Récit de la course : 100 km de Bienne 2014, par pitas

L'auteur : pitas

La course : 100 km de Bienne

Date : 14/6/2014

Lieu : Bienne (Suisse)

Affichage : 1186 vues

Distance : 100km

Matos : Une paire de chaussure, un suiveur, de l'eau et des compotes pour peter pendant 100 kil...

Objectif : Objectif majeur

3 commentaires

Partager :

5 autres récits :

Biel Lauftage 2014 - "A un moment, on voit Bienne"...

Comme toujours, le plus simple quand on fait de la course à pied c'est de s'inscrire, et le défi est d'arriver "entier" sur la ligne de départ. Enfin ça c'est la théorie pour le EDDM, pour l'ADDM je découvre que c'est pas tout à fait pareil, "same same but different"...

 

Apres 4 mois d'entrainements axés sur du foncier et de l'endurance longue, me voila presque entier sur la ligne de départ. C'est long quatre mois quand on y pense, mais tellement court quand on se retrouve dans cette masse de coureurs, avec souvent tous la même question en tête, "suis-je prêt? ai-je vraiment fais tout mon possible pour me préparer pour ce moment?"...

A Bienne, c'est un peu particulier, il n'y a pas que des coureurs.Il y a des marcheurs, des militaires (marcheurs avec le paquetage et coureurs aussi), des couples, des relais par 5 (estafettes), marathon et semi aussi mais eux partent un peu plus tard). Bref, il y a du monde au portillon. Il y aussi pas mal d'anciens, on croise un monsieur de 74 ans qui en est à sa 30 eme participation, et à priori sur le parcours il ne sera pas le seul que l'on croisera (comme Reto, 35 participations!!). Bref on a vraiment l'impression de faire corps avec un monument, un peu spécial...

 

J'arrive donc à Bienne en milieu d'après midi avec mon suiveur et son vélo, récupération du dossard, direction la plage et le camping. On pose la tente et direction le bar, pour profiter du beau (et très chaud) temps. On est 3 heures avant la course et mon niveau de stress est à peu près le même que quand je répond à un questionnaire en ligne, j'en parle même avec mon pote, je me sent serein et confiant. En fait, peut être à tort, mais j'ai axé mon entrainement sur de l'endurance longue en confort, autrement dit j'ai toujours mis une limite à ne pas me griller. Et finalement, à 3 semaines de l'échéance je me dit que je vais réellement en chier et il va me falloir 3 semaines pour accepter et m'y préparer, comme j'ai lu quelque part "les muscles te font tenir debout, et c'est la tête qui te fait avancer". Du coup une fois que c'est admis, c'est plus simple... un peu comme quand on va chez le dentiste, on prend rdv 2 mois avant, ca laisse le temps d'anticiper ;)

 

Après avoir par pure coincidence retrouvé dans la foule ma petite tribu et des amis venus m'encourager voir, je laisse partir mon "coach", je le retrouverai dans 20 kil à Lyss. Je lance un "à demain" à mon fan club -toujours serein et confiant-, c'est sûr je vous revoit demain matin ici même leur dis-je! Et je prend la direction du sas de départ, il y a tellement de monde que je me retrouve en dehors du sas, autour de moi ça parle allemand (et pas que suisse allemand), polonais, russe.. bref un beau melting pot, mais visiblement c'est pas ici que je vais faire des connaissances.

 

Le départ est donné et je passe la ligne après 1:30. Traversée de la ville sous une foule d'applaudissement, une ambiance vraiment exceptionnelle. Mais il fait super chaud, premier ravito à 3,5 km de course, deux verres d'eau sur la tête et je me cale sur mon rythme prévu sur un tranquille 5.35m/km; l'objectif du jour est d'approcher les 10heures (idéalement en dessous). La première heure est paisible, il me hate de sortir de la ville retrouver le noir, de me mettre dans ma bulle. Vers le km 12 on se fait rattraper par les premiers du semi, j'ai l'impression de me trainer, c'est super perturbant, mais focus, eux ne font que 21k (du coup je remarque que tout les "short distance" ont une étiquette dans le dos, super pratique). Ils s'arrêtent à Aarberg où nous nous ferons dépasser par la première marathonienne, une fusée en bikini...impressionnant! Mais surtout l'ambiance est incroyable...bon c'est soir de match aussi, donc entre les buts du match Espagne/Hollande on a droit a des "HOP HOP" et des "holas", c'est magique et surtout super motivant!

 

Je retrouve mon "Coach" à Lyss, trop content de le revoir et de pouvoir parler un peu. On tchatche pas mal pendant une bonne heure, il me raconte le match, on est très détendu et par dessus tout je tiens le rythme, toujours en confiance...

 

Je prend garde à bien m'alimenter (pompotes et purées salées de mon cru) et m'hydrater (eau uniquement). Mais je dois avoir mis un truc qui ne fallait pas dans mes purées salées et au 38km je commence a ressentir des débuts de crampes d'estomac qui vont aller en s'intensifiant jusqu'au premier marathon. D'une situation pas simple, je passe à quelque chose de très compliqué à gérer, rajouté à cela les premières sensations de l'effort dans les jambes et les effets de la nuit, tout cela m'empêche de relancer comme je veux. Il faut dire qu'entre le 38 et le 55 eme c'est quand même pas mal vallonné, pas simple. Je serre les dents à fond, je me terre un peu dans un silence profond...ça va passer, ça doit passer! Chaque arrêt devient super dur à gérer; comment est ce que je dois alimenter la machine? en plus de ca les essais pour faire sortir "l'ennemi" ne marcherons pas. Donc ce sera eau pendant 3 heures...

 

Ma foi, quand on y est on finit... Le 55 eme kil, c'est Kirchberg, c'est un peu plus de la moitié, c'est le moment ou je vais me retrouver seul pour 12 kilométres, à traverser une forêt en mode single track. Ali, mon coach, me dit de rien lacher, prendre mon temps, qu'il m'attendra le temps qu'il faut, et que cette course on va la finir. Question objectif autant dire que c'est rapé, on va terminer la tête haute, je me dis que 11/12h c'est encore jouable. Je prend ma gourde, et le ventre vide, je me dis qu'un verre de bouillon ne pourrait pas me nuire plus que ca, et hop me voila en route.

Le soleil commence à se lever, et je rentre dans la forêt et là on est d'un coup en Asie (d'ailleurs un Cerium la nomme "la piste Hô-Chi-Minh"), ca piaille de partout, il ne manque plus que les singes hurleur pour parfaire le tableau. Mes crampes commencent à diminuer et je me met a cogiter me plan de finir "tranquille" en ponctuant ma course de long moment de marche. Je me dis que pour mon pote je peux pas me laisser aller à marcher, j'essaye d'imprimer un bon rythme en me collant deux femmes d'un relais pas très rapides mais suffisant pour me porter un bon bout...  Et d'un coup miracle, je sent un mieux, je continue à serrer les dents, mais je sent que ca passe. Arrive le ravito du 61eme, je n'ai rien vu passer, je reprend un bouillon et hop j'embraye, je suis seul, mais j'arrive à garder mon rythme, ca "coule", enfin!

 

67 eme je retrouve Alistair qui s'est perdu en route et qui est surpris de me voir arriver si vite! on repart sans s'arreter, je ne sais pas combien de temps mon coup de mieux va durer alors autant en profiter... j'enchaine les kilomètres, on reparle un peu, le soleil fait clairement du bien au moral, et le panneau du 70 eme est un soulagement, plus que 30, on a dépassé les 2/3...c'est clair je vais le faire!

 

Le ravito de Küttigkofen est un rappel des 9heures de courses que je viens de me coller, de l'energie que j'ai du déployer pour contenir mes douleurs gastriques (d'ailleurs Ali est sûr que j'ai de quoi rentrer dans le Guiness avec la plus longue distance parcourue en pétant, mort de rire!). Je me pose un coup, prend des part de tartes de linz (gateaux à la confiote) et je repars tranquille, il reste une grosse bosse bien assassine dans 5/6 kil, une descente et encore 20 kil est c'est le bonheur...

 

Je chope encore quelque fraise que j'avais embarqué, et essayes de retrouver un rythme de course... A l'approche de la "bosse" de Bibern, mon coach me fait une séance de sophrologie express, et ça marche à fond, je suis motivé comme pas possible, je zappe l'arrêt au stand, et avale la montée de Hauptstrasse en 6 minutes (sur le segment de Strava j'ai le 2eme meilleur temps!) incroyable! ca y est c'est revenu, j'enchaine avec une descente, et malgrè quelques douleur de genou je me lache. Je zappe aussi le ravito du 80eme, j'ai ce qui faut sur le vélo, j'ai la pêche et je dois en profiter.

 

Après du 85eme au 95eme ce sera un Cyrano 15/1 puis 9/1 puis x/y. Je me sent exténué, vidé, je veux voir Bienne. Ca va être surtout un partie ou le mental va faire tout le boulot. Au passage du 90eme, Ali me rappelle qu'on fait ça "tranquille" entre pote en 40 min entre midi et deux. Je vais mettre plus d'une heure finalement en alternant de courtes périodes de marches et de soit disant long moments de course.

 

Puis le 95 eme arrive enfin! "il vous reste 5 kil", putain j'y suis! Allez je me dois de finir la tête haute, avec l'aide d'Ali, je me rebooste et décide de ne plus marcher plus et au contraire je me dis que je gratte tout ceux que je vois... je colle ma vitesse de pointe à 9,5km/h et j'envoie....4kil, 3kil, petit calcul je vais faire dans les 12heures, ca ne changera rien mais ca me fait plaisir et j'ai envie de déguster ces derniers kils; arrivée dans Bienne, 2kil, arret au panneau du 99eme pour la photo, les enfants sont sur le bord de la route, ils me rejoignent, j'ai des larmes pleins les yeux, un virage, des applaudissements, un dernier virage, un sprint, un bip, une larme, une médaille, une accolade avec Ali, encore une larme, deux bières (sans alcool)... je suis sur un nuage...

 

 

Avec Bienne, j'ai appris 3 choses, j'ai ré-appris a courir, j'ai appris que je pouvais courir longtemps, très longtemps et que j'aimais ca... mais par dessus tout, j'ai appris l'humilité des longues distances...

 

 Ah au fait, on ne voit quasi jamais Bienne de loin, et soudain, a un moment donné on est dans Bienne....

 

 

3 commentaires

Commentaire de heidi posté le 18-06-2014 à 09:06:51

Ah oui, super dis-donc! Tu as su trouver les ressources nécessaires grâce à ta patience entre autres. C'est une qualité indispensable sur du long. A lire ton récit, je signerais presque pour l'an prochain :)) Bravo à toi!!

Commentaire de Fab06 posté le 18-06-2014 à 10:12:33

Oui encore bravo. C'est vrai que cette distance apprends vraiment l'humilité. Mais je pense que je reviendrai l'an prochain pour faire mieux. Peut-être que je t'y croiserai ;)

Commentaire de GoRun11 posté le 19-06-2014 à 11:18:56

Félicitation !! C'est un super temps pour une 1ère sur 100Km !!

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Votre annonce ici !

Accueil - Haut de page - Aide - Contact - Mentions légales - Version mobile - 0.06 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !