L'auteur : casimirdeh
La course : Ironman 70.3 du Pays d'Aix
Date : 13/5/2018
Lieu : Peyrolles En Provence (Bouches-du-Rhône)
Affichage : 1711 vues
Distance : 113km
Objectif : Terminer
Partager : Tweet
2 autres récits :
5h34. La navette démarre, et je me demande ce que je fous là. J’ai l’impression d’être dans une charrette avec tout un tas de condamnés un peu fous, et très masochistes…
Pour comprendre ce que je fiche ici, il faut revenir quelques mois en arrière, fin août. Je venais d’emménager juste au-dessus de la piscine Keller, que je vois tous les jours depuis mon appart’, grande ouverte devant ce soleil estival, mais noire de monde. Je me suis donc renseigné sur les moyens d’aller y nager en club en configuration 50m, de préférence le matin, et il se trouve qu’il faut pour ça faire partie d’un des 2 clubs de triathlon qui s’y entraine. Ça tombe bien, le tri je voulais m’y mettre sans oser depuis quelques temps : je ne nage pas trop mal, j’ai déjà fait quelques semi et un marathon, et j’ai un vélo de course qui traine dans ma cave depuis 3 ans – à l’époque où j’avais voulu m’y mettre tout seul puis abandonné rapidement avant de partir à l’étranger. Je me renseigne, envoie un mail et vais faire une séance d’essai et me voilà inscrit au fort sympathique RMA Paris Triathlon.
Puis il y a quelques mois, je me suis dit que ça pourrait être sympa d’en faire un pour de vrai, de triathlon. Je me suis mis à comparer les L car c’est la distance qui m’attire le plus (et que la galère logistique me fait dire que si c’est pour traverser la France pour faire du sport, autant que l’effort soit conséquent), et en comme je ne suis pas bon cycliste, j’ai cherché les plus faciles à vélo.
Mais bon, des L en début de saison, en France y’en a pas des masses, et en lisant (un peu trop) rapidement es messages sur des forums, me voilà inscrit à Aix. Avec 1200 de D+, c’est pas exactement le plus facile pour les cyclistes lourds comme moi, mais bon, on fera avec…
Heureusement, je me suis bien entrainé avec le RMA, régulièrement et plus intensément pendant 2 stages de 3 jours en février et mars. Greg Ravise m'a bien fait soufrir mais ça a payé ! J’ai emmagasiné de la confiance et boosté ma condition physique. J’étais à peu près serein jusqu’à il y a 4 jours, quand j’ai regardé de nouveau la météo et que les prévisions se sont salement dégradées. J’ai beau avoir revérifié à peu près toutes les 2 heures depuis, la météo prévue ne s’est pas améliorée et a même empiré. Pluie toute la journée, parfois forte et température qui ne dépasse pas 10°C… Du coup je stresse. Avant de partir de la gare de Lyon vendredi (avant-hier), dans le taxi, je commence à stresser en pensant à mes pneus lisses de 23mm. Après avoir spammé tout le groupe WhatsApp du RMA avec mon stress pendant 10 minutes, j’ai détourné le taxi pour qu’il passe par le Decathlon Rive Gauche, ai dit au vendeur « bonjour, je voudrais des bons pneus pour faire de la compétition sous la pluie » ai pris ce qu’il m’a donné et suis reparti rapidement attraper mon train pour Aix. Après encore un peu de stress au moment de changer le pneu quand je me rends compte qu’il ne passe pas dans les freins – à peu près calmé quand j’ai vu que la manipulation était dans le champ de mes très grandes compétences de mécanicien – je suis parti les tester et reconnaître la dernière bosse du parcours (Le Tholonet – Aix) sous un soleil de plomb.
Samedi, j’ai donc découvert le parcours de check-in d’un triathlon : préparer la veille tout ce dont on aura besoin aux transitions, laisser les sacs dans les aires de transition, aller déposer son vélo – en prenant bien soin d’avoir son dossard accroché en 3 points et le casque sur la tête avec la jugulaire attachée pour marcher à côté du vélo…, parfois il vaut mieux pas poser trop de questions :).
Et tout ça donc pour atterrir dans cette navette de 5h34… Je suis réveillé depuis 1h et serai dans l’eau d’ici 2h. La dernière vérification des prévisions météo n’a pas fait de miracle. Le ciel est couvert mais il ne pleut pas (encore), ça ne saurait tarder. Je règle les derniers préparatifs, regonfle mes pneus (un conseil : même s’ils disent que ça ne sert à rien, il faut tout de même apporter sa pompe, ça évite de stresser et on a des stickers en rab avec notre numéro de dossard donc on peut l’identifier dans le panier des sacs des streetswear). Un dernier point : sachant qu’il faisait froid j’avais demandé à ma compagne de rapporter une veste de cyclisme mi-saison, mais ne l’ai eue qu’après avoir déposé mon vélo. Comme il est interdit de rajouter des affaires sur le vélo, je la compacte et la protège dans un sac en plastique noir, de la même couleur que mon vélo, et place le tout dans un porte bidon. Sur la course d'Aix il est en effet interdit de toucher à son sac de transition Natation->vélo le matin de la course et je dois donc ruser pour pouvoir rajouter la veste. Certains arbitres rappellent les athlètes qui ont laissé des ceintures porte dossard sur le guidon, donc j’espère qu’ils ne verront pas ma veste. Je pars ensuite me préparer pour la nat’, mon point fort. L’eau est à 20°C donc la combinaison est autorisée. Ça ne m’avantage pas trop, mais bon comme mon but est de finir plutôt que de faire un chrono ou un classement je serai moins fatigué donc ce n’est pas plus mal. Je mets donc ma combi néoprène par-dessus ma trifonction, et vais me placer dans le premier sas (moins de 30’). Je regarde les pros partir à 7h30 puis c’est à nous. Le départ est bien organisé. Contrairement à quelques courses en eau libre que j’ai pu faire, il n’y a ici pas de bagarre au départ : on part par groupe de niveau, par groupe de 6 nageurs toutes les 8 secondes. Les départs s’égrènent et je me retrouve rapidement au 1er rang. Bip, bip, tuuuut. C’est parti pour mon tout premier triathlon ! Je m’élance donc dans l’eau, un peu trouble mais ni trop chaude ni trop froide. Le parcours est en forme du U, j’essaie de trouver « des pieds » derrière lesquels me caler mais n’y arrive pas. LE souci dans le premier sas est qu’il y a aussi bien des nageurs en 29m30s que des nageurs en 24min, donc je double un peu, me fais beaucoup doubler mais ne sais pas si j’ai une allure correcte. Finalement ma montre n’annonce que je passe les 500 premiers mètres en un peu plus de 7 minutes. Je suis donc dans les clous. Le retour est un peu plus dur car on a 2 lignes de nageurs en parallèle quand on regarde sur le côté et je me déporte donc un peu trop. Mais j’arrive à maintenir un rythme d’un peu plus de 1’30’’/100m sans m’essouffler. Vers la fin, je mets un peu plus d’intensité dans les jambes pour y faire circuler le sang et les préparer à la course de transition et au vélo, ce qui fait monter le cœur. Je sors finalement de l’eau en un peu plus de 28 minutes et en forme. Objectif atteint, c’est bon pour la confiance. En plus il ne pleut toujours pas !
Il faut ensuite courir 400m jusqu’à la zone de transition. Je récupère mon sac, y mets ma combinaison néoprène et prends mes chaussures de vélo. Je voulais initialement laisser les chaussures sur le vélo et rouler sans chaussettes pour gagner du temps, mais vu la météo j’ai préféré perdre 1 minute et mettre des chaussettes puis courir avec les chaussures et cales aux pieds plutôt que de me geler les pieds et de ne plus pouvoir courir ensuite ; on s’amusera à gratter des secondes la prochaine fois ! J’avais mis plusieurs K-Way dans mon sac – un très léger et un normal --, j’opte finalement pour le moins léger. Je cours ensuite vers mon vélo et suis heureux de voir que ma veste y est toujours. Je m’habille donc à côté du vélo puis jette le sac qui protégeait la veste. A ce moment une arbitre me tombe dessus : je commence à balbutier un truc me pensant pris en faute, avant qu’elle aperçoive que j’avais bien jeté le sac dans une poubelle publique et que c’était donc autorisé. J’enfourche mon vélo est c’est parti pour près de 90km !
Le temps est toujours clément, et les routes sympathiques. Le début du vélo est difficile pour les bons nageurs : on se fait rattraper à toute allure par des cyclistes avec des roues lenticulaires et des casques aéro toutes les 2 minutes… D’autant que je ne force pas trop car je ne sais pas vraiment quelle quantité d’énergie il me faut garder avant le col du Cengle au km 71 et surtout avant le semi-marathon final. J'ai pris sur mon vélo le GPS de mon chat (on utilise un petit boitier GPS qu'on lui fixe au collier quand on part en vacances pour ne pas la perdre), pour que mes supporters puissent me suivre à la trace (même si l'appli d'IronMan est bien faite en fait) ; ma copine peut même faire sonner le boitier à distance (utile pour retrouver le chat endormi dans un endroit improbable, mais aussi pour m'encourager et me rappeler qu'elle me soutient à distance :p !)
La première heure de vélo se passe sans encombre. Je maintiens une moyenne correcte. Je continue de me faire dépasser mais vois aussi des cyclistes marcher à contre sens et revenir vers les stations de ravitaillement pour de l’aide mécanique, ou simplement avec des pneus crevés. Je suis bien content de mes gros pneus, qui certes me freinent un peu mais me rassurent car je ne suis pas très à l’aise pour changer une roue. Au bout d’1h de vélo, la pluie attendue commence à arriver. Je dois m’arrêter sur le bord de la route pour fermer ma veste et mon coupe-vent car manque de me casser la figure en le faisant à vélo puis repars. Le parcours est assez difficile, avec beaucoup de virages et de relances, ce qui fait que je n’ai pas le temps de me mettre à bourriner sur les pédales et me fatiguer. La première grosse descente, que je craignais, au km 53 se passe bien, sous une pluie légère qui force tout le monde à la prudence. Puis la course continue dans un joli paysage provençal (même si les cigales et le soleil étaient en vacances…). La pluie s’arrête quelques km avant la difficulté du parcours : le col du Cengle qui nous permet de franchir la montagne Sainte victoire. Heureusement, je ne me suis pas trop épuisé jusque-là et le col est moins raide que ce que je pensais. J’avale donc tant bien que mal les 3km de montée ; je m’étais fait une antisèche avec le parcours mais l’ai laissée s’envoler en route. Heureusement, des indications au sol indiquent régulièrement la distance restant avant le sommet (il y a aussi des inscriptions pro Mélenchon et LFI un peu partout sur la route, mais on ne sait pas trop ce que ça fait là). Une fois le col franchi en revanche, le déluge reprend de plus belle, et je me retrouve même sous la grêle. La descente est dangereuse, et je vois de nombreux abandons ou blessés au bord de la route, ce qui m’encourage à ré-tripler de prudence. Je me cale derrière un autre cycliste, vraiment lent aussi et nous créons un petit bouchon derrière nous. Finalement on se fait doubler et je double aussi car il est tout de même très lent. Le déluge est parfois tellement intense que je me mets à rire en me demandant ce que je fiche là. Un des points positifs est que je cherchais à faire une "pause pipi" (mais sans faire de pause), mais n'arrivais pas à me lacher car je n'avais jamais pratiqué en roulant (d'autant que c'est moyennement autorisé et n'osais pas le faire quand il pleuvait moins), mais le déluge aidant, je parviens à m'alléger, et à me réchauffer naturellement par le même occasion :) (pour les non initiés qui sont dégoutés : 1. fallait pas lire 2. c'est assez courant en triathlon 3. Il pleuvait tellement fort que j'étais la complétement lavé la minute qui a suivi :p). Les conditions sont dures mais poussent vraiment à la prudence et peut être que je serais tombé s’il avait fait beau et qu’il n’y avait pas eu des bénévoles à chaque virage pour nous demander de ralentir.
Je finis le vélo par la montée après le Tholonet, que j’avais déjà reconnue puis rentre dans Aix. Je suis heureux en posant mon vélo en 3h05 car je sens que je n’ai pas puisé outre mesure dans les réserves et que sauf catastrophe je serai finisher. C’est tout de même rigolo de se dire « c’est bon plus qu’un semi-marathon et c’est fini » Le début de la course est toutefois difficile : le parcours est plus casse-patte que ce que j’avais prévu, avec un beau raidillon dès le début. On passe ensuite dans un parc an centre d’Aix. Je pense qu’ils n’avaient pas prévu la pluie car on se retrouve donc à faire 1km de Mud Day tous les 7km… Le parcours est en effet constitué de 3 boucles de 7km avec 3 ravitaillement par boucle. Il est donc assez facile de cloisonner la course en 10 parties, ce qui aide bien mentalement à la finir. Je boucle le premier tour en une grosse demi-heure et récupère mon chouchou au poignet– on récupère 1 chouchou par tour et il en faut 3 pour pouvoir franchir la ligne --. De plus en plus de coureurs courent avec des couvertures de survie, ce qui donne une ambiance assez apocalyptique. J’aperçois ma famille venue m’encourager au début du 2e tour et cela fait bien plaisir et redonne de l’énergie. Les conditions sont assez proches du semi-marathon de Paris 2016, et l’avoir fait m’a mis en confiance pour me convaincre que ce n’est pas si horrible que ça et que je serai encore en vie à la fin. Le 2e tour se passe sans encombre alors qu’habituellement c’est le 2e tiers des courses que je trouve le plus dur mentalement. Ca commence à tirer dans le troisième tour mais la perspective d’être bientôt finisher – et les gels d’énergie – aident à tenir le coup. Le dernier kilomètre est du pur bonheur, avec une réelle satisfaction qui fait oublier le froid et la pluie. Je souffre étonnamment moins que lors des semi-marathons seuls que j’avais fait à bloc, où quasi systématiquement les 5 derniers kilomètres sont une souffrance forte.
Je récupère mon troisième chouchou et peux donc sprinter vers la ligne d’arrivée. Un semi Iron Man bouclé ! (ou plutôt Rusted Man vu le temps). En 5h21, ce qui est un temps honorable en plus vu les conditions et mon expérience sur la distance ! :-)
J’apprends un peu plus tard qu’il y a 30% d’abandons (contre 5% en moyenne sur cette épreuve), et de très nombreuses hypothermies. Je suis heureux d’avoir pu résister, grâce à un mélange de chance, de bon coupe-vent et de physique pas très sec :-) et espère que le prochain sera un peu moins épique :-). Je m’en souviendrai en tout cas de ce premier triathlon !
Accueil - Haut de page - Aide
- Contact
- Mentions légales
- Version mobile
- 0.06 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !
1 commentaire
Commentaire de fparchemin posté le 11-10-2018 à 00:26:26
Ahah, le gps du chat, excellent ! C'est même un bon temps sur ce format bravo.
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.