Récit de la course : La 6000 D 2006, par Sprolls

L'auteur : Sprolls

La course : La 6000 D

Date : 30/7/2006

Lieu : La Plagne (Savoie)

Affichage : 4000 vues

Distance : 55km

Objectif : Se défoncer

6 commentaires

Partager :

80 autres récits :

La 6000D 2006

J’ai décidé de participer à la 6000D après avoir lu par hasard quelques récits épiques d’ultras et autres courses de montagne qui m’ont donné l’envie de m’y mettre aussi. J’ai dévoré tous les récits trouvés sur la 6000D et c’est avec plaisir que j’ajoute ma pierre !

J’arrive donc à La Plagne 2 jours avant la course, histoire de profiter de la montagne plus tranquillement, de repérer un peu l’endroit, de m’acclimater un peu à l’altitude (à ce niveau-là c’est surtout psychologique…) et de faire doucement monter la pression pour cette première expérience de trail. Ça marche bien d’ailleurs, grosse gamberge sur la manière dont ma course va se passer, mais quel plaisir d’être en montagne et à La Plagne dont le cadre reste magnifique malgré les remontées mécaniques. Enfin vient le dimanche matin, je rejoints le départ grâce au covoiturage avec de futurs participants à l’UTMB (dont Arnaud que je vais croiser régulièrement sur le parcours), de quoi se dire que ça pourrait être pire ! Je me retrouve bien placé dans le sas un peu par hasard (tiens, y a Corinne Favre à côté, on va tâcher de ne pas la suivre !), un petit concert pour se donner le rythme avant le départ, 5, 4, 3, 2, 1 et c’est parti !

J’ai l’impression de partir tranquille sur le plat de début de course et je me sens à ma place au début de la montée. J’effectue juste quelques dépassements dans l’enthousiasme du départ. Après ¾ d’heure, j’essaie de prendre mon pouls par curiosité… Oulà !! 180 ?! Je sais que ma fréquence monte haut en fond mais quand même ça m’inquiète quelque peu. Je temporise un peu mais ma fréquence cardiaque baisse à peine. J’ai l’impression de ne pas trop forcer donc je reste à mon rythme rapide mais qui ne me donne pas l’impression de puiser dans mes réserves. Et j’arrête de prendre mon pouls ! Je fais même un brin de causette avec un autre primo-participant qui a déjà fait la version courte de la 6000d l’année précédente avant de le laisser progressivement prendre un peu d’avance.

Un petit ravito d’eau surprise vers Pra Very (je crois…) par des gens du coin qui font visiblement ça chaque année. C’est bien sympa et l’occasion aussi de rafraichir la tête et la casquette déjà bien échaudées ! Quelques passages permettent de voir le Mont-Blanc et de penser à autre chose que cette longue montée. Tiens, Arnaud me rattrape, il a galéré au début de la montée pour doubler des concurrents, ce qui me conforte dans l’idée que je suis parti à la bonne vitesse sur le plat. A l’approche d’Aime 2000, la pente s’accentue, ça force un peu plus, les ischyos commencent aussi à tirer (c’est un peu tôt, non ?) mais ça passe bien sous les encouragements d’un public nombreux et chaleureux (j’ai presque l’impression d’être à l’arrivée !) et je suis en haut après 1h40 de course. Je suis en avance sur le temps que j’ai prévu, cool ! Ah ben non, ça veut peut être dire que j’ai trop forcé, gasp ! Bon on continue, on verra bien…

Une petite descente pour se dégourdir les jambes mais comme je suis là pour me faire plaisir en descente, je laisse aller mes cannes à grandes enjambées ! Au ravito de Plagne Centre, un peu de banane, un peu d’eau dans le camel-back, une barre de céréales et une compote en repartant, eh on va peut-être s’arrêter là ?! En avant pour la Roche de Mio. La piste alterne bonnes montées et replats où on peut courir. Mais dès que ça grimpe un peu, je commence à lutter. Je me fais régulièrement dépasser tout le long de la montée, les jambes sont déjà lourdes… Arnaud et mon camarade de causerie de la première montée que j’avais dépassés dans la petite descente d’Aime 2000 me doublent à nouveau sans que je puisse les garder en vue. Effectivement je suis sans doute parti un peu vite, sans parler de la petite descente où je n’ai pas vraiment relâché.

Pour la fin de l’ascension, il faut choisir entre couper tout droit, rapide mais casse-patte, et la piste longue mais plus cool. Comme je sais que je vais de toute façon marcher, je préfère prendre la voie directe pour ne pas perdre trop de temps. Mais que c’est dur !! Ce sera mon plus gros passage à vide de la course. Je glisse, j’aligne les pas péniblement dans les graviers, j’ai l’impression de ne pas avancer… J’ai beaucoup plus de mal qu’à Aime 2000 pour profiter des encouragements du public pourtant assez nombreux en haut.

Enfin en haut après environ 2h50 de course, j’entame la nouvelle petite descente plus tranquillement que la première car cette fois je sais que je suis déjà bien cuit ! Les vues sur les sommets de la vallée de Champagny-le-Haut sont magnifiques mais mon état physique ne me permet pas d’en profiter pleinement… Je prends le temps de bien manger au col de la Chiaupe et de m’étirer un peu car la prochaine montée dans le pierrier me fait bien peur. Les meilleurs redescendent déjà. Les 3 premiers sont même déjà passés, zut j’aurais bien aimé voir comment ils cavalaient en descente. Parmi ceux que je vais croiser, la prime du casse-cou revient à l’un des 2 jeunes anglais qui finiront 4ème et 5ème de la course au final. Je n’ai pas encore bien compris comment il tenait sur ses jambes ! De mon côté j’ai l’impression de monter à 2 à l’heure mais je ne perds plus trop de terrain sur les gens qui me précèdent et dans le pierrier final (piste rouge, dré dans l’pentu !), tout le monde grimpe au même rythme. Enfin le glacier ! Encore une petite montée et nous voilà à 3050m, tout en haut, alléluia !! Je prends le temps de bien m’étirer, de relacer les chaussures et de faire une « pause technique » qui me fait penser que je me suis suffisamment hydraté (c’est toujours ça de pris) afin de profiter au maximum de la longue descente que j’attendais avec impatience depuis 4 heures…

C’est parti pour la descente, le balisage suggère de couper tout droit, ça tombe bien on est sur la même longueur d’onde ! C’est mon tour de doubler pas mal de monde dans les pierriers casse-gueules où je me fais plaisir (à part une hanche râpée à un croisement avec la piste). Je temporise un peu sur la fin de la descente vers le col de Chiaupe dans une partie moins raide, c’est que c’est fatigant de descendre vite après avoir grimpé autant. Et c’est pas fini ! Dans la descente vers le Dérochoir, tout en continuant quelques dépassements, je me prépare psychologiquement à la remontée du Carroley dont tout le monde m’a dit que c’était horrible ! Au Dérochoir, j’entends que le premier vient d’arriver sur le talky d’un organisateur. Y en a qui ont de la chance, on est nombreux à en avoir encore pour plusieurs heures ! On suit après une jolie portion un peu vallonnée avec comme toujours des vues superbes, pour peu qu’on lève un peu la tête, et qui permet de rejoindre la fameuse dernière montée.

Après un ravito en eau bien utile (le soleil commence à taper sec), c’est donc parti pour la dernière véritable ascension de la course. Je reprends un rythme qui s’impose très naturellement. Je me fais doubler par 2/3 concurrents mais je me sens relativement bien, en tout cas beaucoup mieux que dans la Roche de Mio. On va peut-être en voir le bout de cette 6000D !! Je passe en haut du col avec la 5ème féminine à la 101ème place ! Incroyable ! Cela fait 5h10 de course et j’entrevois la possibilité de faire dans les 100 premiers et moins de 6h30 alors que mon objectif initial était 7h. Cependant je sais qu’il y a encore des petites montées après Plagne Bellecôte donc je ne pars pas la fleur au fusil dans cette descente raide à travers alpages et forêt et en garde un peu sous le pied. Je laisse malgré tout aller les jambes dans la portion bitumée raide qui mène au ravito à Plagne Bellecôte sans doute stimulé par la sono et prêt à en découdre avec les 11 derniers kilomètres. Juste un peu de banane, j’ai encore de l’eau… Je fais mon ravito le plus express depuis le départ pour tenter de passer sous les 6h30.

