L'auteur : Shostag
La course : La Transvésubienne - 80 km
Date : 25/5/2008
Lieu : Valdeblore (Alpes-Maritimes)
Affichage : 4286 vues
Distance : 59km
Objectif : Pas d'objectif
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2 autres récits :
Préambule :
Mai 2007
Je découvre la Transvésubienne, course VTT mythique, au travers des récits des forumeurs de 1001sentiers.fr : une expérience humaine unique qui durant 88 km et 3.600 m de D+ dans un cadre magnifique entre la Colmiane et Levens donne un sens nouveau au dépassement de soi.
Personnellement, j’ai débuté le VTT en dilettante (4/5 h par week-end en rythme familial) depuis quelques mois et je peine encore à dépasser les 40 km et 1.000 m de D+. Cela ne m’empêche pas d’en rêver et de baver littéralement.
Je viens également, ce que je pensais impossible, de courir pour la 1ère fois 10 km d’affilée en 53 minutes dont un final en souffrance à 195 bpm. Je finis perclus de crampes et conserverai des douleurs aux jambes pendant deux semaines.
Novembre 2007
Je sors désormais un peu plus en VTT, si possible deux fois par week-end. Le Col de la Bonette en moins de 3 heures (en VTT bien sur, je n’ai pas de route) m’a donné foi en mes possibilités et j’arrive désormais mais difficilement à faire des boucles roulantes de 50 km et 2.000 m de D+. Avec un bon entraînement, la Transvésubienne semble envisageable.
J’ai fait quelques randonnées pédestres de 2/3 heures durant l’été et couru 4/5 fois une dizaine de kilomètres en forêt. Je découvre le Trail en compétition à Gorbio où mes résultats sont encourageants : 3h23 pour 27 km et +/- 1.500 m.
Décembre 2007
C’est le drame, j’ai trop forcé et mon corps me rappelle définitivement à l’ordre lors d’une reconnaissance de la Transvésubienne entre Lantosque et le Suquet. La douleur au genou droit que je traîne depuis deux semaines devient insupportable : gros épanchement, quasi-impossible de pédaler et de marcher en descente. Le diagnostic tombe rapidement : syndrome rotulien et six mois d’arrêt. Mes objectifs s’envolent, d’autant que les symptômes ne passent pas.
Janvier et Février 2008
Miracle mi-Janvier, je suis de nouveau capable de courir en descente et j’arrive à pédaler normalement. L’espoir renaît, je reprends progressivement les sorties dominicales et retrouve un semblant de forme. J’ai par contre abandonné toute ambition de faire la Transvésubienne à VTT : pas assez de foncier, préparation tronquée, niveau technique trop faible en descente et surtout le cœur qui ne suivra manifestement pas les montées (il passe rapidement à 180 bpm dans n’importe quel passage un peu raide).
Par contre, en trail (marche en montée et je suis bon descendeur), cela devrait aller. J’arrête donc temporairement le VTT pour me lancer sérieusement et exclusivement dans un entrainement orienté course à pied en montagne. Je vais augmenter le volume progressivement :
· je découvre les séances foncières d’une heure (VMA et endurance fondamentale) sur piste, en solitaire et la nuit principalement : 1 fois/semaine au début et 2 sur la fin
· je bouffe de la randonnée-trail le week-end, jusqu’à ce que à faire 30 km et +/- 2.000 m me paraisse normal ;
· je me teste en compétition : Sainte-Baume (23 km, +/- 1.300 m), Ventoux (39 km, +/- 2.000 m) puis Balcons d’Azur (49 km, +/- 2.600 m).
Mai 2008
Je ralentis le rythme et la fréquence des sorties pour faire du jus. Je reprends notamment le VTT, sport semi-porté, pour préserver mes fibres musculaires. Je suis confiant car le temps limite pour la Transvésubienne, réduite à 72 km et 3.400 m de D+, est encore de 18 heures.
Je me retrouve la veille de la course dans un charmant hôtel à la Bolline avec quelques amis de 1001sentiers.fr qui eux se lanceront demain à VTT dans l’aventure (400 inscrits contre près de 40 pour le trail). Il pleut depuis la fin de la semaine et nous sommes sceptiques sur les conditions et le terrain que nous allons rencontrer.
Gros mécontentement : le départ du trail a été avancé de 5h à 6h (l’organisation n’a pas envie de se lever tôt ??) et une 2ème barrière horaire a été rajoutée au Col Saint-Michel à 16h30 -> nous sommes désormais sur un rythme de course imposé de 13h (pareil, ils ne veulent pas se coucher tard ??).
La course :
Départ
Il pleut toujours. Nous ne sommes finalement que 32 à nous élancer de la Colmiane (1.503 m), le mauvais temps ayant eu finalement raison des bonnes volontés et inscriptions de dernière minute. Georges Edwards nous annonce que, compte tenu des conditions climatiques, nous allons shunter la montée à Peira Cava en nous rendant directement à la Baisse de Béasse depuis Lantosque.
Ma tactique est simple : durer et surtout éviter un coup de bambou comme celui que j’ai connu aux Balcons d’Azur. Pour cela, je compte partir doucement et rester autour de 160 bpm, ne jamais entrer en anaérobie pour prévenir l’acide lactique, me ravitailler régulièrement en solide et liquide et proscrire tout changement d’allure brusque.
La Colmiane – Lantosque
6h00, la course est lancée. Nous empruntons la piste forestière qui passe par le Col du Suc et aboutit sous le Pic de Colmiane (2,4 km, 1.741 m). Tout le monde part comme des avions en courant dans du + 10 % du dénivelé. Je marche pourtant à 5,5 km/h et me retrouve rapidement dernier : ils sont fous ou je ne suis pas du tout au niveau ?! Tant pis pour les 160 bpm, je passe à 170 et un peu plus de 6 km/h et commence à grignoter mon retard pour arriver à + 600 m/h à la fin la piste en 24’’12.
Je dépasse (enfin) un groupe de vétérans dans le sentier boueux et glissant qui descend au Col de Varaire (1.710 m). Nous montons sur le même terrain au Col des Deux Caires (4,3 km, 1.906 m) avec quelques portions encore enneigées qui nécessitent la plus grande précaution. Le cœur reste vers les 170 bpm, avec quelques moments à 180 lors des raidillons. Je fais la jonction avec trois autres coureurs et bascule versant nord en 46’’29.
S’en suit, pour moi inconditionnel de la haute montagne, la plus belle partie de la course : un long travers aérien, enchaînant brèves descentes et remontées, qui va nous mener sous la Cime du Fort (9,2 km, 2.003 m, 1’31’’43). Retrouvant ma ligne de conduite, je marche ou trottine à 9/10 km/h en restant continuellement sous les 160 bpm.
Nous plongeons ensuite dans la longue descente vers Lantosque (21,3 km, 490 m) par les Granges de la Brasque, la Crête de la Valliera, la Baisse de Cangelard, le Campaouri et la Planca. Même glissant, le sentier reste de bonne qualité et il m’est possible de dérouler ma foulée tout en récupérant. Je cours désormais en solitaire, ayant lâché mes compagnons et il en sera ainsi la majeure partie de la course. Le 1er VTT, Thibault Legastellois, me dépose tranquillement au niveau du Seuil, juste avant Lantosque et le ravitaillement où j’arrive en 2’51’’20. Je suis encore frais et la pluie vient de s’interrompre, je marque un bon arrêt de 4 minutes et prends bien soin de m’hydrater et de m’alimenter correctement.
Lantosque – Col de la Porte
Nous empruntons l’itinéraire bis, trace directe vers la Baisse de Béasse. Il débute par une nouvelle monotrace entre les balises 94 et 169, montée raide puis travers vertigineux pour rejoindre la D213 (24,2 km, 607 m, 3’25’’47). Le 2ème VTT, Kevin GRAUX, que j’entends derrière a du mal à revenir sur moi dans la partie à 20 % de dénivelé (je dois avoir encore la forme) : il me reprendra sur le faux plat.
La route jusqu’à Saint-Colomban (26,6 km, 748 m, 3’48’’21) marque le retour des averses qui tombent désormais à fortes gouttes. Un traileur, refroidi par de telles conditions climatiques a trouvé la protection bienvenue d’un oratoire : il ne continuera pas. Les VTT commencent à me doubler en nombre, occasions multiples d’encouragements réciproques et brèves plaisanteries (tu ne devrais pas courir en montée ? non, non, je m’économise pour la suite !).
Nous retrouvons un sentier qui descend dans un vallon (720 m) avant de remonter pour atteindre la Baisse de Béasse (28 km, 884 m, 4’04’’35). Toujours à 160/170 bpm, je reviens dans l’ascension sur quelques VTT, contraints à pousser ou porter sur la plupart des portions.
C’est désormais monta-cala dans les roches grises, traversant les sites des Granges des Moissins et de Raimonaudo jusqu’à la D73 (34,5 km, 925 m, 5’05’’25). Seul depuis le Col du Fort et près de 3h00, je retrouve enfin avec joie un autre coureur, Benjamin de Levens, avec lequel nous allons unir nos efforts. Nous empruntons le sentier qui coupe la route pour atteindre le 2ème ravitaillent au Col de la Porte (36,4 km, 1.060 m) en 5’27’’23.
Col de la Porte – Baisse Minière
Nous prenons notre temps et repartons ensemble pour attaquer la partie « freeride » dans le Vallon de Mairanesca. Les conditions deviennent dantesques, il pleut toujours des hallebardes et les sentiers sont de véritables marécages : nous sommes prudents donc lents mais paradoxalement plus rapides que les VTT dans cette descente, entrecoupée de petites remontées, jusqu’à la Baisse de la Graou (39,5 km, 874 m, 6’03’’03).
J’ai encore de bonnes jambes dans la plongée jusqu’au Pont de l’Engarvin (41,8 km, 564 m, 6’21’’24), raide, technique et vertigineuse. Benjamin, victime de douleurs à la hanche, ralentit et me demande de continuer sans lui. C’est avec regret que nous nous séparons (il terminera presque 1 heure après moi) et je rejoins en bas les 17ème, 18ème et 19ème au classement.
Petit ravitaillement personnel avant d’attaquer la voie romaine et le sentier en balcon qui mène au Col Saint-Michel (45,7 km, 970 m, 7’14’’31). Je continue à un bon rythme autour de 150 bpm jusqu’au Hameau de l’Engarvin (730 m). Je connais hélas un début de ralentissement dans la suite de la montée qui s’avérera définitif : plafonnant à 140 bpm, je ne progresse plus qu’à 450 m/h et laisse s’échapper mes nouveaux compagnons. Bon, j’aurai tenu un rythme « marathon » à 80 % de ma fréquence cardiaque maximale pendant près de 6h30, ce n’est pas si mal. Les compétiteurs en vélo ne cessent de m’impressionner, franchissant entièrement cette portion délicate sur leurs machines.
Au Col Saint-Michel, pas de ravitaillement qui a été transporté plus haut à la Baisse Minière (48,3 km, 1.177 m). Je m’arrête néanmoins et ponctionne mes réserves personnelles. Je continue à marcher jusqu’à la Baisse avec des sensations mitigées, j’y arrive en 7’48’’09.
Baisse Minière - Levens
Le travers et la remontée qui arrive au Col de Rosa (53,1 km, 921 m, 8’34’’38) sont une vraie patinoire qui me paraît interminable. Je perd mon adhérence et glisse à chaque pas, manquant m’étaler sur les rochers ou chuter dans un dévers plusieurs fois, d’autant plus que la pluie redouble d’intensité et diminue la visibilité.
Au Col , le pire est passé, j’entame prudemment la descente finale sur Levens, très rocailleuse et délicate à négocier avec l’adhérence actuelle. Je n’ai de toute manière pas la force de relancer. J’aperçois après le Col du Travail l’aire d’arrivée sur les Grands Prés.
Je continue doucettement mon chemin, passant par Sainte-Claire puis empruntant le GR5 jusqu’à l’aire d’arrivée (59 km, 536 m) que je franchis en 9’25’’41 pour un parcours de 2.590 m de D+ et 3.540 m de D-.
Bilan :
Assez satisfait de mon chrono pour une première, plus révélateur de mon niveau actuel que celui réalisé aux Balcons d’Azur. Meilleure gestion de course, malgré le ralentissement dans les quinze derniers kilomètres, que j’affinerai la prochaine fois (départ plus lent, alimentation, …). Il me reste à être patient, travailler ma VMA et mon endurance fondamentale pour améliorer significativement mes temps.
Superbe ambiance générale, encouragements chaleureux des spectateurs aux nombreux points de passage mais aussi soutiens mutuels et réciproques des coureurs.
Par contre, ce fut la pire organisation des compétitions auxquelles j’ai participé. Sans revenir sur la modification unilatérale des limites horaires : le balisage était nul et quasi inexistant (une pancarte tous les kilomètres, embranchements non fléchés, …), faire le même parcours que les VTT est dangereux et coupe complètement le rythme (peur de se faire rentrer dedans, devoir fréquemment s’écarter et s’arrêter pour les laisser passer), manque total de communication (4ème ravitaillement décalé, les bâtons interdits puis finalement autorisés à la dernière minute le matin même…), convivialité forcée des officiels, … J’avais vraiment l’impression d’être la dernière roue du carrosse.
Je reviendrai l’année prochaine mais pour les copains, en tant que spectateur, photographe et suiveur. De vraies courses m’attendent, organisés par des traileurs pour des traileurs et notamment le Grand Raid du Mercantour 2009 à la même période.
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6 commentaires
Commentaire de martinev posté le 26-05-2008 à 16:58:00
Bravo pour ta course et ton compte-rendu. J'ai hésité entre le grand raid 73 et la transvésubienne, mais finalement je crois que j'ai bien choisi. L'essentiel est que tu ai pris du plaisir malgré tout. Bonne récup.
Commentaire de brague spirit posté le 26-05-2008 à 17:14:00
Il te faut maintenant souffler un peu,pour préparer,L'OBJECTIF 2009.Encore bravo.
Commentaire de gdraid posté le 26-05-2008 à 17:25:00
Merci Shostag, pour ce récit très prenant, du début à la fin, et si bien documenté de photos.
Bravo pour la gestion de ta course.
C'est du sérieux, dans un site aussi difficile, voire dangereux avec cette météo de pluie.
Avec de tels organisateurs, une boussole, voire un GPS sembleraient utiles, pour rentrer à coup sûr ...
JC
Commentaire de shunga posté le 26-05-2008 à 21:04:00
Effectivement, ça n'a pas dû être simple...
Bien raconté et belles photos.
Commentaire de akunamatata posté le 27-05-2008 à 12:27:00
bien bien le CR, ça nous donne un vraie vue de l'intérieure de la course (humide). Un petit conseil si tu peux calculer ton coef de ralentissement (vitesse arrivée / vitesse départ) ça te permettra de partir sur un bon rythme les prochaines fois (sachant que 0,8 est très bon, 0,7 est bon, 0,5 est moyen)
Commentaire de Shostag posté le 27-05-2008 à 22:35:00
Très intéressantes tes infos akuna, je pensais qu'il fallait être constant et que l'on pouvait maintenir du 1 tout le temps voir éventuellement finir à 1,1 ou 1,2 en négative split. J'étais à 0,86 sur la fin donc a priori rythme correct.
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