Récit de la course : Trail Cévenol - 71 km 2021, par L Espadon

L'auteur : L Espadon

La course : Trail Cévenol - 71 km

Date : 12/9/2021

Lieu : Anduze (Gard)

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Distance : 71km

Objectif : Pas d'objectif

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Ce qui ne te tue pas te rend plus fort

Le titre ne renvoie pas à la course elle-même mais à des évènements qui l'ont précédée (voir le contexte).

Contexte

J’aime bien commencer un récit de course avec un peu de contexte. Résumons pour nous concentrer sur l’essentiel (la course) : échec à l’UT4M 160 Xtrem en juillet (un récit suivra d’ici peu), un peu de rando engagée en août, des vacances reposantes en famille, et une bonne reprise de l’entraînement. Le Grand Trail Cévenol n’est pas un objectif de l’année, mais je m’y suis inscrit :
- pour tester l’option sans bâton sur ce type de profil.
- en guise de prépa pour l’Hérault Trail (qui devait être un élément de ma prépa UT4M, mais qui a été décalé à l’automne à cause du contexte sanitaire, et est donc logiquement devenu mon objectif de fin de saison).
- parce que je ne l’avais jamais fait, et que j’aime bien découvrir de nouvelles courses.

Ah oui, j’oubliais deux détails (l’un très positif, l’autre moins) :
-d’abord depuis quelques semaines je suis suivi par un kiné qui m’a motivé pour m’étirer régulièrement (ce que je ne faisais jamais avant) et pour pratiquer des auto-massages plusieurs fois par semaine. Plus précisément, les séances de kiné sont extrêêêêêmement douloureuses si je ne le fais pas (d’où la motivation).
- ensuite, vendredi soir (l’avant-veille de la course), un petit apéro avec un pote a dégénéré et s’est transformé en grosse grosse cuite (avec posage de renard le lendemain midi).

Bon, ce résumé s’avère plus long que prévu Innocent

Le départ

Dimanche matin, réveil à 3h du mat. Je n’en mène pas large (il faut lire le paragraphe "contexte" pour comprendre pourquoi). Je me prépare à bouffer (pâtes et œuf), je mange, je prépare mes affaire, et à 4h me voilà parti pour Anduze (depuis Montpellier). Arrivée à Anduze à 5h, je croise un type sympa qui a déjà fait l’UT4M, je vais récupérer mon dossard et les cadeaux (un buff et deux produits locaux, ce qui est très éthique – bravo l’orga).

A 6h00 le départ est donné, et un groupe de 80 improbables lucioles bipèdes s’élance. Devant ça part vite ; moi j’y vais tranquillou bilou, avec la ferme intention de gérer jusqu’à la base de vie du 34e km. Mis à part quelques aigreurs d’estomacs résiduelles bien compréhensibles je me sens bien ; et sauf lorsque les montées sont trop techniques ou/et trop raides je continue de courir même lorsque ça grimpe. Tant que le jour ne se lève pas, je me fais allègrement doubler dans les descentes par des coureurs qui sont au taquet (mais que je reprends la plupart du temps en montée).

Arrivé au 1er ravito (uniquement liquide, à Thoiras, 14e km) il fait jour, je range la frontale. On remplit les bidons et on repart.

Ca prend la confiance

Je ne sais pas si c’est venu avant ou si ça a commencé là, mais la chanson « Avec ta Zouz » de Thérapie Taxi m’est venue dans la tête et ne m’a pas quitté jusqu’à la fin de la course. Ca m’a beaucoup aidé à garder le rythme dans certaines montées :-)).

A partir de ce moment là je commence aussi à prendre conscience que tous les voyants sont au vert : je m’alimente bien, je cours en montée (là où certains commencent déjà à souffrir), et je passe les descentes tout en relâchement (pas hyper rapide, mais avec aisance, sans forcer, et sans voir venir le moindre signe de fatigue musculaire). Et petit à petit je double des gens.

De mieux en mieux

Au deuxième ravito (Sainte-Croix de Caderle, 22e km) je mange bien mais je manque de me tromper de chemin en partant (et d’entraîner le pauvre gars qui me suivait). On nous avait pourtant bien prévenu au départ qu’il fallait être particulièrement vigilant au balisage aux abord des villages.

J’ai bizarrement des souvenirs très flous de la portion précédente du parcours (entre les ravitos 1 et 2). En revanche, j’ai des images très précises de la 3e portion (entre le 2e ravito et la base de vie de Saint-Jean du Gard). En forêt la plupart du temps, on débute par deux montées suivies de descentes courtes : je trouve ces montées, que je gravis sans jamais marcher et en doublant quelques personnes (mais dans l’ensemble je suis la plupart du temps seul), particulièrement agréables. En descente j’entends parfois des gens recoller derrière, mais ils n’arrivent pas à doubler et je les lâche en montée. Arrivent alors les derniers 150m de D+ de cette longue ascension en paliers qui a commencé grosso modo au 20e km : mains sur les cuisses, et je marche en rythme avec Thérapie Taxi. Je double un puis deux coureurs ; l’un d’eux est au plus mal lorsque je le dépasse.

De mon côté, je réalise qu’après un peu moins de 30km de course les voyants sont toujours au vert. Je me réjouis en me disant néanmoins que la facture arrivera nécessairement pour moi à un moment ou un autre. En attendant, j’en profite et j’entame la descente depuis le sommet (Mont Brion) en direction de la base de vie (Saint-Jean du Gard). La descente est longue, parfois technique, mais les jambes ne me trahissent pas. Je double une relayeuse dans une des parties techniques, et sur la fin plus roulante je rattrape un autre gars. A 1km de la base de vie ils vont me sauver la mise en hurlant alors que je venais de me planter de chemin une fois encore (il faudra faire gaffe que ça ne se reproduise pas).

Une autre course commence

On se ravitaille à la base de vie, et c’est parti pour la 2e moitié. La chaleur commence à se faire sentir, et tous les gens que je croise (coureurs comme bénévoles) me parlent de Mialet comme d’un territoire maudit. On n’y est pas. Avant ça il y a une bosse et 8km à franchir. A la montée (beaucoup de bitume au début) j’alterne marche et course et je lâche rapidement le camarade que je m’étais fait à la sortie de la base de vie. Après quoi je réalise qu’en descente je suis toujours bien, et que les quadris qui d’habitude me font souffrir beaucoup plus tôt restent fidèles et loyaux. Et puis l’air de rien on arrive à Mialet, ravito tant redouté du 42e km.

Les bénévoles sont aux petits soins (comme sur tous les ravitos de cette course) : est-ce parce qu’ils savent ce qui nous attend ? Car en vérité ça n’est pas Mialet qui est redouté, mais l’ascension qui vient après.

Les difficultés arrivent enfin

A la sortie du ravito, je prends conscience qu’il fait très chaud. Je cours encore sur le plat et dans les montées douces mais à allure réduite, et je vois pas mal de gens qui ne font même plus l’effort de courir sur le plat.

De toutes façons, le plat et les montées douces ne sont pas au programme de ce qui arrive, et on entame une grimpette raide dans les cailloux et en pleine cagne. J’ai vu sur le profil qu’il y en a grosso modo pour 500D+ jusqu’à la Combe Male, et je me prépare à passer une heure difficile en plein soleil (il doit être midi et quart). Et puis de manière surprenante, après un passage raide au soleil on arrive sur une partie en sous-bois presque roulante (où je peux alterner marche et course). On retrouve néanmoins ensuite une végétation méridionale (comprendre : qui ne protège pas du soleil) et des pourcentages de pente plus élevés. Je souffre, mais je gère. Et puis… j’aperçois une bâtisse qui a l’air d’être au sommet. Je me raisonne : ça ne peut pas être déjà le ravito liquide (annoncé à seulement 6km de Miallet) ; pourtant une petite voix au fond de moi espère, et « ta zouz » m’y entraîne. Evidemment ça sera la déception, mais pire encore que ce que je pensais.

Mauvaise lecture du profil

A ce moment, je pense encore que le ravito liquide se situe à la Combe Male, lieu dont je ne sais pas à quoi il ressemble, mais dont je sais qu’il est au somment de l’ascension en cours. Sauf que… le ravito se situe en fait quelques km plus loin, au Col de l’Escoudas (et si j’y avais prêté attention, je me serais souvenu que les super bénévoles du ravitos de Mialet me l’avaient pourtant dit !). Eh oui, chaleur, espoir, mirage, désespoir.

Mais bon, je double quand même un type qui a l’air au bout de sa vie. Puis je commence à croiser régulièrement des randonneurs. Echanges rapides mais sympas. J’en avise un pour lui demander s’il a une idée d’où se situe le prochain ravito : il me répond « au moins une demi-heure » et là je me dis que c’est la merde et que je n’avance pas. Bon, en fait, ça me prendra « seulement » un quart d’heure pour rejoindre le Col de l’Escoudas (48e km, ravito liquide uniquement), où je manifeste une joie excessive devant des bénévoles (qui eux tournent au rosé 😊).

Une avant-dernière étape bien rapide

Un groupe de coureurs arrive juste derrière moi. L’avance grattée dans l’ascension a été rattrapée dans cette partie merdique entre la combe et le col. Pas grave. Je repars avec un gars sympa qui semble blessé pour une longue descente en paliers : quand c’est roulant il va plus vite mais dès que c’est technique ses jambes ne tiennent plus : la cheville tourne, il bute sur des racines, il s’énerve, et commence à avoir le moral qui flanche. Il parle d’abandon, j’essaie de l’encourager, et au bout d’un moment il me demande de repasser devant. Je comprends : dans ces moments-là je préfère aussi me retrouver seul. J’espère juste qu’il a tenu bon jusqu’au bout.

La descente devient de plus en plus roulante, et même si mes jambes vont toujours plutôt bien je commence à être fatigué. Mais depuis la base de vie (et en fait même avant) personne ne m’a doublé. Et puis la fatigue n’a absolument rien à voir avec ce que j’ai pu vivre sur d’autres courses de profil similaire. C’est complètement gérable ; en plus cette descente est passé très vite.  

Arrivé en bas, il reste une bosse (à peine 100D+) avant le dernier ravito. Je double un coureur, porté par le rythme de Thérapie Taxi. Et j’ai encore les jambes et l’énergie pour alterner avec un peu de course quand c’est plus roulant. J’avale finalement cette montée assez vite et j’entame la descente vers le ravito de Carnoulès (52e km).

Juste avant on passe dans le jardin de particuliers et on longe une piscine qui fait très envie !!!

Et une dernière étape vraiment difficile

Le ravito est assailli par les guêpes. Je réussi quand même à boulotter et à remplir les bidons, et je repars.

Tiens, j’ai pas parlé chrono. Sans réel objectif, j’avais bien envie de terminer en 11 heures. A la base de vie (qui n’est pas tout à fait à mi-course) j’en était déjà à 4h35… j’ai donc caressé l’espoir de terminer en 10h et des brouettes. Mais quand je sors du ravito il reste grosso modo 12km et j’ai une heure et demi devant moi si je veux terminer en 10 heures. J’y crois sans trop y croire.

Dans la descente je me force à pousser un peu et je double une relayeuse et un solo. Arrive la 1ère bosse de la dernière partie (il y en a deux). Dès le début de la montée, le cardio s’affole. Pas le choix, il faut gérer… mais toujours « avec ta zouz » qui m’aide à garder un rythme et à ne pas sombrer dans la lenteur.

Un gars me rattrape sur une partie bitumée. On court un peu ensemble et on se dit mutuellement que « c’est dur ». Une dame nous propose de l’eau. Je refuse poliment (on vient de remplir les bidons) quand mon comparse a une idée de génie : il demande à la dame de nous arroser complètement avec son tuyau. Le pied total !!!!! Trempés et rafraîchis, on repart et ça descend. Le copain prend du retard et je déroule. Arrive la 2ème bosse. Je double un gars avec qui on discute quelques minutes : d’après l’heure qu’il me donne j’ai 45 minutes pour terminer la course en 10 heures, et d’après sa montre il nous reste au moins 7 km et une belle montée. C’est cramé. Mais j’essaie quand même de terminer en beauté. Je souffre en montée mais je lâche mes poursuivants. J’essaie de relancer quand ça ne monte pas trop, mais je n’arrive pas à courir plus de 100m sans devoir marcher un peu.

Ca redescend un peu. Je crois que c’est la fin alors j’accélère, mais il y a un dernier coup de cul. Dur. Le cardio s’affole. Je gère. Deux personnes arrivent derrière avec un bon rythme. Une première relayeuse me double un peu avant le sommet. J’essaie d’accrocher son rythme. Pas possible. Une deuxième relayeuse (celle que j’avais doublée à la sortie du ravito de Carnoulès) me passe au sommet, et là je m’accroche tant bien que mal. Je la garderai en visu pendant toute la descente.

Puis c’est la fin : un peu de bitume, traversée du gardon (putain que ça fait du bien de mettre les pieds dans l’eau !), et remontée vers le parc.

Je termine en 10:23:50, à la 23e place. Le camarade qui m’a obtenu un arrosage gratis a dû refaire son retard car il termine 7 secondes derrière moi !

Très content de cette journée. Les 12 derniers km ont été très difficiles, mais j’ai eu des sensations extra pendant les 2/3 de la course. Pour ne rien gâcher, je gagne 13 places entre la base de vie (où apparemment je pointais à la 36e place) et l’arrivée. Pour mon niveau, c’est une excellente gestion de course !

J'ai engrangé de la confiance pour l'Hérault Trail, que je ferai donc sans les bâtons.

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