L'auteur : Miche
La course : La Grande Traversée Sud de France
Date : 5/10/2018
Lieu : Vernet Les Bains (Pyrénées-Orientales)
Affichage : 1951 vues
Distance : 119km
Objectif : Terminer
Partager : Tweet
9 autres récits :
Deux bonnes raisons pour m'aligner au départ de la Grande Traversée : 1) accompagner Pierre, un copain d'entrainement, sur son premier 100 km et 2) tenter un plus de 100 km après 3 ans d'interruptions et diverses galères.
Côté préparation, ce fut scientifique, avec un 50 km en avril pour se rassurer (Trail des Citadelles) et ensuite pas mal de sorties montagnes. Pierre a été un peu plus assidu que moi dans les dernières semaines et j'ai fait l'erreur de sortir en montagne uniquement sur du très technique. Mon capital vitesse n'est donc pas fameux.
Côté organisation, on rejoint Argeles sur Mer le vendredi matin, pour monter dans le bus de l'orga qui nous emmène au Vernet. On y est un peu après midi. La pasta party est cool : chacun se sert. Je me gave de pâtes une dernière fois. Puis tentative de sieste et recharge des appareils électroniques. Je pars avec mon smartphone comme GPS et je voudrais le garder allumé tout du long. j'ai une batterie en plus pour tenir la distance et j'espère trouver des prises dans les bases vie.
16h20 : le premier et le second du 100 miles arrivent, relativement frais. Puis briefing : tout va bien, la météo est bonne. 17h on sort du gymase pour se rendre sur la ligne de départ en centre ville. Dernières blagues, dernières photos et contrôle des puces. Les troisième et quatrième du 100 miles nous doublent et sont largement applaudis.
17h30 : les 229 coureurs sont lachés.
Zig zag dans la ville puis piste large. Je suis dernier, tout va bien, je me sens à ma place pour ce démarrage. Problème : je vois Pierre juste devant moi qui devrait déjà être en milieu de peloton. Je le laisse devant et on attaque les pentes un peu plus fortes. Ca bouchonne un peu quand le sentier se rétrécit. On arrive au 4ème km où un ravito supplémentaire est installé. Je prends quelques tranches de jambon et un peu d'eau mais je ne m'arrête pas trop. Je passe devant Pierre et je lui explique qu'il n'est pas à sa place. J'imprime un ryhtme un peu plus soutenu pour qu'il ne se retrouve pas trop loin et puis de toute façon, cela monte raide et j'aime bien.
Par moments on se retrouve bloqué quelques minutes derrière un concurrent à la peine, puis dès qu'on peut doubler, je double. Je m'apercois que j'ai pris la mauvaise altitude de départ pour le Vernet et mes estimations sont donc pessimistes de 20 mn, donc j'ai 20 mn d'avance sur les prévisions ! Ca me fait faire plein de calculs, j'aime bien ça. 20h, on arrive sur la piste des Cortalets. Je sors la frontale et la seconde couche pour ne pas attraper froid. Coucher de soleil derrière les arbres.
Dernières photos de la journée :
Au refuge, il y a foule. Je prends deux soupes et mange beaucoup. Je le sentirais plus tard... Au bout de 15 minutes, je cherche Pierre pour repartir mais il ne répond pas à mes appels. Il a du repartir avant : c'est mieux ainsi et tel qu'on l'avait convenu. 50 mètres de montée puis on attaque la descente. D'abord pas trop raide puis on marche sur du métal, reste d'un objet volant qui s'est écrasé là dans les années 50.
Peu après, on vire à gauche et c'est raide. J'ai rangé les batons et je descends bien. Je double un peu. En bas de cette bonne descente, un groupe de jeunes nous encourage en hurlant comme des fous. Ca réveille bien. Merci à eux. A partir de là on attaque une très très longue traversée à flanc. C'est parfois au-dessus d'un gros ravin et heureusement qu'il fait nuit. Enfin une courte descente puis une courte remontée et nous voilà au col qui tombe sur le refuge de Batère.
Pas de Pierre. On commence à s'échanger des SMS à partir de là et je sais qu'il a déjà 30 mn d'avance. Un peu de route puis un sentier qui emprunte plus ou moins le lit d'un ruisseau nous fait perdre beacoup d'altitude. Je vois Arles au loin mais il faut encore descendre. Un cable suit plus ou moins le sentier (au sol) et nous oblige à bien regarder où on met les pieds.
J'arrive à Arles sur Tech vers 1h du matin. C'est un gymnase immense. Je me change complètement (sauf les chaussures) y compris douche sur les pieds. Je mange et je recharge le smartphone. 35 mn de pause qui font du bien. Quand je repars je suis tout seul mais je retrouve vite un gars qui s'est fourvoyé à la sortie de la base vie. 3 mn plus loin il rate encore un embranchement. On monte raide de nouveau sur un très bon sentier. J'ai un peu la nausée. C'est inhabituel. Je me sens un peu patraque aussi.
Vers 3h15 je décide de me poser sur le bord du chemin. Je mets le réveil pour 4h mais finalement je ne dors que 15-20 mn. Quand je repars, je pête le feu. Génial, première fois que j'arrive à dormir bien en course.
J'arrive à Montalba un peu avant 5h. Je m'apercevrais après que j'ai perdu une quinzaine de places mais au moins je suis reposé. Le ravito n'est pas très drole et donc je repars vite. On attaque la seconde grosse difficulté. 600 m de D+ sur une trace droit dans la pente. Je suis bien et donc ca passe bien. Je double pas mal de coureurs à la dérive. Arrivé en haut, ce n'est pas fini, il faut encore se taper des petites montées descentes pour rejoindre le Roc de France, que j'ai aussi oublié sur mon profil. Il faut même mettre les mains pour gravir un petit couloir. Juste après le sommet, on rejoint une route en ciment. Des gendarmes ont fait un feu pour se réchauffer. Le soleil se lève.
Je cours en descente sur la route. Puis sur une piste en terre. C'est chouette d'avoir encore les jambes pour descendre comme cela. J'ai un peu mal aux genoux, mais sans plus. 850 m de descente très roulante. Quand j'arrive à las Illas, je suis quand même bien entamé (mais j'ai regagné 20 places!!). Ravito exsigu et donc express. Quand j'en ressors, je tombe nez à nez avec Grumlie et Thierry venus m'encourager. Ca fait chaud au coeur et cela me remonte le moral (il parait que je fais une sale tête quand même). J'ai maintenant 1h30 de retard sur Pierre.
On commence maintenant avec de long plats. J'alterne marche et course. Ca discute. On double aussi des randonneurs qui font le GR10. Les balises ne suivent pas toujours le tracé prévu (c'est le GPS qui me le dit). En vue du fort de Bellegarde, je me fais doubler par le premier du 79 km , puis le second qui est une femme. C'est d'ailleurs elle qui finira première à Argeles. On passe sous le fort et on entre au Perthus.
J'ai très mal aux tibias depuis quelques kilomètres dans les descentes. Je me nettoie les pieds et je me change encore une fois puis je vais voir le kiné pendant que le téléphone se recharge. C'est une tendinite du releveur ! Il me masse et je hurle intérieurement. Il va falloir ralentir en descente si je veux terminer me dit-il. Houlà, ca va être chaud alors. 1h d'arrêt et 2h30 de retard sur Pierre. Simon, notre coach commun nous a reboosté et confirmé que maintenant on allait au bout.
Ca monte et j'aime bien ça et cela ne fait pas mal aux tibias. Cette troisième grosse montée est plus tranquille. Il y a un ravito non prévu à mi pente animé par un club de rugby. Je continue à un bon rythme jusqu'au col de l'Ouillat et son refuge. Les bénévoles se préparent à baliser une descente alternative pour la soirée car des orages sont annoncés sur les crêtes.
Effectivement, on continue à monter et cela souffle très fort là haut. Des scandinaves sont en short alors que nous avons tous sorti l'anorak. On passe le Puig Neulos, point culminant de cette dernière section et on plonge raide. J'enlève les talonnettes pour moins solliciter les releveurs. Je m'appuie sur les batons pour soulager les jambes. Mais rien n'y fait, cela reste très douloureux. Tout le monde me double, les 70 km, les 117 mais aussi les 172. Je suis une limace. J'arrive tout de même à avancer en marche avant. J'ai entendu tant de récits de coureurs contraints à la marche arrière dans ces cas là...
Enfin le ravito de la Vallée Heureuse. Et je confirme : je suis heureux d'avoir terminé cette descente. Une courte remontée nous emmène aux abords d'un Ermitage. On voit la mer, je sais que je vais terminer. D'ailleurs Pierre vient de terminer et je ne peux que le féliciter de sa performance pour son premier 100 km (qui en fait 119 au passage !).
La descente sur la plaine est digne du coteau Kergueven : végétation serrée, des virages dans tous les sens, des piquants, des cailloux. Il faut rester calme. Je pense à ceux qui vont la passer de nuit (et ce sera d'ailleurs épique pour certains sous l'orage). Puis un long plat, mi-route, mi-piste. Et le dernier ravito qui n'arrive pas alors que je n'ai plus d'eau et qu'on est encore hors de la trace prévue.
20h : dernier ravito. Plus que 10 km. Bonne ambiance encore une fois au ravito. Je repars avec un petit groupe et on attaque un dernier tout droit dans la pente avant de faire une autre longue traversée. Je suis au taquet en marchant : 5 ou 6 km/h. Je compte les centaines de mètres qui défilent mais elles ne défilent pas vite. Les lumières d'Argeles au loin, le chateau de Valmy puis on passe sur la voie rapide et on entre dans Argeles. J'ai les plantes de pied qui commencent à chauffer. En revanche la tendinite du releveur ne me fait plus souffrir.
Je tente de courir sur la route. Je tiens 300 m mais non cela fait mal aux jambes et puis à quoi bon. 3 km le long du port puis le long de la plage (enfin je suppose car il fait nuit noire et je ne vois même pas la mer). Et je vois l'arche d'arrivée au loin. Je tombe dans les bras de Yves, un copain chronométreur. Il me demande : "C'était comment ? " "C'était long !". Pierre est là aussi. Je finis donc 4h30 après lui au final.
Je n'ai pas trop la tête à discuter en fait. Je n'ai pas spécialement faim même si je rêve d'une pizza depuis quelques heures. On file à l'hôtel qu'il a réservé et ni l'un ni l'autre ne met très longtemps à s'endormir.
7h le lendemain, je passe au PC course discuter avec l'équipe d'organisation qui est super rodée et qui n'a pas eu de gros soucis à déplorer. L'orage a fait peur à certains coureurs sur la fin. Je discute longuement avec Jacques, ancien commandant du PGHM de Pierrefitte, qui nous a beaucoup soutenu dans l'organisation du GRP la première année. Il a fait une chute de 19 mètres en escalade il y a 4 ans, a passé 1 an à l'hosto et en centre de rééducation et a failli ne pas pouvoir remarcher. Sa vision du monde a complètement changé et il en profite à fond tant que ses articulations (du moins ce qu'il en reste) le laissent à peu près tranquille.
Debriefing à chaud avec Pierre dans la voiture au retour : c'était chouette.
Conclusion : oui, il y a des parties roulantes sur ce 100 miles du Sud de France, mais il y a aussi du très technique, des montées hyper raides et des descentes tout aussi raides. Donc il vaut mieux être complet : coureur et montagnard. Super ambiance tout le long avec des très nombreux bénévoles et des ravitos supplémentaires qui font du bien.
Accueil - Haut de page - Aide
- Contact
- Mentions légales
- Version mobile
- 0.03 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !
1 commentaire
Commentaire de grumlie posté le 20-10-2018 à 16:34:15
Comme quoi une préparation scientifique, c'est du tout bon.
Effectivement tu avais une sale tête mais le moral était bien bon du coté de Las Illas.
Bravo pour cette chouette aventure.
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.