Récit de la course : Alpe d'Huez 21 2012, par c2

L'auteur : c2

La course : Alpe d'Huez 21

Date : 15/8/2012

Lieu : L'Alpe D'Huez (Isère)

Affichage : 2136 vues

Distance : 13.8km

Objectif : Terminer

3 commentaires

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montée de l'alpe d'Huez

L’Alpe d’Huez 21

Sur les pentes de la perle de l’Oisans

 

 

 

Ca fait trente minutes que je chauffe le moteur le long de la Romanche mi-rivière, mi-torrent. Pas question de partir à froid sous peine de faire exploser le compte-tours avec une aiguille propulsée dans la boite à gants qui mettrait bien trop de temps à redescendre dans des valeurs raisonnables. D’entrée les trois premiers kilo sont à plus de 10%. Alors évidemment sur le papier ça calme. Pas question de se cramer dès l’entame. Il va falloir la jouer fine.

 

 

Ce n’est pas la plus longue ni la plus dure mais probablement la plus mythique, la plus connue cette montée de l’Alpe d’Huez. Tellement connue, qu’on dit tout simplement la montée de l’Alpe et tout le monde comprend. Le tour de France y a largement contribué. Grimpée et gagnée la première fois par l’immense Fausto Coppi en 1952 elle est devenue en 1976, pour la seconde ascension durant la grande boucle, un incontournable escaladé depuis à 26 reprises en consacrant de très grands futurs vainqueurs du tour de France ou d’immenses grimpeurs. Pour monsieur tout le monde, en pleine saison, 300 cyclistes « amateurs » s’y attaquent chaque jour.

 

 

Mais aujourd’hui en ce 15 août 2012, les coureurs à pied seront les rois du bitume. Et ce sera la 28ième édition. Menu commun pour tous : 13.8km et 1100m de grimpe non-stop.

 

 

Le chiffre du jour c’est le 21. Ce n’est pas la température du moins pas encore bien que nous en soyons proche en cette période de canicule, ni le nombre de points à marquer pour gagner un set de ping-pong à l’ancienne. Non 21, c’est le nombre d’épingles de ce lancinent trajet vers la station. Comme les étapes d’un chemin de croix, elles sont numérotées dans un lent décompte au fil des virages.

 

 

Une cinquantaine de marcheurs a été lâchée à 9h30 avec 30 minutes d’avance sur les 250 coureurs prêts à les croquer.

 

 

 

Départ des marcheurs

 

Parcours et ses 21 virages

 

 

La difficulté majeure de cette montée vient de l’absence de temps mort. Aucune zone de récup possible. Ca monte tout le temps.

 

 

10h. A nous la route.

 

Départ des coureurs

 

400m de plat entre deux campings avant la première rampe. La prudence se lit sur les visages et dans l’allure plutôt sur la retenue de la majorité du troupeau. 737m d’altitude. A gauche toute. On se penche en avant et on attaque la butte. Ce premier virage n°21 est loin, très loin vers l’ouest. Qu’il est long à accrocher ! Nous sommes à l’ombre mais il fait déjà bien chaud. Qu’est ce que ça va bien pouvoir donner un peu plus haut ? Je m’attends au pire. Déjà deux kilomètres avant de voir le n° 20. « Pouf, on n’est pas au bout ». Certains souffles me semblent déjà bien bruyants en léger surrégime. Ca sent mauvais pour eux pour la suite. Le serpent de bipèdes tire au plus court et coupe consciencieusement les virages. Ca slalome entre les vélos qui ne vont pas beaucoup plus vite que nous et qui se sont quand même risqués aujourd’hui sur le parcours et les voitures qui avaient simplement été arrêtées pour le départ. Tout se passe globalement en bonne intelligence. Les efforts de chacun sont bien respectés. Je craignais les pots d’échappements. Les voitures modernes semblent dans l’ensemble avoir fait de gros progrès. 

 

 

Moins de 4 km, je reprends mes premiers marcheurs. Les 1000m d’altitude se rapprochent. La Garde, premier ravito. Les voyants restent au vert. Arrêt express.

 

 

6ième virage n°16, finie la protection de la face nord. Ca change du tout au tout. Un puissant soleil nous accroche et ne va plus nous lâcher jusqu’à la fin. Je suis parti sans casquette. Ne vais-je pas le regretter ? Sans pitié l’asphalte renvoie la chaleur et commence à nous cuire à petit feu. Je fais le yoyo avec une voiture accompagnatrice d’un coureur qui me colle sûrement aux basques. Vitres latérales ouvertes, encouragements version hurlements, nerveux coups de klaxon, caméscope en continu, gourde tendue. La totale. Vivement que je me dégage de ce bruit de fond qui me plombe un peu l’ambiance générale.

 

 

8ième virage n°14. On passe le hameau du Ribot d’en Bas qui est bien entendu suivi par le Ribot……………d’en Haut. Les écarts grandissent. Ca craque à droite à gauche en mode marche alternée. Pas bon, pas bon du tout. Surtout ne pas se laisser tenter et continuer le plus naturellement possible, comme si on n’avait rien vu.

 

 

Huez (1450m) et l’Alpe d’Huez (1860m)

 

Saint Ferréol. 8km. On flirte avec les 1400m. Je reprends Marie qui gaze pas mal dans la version marche. Ce deuxième ravito, je sais qu’il est là tout proche mais reste masqué par ce prochain virage à gauche dans le fond. Mais qu’il arrive, vite, très vite ce ravito !!!  Très mauvaise sensation. Je suis en limite de surchauffe et au bord de l’explosion. « Bonjour, c’est pour refaire les niveaux. Je prends le forfait big-frais version lance à incendie. C’est pour consommer sur place, … tout de suite. Merci je suis très pressé ». Nouvelle cassure de terrain, soleil pleine poire. Je coule de partout dans une agréable et éphémère armure de fraicheur liquide qui redonne un peu de lucidité. On traverse le village d’Huez.

 

 

Devant la bagarre finale fait rage entre un coureur qui tourne autour des 30 minutes au 10 bornes sur du plat !! et un ancien cycliste pro, 30ième du tour d’Espagne 2006 qui court de « temps en temps ». Force revient sur la ligne au bipède qui a aussi fait du 1500m et qui dans un dernier sprint gratte 10 précieuses secondes pour franchir la ligne en vainqueur en 1h04.

 

 

Et dire qu’il me reste encore 5 bons kilomètres. Je commence à sentir sérieusement l’altitude. En quête d’oxygène ma pompe des plaines bat la chamade depuis quelques temps. « Passez-moi un troisième poumon s’il vous plait ». Marquage kilométrique pour les 5 derniers. On se raccroche aux branches et on serre les dents.

 

« Patte d’oie ». Lieu où les deux routes d’accès à la station se séparent. Dernier ravito. Abondant déversement d’eau à l’extérieur et remplissage flash d’une boisson sucrée à bulles à l’intérieur. Là, ça plombe vraiment fort. La cafetière se rapproche de l’ébullition. Je reprends une féminine, très régulière, en autonomie boisson qui ne s’est pas arrêtée à ce dernier stand liquide. La vue porte au loin. Les arbres ont tous quasi-disparus. Sympa pour les paysages, cruel pour le mental. Trois virages bien visibles nous narguent encore avant la future entrée dans la station signe de délivrance proche. Le sol est bariolé d’énormes inscriptions blanches que j’ai du mal à lire.

 

Je rentre dans un tunnel d’introspection.

 

 

 

 

Ne rien lâcher. Continuer à courir comme depuis le début. Comme si de rien n’était ! Comme si j’évoluais au niveau de la mer ! Comme si c’était plat ! Comme si c’était l’hiver ! Maintenir ce tempo régulier. Penser positif. Rester en limite de zone rouge sans la franchir.

 

 

2000m. Il reste 2000m. 5 tours de stade. Une broutille en temps normal sur du plat. Une belle épine dans la chaussette dans ce scénario grimpe version étuve.

 

Mais oui il est là. C’est écrit sur le panneau. 1713m. Virage n°1. Ca va le faire.

 

 

 

virage n°1

 

 

Premier chalets, encouragements plus fournis. Traversée du Viel Alpe. Touristes aux terrasses. Ne pas s’enflammer. La station est très grande. Les gendarmes font le ménage. 200m un peu plus doux et ça repart sèchement dans le tunnel en courbe à gauche.

 

 

Un jeune qui encourage à tue-tête me le vend pour 1000m. Je prends. Passage sous les bennes qui relient les différents niveaux de la station en hiver. Double virage à droite qui s’élargit. Ligne droite finale en légère descente avec barrières histoire d’accélérer nettement en donnant l’illusion aux spectateurs que tout a été facile. Rue commerçante nous bombardant à côté de la piscine en clôturant l’affaire par le bip salvateur de la puce accrochée à la chaussure indiquant que l’arrêt est envisageable et le chrono dans la boite.

 

 

 

Aire d’arrivée

 

 

Question temps, 1h46, borne haute de la fourchette du chrono envisagé. Mais sans préparation spécifique à la haute altitude et le plomb de la grosse chaleur en bonus on peut relativiser. Petite satisfaction personnelle, seule une dizaine de coureurs plus âgés ont fait mieux que moi.

 

 

17 août : 6 heures de rando en mode récup dans le massif des écrins pour se retrouver à 2600m au pied du glacier de la Pilatte dans un silence régénérant et contemplatif.

 

 

Sur route, sur chemin, sur sentier, que la montagne est belle !!!!!

 

3 commentaires

Commentaire de Maëlwenn posté le 28-08-2012 à 23:52:51

Bravo pour ta course, montée mythique en effet. Merci de nous faire partager ton récit.

Commentaire de totoro posté le 29-08-2012 à 10:16:59

Ah la la, monter l'Alpe d'Huez : un jour je le ferai aussi. Merci de nous avoir fait partager ce récit emprunt de l'effort et de l'envie de monter là-haut !

Commentaire de Jean-Phi posté le 29-08-2012 à 10:50:15

C'est sympa ces montées sèches comme ça et puis on se prend à croire que l'on est un peu le héros à ce moment là des légendes qui ont forgé le tour ! Bravo à toi en tout cas car avec la chaleur, ça ne devait pas être des plus simples !

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