Très vite après Plagne Bellecôte, effectivement, ça remonte et pas qu’un peu. Heureusement on est de retour dans la forêt et on subit moins le soleil qui lui est en pleine forme. Sur cette longue portion alternant légères descentes et petites remontées, je commence à me sentir moins bien. Pour la première fois, la digestion ne se passe pas très bien. Le moral en prend un coup et l’envie d’en finir est très très forte… On se remet à descendre un peu plus franchement mais voilà qu’un point de côté apparaît. C’est très pénible, je suis obligé de temporiser, de m’arrêter par moments. J’essaye de respirer fort, d’appuyer sur les côtes mais ça ne passe pas. Pour la première fois depuis le début je me fais dépasser en descente. Les coureurs avec moi s’enquièrent de ma situation et l’un d’eux me conseille de serrer une pierre en plus d’appuyer sur le point de côté. Ah bon ! Je suis les recommandations et petit-à-petit le point de côté se fait plus dicret ! Merci m’sieur !

Ça tombe bien, on arrive dans le morceau de choix de la descente après les Tuiles, un chemin poussiéreux et droit dans la pente. Je repasse à l’attaque autant que me le permettent mes cuisses. Mais je suis épuisé, sans doute plus très lucide et soudain, aïe la cheville, un faux mouvement qui me fait craindre une petite entorse mais en fait non, ça a l’air de tenir. On voit enfin le fond de la vallée, je n’en peux plus, j’ai tout donné dans cette fin de parcours. On rejoint une petite route en bitume, on voit l’arrivée à travers les arbres à gauche mais on doit la dépasser pour revenir en arrière ! C’est pas vrai, on en finira jamais ! Je me traîne péniblement sur les dernières longueurs au bord du plan d’eau de Macôt, franchis la banderole, m’arrête, « Non, c’est pas celle-là l’arrivée, c’est la suivante 50mètres plus loin » dit le speaker. Argh ! Ils le font exprès ou quoi !? Enfin c’est fini !! J’ai l’impression d’être dans une fournaise sous l’effet combiné de la chaleur en bas et de l’effort effectué, je m’allonge à l’ombre, complètement épuisé mais soulagé d’en avoir terminé et d’avoir tenu dans ce final d’enfer.

Il me faudra plus de 2 heures pour reprendre mes esprits, un doliprane pour le mal de tête, un massage pour commencer à soulager les jambes et une petite sieste. Le bilan est tout de même très satisfaisant : je remplis mon objectif, 78ème (grâce aux descentes) en 6h20 environ pour ce premier trail, vidé donc mais heureux ! J’attendrai quand même un peu avant de me lancer dans l’UTMB…

6 commentaires

Commentaire de Kiki14 posté le 16-08-2006 à 21:17:00

et ben dis donc Sprolls tu nous a fait souffrir a la fin de ton récit.....mais vraiment un grand bravo pour ton courage.....et remet toi bien....

Commentaire de NoNo l'esc@rgot posté le 16-08-2006 à 21:58:00

Ce genre de CR, ça me coupe le souffle rien qu'à le lire !
Vraiment super, je n'ai pas de mot pour dire mon admiration...
Respect.
Noëlle

Commentaire de Yannael posté le 16-08-2006 à 22:30:00

Wouah ! Impressionnant. Chapeau pour cette course incroyable, et ce récit si vibrant.

Commentaire de nicou2000 posté le 17-08-2006 à 09:39:00

Merci de nous avoir fait partager cette course mythique et bravo pour ton chrono!

Commentaire de riri51 posté le 17-08-2006 à 21:03:00

félicitations!!!

Commentaire de Gibus posté le 21-08-2006 à 21:24:00

Félicitations pour les descentes surtout la première après le glacier. Moi j'y arrive pô. Sympa le coup de la pierre sur l'point de côté. :-)

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Votre annonce ici !

Accueil - Haut de page - Aide - Contact - Mentions légales - Version mobile - 0.08 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !