus marquée (15 minutes), et je me nourris bien car l'étape suivante s'annonce de presque 3h jusqu'a la Fouly, il faut de la réserve.
Je repars sur un rythme pas franchement saignant, mais on est en plein cagnard et il faut se farcir ce Grand Col Ferret. Je garde quand même mon humour, j’envoie à Vincent « Ca va y’a quelques nuages. Enfin c’est dur quand même et la neige elle est trop molle pour moi ! ». Et plus pragmatique pour Clémence : « Je commence à être bien cuit. Maintenant un gros morceau ». Et la réponse suit « Allez tu avances bien. Amuse toi bien. Ca le fait ». En haut ça sera déjà un gros morceau de bouclé, l'Italie sera derrière. Il y a un peu au loin un gros groupe de coureurs, je me motive pour les rattraper mais le groupe explose assez rapidement. Je reprends quand même plusieurs places. Presque au sommet, l'un d'entre eux avec qui j'échange quelques mots me dit entre autres, "Ah les jambes, ça va ça vient". Cette petite phrase a dû déclencher un truc en moi sans que je m'en aperçoive.
Passé le col, petit cri de victoire: à nous la Suisse ! Un peu fatigué quand même, je fais quelque chose que d'habitude je ne fais jamais en course: je m'assois pour une courte pause, en dehors d'un ravito. Je contemple le paysage. 6 ou 7 minutes assis, à grignoter mes noix de cajou au shoyu. Je ne sais pas si c'est cette pause ou la phrase du coureur, mais je repars, me force à relancer, un peu difficile sur les premiers mètres, et finalement ça trotte. Ca trotte même plutôt correctement. C’est pas la folie, mais les cuisses encaissent. Le moral remonte, le coup de mou d'Arnuva est loin derrière, oublié. On a 20 bornes à se farcir en douce descente, il faut capitaliser.
Je ne sais plus trop mais je finis par me retrouver avec un certain Florent à courir ensemble au même rythme (même les courtes remontées). On ne double pas énormément mais les kilomètres défilent, on papote un bon moment. Profiter aussi des rencontresEt le temps passe plus vite, surtout que la Fouly se fait attendre, après une fin de descente un peu raide, tu penses arriver mais non, il y a encore un peu de fond de vallée. Clémence m'a averti qu'elle va me retrouver aussi à la Fouly, même si ça n'était pas prévu au départ, ce qui fait bien plaisir. Arrivés au ravitaillement, on a l'air en plutôt bonne forme.
12 minutes à ce stop: remplissage des gourdes, chocolat, et je me rabats pas mal sur les biscuits fourres à la confiture qui me font bien envie sur le moment. J'ai la langue qui commence à me bruler un peu à force d'avaler tous ces trucs plus ou moins chimiques, salés, sucrés. Je remercie Florent pour la compagnie et sors assez vite pour retrouver Clémence (pas d'assistance à ce ravito), et je papote un peu avec elle. Je sais qu'il me reste encore de la borne (environ 10) jusqu'au fond de la vallée, mais je sais pouvoir compter sur mes jambes revenues de je ne sais où. Je n'ai peut-être pas bien fait attention au roadbook, mails il y a bien 14km jusqu'à Champex, j'aurais pu prévoir un stop plus reposant.
Je me débrouille pas trop mal sur la fin de la descente, je crois encore Clémence 2 fois le long de la route. Un dernier coucou au pied de la montée à Champex, on ressort les bâtons et c'est parti pour la montée pénible. Je monte lentement mais assez correctement car je prends 20 minutes sur mon roadbook sur cette section. Ça reste difficile quand même.
En arrivant sur Champex, toute la famille est là, ça fait super plaisir, je suis très content de voir tout le monde mais je suis quand même fourbu. Mon père se propose pour l'assistance mais je préfère que ce soit Clémence (je dois inconsciemment anticiper qu'il va falloir gérer quelques trucs à ma place). Il y a eu quelques signes un peu avant-coureurs, que je ne peux pas noter sur le coup: l'oncle de Clémence est au bord du chemin pour m'encourager, je ne le reconnais pas (il faut dire qu'avec les noms sur les dossards on a pris l'habitude d'être encourages personnellement par des inconnus), sur les photos prises par mon père au sommet, c'est un peu la soupe à la grimace, et ça se voit aussi sur la vidéo d'entrée dans la tente. Il me coûte de courir la descente de 3 mètres ! J'ai à ce moment plus d'une heure d'avance sur mon tableau de marche, surement un peu trop.
J'ai prévu 30 minutes de repos ici. La tente est immense mais il y fait très chaud et il y a un boucan infernal. Du monde, mais ça passe encore. Clémence est là pour l'assistance et ça repart comme à Courmayeur: branchement de la montre, changement short/t-shirt/chaussettes. Je baille plusieurs fois, premiers signes de manque de sommeil depuis le départ. Puis je pars chez les podos me faire percer deux ampoules naissantes. Il n'y a à nouveau pas grand monde, je me fais également masser. Je plaisante avec les kinés.
Puis c'est le retour dans la grande tente, je vais prendre quelques trucs au buffet, je rejoins la tente et d'un coup, il fait très chaud. Je m'assois, prend une gorgée d'eau qui me reste immédiatement sur l'estomac. Je marmonne à Clémence: "J'arrive plus à boire", puis je me sens partir. Je sue à grosses gouttes en 10 secondes, demande à Clémence de retirer mon t-shirt et lui annonce calmement "Je fais un malaise". Devant toute la famille, y compris mes parents et ma fille qui sont à 15 mètres dans la partie réservée aux suiveursMoi qui regardait ironiquement les coureurs en difficulté au bout de 15 ou 20 kilomètres, me voici remis à ma place.
Clémence gère parfaitement: elle m'allonge sur le banc, demande aux voisins de me surveiller et part chercher les secours. Jambes en l'air, ça va mieux dans la minute qui suit. Bien sûr on m'emmené dans la tente secours. On me prend le pouls, la saturation, la tension, tout est ok, glycémie a 0.7, un peu bas. On me fait manger du sucré, puis repos forcé. A aucun moment je ne me pose la question de l'arrêt (qu'il soit volontaire ou pas). Je profite d'être installe ici sous une couverture pour me reposer.
Apparemment je m'endors 20 minutes, mais je ne m'en souviens pas. Apres 3 autres prises de glycémie, la médecin du poste m'autorise à repartir. Je me sens bien. Je me lève tranquillement, la tête ne tourne pas, rien. Je m'équipe, RAS.
Je suis finalement resté 1h30. Du temps perdu pour du temps gagné, car je ressors assez reposé. Je suis prêt a en découdre avec la nuit, mon moral est remonté en flèche. La famille m'accompagne sur quelques centaines de mètres le long du lac, ils n'ont pas l'air trop affolés, ouf ! Le timing pour leur resto est toujours bon. Il ne fait même pas encore nuit. Je vois au loin derrière vers la Fouly des nuages très sombres (ils ont eu un bon orage de grêle apparemment).
Je repars donc à la trottinette (je m'arrête au bout de 200m enlever ma couche chaude que je venais juste d'enfiler) sur cette partie un peu monotone qui rejoint le bas de la montée de Bovine. Juste avant celle-ci la vue s'ouvre grand sur le fond de la vallée de Martigny et même le bout du Lac Léman, dément ! Je commence à reprendre un certain nombre de coureurs qui n'ont pas fait de malaise vagal et m'ont doublé a Champex pendant mon dodo. On s'encourage les uns les autres, et puis à mi-hauteur la nuit s'invite doucement, on sort les frontales. La fin de la montée est un peu longue à venir. On passe a Bovine, puis ça continue encore en traversée un bout de temps. Et je commence à avoir des hallucinations: je vois un bâtiment avec des banderoles UTMB, j'entends de la musique de boite de nuit... Ah, non, en fait, c'est la ferme de la Giète qui abrite un petit ravito liquide et dans laquelle règne une ambiance de samedi soir (ça tombe bien, on est samedi soir). Incroyable :D
Je ne m'éternise pas ici pour ne pas prendre froid dehors en repartant. Je me prépare a une descente bien raide qui va piquer les quadris. C'est effectivement ce qui se produit, mais je me force quand même à trotter. Le physique tient, il faut en profiter. En plus je sais que Clémence, ma sœur et son conjoint sont en bas à Trient. Je mets un point d'honneur à ne pas les faire attendre (et même si je peux un peu leur mettre la pression, c'est mieux :)
Les descentes de nuit demandent toujours un peu de concentration, surtout sur ces sentiers assez poussiéreux où les reliefs sont difficiles à bien distinguer. On voit Martigny en contre-bas, et aussi la route du col de la Forclaz qui s'approche petit à petit, c'est bien motivant. Passage au dit col, il y a du monde pour encourager, c'est dingue ! Tout le long du parcours, quelle que soit l'heure, s'il y a un accès pas trop loin, il y a des gens, et tout le monde reçoit son petit mot. Profite, profite.
On dépasse le col et on plonge vers Trient, passage au-dessus de la route sur une passerelle assez impressionnante, puis à flanc de falaise, on passe sur une passerelle suspendue (je crois que c'est là, mais j'ai un doute, peut-être au-dessus de Vallorcine ?). Un petit vice de traceur pour entrer dans le village, au lieu de simplement traverser la route on fait un grand détour pour passer sous un petit pont, mais bon, nous y voilà, plus que 2 !
Il y a une rangée de toilettes, j'en "profite" également (très étonné par la propreté alors que le traileur n'est quand même pas trop réputé sur ce point). Je reste assez longtemps ici, 22 minutes, bonne discussion avec la famille, le temps file sans qu'on s'en rende compte. Un peu de nok aux endroits stratégiques ;), encore des fourrés à la confiture, chocolat, et ça repart. A la sortie un bénévole me demande si je connais la suite. Il prend bien soin de m'expliquer qu'une fois qu'on passe le pointage, il reste juste un tout petit peu de montée, et ensuite on bascule et "ça roule sur Vallorcine". Parole de bénévole, tu parlesLa montée se passe plutôt bien, je sors le MP3 et Mademoiselle K pour me donner du courage et j'arrive à y tenir un bon 600 m/h. Par contre je maudis le bénévole: une fois le pointage il y a encore de la montée un bon moment, et surtout une grosse traversée avant de vraiment commencer à descendre.
Descente un peu longuette. On devine qu'on passe près de falaises car il y a deux "phares de travaux" dans des épingles. Je trottine toujours, finalement les quadris sont un peu douloureux mais ça n'empire pas, c'est plutôt chouette ! On voit diverses lumières sur la droite, mais je n'identifie pas le village. En fait on ne le voit qu'au dernier moment. Je reviens sur un autre "coureur" qui tient à peu près mon rythme. On descend quelques kilomètres ensemble, puis d'un coup il me dit "mais dis donc, c'est toi !".
J'ai donc retrouvé Florent, que j'avais laissé derrière moi à la Fouly. Arrivé 30 minutes après moi à Champex, il en est reparti avec 20 minutes d'avance, et j'ai fini par le rattraper. On papote encore, ce qui fait passer le temps sur ces pistes de ski barbantes. On passe à cote d'un coureur qui dort directement sur un tas de cailloux, ça ne doit pas être très confortable. On rigole en se disant qu'il a l'air parti pour une bonne grosse nuit, et on imagine le réveil au petit matin.
A l'arrivée sur Vallorcine le traceur fait faire tout le tour de la tente, ça doit être le même vicelard qu’à TrientM'enfin c'est pas grave, plus on se rapproche de l'arrivée, plus mon moral grimpe, grimpe ! Cette fois, plus qu'une !
Je retrouve encore la petite troupe de soutien qui m'accompagne jusqu'à la tente, Clémence entre, mais je ne reste que 5 minutes juste le temps de faire les pleins: il y fait chaud et dehors ça s'est bien rafraîchi, je ne veux pas d'un coup de froid si près du but. Toujours pas de signe de fatigue depuis le malaise de Champex, pas d'hallucinations.
Je repars avec les encouragements et les sons de cloche. Pour eux aussi la nuit est courte. Ils vont rejoindre Chamonix pour une mini sieste, et si tout se passe bien, on se retrouve au complet à l’arrivée, je leur donne une indication, d'ici 3h30 à 4h.
Le chemin vers le col des Montets se fait à la marche (Vincent m'a bien dit que c'était courable, mais bon, je ne m'en sens pas le courage, j'avoue). Au fur et à mesure qu'on s'en approche, on voit de mieux en mieux les frontales sur la montée de la Tête aux Vents, et ça a l'air terrible ! C'est pas une étoile cette lumière ? Non non, ça bouge, c'est une lampe. Ça a l'air vertical. Mais je suis prêt à en découdre, et j'aime les montées raides. Je pense y être efficace, quand un concurrent Japonais me rattrape. Je lui demande s'il veut passer, et quand je m'exécute, il passe et embraye en courant oO Je n'en crois pas mes yeux. Comment est-ce possible ?? Un lacet plus haut, je reviens sur un autre coureur, qui est lui à l'arrêt, l'air un peu éberlué. Je lui demande "Tu viens de voir passer un mirage toi aussi ?". Il me répond "J'analyse ce que je viens de voir" :D
Hormis l'avion Japonais, je double pas mal, et tiens encore environ 620m/h. Le sommet se fait néanmoins attendre: ça se couche, et le sentier devient technique avec beaucoup de cailloux, ce qui ressemble à une grande traversée ascendante. On n'en finit pas d'arriver.
Cette fois ça sent la fin. La descente vers la Légère est une purge, difficile à courir et relancer. Le premier qui dit que c'est roulane, il reçoit un pavé (Belledonien) dans la figure. Je peste un peu. Ces quelques kilomètres seront moins profités que les autresJe craignais un peu la remontée au téléphérique, mais c'est en fait très court. Nous voici à la dernière tente, ça sent l'écurie. J'entre, les bénévoles me questionnent... "Chocolat !" Un dernier cookie, je ressors, direction Chamonix ! SMS a Clémence: "Je démarre la dernière descente"
Celle-là aussi, elle se fait désirer. Ça descend d'abord raide, fort bien, ça fait mal aux cuisses mais au moins on perd de l'altitude. Puis on fait un gros travers, quelques lacets, un autre gros travers. J'ai l'impression de me faire balader pour le plaisir. Puis voilà une averse qui oblige à sortir la veste. Décidément ! Ça dure un peu, et puis finalement on arrive aux chalets de la Floria, et là je sais qu'on n'est plus très loin. On entre dans la ville, passage par la passerelle, on longe le gymnase. Ca y'est cette fois, c'est la fin. Applaudissements des supporters, félicitations entre coureurs. J'allonge le pas. J'arrive à encore bien courir finalement. Je cherche la famille, ils sont la près de l'arrivée.
On court ensemble les derniers mètres avec Clémence et ma fille, super moment de partage bien mérite pour tout le monde. Il est 4h30 du matin, un peu comme à mon arrivée de la TDS, la ville est calme, sur le réveil, et l'arrivée intime. J'aime cette ambiance pour finir et passer simplement la ligne, comme un simple point final.
Tous ensemble on cherche un troquet ouvert pour prendre un petit déjeuner, mais il faut se rendre à l’évidence : je suis allé trop vite :D On trouve quand même quelques croissants qu’on ramène au chalet, petit café, puis tout le monde va se coucher pour une grande sieste. Nous fêterons ça le midi avec un bon resto fondue.
J’ai donc bouclé cet UTMB. Ce n’est pas pour moi la boucle ultime, mais clairement un accomplissement sur un projet qui m’a fait rêver plusieurs années, même avant que je me mette à la course à pieds. D’un point de vue sportif, c’est une quasi pleine réussite. J’ai fini assez frais et pas trop abîmé (quelques courbatures le lundi, et le mardi je reprenais le vélotaf). C’est aussi ainsi que j’envisage mes grosses courses pour le moment : ne pas essayer de faire un temps, mais me focaliser sur le plaisir et la réussite de l’objectif. J'ai plutôt bien géré mon effort, pprenant des places tout du long ou presque.
Il n’y a que le malaise de Champex pour ternir un peu l’image. Ca a finalement été sûrement bénéfique, car je me suis imposé un bon repos dans des conditions optimales (le même malaise en pleine montagne n’aurait pas été la même chanson).
Partager cette aventure avec tout le monde a été une super expérience, je me suis senti soutenu tout le long.
Je voudrais bien sûr remercier :
- Clémence : tu t’es démené pour assurer une assistance sans faille et a dû finir aussi fatiguée que moi, sans parler de supporter aussi les entraînements toute l’année, les courses à droite à gauche. Merci d’être là à mes côtés pour ça et tout le reste aussi :D
- Merci à ma petite fille qui m’encourage toujours !
- Vincent : tu m’as fait un super topo préparatoire et as continué de me prodiguer tes conseils et encouragements pendant toute la course, une aide extrêmement précieuse. Merci !!
- Toute la famille présente pendant le week-end : les parents qui se sont occupés de la petite, les photographes, les sonneurs de cloches ;) Ca n’a l’air de rien mais ce soutien moral est aussi quasi indispensable, en tout cas l’une des briques de la réussite. Merci à vous tous.
- Mes "petits" coureurs Turtles : on a fait un paquet de Paradis ensemble, pour finir par cette belle aventure du relais à l'UTCAM. Je vous ai senti derrière moi, vous faites aussi partie de l'aventure.
- Tous les amis et famille : vous étiez là par la pensée, vous m’avez alimenté de SMS d’encouragements. Je n’ai pas souvent pris le temps de répondre, mais ça compte aussi. Merci !
- Le personnel médical, kinés, podos, et en particulier ceux de Champex qui ont été aux petits soins pour moi. SI quelqu’un les connaît, vous pouvez tramsettre.
- Les bénévoles aux petits soins sur absolument chaque ravitaillement, merci d’être là pour nous les coureurs qui trimballons nos souffrances en course, notre folie et nos égos surdimensionnés, vous êtes adorables.
Est-ce que je reviendrai sur cette course ? Très très probablement.
Temps de passage:
Bande son: https://www.deezer.com/fr/playlist/839492431
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15 commentaires
Commentaire de Gilles45 posté le 07-09-2019 à 07:57:20
Superbe Gestion de Course Shef bravo
On aurait quasiment pu se voir, j’arrive à Vallorcine un peu avant toi mais je fais un stop plus long
Continue les cookies tout chocolat, ça te réussi !
Commentaire de shef posté le 08-09-2019 à 08:13:13
Merci. Effectivement on a dû se croiser là bas. Bravo pour ta course et à ton équipe de suivi
Commentaire de Lécureuil posté le 07-09-2019 à 22:53:24
Bravo Guillaume, sacré perf, bientôt les podiums ;-)
Commentaire de shef posté le 08-09-2019 à 08:11:48
😁 Merci, mais n'exagérons rien.
Commentaire de rvialles posté le 08-09-2019 à 22:27:22
super compte rendu, hyper détaillé. Ca donne envie de s'inscrire pour le vivre !
Commentaire de shef posté le 11-09-2019 à 09:07:27
Merci !
Commentaire de Bert' posté le 10-09-2019 à 23:49:34
Bravo Guillaume !!
De ravi à suivre ta progression régulière pendant la course, j'ai partagé (avec David) l'inquiétude de ton malaise à Champex... tout en ne doutant pas qu'avec une telle avance tu avais le temps de t'en remettre.
(pour la petite histoire, j'ai vécu un peu la même chose au même endroit lors ma CCC).
Bref, très content de voir que tu as quand même réussi une sacrée course avec un temps canon !
Quelle évolution encore :-)
Commentaire de shef posté le 11-09-2019 à 09:08:42
Merci Bert'
Je ne savais pas que vous aviez suivi ca avec David. J'ai relu ton CR de la CCC effectivement ca ressemble un peu.
Commentaire de Vince88 posté le 11-09-2019 à 22:18:41
Bravo, bien joué sur une course qu'il est pourtant si facile de rater (selon moi...). A la réflexion, à te lire et à avoir les commentaires de Clemence, je me demande si il ne manquait pas juste un chapitre à mes conseils : Le guide de la suiveuse !! :D ...
Commentaire de shef posté le 12-09-2019 à 08:21:24
Merci Vincent. À ajouter à la prochaine version, mais elle a assuré à 100%
Commentaire de Shoto posté le 12-09-2019 à 06:26:23
super CR agréable à lire. Bravo belle course bien gérée et quel classement au final ! Bravo aussi au soutien familial hors norme. Je retiens que sur du long il faut PROFITER et éviter la pression.
Commentaire de shef posté le 12-09-2019 à 08:25:26
Merci. Il manquait quand même quelque chose pour la gestion parfaite, sinon je me serai économisé la visite aux médecins. Le soutien sur place est un gros plus, c'c'est certain, mais ça met aussi un peu de pression car tu es obligé de finir :D Je débute en ultra donc je vise le plaisir et d'arriver au bout sans dégâts. On s'essayera aux performances plus tard
Commentaire de Gazel posté le 12-09-2019 à 13:59:30
Belle course, réguliere. Les aléas de l'ultra , tu n'en as eu qu'un : le malaise à Champex. Moi aussi j'ai passé 1h30 à Champex, mais avec une sieste volontaire :)
Commentaire de shef posté le 12-09-2019 à 14:52:57
Oui, la sieste a Champex fait du bien a tout le monde :) A savoir pour la prochaine fois
Commentaire de Arclusaz posté le 31-08-2023 à 22:19:47
Tiens j'avais loupé ce CR ! quelle réussite cette course avec juste un peu la séquence émotion du malaise. Tu as vraiment un sacré potentiel. Et bravo à l'assistance !
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