Récit de la course : Trans 333 2011, par leptitmichel
5 autres récits :
- Les récits de 2011 (1)
- Les récits de 2009 (2)
- Les récits de 2007 (2)
Le récit
Putain ! 2 ans …
J. Chirac, les Guignols de l’Info, 1993
Voilà une expression qui colle bien avec cette Trans 333.
2 ans !
2 ans que j’attends de revenir sur la 333.
En 2009, j’étais parti avec l’Electron sur l’édition marocaine de cette épreuve mythique organisée par Alain Gestin, mais une violente chute, une semaine avant lors d’une course d’orientation, m’avait alors obligé à prendre le départ avec une côte fêlée…
Résultat des opérations, une impossibilité de courir (mais heureusement je marche assez vite et surtout de façon assez régulière), mais au bout de 140km, il m’avait quand même fallu jeter l’éponge, le choc du sac à dos à chaque pas devenant insupportable, même avec les anti-douleurs.
Bref, j’étais alors rentré seul en France, l’Electron ayant pris la décision de rester là bas, dans une petite auberge appelée la « boussole du Sahara »
2 ans plus tard, me voilà à Orly Sud prêt à embarquer pour Ouarzazate via Casablanca
Toute ma saison 2011 a été construite pour m’amener au mieux sur cet objectif. Une saison exclusivement consacrée à l’endurance avec des épreuves comme le Raid 28 (90km), l’Ecotrail (80km), un 24heures (155km), et où seule ma participation à la CCC (90km) ne répondait pas strictement à mes critères de sélection (course de montagne). Mais c’était à la fois pour conjurer un sort et pour partager l’épreuve avec les copains de Bled Runner.
Autre point positif, j’ai atteint tous les objectifs que je m’étais fixé cette année. A commencer par mon meilleur classement sur le Raid 28 (6ème) grâce à une équipe haut de gamme, un Ecotrail géré tranquillement mais avec presque 1h de marge sur l’objectif initial, un record perso sur 24h (de 144 à 155km) et la CCC que je boucle en 23heures malgré une nuit assez difficile côté météo. Bref une saison de bonheur.
Seulement l’entraînement ne suffit pas pour une 333. Il faut d’autres composants peut-être moins faciles à maîtriser.
Tout d’abord l’envie. Ce n’est pas une épreuve où on va juste comme ça pour voir. Ce type d’épreuve et l’engagement physique et mental que cela demande nécessite d’avoir faim, la niaque, l’envie de la faire. Et cette année c’est le cas.
L’autre point c’est le mental. Lié à l’envie mais en plus subtil. Là-dessus je pense avoir pas mal progressé ces dernières années, et les grosses baisses de moral qui m’ont parfois poussées à pratiquer « l’abandon raisonné » sont derrières moi… Enfin non, j’en ai toujours mais disons que j’arrive beaucoup mieux à les gérer (cf. le CR de la CCC dans la montée du Grand Col Ferret).
Ensuite l’équipement. Pas de place à l’improvisation sur ce genre d’épreuve ou le moindre petit grain de sable (c’est le cas de le dire) peut se traduire par une enchaînement de galères. Du coup j’ai tout préparé au millimètre près. Tenue, équipement, ravitaillement énergétique et traditionnel, organisation des drop bags… bref pas de place pour la hasard. Je vous laisse jeter un œil sur la fiche équipement disponible sur mon site ( www.lesitedemichel.fr ) pour vous faire une idée.
Entre temps, Alain nous apprend que la course utilisera exactement le même parcours qu’en 2009. C’est une information très importante pour moi car du coup je connais environ la moitié du tracé (du départ à la moitié entre P7et CP8), et je sais là où j’ai fait des erreurs en 2009 et donc là où je devrai être vigilant.
On reçoit les points GPS… A leur lecture et après un rapide contrôle dans mes archives, je me rend compte que ce sont les points qui nous avaient été communiqués avant la course en 2009 mais je me souviens aussi que certains points avaient été modifiés lors des briefings, hors là je ne trouve pas de trace de ces modifications.
J’en informe Koko et Thomas aussitôt en leur indiquant de ne pas s’inquiéter et qu’on aura toutes les infos sur place.
C’est vrai que je ne vous ai pas parlé de Koko et Thomas…
Thomas, on ne se connaît qu’au travers de FB. On a pas mal échangé sur la course, le matos, la gestion, mais nous ne nous sommes jamais rencontrés.
Pour Koko (Corinne) c’est très différent. On se connaît maintenant depuis pas mal d’années et on a même eu l’occasion de courir ensemble à plusieurs reprises, dont 2 fois sur des Raid28…
Le fait de partir tous les 3 est aussi un élément important, même si une fois sur place, je sais qu’en général, le groupe ne fait plus qu’un…
La veille du départ je prépare le sac à dos… Bon ! Une fois rangés les 15 drop bags, le sac est plein au ¾… c’est que ça bouffe un coureur quand même.
Du coup, je termine le remplissage du sac avec le reste du matos, plus tout ce que je ne peux pas prendre avec moi en cabine (bâtons, pharmacie, trousse de toilette, chaussures…)
Au final je suis quand même obligé de garder avec moi en bagage cabine mon sac à dos (le DK 30L avec une petite partie de l’équipement car le sac à dos est archi bondé…
Moi qui préfère voyager très très léger en avion, c’est loupé…
Vendredi 4 novembre 16h30…
Donc nous voilà revenus vendredi après midi à Orly Sud. J’arrive en transports en commun, direction l’enregistrement. Là je retrouve Koko et Thomas derrière une file d’enregistrement qui n'avance pas, alors qu’une sympathique hôtesse me propose de passer dans la file réservée aux business… enregistrement express du sac… 19kg pour 20 autorisés. Tip Top.
Dans le hall d’embarquement je commence à retrouver quelques têtes connues (l’effet « tribu Gestin »). Alain, avec qui j’ai couru en Amazonie, Jean Claude qui était là en 2009, Dominique et Patrice, également présents en 2009 (et qui ont remporté la Trans 555 ensemble depuis), bref les contacts se nouent.
3h00 d’avion pour aller à Casablanca, puis un transfert express d’une heure pour prendre un vol Casablanca Ouarzazate.
A casa nous retrouvons les coureurs qui arrivent d’autres régions de France… Les PAM (comprenez le staff médical) composé d’Alex, les 2 Isa et de Claude, mais aussi des coureurs lyonnais ou bordelais dont Françoise avec qui j’avais fait un peu du début de la course en 2009 et Gérard, venu courir accompagné de son fils Juju et pour qui cette participation relève réellement du défi.
Nouveau vol mais rapide cette fois pour rejoindre Ouarzazate (30mn) juste histoire de passer l’Atlas et ses routes sinueuses.
Vers 22h30 on arrive à Ourazazate. Formalités douanières, puis récupération des bagages …
Les tapis présente son flot de valises et de sac, mais pas le mien… j’attends, j’attends quand au bout de 30mn, le tapis s’arrête. Un employé de l’aéroport nous informe qu’il n’y a plus d’autres bagages en cours. On est 6 ou 7 à attendre encore nos affaire, et en provenance d’aéroports multiples (pas seulement en provenance d’Orly).
Après quelques palabres, je retrouve Alain et Mustapha (notre correspondant local). On décide d’aller au comptoir des réclamations pour avoir des infos.
Après plus d’une heure trente, (c’est pas rapide rapide là bas) j’arrive enfin à faire enregistrer ma réclamation. On m’indique que le bagage est probablement resté à Casa et que du coup il arrivera ici demain soir car il n’y a qu’un vol par jour entre Casa et Ouarzazate…
Et M…. ça commence bien !
Alain me ramène à l’hôtel où sont déjà installés les autres coureurs, et je passe une première nuit dans des conditions pas tip top… mais bon je ne peux rien faire avant le lendemain.
Samedi 5 novembre
Le lendemain matin on doit quitter Ouarzazate pour rejoindre Mhamid, à 250km plus au sud. Après avoir fait des copies de tous les documents nécessaires pour permettre que le sac soit récupéré par un représentant de l’agence locale, on part pour une journée de transfert en mini bus.
Milieu d’après midi, arrivée à Mhamid à l’Hôtel Azalaï où nous étions déjà installés il y a 2 ans.
Je récupère une chambre puis je me renseigne auprès de Mustapha pour avoir des nouvelles des bagages. Il va envoyer quelqu’un à l’arrivée de l’avion ce soir (vers 23h00) pour pouvoir le récupérer. Il me laissera un SMS des que ce sera fait.
Il faut dire qu’on est samedi et que si mon sac n’arrive pas ce soir, c’est foutu pour la course (si il arrive dimanche soir, je ne pourrai jamais le récupérer avant le départ de lundi matin.)
Après un sympathique repas, direction le dodo… Je laisse le téléphone allumé en attendant les news de Mustapha.
Vers 23h45, le portable vibre. Un message s’affiche : « Michel, désolé. Ton bagage n’est pas arrivé à Ouarzazate »…
Là je prend une bonne grosse claque ! Pas de sac, ça veut dire pas de course… 2 ans de prépa fichus sans parler de l’aspect financier (le budget de la course, l’équipement, le sac…).
Je crois que je vais passer ma plus mauvaise nuit depuis fort longtemps. J’essaye d’envisager toutes les possibilités, mais avec un peu de pragmatisme celle qui revient le plus régulièrement c’est : "demande à Mustapha de te trouver un vol de retour pour Paris dès maintenant".
Dimanche 6 novembre
Au petit matin je n’ai pas l’esprit super clair. J’ai essayé de passer en revue ce que j’ai dans mon sac de course et ce qui me manque, et franchement, le topo n’est pas à une tendance favorable.
Je me rend au petit déjeuner, il n’y a pas encore grand monde de levé, mais déjà les premières questions fusent. « Alors tu as des nouvelles ? ». Ma réponse est laconique… Non rien, et on en aura pas avant cette nuit au mieux maintenant.
C’est là que va se produire le déclic… un truc auquel je n’avais même pas pensé, mais qui est probablement un des effet de ce qu’on appelle la « Tribu Gestin »…
Dès cet instant, je crois que tout le monde va venir me voir pour me demander ce qu’il me manque… non seulement les coureurs, mais aussi les PAM, le staf logistique, bref , à ce moment là va se créer un mouvement de solidarité rare… et fort .
J’essaye de lister rapidement ce qui pourrait me manquer.
En fait j’ai avec moi mon sac de course (le fameux DK30L) avec sa poche à eau. J’ai aussi un corsair long, un slip une paire de chaussettes une casquette, un TS en coton, ma gore tex et mon GPS.
Et c’est tout.
Par contre ce qui me manque ce sont avant tout les chaussures, maillot de course, coupe vent, frontale, piles (une trentaine…) tout le ravitaillement, la pharmacie (anti-frottement, de quoi soigner les ampoules les maux de ventre…) et tous les accessoires (miroir, sifflet… bref relisez ma fiche équipement et vous comprendrez.)
Bien sur, le point ultra critique là dedans ce sont les chaussures… Vous imaginez vous partir sur un semi marathon avec des chaussures que vous n’avez jamais portées ?… Alors qu’est-ce que vous diriez si il fallait courir 330km… ?
A ce moment là, je vais avoir 2 sauveurs… Joël et Franck qui tous deux me proposent une paire de chaussures taille 45 qu’ils avaient prévu pour mettre dans un drop bag à mi course. Ils sont prêts à s’en défaire juste pour me permettre de me lancer dans l’aventure…
Ensuite tout va s’enchaîner très vite. Moi qui ait toujours du mal à « demander » quelque chose, voilà que je bénéficie d’un mouvement incroyable. Un tee shirt, un coupe vent, du ravitaillement divers et varié, une frontale, des piles, … Petit à petit je vois fleurir un équipement certes hétéroclite, mais largement suffisant pour me permettre de prendre le départ de la course.
Moi qui prépare tout à la virgule près, je suis juste en train de tout remettre en cause pour me lancer dans cette aventure avec une approche plus « root » que je ne l’aurais jamais imaginée…
Cet élan de solidarité me touche vraiment. J’ai un peu de mal à l’exprimer, je ne suis pas un grand sentimental, mais franchement, je ne sais pas comment les remercier toutes et tous à ce moment là autrement qu’en effaçant d’un geste mes idées de retour en France et en décidant de prendre le départ quand même.
Les PAM me préparent une trousse à pharmacie sur mesure, Bernard, côté logistique me prête son maillot épais (pour la nuit) pour soutenir Fanny, bref, ça arrive de tous les côtés.
Là Koko va avoir une idée fort sympathique… et amusante. Elle me dit « vient on va aller dans Mhamid au supermarché pour essayer de trouver ce qu’il te manque ».
Heu Koko, on voit bien que tu ne connais pas Mhamid… Ici c’est le dernier village avant la frontière algérienne, alors le supermarché, tu l’oublies… on ira voir les petites épiceries locales, mais tu vas vite comprendre pourquoi on ne trouvera rien ici sur place.
Dans l’après midi on va donc faire un tour dans le village… Je trouve quelques paquets de gâteaux secs, mais pas grand-chose d’autre. Avec Dom, Thomas et Koko, on décide d’aller prendre le Thé chez L’Electron. On retrouve la Boussole du Sahara. Dommage car la tente berbère a laissé place à une petite cabane en dur moins typique … mais bon ça fait quand même plaisir de le retrouver là où il était resté il y a deux ans.
En fin d’après midi retour à l’hôtel. Je fais mes drop bags mais pour ça aussi il a aussi fallu trouver des sacs plastiques (merci Michel), puis répartir de façon la plus intelligente possible tout le bric à brac donné par les coureurs.
Après la règle n°1 qui dit qu’on ne doit jamais faire une compétition avec des chaussures jamais portées, voilà que je me prépare à transgresser la seconde règle de base qui veut qu’on ne teste jamais une nouvelle alimentation lors d’une compétition.
Là c’est simple, j’ai un mélange de tous les produits possibles et imaginables du marché, produit que je n’ai jamais testé en course pour la plupart… énergétiques ou pas …
Je termine tant bien que mal mes drop bag… C’est cool parce que du coup ce sera une vraie surprise à chaque CP de découvrir ce qu’il y a dedans…
Côté boisson aussi ce sera une première, puisque je n’aurai pas de boisson énergétique et que je vais donc tourner… à l’eau.
Pour le reste, j’ai récupéré un tube de nok auprès de Koko, une frontale chez Patrice, un coupe vent et un maillot chez Dom, un maillot épais chez Bernard, des piles à droite et à gauche plus quelques unes achetées dans Mhamid (avec un petit doute sur leur durée de vie…) et bien sur les chaussures de Franck. J’ai choisi les sienne parce que ce sont celles dans lesquelles je me sens le mieux (des Salomon XA Pro 3D). Franck, sur ce coup là je crois que tu vas me sauver la mise… et tu n’imagines pas encore à quel point.
Une partie de la fin d’après midi est passée à charger les points GPS des concurrents à partir du PC de l’organisation. Je me retrouve préposé à la manœuvre, mais franchement, ça me fait du bien de rendre service à mon tour aujourd’hui… Quelques plaisanteries fusent « Hé les premiers, je vous ai ajouté des points fictifs histoire de vous mettre un petit handicap… ».
Il faut aussi rassurer ceux qui ne sont pas à l’aise avec l’utilisation du GPS. C’est pourtant bien plus efficace que n’importe quel balisage, mais bon quand c’est la première utilisation, entre les waypoints, les traces les routes et tous les autres boutons, ce n’est pas toujours simple de s’y retrouver. Du coup je vais faire ce que je peux pour essayer d’expliquer simplement comment ça fonctionne… sans trop stresse les gens.
En fin de journée je suis pratiquement prêt à me lancer… j’ai un gros booster (pas mes manchons qui eux sont dans mon sac à dos) supplémentaire en emportant avec moi un petit peu de tout le monde… où comment se rajouter de la pression … sans la mousse ! Place au briefing d'Alain, rapide cette année.
Dodo tôt… J’ai besoin de souffler après cette journée difficile.
La nuit se passe pas trop mal (mieux que la précédente en fait) et j’arrive à ne pas trop penser aux bagages perdus. Par contre je décide de refondre totalement ma stratégie de course. Fini la feuille de route détaillée établie à Paris. Je conserve mon objectif de finir en moins de 4 jours (96 heures), mais vu la situation je simplifie la situation en me disant que je vais faire 5 CP sur le premier 24 heures, 4 CP ensuite, puis encore 4 et pour finir 3 CP le dernier jour. Ce sera bien suffisant comme feuille de route.
Lundi 7 novembre 6h30…
Debout là dedans…
Je file directement au petit déj… je mange bien (je ne sais pas ce que j’aurai dans les 4 jours à venir) puis je retourne à la chambre pour me mettre en tenue.
Celle-ci est on ne peut plus basique :
- Chaussures Salomon XA Pro 3D (re merci Franck)
- Chaussette DK
- Slip coton (pas glop pour la course, mais bon je n’ai que ça)
- Corsair long
- Tee shirt manches longues en coton
- Casquette saharienne (ouf celle là je l’avais dans le sac)
- Le sac à dos avec les fringues prêtées surtout pour la nuit en cas de froid
Sur la photo on voit bien que l’ensemble ne fait pas très « high tech », mais je m’en fiche… Je suis là, je vais prendre ce foutu départ malgré tout, et après tout, Alain ne nous a-t-il pas appris à gérer ses courses à la mode « rustique » ?
Un peu avant 8h, on se retrouve dans la cour de l’hôtel pour quelques photos et le remplissage des poches à eau. Petite photo avec Koko
et derniers mots d’encouragement. Je ne suis pas inquiet, je sais qu’elle peut gérer la course, mais c’est vrai que sur une telle distance, tout peut arriver.
8h00 photo de groupe devant l’entrée de l’hôtel
Et à 8h10, Alain lâche les fauves… Ça y est on est enfin dedans…
Du départ à CP1
Rappel…
CP = Check Points – passage obligatoire (eau + contrôle de sécurité)
PI = Points GPS intermédiaires facultatifs (mais pas inutiles…)
C’est parti…
Maintenant il faut absolument que je me vide l’esprit, que j’arrive à me concentrer uniquement sur ma course, mon effort et ma gestion.
Du coup je vais rapidement m’isoler et me mettre dans ma bulle. Je connais la route sur les 140 premiers kilomètres et je compte bien mettre cette connaissance à profit.
Le départ est roulant. On traverse Mhamid, puis on remonte vers le PI 2 (passage obligatoire sur celui là pour le lancement de la course) à une petite dizaine de kilomètres au nord du village. Facile et roulant, la température matinale est bonne et je trottine tout du long sans me poser trop de questions. Je ne m’occupe pas des autres. Suis-je devant ou derrière ? Je m’en fiche. J’ai juste besoin d’entrer dans MA course…
J’effectue quelques coupes entre les dunettes pour ne pas faire les détours de la piste. Ça passe bien. J’avance tranquillement pour arriver au PI 2.
Là un premier constat douloureux s’impose… j’ai les pieds en feu. Normal avec des chaussures neuves, mais bon c’est que j’ai encore 320 bornes à faire.
J’ai un peu l’impression d’être rattrapé par mon vieux démon de 2009. C’est exactement ici que j’avais décidé de ne plus courir en raison de ma côte fêlée. Et bien cette année l’histoire se répète… Sauf que là c’est pour essayer de préserver mes pieds.
Pas grave, de toutes façons tant que j’avance c’est bon signe…
Au départ de PI2 je rejoins le passage entre les dunes puis, comme il y a deux ans, je décide ne couper droit dans la plaine et de ne pas contourner par la piste.
Je retrouve aussitôt mes anciens réflexes. Un arbre sur la ligne d’horizon en point de mire. Un contrôle d’azimut avec le GPS, et hop c’est parti droit devant, GPS éteint pour économiser les piles, pour quelques kilomètres sans se poser de question.
Je vais retrouver mes 3 points d’appuis de 2009… un arbre seul, un second puis 2 arbre où il faut viser entre les deux…
C’est plat, long, la chaleur commence à monter, mais je suis enfin dedans… Je ne pense plus qu’à la course… enfin !
Petit avantage cette année, on n’a pas le fort vent de face. Au contraire on a un petit vent de dos qui nous aide…
Sur cette section je suis rejoint par Joël, qui m’indique avoir un soucis avec son GPS.
Je contrôle les azimuts et effectivement son CP est à 90° par rapport au mien !!! Sauf que le mien est bon puisque je sais exactement où est le CP. Je contrôle son GPS (un foretrex 401) et celui-ci a perdu son calibrage… Je le refais (deux petits tours sur moi-même) et voilà le GPS qui repart sur de bonnes bases… Sauf que Joël a quand même fait un premier détour à cause de ça.
Étrange ce problème de perte de calibrage sur les 401 (j’ai un foretrex 101). Normalement ça ne se produit que lors des changements de piles mais là ça semble lui faire régulièrement…
Je devine enfin la cabane et le puits à proximité du CP… Là encore, comme il y a deux ans, j’y arrive en même temps que Françoise.
Arrivée à CP1 lundi à 11h38
- 3h28 de course
- Temps estimé initialement 3h45
- Temps de 2009 : 3h20
- 8ème position
Pour les classement, ce sont des choses que je n’ai jamais regardé pendant la course. Je les indique ici à titre d’information sur la base des feuilles de pointage des CP que j’ai pu récupérer après la course
Je m’impose une petite pause, car je sais combien il est dangereux de zapper ces premières haltes.
Je prends mon verre de coca, fais le plein de la poche à eau, et bois un peu tranquillement installé à l’ombre.
12 minutes plus tard me voilà prêt à relancer la machine
De CP1 à CP2
Départ de CP1 à 11h50 (3h40 de course)
C’est reparti pour une seconde traversée de plaine tout plate et caillouteuse. Là encore je fais une trace directe de CP à CP en zappant le point intermédiaire… Ça passait il y a deux ans, pas de raisons que ça ne passe plus cette année.
On va se heurter aux premières chaleurs. C’est en fait la période la plus difficile à gérer (11h-15h) sachant que la nuit tombe entre 18 et 19h et que le jour se lève vers 6h30 .
Là on tape dans le chaud mais grâce à un peu d’air c’est supportable.
Je croise quelques quads en ballade, puis je continue ma progression au cap, GPS éteint.
Je passe près d’une espèce de cabane avec une famille en train de manger… Et en plus ça sent bon. Vivement le CP que je trouve mon premier drop bag.
L’azimut n’a pas changé. Je contrôle et j’ai un large chemin devant moi. Il me reste 3km. J’arrête à nouveau le GPS et c’est reparti. Au bout d’un long moment je commence à trouver étrange de ne pas voir le CP sur le bord du chemin. Je rallume le GPS, et la flèche m’indique le CP à 2km… à 90° sur ma gauche … Quel crétin je suis. Je ne suis pas sur la bonne piste.
Me voilà obligé de faire un tout droit dans les ravines pour remonter au plus vite vers le CP. Franchement, comme si j’avais besoin de ça !
Je contrôle bien mon cap, et j’arrive finalement sur le CP, à la surprise de Bernard et des PAM qui me voient arriver sous un angle imprévu…
Arrivée à CP2 lundi à 15h18
- 3h28 de course sur la section et 7h08 depuis le départ
- Temps estimé initialement 4h00
- Temps de 2009 : 3h30
- 7ème position (en fait j’ai passé Thierry qui est resté avec Françoise)
Je prends le temps de me poser, de bien m’hydrater et de manger un peu. Je fais le plein de la poche à eau (j’ai tout bu sur cette section) et récupère le drop bag de CP3.
Un peu avant mon départ du CP je vois Joël qui arrive. Étrange il était loin devant moi. Il nous apprend que son GPS a encore fait des sienne et qu’il est parti sur… CP15 ! Là avec la chaleur il est claqué. Il décide de se poser et d’attendre Michel (l’autre) avant de repartir
De CP2 à CP3
Départ de CP2 à 15h50 après une pause de 32mn. (7h40 de course)
Sur cette section il y a 2 ans j’avais décidé de zapper le PI, mais le résultat avait été mitigé puisque j’étais tombé dans une zone de cailloux et de grosses ravines qui m’avaient finalement obligé à revenir sur la piste. Comme la nuit tombera pendant cette section, je préfère la jouer soft cette année et prendre la piste et le PI.
Pas de gros soucis de progression. J’ai bien quelques doutes à proximité d’une oasis car la piste ne part pas dans le bon sens mais un bédouin me confirme que je suis sur la bonne trace et que la piste va faire un coude un peu plus loin. Et effectivement il y a bien un coude.
La section est sympa car assez variée (ça change des deux premières), et la fin du jour permet de parcourir ça dans une relative fraîcheur bien agréable.
La nuit commence à tomber. Heureusement, une des habitudes d’Alain est d’organiser ses courses pendant la semaine de la pleine lune… et comme le ciel est totalement dégagé, on devrait y voir comme en plein jour.
Bon en fait, pas tout à fait car l’éclairage blanc/bleu de la lune a un effet pervers, c’est qu’il modifie la perception des reliefs… Et avec la fatigue cela ne va pas s’arranger pendant les nuits suivantes ce que je découvrirai bien assez tôt. Mais en dehors de ça, ça devrait être un vrai plaisir de pouvoir progresser sans la frontale.
Sur la fin du CP, je décide de ne pas contourner par la piste mais je préfère couper tout droit comme l’an dernier dans les dunettes. Ça ne passe pas trop mal et comme je sais que le CP est juste derrière, ce n’est pas très grave.
J’arrive donc finalement au campement de Chegaga ( ?) CP3 de la course
Arrivée à CP3 lundi à 18h39
- 2h49 de course sur la section, et 10h20 depuis le départ
- Temps estimé initialement 4h00
- Temps de 2009 : 2h40
- 7ème position.
Un bon petit ravito où je vais même manger une soupe (moi qui déteste ça !).
J’en profite pour changer de tenue et pour passer en mode nuit. Mon maillot Akammak étant perdu avec les bagages, c’est le maillot prêté par Bernard qui sera ma base pour la nuit et qui sera complété par un coupe vent léger prêté par Dom' en cas de petite fraicheur. Je garde la Gore Tex dans le sac en cas de gros coup de mou ou de froid plus important, comme il y a 2 ans où les températures avaient atteint les 0°.
Pendant ce temps arrivent Thierry et Françoise (on se suit depuis le départ).
Je vais aussi faire une chose que je ne fais jamais… c’est de me faire soigner les pieds par nos valeureuses PAM, et en l’occurrence c’est Alex qui va s’y coller.
Même si le fait de ne plus courir permet de ménager les blessures j’ai quand même des ampoules et surtout deux fortes douleurs sous l’avant du pied.
Finalement, après contrôle ce sont également des ampoules. Je confie donc l’intégralité de mes deux petons à Alex, profitant pour prendre un cours sur comment arrondir les angles (des pansements) et créer des plis d’aisance… ;-)
Je commence à cogiter sur la section à venir. C’est ici que j’avais beaucoup galéré il y a deux ans, quittant la piste et devant traverser un champ de dunes où j’avais laissé une énergie pas possible, sachant que la piste est ensablée du début à la fin.
Aussi, après m’être ravitaillé et avoir fait le plein de la poche à eau, je profite du départ de Thierry et Françoise pour me joindre à eux. Même si j’adore progresser seul la nuit dans le désert, je me dit que sur cette section là, à trois, ce sera probablement plus facile.
De CP3 à CP4
Départ de CP3 à 19h39 après une pause d’une heure. (11h20 depuis le départ)
Sur la section il y a deux points intermédiaires, mais je laisse Thierry prendre les devants.
De toutes façons je n’ai pas le choix, car son allure de progression est bien plus rapide que la mienne et que dans le sable j’ai du mal à suivre.
Je m’accroche tant que je peux mais je sens que je suis dans le rouge. Par contre on est sur la piste et on ne s’est pas loupé, ce qui à mes yeux rembourse largement l’effort physique fourni.
On arrive enfin au premier point intermédiaire. Je sais que je suis sorti de la zone à risque aussi je décide de laisser Françoise et Thierry partir devant. Je suis claqué. Content de ne pas avoir fait d’écart, mais claqué. Je décide donc de faire la liaison vers le second PI très doucement le temps de me refaire la cerise.
Cette section reste malgré tout usante avec tout ce sable. J'avance très lentement, reprenant des force et faisant à l'occasion de courtes pauses. La nuit n'aide pas vraiment mais avec la lune j'arrive à ne pas perdre la trace de la piste.
Au niveau du second PI je retrouve Françoise et Thierry qui ont fait une pause, mais ça ne dure pas longtemps car ils repartent sur le même rythme et cette fois ci je préfère ne pas tenter de rester avec eux. J’ai récupéré mais je ne veux pas me remettre dans le rouge.
Finalement, petit à petit je fini par atteindre le CP4
Arrivée à CP4 mardi à 00h04
- 4h24 de course sur la section, et 16h00 depuis le départ
- Temps estimé initialement 4h30
- Temps de 2009 : 4h15
- 9ème position (Françoise et Thierry sont repassés devant)
Ma progression depuis le départ est un peu plus lente qu'il y a deux ans, mais pendant la course je ne m'en préoccupe pas, d'autant que je n'ai pas pris avec moi mes anciens temps, justement pour ne pas être tenté de m'y accrocher. Par contre ce qui est important, c'est que je suis totalement en phase avec mes objectifs, le premier étant de couvrir les 5 premiers CP en moins de 24h, c'est à dire repartir de CP5 avant 8h demain matin.
Je me ravitaille tranquillement et comme je suis bien, je décide de repartir pour CP5. Thierry et Françoise préfèrent rester un peu pour dormir. Moi je reste sur la ligne directrice. je dormirai à CP5 en fonction de ma marge de manœuvre sur mon créneau de 24h.
De CP4 à CP5
Départ de CP4 à 00h50 après une pause de 45mn. (16h40 depuis le départ)
Désormais sur cette section, le sable va laisser la place à la traversée d'un lac salé (le lac Iriqui). C'est une grande surface plane, relativement lisse (sauf sur la fin) où il n'est pas toujours facile de suivre les traces de 4x4 la nuit, mais avec le GPS, il suffit d'aller toujours tout droit.
photo prise de jour par Michel Laporte
Il y a 2 points intermédiaires sur cette section mais je décide de ne pas en tenir compte. Je sais qu'il n'est pas prudent d'essayer de faire des coupes de nuit, mais là, vu le terrain sans risques, je décide de faire un point à point direct vers CP5.
Je progresse régulièrement, sans varier la vitesse. Là je décide de faire un truc que je ne fais pratiquement jamais en course, je sors le MP3. Imaginez vous en pleine nuit, seul sur un lac salé, frontale éteinte, juste éclairé par la lune... et avec votre playlist préférée...
Et bien voilà comment, sans m'en rendre compte, je me suis retrouvé en train de chanter à tue tête du U2, du AC/DC du Credence Clearwater Revival (Oh susieeeee Q... !) ou du Brassens... J'espère ne pas avoir réveillé trop de bédouins parce que avec un MP3 sur les oreilles, il arrive que certaines notes ne soient pas très justes.
photo prise de jour par Michel Laporte
La fin de la piste se présente sous la forme d'une couche de sable et de sel légèrement craquante mais sans qu'on s'enfonce de trop pour autant.
Tranquillement j'arrive sur CP5
Arrivée à CP5 mardi à 4h53
- 3h58 de course sur la section, et 20h43 depuis le départ
- Temps estimé initialement 5h00
- Temps de 2009 : 4h05
- 7ème position.
Le premier objectif est atteint. Je suis là bien avant 8h00, et du coup je vais pouvoir non seulement me reposer un peu, mais surtout attendre le lever du jour pour repartir, car après ce CP on attaque la fameuse zone de cailloux où j'avais terriblement souffert en 2009. Cette zone a d'ailleurs fait beaucoup parler avant la course, d'autant qu'il n'y a aucun point intermédiaire, et que si on essaye de suivre la ligne directe des CP, c'est la galère assurée.
Sur ce je me pose sur un matelas, me cale sous une couverture et hop, au dodo... pour 1h15.
6h15 je me réveille. Le jour commence à peine à pointer. J'en profite pour manger un peu et préparer mon sac.
Françoise et Thierry arrivent. Je m'imagine qu'ils vont juste se ravitailler puis repartir avec moi vu qu'ils se sont reposés au CP précédent, mais non, il se glissent dans leurs duvets, et attaquent une nouvelle pose.
Je teste une soupe effinov fournie par Koko en guise de petit déjeuner puis, le jour étant assez levé, je décide de partir vers CP6.
Prochain gros objectif, c'est de faire les 4 prochains CP en 24h, et donc un départ de CP9 avant 08h00 demain !
De CP5 à CP6
Départ de CP5 à 06h53 après une pause de 2h00 dont 1h15 de sommeil (22h43 depuis le départ) et pratiquement une heure d'avance sur mes prévisions.
Au moment de partir je me renseigne auprès de notre accompagnateur qui s'occupe du CP pour valider la bonne route à suivre.
Plutôt que de partir plein ouest vers le CP6, il faut effectivement faire un large détour par le sud, ce qui allonge de plusieurs kilomètres, mais qui présente l'avantage de rester sur une piste théoriquement roulante. Par contre il ne faut pas se tromper de piste... Il m'indique également un gros massif rocheux au loin et me dit que je dois viser de passer au pied de celui-ci et qu'ensuite ce sera pratiquement tout droit. Vu d'ici, ça fait effectivement un joli détour.
Au moment où je quitte le PC je vois William qui arrive au loin. Un petit signe auquel il répond, et je file.
Je pars sur la piste et je trouve sans trop de soucis le bon embranchement pour bifurquer en vérifiant qu'il s'agit d'une piste pérenne et non d'une piste temporaire. Le fait que la piste soit fortement marquée dans le sol indique qu'il y a du passage régulier, et donc peu de chances de se trouver dans un cul de sac.
La piste est caillouteuse mais franchement loin de ce que j'ai vécu dans le grand pierrier. La température est bonne, et j'avance pas trop mal, même si je trouve ce contournement un peu long. Mais ce n'est pas grave, ce qui compte c'est d'arriver en bon état au CP suivant.
Je passe au pied de la grosse masse rocheuse comme cela m'avait été indiqué au départ du poste. A partir de là je peux commencer à envisager un azimut un peu plus direct vers le CP, mais la chaleur commence à arriver et comme pour le moment je pense m'en sortir pas trop mal, je préfère assurer.
Je passe les derniers contreforts de la zone de pierrier sur ma droite et j'attaque la dernière partie, une piste vaguement sablonneuse qui remonte vers le CP. Je sais que le CP est situé en direction d'une grande barre rocheuse que nous allons devoir contourner par la suite, alors je ne m'inquiète pas trop pour ma progression, d'autant que je reconnais bien la piste d'il y a 2 ans.
Un peu sur la gauche de la piste une écurie de motards se préparent pour le Dakar. J'en salue 2 qui passent près de moi. Belle infrastructure avec tente technique, et véhicules d'assistance...
Je continue de remonter tranquillement la piste sans trop de difficultés avant d'arriver enfin à CP6
Arrivée à CP6 mardi à 11h02
- 4h09 de course sur la section, et 26h52 depuis le départ
- Temps estimé initialement 5h00
- Temps de 2009 : 4h30
- 7ème position.
Bien content d'en avoir fini avec cette section, et surtout d'avoir contourné la difficulté. C'est vrai que d'attendre le lever du jour avant de quitter CP5 a été un bonne idée car à plusieurs reprises au début j'aurais pu prendre la mauvaise trace de nuit. Si on y ajoute l'heure de sommeil, ce n'est que du bénéfice, comme quoi je n'avais pas si bien géré les choses il y a 2 ans.
Ravitaillement classique, je fais le plein d'eau car la prochaine section va être chaude, lorsque arrivent un véhicule des PAM. Cette fois ce sont Claude et Isa qui viennent aux nouvelles. Pour la seconde fois, je vais leur confier mes pieds. Le bilan n'est pas si mauvais que ça. Bon les pansements faits à CP3 sont en mauvais état (principalement à cause de la traversée dans le sable entre CP3 et CP4), mais il n'y a pas beaucoup de nouvelles ampoules. Il faut dire que je fais ce qu'il faut pour ménager mes pieds.
Elles refont tous les pansements, traitent les petits nouveaux échauffements puis finissent par un surblindage en elasto. Objectif : il faut que ça tienne 5 à 6 PC...
Elles m'indiquent aussi que William est en route pour CP6 et qu'elles se sont arrêtées en route pour le soigner. Thierry et Françoise sont plus loin derrière.
Après cette remise en état je me prépare pour repartir, en pleine forme pour attaque la section de grosse chaleur.
De CP6 à CP7
Départ de CP6 à 11h57 après une pause de 52mn (27h44 depuis le départ).
Que dire de cette section ?
D'abord elle comporte 4 PI, PI qui empruntent dans un premier temps une piste qui contourne par le nord, puis qui traversent une zone sablonneuse avant de terminer par une très longue traversée de plaine rocailleuse totalement plate (tracé en vert sur la carte). J'en garde un souvenir assez difficile. J'avais souffert de la chaleur pendant toute la section, probablement accentué par le manque de sommeil et mes problèmes de dos. Je me souviens aussi du récit de certains coureurs qui étaient passés presque en direct et qui s'en étaient bien sortis.
Je décide donc de tenter le tout pour le tout et de zapper les 4 PI.
Je quitte le CP alors qu'une fois encore je devine William qui arrive un peu plus loin. Décidément, encore un ou deux CP et j'aurai un compagnon de route. Mais là je n'ai pas trop envie de m'arreter une heure de plus pour attendre... Je verrai comment ça se passe lorsque je ferai mon prochain arrêt prolongé pour dormir un peu à CP9.
Je quitte donc le CP par la piste et rapidement je quitte la piste pour faire un tout droit vers la barre rocheuse (mon tracé en orange sur la carte). Vu que c'est un site touristique, cela m'étonnerait beaucoup qu'au pied des montagnes il n'y ait pas une piste à 4x4 qui longe, histoire de promener les touristes l'été.
Ma réflexion va être la bonne. une fois au pied, une piste longe la barre rocheuse. Je progresse sans trop de difficulté sur plusieurs kilomètres quand je commence à trouver quelques ravines provoquées par les failles dans la barre rocheuse. La piste, elle, s'enfonce dans une de ces failles, mais je sais que le CP est situé bien au delà de la montagne et qu'il me faut la contourner totalement (encore un des gros avantages de connaitre le terrain). En effet, quand on est au pied de la montagne, l'azimut montré par le GPS laisse à penser qu'il faut entrer dans une de ces failles, alors que le point GPS est de l'autre côté.
C'est d'ailleurs l'erreur que vont commettre Dom et Patrice, se retrouvant coincés face au PC mais isolés par une falaise de plusieurs centaines de mètres (le tracé en bleu sur la carte).
J'entame donc un passage dans les premières ravines, et c'est là que je vais manquer de lucidité. Si c'était à refaire, dès les premières ravines, je serai redescendu vers la plaine pour attaquer la partie plane. Mais au lieu de ça je vais m'entêter, me disant à chaque fois que je vais retrouver une piste carrossable.
Au bout d'une trentaine de ravines, je me rend compte que si je continue comme ça, je risque de perdre tout le bénéfice de mon bon choix de début de parcours. Je décide donc, un peu tardivement, d'entamer une descente vers la plaine.
Je croise un berger avec son troupeau de chèvres (au moins une cinquantaine), traverse quelques queues de ravines, puis je retrouve la plaine finale. Ici, il suffit juste de prendre un azimut un peu grossier (cap pris sur une montagne dans l'axe du CP) d'éteindre le GPS et d'avancer. Bien sur, pas question de refaire l'erreur du CP2, aussi j'effectue un contrôle d'azimut toutes les 30mn, mais là je progresse dans la bonne direction, d'autant qu'il n'y a aucune piste pour m'induire en erreur.
Pendant cette traversée je prend un petit coup de bambou. Normal, mais j'accuse un peu le coup, tout en essayant de maintenir l'allure.
Le CP commence à se profiler au loin, l'approche est interminable, et j'ai vraiment hâte d'y être.
Arrivée à CP7 mardi à 16h14
- 4h17 de course sur la section, et 32h07 depuis le départ
- Temps estimé initialement 5h15
- Temps de 2009 : 5h40
- 7ème position.
Quand je regarde mon temps en arrivant au CP j'esquisse un large sourire. 1h30 de moins que l'an dernier. le choix de passer par la montagne était le bon, et j'aurais pu gagner près de 30mn si je n'avais pas merdouillé dans les ravines... Bon mais avec des "SI"...
Après coup, en étudiant les temps de parcours, il se trouve que j'ai réalisé le meilleur temps de tous les coureurs. En effet, patrice et Dom se sont trompé et se sont retrouvés en haut des falaises (sic !), quand à Patrick et Thomas, il mettront environ 20mn de plus que moi, le plus lent mettant près de 7h00.
Dire qu'il y a 2 ans j'arrivais ici blessé, épuisé pour y abandonner, et voilà qu'aujourd'hui, je réalise le meilleur temps partiel.
Au CP je retrouve Juju et Gérard en train de récupérer. Ils sont partis un peu vite et maintenant, pour emmener Juju au bout de l'aventure, Gérard doit réduire un peu l'allure et gérer au mieux les phases de récupération. On nous installe des matelas à l'ombre, et je me pose le temps de me ravitailler et de récupérer de cette traversée où la chaleur m'a quand même obligé à puiser un peu dans les réserves.
Le jour tombe progressivement et la température devient agréable. Une tente a été installée pour pouvoir dormir un peu, mais je décline l'invitation. J'ai encore 2 CP à faire avant de dormir, et surtout, la chaleur étant passée, je me sens bien et je n'ai pas envie de dormir. Je me repose un peu en me ravitaillant, Isa m'ayant préparé une sorte de purée mixée à la viande, et je complète en terminant le plat lyo de Juju... Quand on a faim, il faut manger...
Je profite de ce CP pour envoyer quelques SMS. C'est la première fois depuis le départ qu'on a du réseau, le relais des CP 2 et 3 étant tombé en panne.
La fraicheur arrive vite. Pas question de faire de vieux os ici. Juju et Gérad sont reparti depuis une vingtaine de minutes lorsque, à mon tour, je décide de reprendre la route.
Même si j'ai abandonné ici en 2009, je me souviens en partie du début de la section suivante faite en voiture, en gros jusqu'au poste de contrôle militaire, mais ensuite je serai à égalité avec les autres concurrents car je vais découvrir le parcours (et encore, il y a dans les coureurs des finisher 2009 qui eux connaissent le tracé en intégral).
De CP7 à CP8
Départ de CP7 à 17h03 après une pause de 49mn (32h53 depuis le départ).
Dès le départ je regrette de ne pas pouvoir progresser comme prévu. On a une longue section plate et roulante pour rejoindre une passe dans la montagne, et j'ai envie de dérouler un peu, sauf que les pieds ne le voient pas de la même façon. Je m'oriente donc sur une allure de marche rapide comme je sais la gérer.
Je remonte progressivement Gérard et Juju, restant avec eux quelques instants au moment de les doubler, mais il ne sont pas du tout dans mon rythme, et comme je suis bien, je préfère continuer à tracer. Et puis ils sont là pour vivre aussi une aventure à deux. Le père et le fils. De toutes façons on se reverra certainement plus loin.
J'en termine avec la traversée de la plaine. La nuit est tombée et je progresse avec la lumière de la lune même si c'est parfois un peu juste car il y a par moment un très léger voile de nuages suffisant pour estomper la lumière. De plus j'ai parfois des doutes sur la trace à suivre, alors je vais commencer à utiliser une technique que je conserverai jusqu'à la fin, à savoir la recherche de traces de pas. Oh ce n'est pas une technique fiable, les coureurs devant peuvent aussi se tromper, mais dans ce cas là au moins je ne serai pas tout seul dans la mouise !
Donc à chaque fois que j'ai un doute je cherche les empreintes de chaussures pour confirmer mes choix. Il y a plusieurs PI sur cette section et j'essaie de les suivre un par un en raison de la nuit et de mon manque de connaissance du terrain. L'attaque la montée vers la passe. C'est une des seules pistes carrossables qui traverse la chaine de montagne, alors on devrait trouver une belle trace. Sauf que pour rejoindre cette trace on coupe un peu dans le tout droit, et que ça passe par des séries de petites ravines et un sol dont la croute craque sous le pied.
La fin de la progression n'est pas très facile pour moi. j'ai un peu de mal à lire le terrain. la lune est revenue et son éclairage perturbe ma lecture des reliefs. Plusieurs fois je suis obligé d'allumer la frontale soit pour me rassurer, soit pour valider ma trace, soit pour identifier un relief.
Finalement je fini par retrouver la large piste. Là aucun doute, c'est forcément celle qui passe par le col.
J'embraye dessus, coupe le GPS, franchi le col et commence la descente. Je fais attention car c'est assez caillouteux et j'essaie de protéger mes chevilles. J'arrive au point de contrôle de l'armée marocaine. Quelques échanges avec les militaires présents, ils notent mon numéro de dossard puis m'ouvrent la barrière qui coupe le passage.
Koko et Franck passant le poste de contrôle
Je continue la descente et je rallume le GPS car il y a un PI un peu plus bas. Sur cette section j'ai un gros coup de fatigue. Je sens que je titube un peu ce qui n'est franchement pas bon signe. Aussitôt je décide de faire un micro sommeil. Je me trouve un recoin avec un petit tas de sable (c'est plus confortable que les cailloux), je place ma tête dans mes bras et hop, c'est parti pour 15mn de sommeil récupérateur.
L'avantage c'est que j'arrive à me conditionner et à m'endormir pratiquement tout de suite. Le risque c'est d'être réveillé en plein cycle par un autre concurrent. Mais là je me réveille tout seul au bout de 14mn, juste avant que la montre ne sonne. C'est pas beau ça ?
Cette pause me redonne l'énergie nécessaire pour repartir jusqu'au CP.
Arrivée à CP8 mardi à 21h05
- 4h02 de course sur la section, et 36h55 depuis le départ
- Temps estimé initialement 5h15
- 5ème position (j'ai passé Juju et Gérard).
Pause classique au CP. Pendant ma pause je suis rejoint par Gérard et Juju qui ont bien tourné sur la seconde partie du parcours (celle où j'ai eu mon petit coup de pompe). En tous cas, Juju qui était un peu attaqué à CP7 semble avoir repris du poil de la bête.
Je termine mon ravito, essaye de refaire un sommeil flash, mais je vais être réveillé par le contrôleur du CP qui me voyant assoupi vient me mettre une couverture sur moi. l'intention était gentille, mais ça coupe pile ma récup. Je tente d'en refaire un autre, mais cette fois ci je suis réveillé par Alain qui passe en 4x4. Il nous apprend qu'il y a eu une vague d'abandons pendant cette journée. Daniel, Jean-Claude, William, Alain, Joël et Michel ont jeté l'éponge pour des raisons diverses et variées, comme quoi, même des finisher habitués à ces épreuves peuvent caler dans certaines conditions. Je prend des nouvelles de Koko, et il me dit qu'il n'y a pas de soucis et qu'elle est toujours en course. Je ne suis pas inquiet, mais ça fait plaisir d'avoir des nouvelles.
Du coup, je ne vais pas arriver à me reposer. Je décide donc de repartir pour aller jusqu'à CP9 où j'ai prévu ma seconde vraie pause sommeil, d'autant que vue l'heure, je devrais avoir pas mal d'avance par rapport à mon échéance de 8h00 demain matin.
De CP8 à CP9
Départ de CP8 à 22h12 après une pause de 1h07 (38h02 depuis le départ).
Je repars un peu avant Gérard et Juju, toujours dans l'idée de me mettre à mon rythme. Je n'ai pas trop trop de souvenirs de cette section. J'ai avancé du mieux possible mais mon déficit de sommeil se fera sentir. Il y a 2 PI (8 et 5 km) avant d'atteindre le CP et je me fixe comme objectif de les atteindre, sans penser au CP final(7km de plus).
Au moment du second PI j'ai un nouveau coup de pompe, et en plus il y a un peu de vent. je me trouve une petite dépression dans le sable protégée du vent, je cale la montre de nouveau sur 15mn et je m'allonge. Ah oui je suis bien protégé du vent mais ... j'avais oublié la lune qui est pile poil face à moi. Et une lune désormais dégagée, ça éclaire fort.
Un bras sur les yeux je m'endors quand même rapidement. Au réveil j'ai un joli regain d'énergie comme prévu (heureusement que ça fonctionne). Je reprends ma route direction CP9. Là plus trop de soucis cette pause ayant pu être gérée proprement. Je crois que mes 2 tentatives ratées à CP8 ont eu l'effet inverse. C'est une technique efficace, à condition qu'elle ne soit pas interrompue.
Arrivée à CP9 mercredi à 03h03
- 4h51 de course sur la section, et 42h53 depuis le départ
- Temps estimé initialement 5h45
- 5ème position.
J'arrive avec plaisir à CP9. J'ai 5 heures de marge par rapport à mon plan de route ce qui devrait me laisser le temps de dormir un peu. Comme je suis seul avec le gardien du CP je décide de me coucher tout de suite et de me ravitailler après avoir dormi pour éviter de dormir le ventre plein.
Comme je sais que Gérard et Julien vont arriver, je me couche dans le fond de la tente pour leur laisser la place car je ne connais pas leur stratégie de repos, et je m'endors, le réveil calé sur 2h30 de sommeil (soit un bon cycle).
Gérard et Juju arrivent pendant que je dors. Par contre l'installation est moyenne car ce doit être le seul CP dans lequel il n'y a pas de matelas... heureusement que sous les tapis de la tente c'est du sable et pas des cailloux.
Un peu avant 6h00 je me réveille. Le jour commence juste à pointer et cette très courte nuit m'a vraiment fait du bien. Bon ça me fait quand même 4h de sommeil en 48h !
Gérard et Juju sont là. On prend notre petit déj ensemble puis on décide de profiter des températures clémentes et du lever du jour pour attaquer notre 3ème journée.
Mon objectif est encore simple cette fois ci, enquiller 4 CP en 24h, c'est à dire repartir de CP13 avant 08h00 demain matin.
Gérard et Juju repartent quelques minutes avant moi, puis je quitte à mon tour le CP.
De CP9 à CP10
Départ de CP9 à 07h00 après une pause de 4h00 dont 2h20 de sommeil (46h50 depuis le départ). J'ai encore une heure d'avance sur ma barrière horaire personnelle.
Cette section est une nouvelle traversée, mais dans l'autre sens, du lac Iriqui. C'est donc plat, plat et plat.
Je rattrape rapidement Gérard et Juju, et m'approchant sans trop faire de bruit j'en profite pour faire une photo dans le soleil levant.
On discute quelques instants et une fois encore je repars à mon allure, sachant que de toutes façons je les reverrai au CP suivant.
Pas grand chose à dire sur cette section. j'avance correctement, réalisant un des meilleurs temps sur la section (16mn derrière Thomas, le plus rapide, et 5mn derrière Thierry et Françoise).
Mon allure de marche s'avère efficace surtout dans la régularité. Et dire que j'ai les jambes pour courir... c'est limite frustrant...
Arrivée à CP10 mercredi à 10h59
- 3h59 de course sur la section, et 50h49 depuis le départ
- Temps estimé initialement 6h00
- 5ème position.
Je fais une bonne pause sur le PC avant d'attaquer la section chaude de la journée. Je prend encore une fois le temps de bien m'hydrater, de manger (y compris ce que les concurrents précédents me laissent parfois après leur passage...) et de me reposer , intégrant toujours une petite sieste sans sommeil de 15-20mn.
Je commence à me préparer pour repartir, mais je me rend compte que je n'ai pas revu Gérard et Juju. Je sors de la tente et je devine les deux silhouettes au loin. C'est bon ils arrivent. Le petit jeune tient le coup, ce qui n'était pas gagné d'avance.
Je quitte le PC en leur faisant un signe de loin auquel ils répondent.
De CP10 à CP11
Départ de CP10 à 11h52 après une pause de 53mn (51h42 depuis le départ).
La section qui s'annonce est presque aussi plate que la précédente. Un grand plateau désertique (le lac) sans un poil d'ombre. Ici ce n'est pas la peine de chercher le moindre tamaris, il n'y a rien de rien, même pas un buisson.
Un seul PI sur le chemin. Comme il fait un détour, j'envisage de couper droit par le lac, mais dès que je sors de la piste, je tombe sur un terrain avec une croute craquante et un sol meuble en dessous. Après quelques centaines de mètres je me rend compte que ce sera difficile de faire 20km là dedans, sans compter que sur cette distance je ne sais pas ce que je peux trouver ensuite.
Je décide donc de revenir sur la piste. Au loin, derrière, un 4x4 arrive au CP.
Je reprend ma route quand au bout de quelques km, le 4x4 me rejoint. Dedans il y a Michel, Alain et Jean Claude dont j'avais appris les abandons. Ca fait du bien de croiser un peu de têtes nouvelles.
On discute 5mn puis je me prépare à reprendre mon chemin quand j'ai un éclair de génie... (si si, c'est possible). je leur demande si ils n'ont pas des bâtons à me prêter (je vous rappelle que ceux que j'avais emporté sont... dans mon sac à dos, quelque part entre Orly et Ouarzazate...). Et là, Jean Claude me prête les siens, me demandant d'en prendre soins car ce sont ceux d'un copain... Hum hum... Et dire que ceux dans mon sacs sont ceux aussi d'un copain... désolé Olivier !!!
Ces deux jambes providentielles vont avoir un effet booster, au moins moralement.
Je repars à ce qu'il me semble être une bonne allure, mais la chaleur va très très vite me calmer... et me cramer.
J'ai du mal à avancer. Je sais qu'il faut que j'arrive au CP et qu'ensuite j'aurai une section plus fraiche à la tombée de la nuit, mais pour le moment je pioche grave. Je termine la zone du lac et je trouve un buisson. comme c'est le premier je décide d'y faire une pause. Je m'allonge plaçant juste la tête dans la petite zone d'ombre, et j'en profite pour boire un coup... Que c'est bon.
C'est pas tout mais j'ai encore du chemin à faire.
je repars puis après quelques km, j'entame une zone de petites dunes. Pas très hautes et avec des possibilités de contournement , mais avec la chaleur et la fatigue, c'est crevant. Heureusement que j'ai les bâtons et surtout que ma préparation à la CCC m'a fait travailler les cuisses
Je passe les dunes quand je vois le CP un peu plus loin derrière. Trop cool... Ca commence à sentir bon tout ça.
Claude vient à ma rencontre et j'arrive sur le CP où je retrouve William et Alex.
Arrivée à CP11 mercredi à 17h00
- 5h08 de course sur la section, et 56h50 depuis le départ
- Temps estimé initialement 6h00
- 5ème position.
Je me pose rapidement sur le grand tapis déployé à l'ombre devant la tente, bois mon coca et un thé préparé par le responsable marocain du CP.
Claude me demande si tout vas bien et si j'ai besoin de quelque chose, et moi bêtement je lui répond "oui, j'ai besoin d'un slip propre"...
En fait, je porte le même sous vêtement (en coton) depuis le départ et entre la transpiration et les multiples couches de crème, non seulement ça commence à sentir un peu fort, mais surtout ça provoque des échauffements mal placés, et là encore, mes rechanges sont... dans mon sac à dos.
Sur ce je m'installe pour récupérer et me ravitailler quand je vois Claude revenir avec un sous vêtement de course emprunté à Patrick (dont elle avait les bagages dans le 4x4)... Cerise sur le gâteau, elle me donne aussi un mélange de pommade et de vitamine A à passer sur les zones irritées une fois que je me serai changé.
Du côté des pieds tout va bien. Les pansements tiennent le coup, et comme il n'y a pas de nouveaux échauffements, on ne touche à rien. Je vais juste en profiter pour changer de chaussettes et mettre la paire prêtée par Koko avant le départ.
Claude, Alex et William repartent car ils doivent aller sur CP13, et moi je profite tranquillement de ma pause avec le responsable du CP
Une fois ravitaillé, je fais un brin de toilette... ça fait du bien de se sentir un peu plus frais, puis j'applique la pommade magique de Claude et le caleçon de Patrick... Et voilà un coureur neuf.
La nuit est tombée, la température est de nouveau bonne, et il est temps de reprendre la route
De CP11 à CP12
Départ de CP11 à 18h35 après une pause de 1h35 (51h42 depuis le départ).
Pas de fantaisies sur cette section. Il y a une zone de dunes pour commencer, une zone plus facile ensuite et à nouveau une zone de dunes sur la fin. Il faut essayer de rester sur la piste le plus possible.
Je pars donc sur la piste, pas trop difficile à suivre au départ. Il n'y a qu'un seul PI sur le tracé que je décide d'essayer de rejoindre.
Rapidement la piste part dans des méandres et des directions fantaisistes par rapport à l'azimut du PI. Je décide donc de me caler directement sur le CP et de zapper le PI. Tant pis pour les dunes, je vais faire du tout droit.
Finalement, les premières dunes passent plutôt bien. Soit je trouve des passages entre elles sur un sol dur, soit, avec l'aide des bâtons, je les passe sans difficulté. La zone n'est pas trop longue et je me retrouve rapidement sur le grand plateau intermédiaire. Là j'ai du mal à identifier le terrain. Fatigue + lune me perturbent et je mélange reliefs et zone sombres au sol. Finalement je prend le parti de continuer toujours tout droit sans me préoccuper du sol, et ça passe...
Ce passage est assez long mais je gère au mieux jusqu'à l'apparition de la seconde zone de dunes.
Ici rapidement la problématique est différente car les dunes sont franchement plus hautes et un peu plus difficiles à essayer de contourner (toujours avec l'éclairage de la lune). J'en passe plusieurs quand à un moment au loin je vois un feu de camp pile dans l'axe. Le GPS indique près de 3km, mais pas de doute en dehors du CP je ne vois pas qui pourrait faire du feu à cet endroit.
Par contre 3km de grosses dunes, ça ne me dit rien de très bon, et je suis incapable de voir si celles-ci s'arrêtent avant le CP.
Depuis un moment je vois sur ma droite une longue bordure d'arbres, un peu comme si il y avait une route avec des arbres tout le long. Vu mon état de fatigue, je me dit que je me fait des idées, que ce sont certainement encore des ombres qui me font cette illusion, et que si je vais par là je vair encore me retrouver au milieu de nulle part.
Je continue encore un peu dans les dunes, mais, même avec les bâtons, la progression reste terriblement lente et les hectomètres n'avancent pas très vite. Seul point rassurant le feu reste visible à intervalles réguliers, comme quand on remet un peu de bois pour le relancer.
Finalement je vais craquer. Tant pis si c'est une fausse impression, mais je décide quand même de tenter l'approche par la bordure d'arbres. L'avantage c'est que pour les rejoindre, je vais progresser dans le sens des dunes, et donc sans trop de difficultés. Plus je m'approche plus cette barrière d'arbre semble réelle... Finalement je n'ai peut-être pas rêvé.
Globalement sur la fin je vois bien que ce n'est pas exactement une haie d'arbre telle que je me l'imaginais, mais quand même une zone plutôt dense. En arrivant sur zone je comprend pourquoi. Il s'agit en fait d'une sorte d'oued, d'où la présence de ces arbres. Là non seulement la progression est d'un coup beaucoup plus facile, mais la direction est globalement dans le bon sens et , cerise sur le gâteau, j'y trouve des traces de chaussures... Yes ! Ça va le faire...
Je vais jusqu'à la sortie des dunes par l'oued, puis je retrouve une belle piste qui va vers le CP... Je m'en suis sorti. Le final est assez simple,e t je m'offre même le plaisir d'un dernier petit tout droit pour arriver enfin au CP.
Arrivée à CP12 mercredi à 22h25
- 3h50 de course sur la section, et 62h15 depuis le départ
- Temps estimé initialement 6h00
- 5ème position.
Je me pose à l'extérieur du CP à côté du chef de poste. Il a effectivement fait un petit feu de bois et c'est bien cela que j'avais vu. Je lui dit qu'il faut qu'il continue et que cela se voit de loin.
Il fait bon, alors je reste dehors le temps de me ravitailler. On est que tous les deux et du coup on discute un peu et on se boit un petit thé. Là planté au milieu du désert autour du feu la nuit... Je suis juste bien et j'en profite.
Après m'être ravitaillé je me pose la question de me poser ici un peu ou d'aller jusqu'à CP13. Comme je commence quand même à pas mal fatiguer, je choisi de faire ma pause sommeil ici, ce qui me permettra d'attaquer la dernière section de nuit en étant un peu plus en forme, et ce qui ne remettra pas en cause mes objectifs de progression.
Une petite demi heure après mon arrivée, Juju et Gérard arrivent à leur tour. Eux décident de se ravitailler ici puis de pousser jusqu'à CP13 pour se reposer. Comme les tentes ne sont pas très grandes cela conforte mon idée de dormir ici. Direction la tente où je me cale sous une couverture et où je m'endors toujours aussi rapidement.
1h45 plus tard je me réveille (juste un peu avant que la montre ne sonne). Pas facile de s'extirper de la chaleur de la couverture en pleine nuit, c'est plus facile lorsque le jour se lève.
Je me prépare tranquillement, enfile le coupe vent pour le démarrage et je sors de la tente. Le chef de poste dors. Je rempli moi même la fiche de contrôle avec mon heure de départ, puis je le réveille quand même pour lui dire que je m'en vais et que j'ai rempli les papiers. Ca lui évitera de s'inquiéter.
Avant de me coucher je lui ai demandé si la piste était praticable. l'interposte comporte plusieurs PI, et fait une grand S. Il me dit qu'on peut faire plus simple en coupant totalement hors piste et en rejoignant une piste qui relie CP3 à CP13... J'ai un peu de mal avec toutes les explications détaillées qu'il me donne et comme en plus c'est de nuit je décide de ne pas tenter le coup. Finalement je verrai après la course que j'ai probablement bien fait car la partie hors piste était longue et que si jamais on croise la bonne piste sans s'en rendre compte, là c'est la galère assurée.
De CP12 à CP13
Départ de CP11 Jeudi à 01h20 après une pause de 2h55 (65h10 depuis le départ) dont 1h45 de sommeil (soit environ 5h30 de sommeil depuis le départ).
Là je prend PI par PI. Je progresse sur la piste en contrôlant régulièrement les traces de pas par sécurité en me disant que les coureurs devant moi sont passés de jour et donc avaient moins de chances de se perdre.
Je n'ai pas en mémoire toute la section, mais je me souviens que c'est probablement celle qui a du être la plus variée côté relief. Des montées des descentes des virages, mais comme il fait nuit j'ai un peu de mal à me faire une idée du paysage qui m'entoure. De toutes façons, la seule chose qui m'intéresse c'est de continuer à progresser sans me perdre. Je sais que je suis toujours pile dans mes temps et que, sauf erreur, il y a peu de raisons que ça ne passe pas.
J'enchaîne les PI, zappant en général les derniers hectomètres pour passer au plus vite sur le PI suivant.
Il y a un petit truc qui me turlupine quand même. Je sais que le PC13 est dans une zone de sable (on y avait fait les tests de la gestinette en 2009) et moi je progresse toujours dans un univers de cailloux.
Le jour commence à se lever me redonnant un petit coup de boost. Les kilomètres fondent progressivement, et même sur le dernier kilo, je suis encore dans les cailloux. Me serais-je trompé ?
400m... Je décide de couper droit sur le CP dans un champs de cailloux, et voilà qu'au dernier moment je bascule dans une large cuvette sablonneuse où se trouve le CP. Je reconnais l'arbre au milieu. Ca y est j'y suis enfin.
Arrivée à CP13 Jeudi à 06h55
- 5h35 de course sur la section, et 70h45 depuis le départ
- Temps estimé initialement 6h15
- 7ème position. (Juju et Gérard sont repassés devant)
Je me rend vers la tente du CP, et là j'y retrouve Gérard et Juju. Sauf que Gérard a la mine un peu déconfite. Juju est allongé sur un matelas, complètement emmitouflé en train de dormir. Gérard m'explique qu'il souffre de plus en plus, et qu'il a énormément galéré pour arriver jusqu'ici cette nuit.
Je m'installe à l'extérieur de la tente pour laisser Juju dormir, je me ravitaille et Gérard me dit qu'ils ont mis près de 7h00 pour arriver ici et que depuis, il n'arrive pas à joindre les PAM du fait qu'il n'y a pas de réseau sur ce CP. De plus personne n'est passé en 4x4 depuis qu'ils sont ici.
C'est vrai que le PC est dans une cuvette et que l'arrêt de l’émetteur qui couvre la zone n'aide pas vraiment.
Du coup je décide d'écouter ma pause et j'indique à Gérard que dès que je sors de la cuvette j'essayerai de les contacter. on ne sait jamais, il y a peut être une chance que j'arrive à capter un peu de réseau quelque part.
De CP13 à CP14
Départ de CP13 Jeudi à 07h34 après une pause de 0h39 (71h24 depuis le départ) la pause la plus rapide de tous les participants à ce CP...
Je pars par la piste, un peu perturbé par l'état de Juju, et probablement par l'inquiétude que j'ai pu lire sur le visage de Gérard. Je me dépêche de grimper la piste qui monte hors de la cuvette et je me retrouve sur le plateau. Là je branche le portable, mais aucun signal. Malgré le fait que je n'ai plus de chargeur (lui aussi est dans mon sac à dos), vu que j'approche de la fin de course, je décide de laisser le portable allumé au cas où, à un moment, j'arriverais à attraper un peu de réseau.
Une fois en haut, s'affiche devant moi une longue et morne plaine caillouteuse sans rien d'autre qu'un enchevêtrement de pistes à 4x4... Pas d'ombre, pas de végétation, pas de jolis décors, juste un plateau "de la mort qui tue", surtout quand on a déjà 270 bornes dans les jambes...
Là, le mode "Off" est de rigueur. Il y a bien 2 PI mais comme c'est tout droit de chez tout droit je les zappe et passe directement en cible sur CP14
Je sais qu'une fois là bas ce sera pratiquement gagné, mais d'ici là, je vais avoir le temps de cogiter un peu. Heureusement que j'ai de la distraction avec le passage de 4x4. Pas passionnant, mais ça coupe la monotonie du plateau, même si après leur passage il faut gérer le nuage de poussière.
Tous me saluent au passage et certains viennent même discuter un peu, étonnés de me trouver en ce lieu perdu. Il y en a même un qui me propose de m'avancer sur la piste... c'est sympa mais je décline poliment son offre. Je n'ai pas fait tout ça pour monter dans un 4x4 quand même !!!
Je croise un gros pick up qui se dirige vers moi. C'est Alain avec Dom et Patrice qui se rendent sur CP13. je leur indique ce que je sais sur Juju, mais visiblement ils sont déjà au courant (!). Patrice m'indique que cette section est interminable (merci, je commençait juste à m'en rendre compte) et que je vais avoir le temps de cogiter... Sur ce, ils reprennent leur route et moi la mienne.
Je continue de progresser entre piste caillouteuse et passages de 4x4. Je vois aussi quelques véhicules en prépa pour le Dakar. En fait on les entends souvent avant de les voir.
Le 4x4 d'Alain repasse dans l'autre sens. J'en profite pour passer une petite commande à Dom' (des sandales ouvertes pour l'arrivée, les miennes étant dans... mon sac. Comment l'avez vous deviné ?), puis ils filent à nouveau.
La chaleur commence à bien me taper dessus, et je n'ai rien pour m'abriter par ici.
Arrivé à quelques kilomètres de CP je découvre des zones vert fluo au sol. C'est marant mais il y a de la roquette qui pousse ici d'un vert assez soutenu et surprenant dans cet univers aride.
Un peu plus loin le relief commence à changer. la zone plate de cailloux laisse place à un univers sablonneux avec des monticules de terre et des dunes. Par chance de larges pistes passent au travers de tout ça et favorisent ma progression. Je profite du premier gros tamaris pour faire une petite pause à l'ombre et m'hydrater.
Je repars au milieu des pistes de 4x4 croisant des Quad de reconnaissance en charge d'ouvrir la voie aux 4x4 du dakar pour leurs entrainements, mais à la différences de ceux de tout à l'heure, ceux là n'esquissent même pas un petit geste de salut... pfffff !
Finalement, en affinant progressivement mon azimut je trouve enfin le CP14
Arrivée à CP14 Jeudi à 13h05
- 5h31 de course sur la section, et 76h55 depuis le départ
- Temps estimé initialement 6h30
- 5ème position.
Encore une fois la chaleur m'a quand même pas mal plombé. Je pose mes affaires près de la tente, bois mon coca, de l'eau, et réhydrate un plat parce que je commence à avoir faim. Une fois tout ça fait ainsi que le plein en eau pour tout à l'heure (je préfère faire ça tout de suite pour ne pas oublier et prendre le risque de repartir à vide), je décide de différer un peu mon départ pour éviter la forte chaleur de l'après midi. je décide de ne repartir que vers 15h00, comme ça je n'aurai qu'une heure de chaud et ensuite je pourrai bénéficier de la baisse des températures.
Ayant annoncé ça au responsable du CP, il me propose de venir m'installer derrière le gros tamaris situé devant la tente. Il y a installé des tapis et des matelas et il y fait meilleur que dans la tente. Il me propose un thé que je m'empresse d'accepter puis, pour tuer le temps je décide de faire une petite sieste. Après tout autant prendre des forces pour la fin.
Un peu avant 15 heures je me prépare à partir. Il fait toujours bien chaud mais ça devrait bientôt baisser d'intensité. Je fait le point avec le responsable du CP sur le meilleur itinéraire à suivre.
En fait pour aller de CP14 à CP15, le plus court c'est de faire une trace directe, sauf qu'on est obligé de passer par le point intermédiaire PI27 qui est complètement excentré. En fait le PI27 correspond au CP1 de l'aller, et le CP15 correspond au PI2 qui était aussi un PI obligatoire à l'aller.
Le problème c'est que les 6km en CP14 et PI27 correspondent à une zone de dunes dans lesquelles des concurrents avaient pas mal souffert il y a 2 ans. Il existe bien une autre solution qui serait de contourner cette zone de dunes mais qui oblige à revenir un peu en arrière, ce qui sur le principe ne m'enchante pas trop. Par contre, galérer dans les dunes aussi près de la fin, me branche encore moins. Du coup j'opte pour la solution de contournement.
Le responsable du poste me dit qu'il me suffit de revenir en arrière jusqu'à la fin des dunes puis de prendre à 90° jusqu'à la piste (celle qui faisait la jonction entre CP1 et CP2) puis de suivre cette piste jusqu'au PI27 (ex CP1). Pour ne pas me tromper il me donne un indice qui va bien me servir... "Tant que tu vois des Tamaris, c'est que derrière il y a des dunes. A la fin des Tamaris, tu pourras couper.
Mon idée du tracé est à peu près celle là (ah oui, vu comme ça, ça calme... !)
Alors que je termine de me préparer, Juju et Gérard arrivent ! Grand moment de plaisir de les voir débarquer ici. Vu l'état de Juju quand je suis parti de CP13, j'étais assez inquiet sur sa capacité à repartir, mais visiblement le passage des PAM a fait de l'effet.
Par contre, ils se sont fait la traversée du plateau en pleine chaleur et cette fois ci c'est Gérard qui est explosé.
On discute avec Juju lorsque je me rend compte que Gérard s'est déjà endormi sur un matelas à l'ombre. De toutes façons ils veulent prendre le temps de se reposer avant d'attaquer la prochaine section et repartir avec la fraicheur du soir.
Du coup je décide de ne pas les attendre. non pas que je ne veuille pas rester avec eux (j'avais même parlé à Gérard du fait qu'on puisse finir tous les 3 ensembles vu le chemin que nous avions parcouru), mais là, j'ai un peu hâte d'en finir et j'ai vraiment envie de bouger après mon arrêt prolonger. Je salue Juju, lui dit de faire la bise à Gérard quand il se réveillera et je pars sur la piste, par le même chemin qu'en arrivant.
C'est marrant mais le fait de les savoir ici me redonne un coup de booster...
De CP14 à CP15
Départ de CP14 Jeudi à 14h50 après une pause de 1h45 (78h40 depuis le départ)
Je repars par la même piste que celle par laquelle je suis venu. Pour gagner de la distance je décide de biaiser un peu pour longer les dunes au plus près, et on ne sait jamais, si je trouve une piste...
Jes fais environ 1,5 km à contre sens quand je me rend compte que les dunes ont beaucoup perdu en densité et en taille. Comme je devine la fin de la zone de dunes plus loin, je décide de me risquer à couper.
Je traverse un petit plateau, passe à proximité d'une cabane isolée, puis attaque la traversée des dunes. Ca passe bien, car celles ci sont espacées et de larges plaques de sol dur permettant de naviguer entre elles. J'avance correctement en me disant que dans cette direction je vais finir par trouver la piste.
Par sécurité je me décide à contrôler ma position avec le GPS. Je me dit que sur les 6km initiaux, j'en ai fait 1,5 à contre sens, puis probablement 2 ou 3 en latéral. il doit donc m'en rester à peu près autant à faire, et là surprise... Le GPS m'indique moins de 2 km !
En fait contrairement à ce que je pensais, je ne suis pas en train de tout contourner, mais plutot de faire un trajet avec un simple angle ouvert, ce qui fait que, même avec le détours, je continue de me rapprocher du PI. Il y a aussi des bonnes nouvelles parfois. Et puis la navigation de jour avec la chaleur qui s'est calmée rend la progression agréable. Je me demande par contre comment Juju et Gérard vont gérer cela vu qu'ils risquent fort de repartir de nuit, et que là, les choix que j'ai fait ne seront pas forcément très lisibles... sauf si ils suivent mes traces de pas !
Je laisse le GPS allumé et vue la distance je pique droit sur le PI, je sors des petites dunes et je vois le puits et la cabane du PI... Yes c'est tout bon. Je termine en traversant une zone de cailloux et j'arrive au puits. Il ne m'a fallu que 1h25 pour venir ici contournement compris.
Alain avait dit qu'il y aurait un contrôle, mais il n'y a rien de rien. pas même une feuille à signer ! Pour montrer que j'y suis bien passé et que je n'ai pas coupé, je fais une photo de l'endroit avec le soleil rasant (il faisait grand jour lors de notre passage lundi dernier).
Maintenant place au même chemin qu'à l'aller... enfin, ça c'est ce que je pensais !
Petit rappel... A l'aller j'ai quitté PI2, je suis passé par le passage au bout des dunes (en rouge sur le plan) puis j'ai fait un azimut direct sur le CP1 en traversant la plaine de cailloux (vous vous souvenez ?)
Alors je me dit que ce sera pareil... je fais un azimut direct sur le CP15 et hop je traverse la plaine de cailloux et j'y arrive
Sauf que j'ai tout faux !
Je pars donc à l'azimut direct, et rapidement je ne reconnais pas le terrain. c'est valloné alors que c'était plat à l'aller, je n'ai aucun arbre isolé comme poit d'azimut, et le sol alterne cailloux et sable... bref j'ai l'impression d'être ailleurs.
Je prolonge cette progression mais avec la nuit qui tombe je commence à avoir de sérieux doutes sur ma position, jusqu'au moment où le déclic se fait...
Quel crétin.... je me suis complètement planté de chez planté...
A l'aller, quand j'ai calculé mon azimut direct, je ne l'ai pas fait entre PI2 à PC1. Je suis parti de PI2, je suis allé jusqu'au point de passage au bout des dunes, et de là j'ai pris mon azimut. Du coup si j'avais voulu faire un azimut direct en retour, il aurait fallu que je fasse PI27 (ex CP1) vers le point de pasage au bout des dunes, sauf que je ne connais pas la position de ce point là !
Arrrggghhhhhhhhhhhhhhhh ! ! !
Ça veut dire que je suis paumé quelque part entre les dunes et ma trace de l'aller sans points d'appuis fiables pour me recaler.
Pas de panique. Normalement, sur ma droite je dois avoir la piste par laquelle sont passés les concurrents à l'aller, puis une zone de dunes puis le plateau où se trouve CP15. Je me dit que le plus simple est de continuer à progresser directement vers le CP, puis quand je croiserai la piste, il me suffira de la suivre le long des dunes jusqu'au point de passage (lui je le reconnaitrai) puis de faire un dernier azimut sur le CP.
Je pars donc droit devant moi. la progression est fastidieuse dans une zone de cailloux dense entrecoupés de petites zones de dunes... Quelle galère alors que je pensais faire un dernier tronçon facile. De plus la nuit est en train de tomber est ma visibilité est du coup n'est plus très bonne.
J'avance péniblement (c'est le bon mot) jusqu'au moment où je me trouve face à de grosses dunes. M.... qu'est-ce qu'elles font là celles là. J'aurais du trouver une piste avant d'arriver ici. Ou alors la piste est un peu plus loin derrière ces dunes. Pas le choix je dois passer. Je traverse une première dune, descend de l'autre côté mais pas de piste. Une seconde dune, une troisième une quatrième, c'est sans fin et surtout sans piste ...
Il y a encore un bon bout pour rejoindre le CP, mais je n'ai pas le choix. Je n'ai aucune idée du meilleur endroit pour traverser, alors je reste sur le tout droit, façon sanglier.
J'enchaine les dunes, m'enfonçant parfois jusqu'à mi-mollets, dans les descentes, même avec l'aide des bâtons. Les hectomètres n'avancent pas très vite et j'ai l'impression de passer ici un temps infini, d'autant qu'à chaque fois que je suis en haut d'une dune, j'en devine d'autres derrière, même si je reste méfiant la nuit avec mes impressions...
J'arrive enfin sur une zone dure et plate que j'identifie comme étant le plateau du CP. je m'arrête, enlève et vide les chaussures, puis repars droit sur le CP. Ca ne dure pas longtemps. J'avais cru que c’était plat, et bien non, je retombe dans les dunes...
Re-traversée des dunes, re-ensablage, et re-plateau dur. Pas d’affolement ce coup-ci, sauf que cette fois ça semble durer un peu.
Au loin de vois une sorte de petite lumière... le CP??? et d'un coup deux gros points lumineux. Un 4x4. Là pas de doutes, je suis sorti des dunes. je re-vide mes chaussures et mes chaussettes, puis je file droit sur les phares qui sont dans l'axe indiqué par le GPS. Il reste encore un bon bout mais c'est enfin stable et plat. Les feux du 4x4 se mettent en mouvement. Dommage ça me faisait un bon point de repère. Du coup je fixe mon cap sur la lune.
En me rapprochant je devine enfin les vagues lumières. Pas de doutes c'est le CP cette foi-ci.
Je remonte au milieu des cailloux mais dans une zone relativement praticable, puis je trouve une pistouille qui me permet de rejoindre le CP
PC15 vu de jour
Arrivée à CP15 Jeudi à 19h54
- 5h04 de course sur la section, et 83h44 depuis le départ
- Temps estimé initialement 6h30
- 5ème position.
J'arrive au niveau de la tente, où il me semble y avoir pas mal de mouvements. En fait je suis accueilli par Michel et Jean-Claude qui ont décidé de venir passer la nuit ici pour attendre les coureurs. En voilà une bonne idée !
Je m'étais fait à l'idée d'un arrêt flash sur ce CP, du genre je bois un verre de coca, je pointe et je repars, mais là vu l'accueil je décide de me poser un peu et passer un petit moment sur place. De toutes façons il ne me reste qu'une dizaine de kilomètres, j'ai une grrrrrooooossssseeeeee marge de manœuvre, et le pire c'est que d'ici on voit nettement les lumières de Mhamid au loin.
Je m'installe sur un des matelas, et Jean Claude place une grosse couverture comme dossier. Il faut bon, on discute un peu, je grignotte un peu de viande séchée qu'ils me proposent (je suis parti à vide de CP14 côté alimentation) et du coup, j'ai tendance à commencer à m'endormir. Il va falloir que je finisse par me faire violence pour m'extirper de la tente et me décider à prendre la direction de l'arrivée.
Michel envoie un SMS aux coureurs à l'hôtel pour me commander des tajines et deux bières...
Je me ré-équipe, enfile le coupe vent pour repartir, puis je cherche la trace de la piste pour être sur de ne pas me tromper. Il y a une zone de dunes entre le CP et Mhamid, et j'aimerai bien l'éviter autant que faire se peut. De jour, ça se fait bien, mais là encore, de nuit ça risque d'être moyen moyen...
Je salue mes deux camarades, le chef de poste et j'attaque ma dernière section avec beaucoup de plaisir.
De CP15 à l'Arrivée
Départ de CP15 Jeudi à 20h30 après une pause de 0h36 (84h20 depuis le départ)
Il y a plusieurs traces, mais finalement je trouve la vraie piste, bien marquée et sur laquelle je trouve encore des marques de pas.
Le début est roulant et la piste bien lisible, donc pas de soucis. De temps en temps quand le sol est très dur les traces s'estompent, et la lune écrasant le relief, j'utilise la frontale au plus près du sol pour faire ressortir les ombres. Ca fonctionne pas trop mal.
J'ai rapidement enlevé le coupe vent qui ne m'a servi qu'à me protéger de l'effet de froid lors de la sortie du CP. Je ne cherche pas à avancer super vite, j'ai plutôt envie de profiter un peu de cette dernière section. Quand on est en course on a qu'une hâte, c'est d'arriver, mais maintenant que j'arrive et que globalement je sais que je vais exploser mes objectifs, voilà que je suis d'un coup beaucoup moins pressé.
Les premières dunes apparaissent. C'est là qu'il ne faut pas que je me plante. En gros soit on contourne la zone par une piste dérivant légèrement vers la droite de la ville, soit il faut contourner complètement par la gauche, mais là je ne sais pas exactement où s'arrête le zone de dunes.
Je prend donc l'option qui contourne sur la droite. C'est étrange car de nuit je ne reconnais absolument pas la zone où on a du passer lors du départ. Et puis ce n'est pas très grave après tout !
J'essaye de rester sur les traces de 4x4, contrôlant régulièrement avec la frontale. La piste fait des "S" mais là je ne joue pas au petit malin en coupant tout droit. Je contourne encore et encore. A un moment j'arrive dans une sorte de cuvette où les 4x4 on fait des tours sur eux même. Zut, un cul de sac. Il me faut revenir un peu en arrière pour trouver, presque par hasard, le contournement qu'ils ont pris. Un peu de chance ça ne fait pas de mal.
La suite de la progression ne change pas beaucoup. Dunes, contrôle à la frontale, identification des traces, et ainsi de suite.
Finalement je retrouve les premières zones rocailleuses qui annoncent le dernier tronçon sans m'être perdu dans le sable... Quel soulagement.
Je retrouve une large piste en dur qui m'amène pile sur le chemin emprunté à l'aller et me fait rejoindre le village. C'est étrange car la rue principale est très éclairée mais il n'y a pas grand monde dehors. Je profite des encouragements de quelques passants que je croise, mais je n'ai plus qu'une envie, c'est d'arriver à l'hôtel.
J'emprunte la rue centrale du village, arrive sur la grande place et prend la bifurcation qui va vers la zone où est notre hôtel. Je passe l'oued asséché, et me dirige pile sur l'hôtel qui est éclairé pour la nuit. Les derniers mètres sont faits en courant... juste pour le principe, et même si je suis tout seul à ce moment là.
Arrivée Jeudi à 22h45
2h15 de course sur la section
86h35 depuis le départ
5ème position.
YEEESSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSS ! ! !
J'y suis arrivé.
Je savoure ce moment que j'attendais tant.
La TRANS 333, je l'ai accrochée. Décidément, 2011 aura été la bonne année...
Une arrivée "à la Gestin"
Je me rend vers l'entrée de l'hôtel pour y retrouver les coureurs déjà présents, et là, grosse surprise, le portail extérieur est fermé !
Je le secoue un peu, mais il est réellement fermé à clé. Il y a un bouton d'appel sur le côté. j'appuie dessus une fois... Rien ne bouge, une seconde fois, toujours rien, trois quatre, cinq fois, sans effet.
Je commence à m'agacer un poil. Je fais toute la façade de l'hôtel, mais il n'y a aucune autre entrée, en tous cas celles que je trouve au niveau de la piscine sont toutes verrouillées également.
Comme il y a de la lumière dans les jardins , je monte sur un muret et j'appelle... Pas de mouvement, pas de bruit, rien ne bouge.
Ça commence à me gonfler grave ! Je prend une grosse pierre, retourne au portail et commence à tambouriner en tapant dessus. Ça fait un joli vacarme mais qui reste une fois de plus sans effet... J'appelle Alain mais son portable est sur messagerie. Quand ça veut pas y aller, ça veut pas !
Je fais le tour complet de l'enceinte de l’hôtel voir si il n'y a pas d'autre accès mais rien. J'envisage alors de faire le mur, à l'ancienne, mais j'ai juste oublié qu'après 330 km, on est un peu moins souple qu'en temps normal, surtout avec un sac sur le dos.
Je vais continuer à chercher un moyen de franchir la palissade (en constituant un tas de pierre) quand j'entends parler dans les jardins. Je me remet à appeler en criant, et j’obtiens enfin une réponse. je leur dit que je viens d'arriver et on me répond qu'ils vont ouvrir le portail... enfin !
Une des personne de l'hôtel m'ouvre et là, le pauvre s'en prend plein les dents... Ça fait bientôt 45mn que j'attends, et je suis un poil énervé. 2 autres personnes arrivent et me disent qu'ils ont eu comme message que le prochain coureur n'arriverait que vers 5 ou 6h du matin... Gaps ! et moi je suis arrivé à 22h45... Trop rapide Michel, trop rapide...
Ils me proposent de venir dans le restaurant pour me reposer un peu et manger. La tension retombe un peu et j'accepte avec plaisir, d'autant que du coup... j'ai faim.
Visiblement tout le monde dort dans l'hôtel. Pas grave, moi je vais manger. J'ai le droit d'abord à une grosse soupe que j'accompagne d'une première bière bien fraiche, puis une plâtrée de pâtes avec de la volaille grillée que je vais accompagner d'une seconde bière, et une vraie salade de fruits frais... quel plaisir...
Je profite de ce répit pour m'excuser auprès de la personne que j'ai un peu incendié tout à l'heure... la fatigue, l'énervement, l'absence d'accueil côté course... bref, une arrivée typique "à la Gestin" que j'avais déjà expérimenté en Guyane.
On me propose de venir m'installer dans une chambre dans laquelle il n'y a qu'un seul coureur pour le moment. Il est autour de minuit maintenant, et je vais un peu réveiller William. Bon OK il ne le prend pas trop mal (merci !).
La bière commence à me faire tourner légèrement la tête. Du coup je n'ai plus que deux envies... Prendre une douche, et me coucher. Et c'est exactement ce que je vais faire, même si la douche est pour le moins fraiche (après 4 jours, on s'en fout!).
Là dessus direction le dodo... des draps propres, et je m'écroule rapidement.
Vendredi 11 novembre
Le lendemain matin on est réveillé par l'arrivée d'un coureur qui pensait que la chambre était vide. Un peu rapide comme réveil mais bon, c'est fait ! Il s'agit de Thierry qui est reparti seul suite à l'abandon de Françoise à CP14 et qui a bien tourné pour rentrer. Ils nous apprend que Gérard et Juju sont à CP15 et qu'ils s'y sont arrêté pour dormir afin d'arriver dans la matinée. Pas bête comme idée comme ça ils sont sûrs d'avoir du monde pour leur arrivée.
Je me lève , m'habille et vais prendre le petit déjeuner. Je retrouve une partie des coureurs soit qui ont fini, soit qui ont arrêté.
Le petit déj est vraiment apprécié. je me baffre un peu quand même, puis la matinée se passe entre un peu de remise en état du bonhomme, un peu de rangement des affaires (enfin, de celles qui me restent) et les premiers soins des pieds post course. J'ai tout retiré pendant la douche et maintenant il n'y a plus qu'à désinfecter et protéger.
Ce qui est intéressant, c'est mon état de forme. On en reparlera plus tard mais il est globalement bon. Bien sur les courbatures vont commencer à apparaitre, mais en dehors des ampoules, je n'ai aucune blessure. Ni douleur, ni tendinite, ni rien de rien...
Dans la matinée, on accueille petit à petit les derniers coureurs qui en terminent. D'abord Gérard et Juju qui arrivent un peu avant 9h00, puis Franck que je rate car je devais être à nouveau sous la douche quand il est arrivé, puis Baudoin dont on attendait l'arrivée avant d'aller déjeuner dans Mhamid.
Il y a aussi le retour de Koko qui a du arrêter entre CP12 et CP13 après s'être perdue. Problème de GPS ou manque de lucidité du à la fatigue ? Impossible de savoir. Toujours est-il qu'elle sera récupérée à proximité du CP3 (!), ce que confirmera la trace de son GPS, alors qu'elle est passée juste à côté d'un des PI entre CP12 et 13. Grosse déception pour Koko, d'autant qu'elle était plutôt bien et qu'elle avait géré sa course comme il fallait.
Après l'arrivée de Baudoin, on part manger dans le restaurant de Mhamid. On débarque à 18 ce qui, en cette période où il y a peu de touriste fiche un peu la pagaille... La carte est en mode "hivers", comprenez qu'il ne font que des salades marocaines et des omelettes berbères... et même là, il faudra le renfort de nos PAM en cuisine pour aller aider à dresser les plats.
Après midi avec une petite sieste pour moi, puis un petit tour au bar histoire de commencer à refaire la course avec les autres, moment où on va en profiter pour remercier toute l'équipe locale qui nous a accompagné sur ce périple et aux CP.
Samedi 12 novembre
Samedi matin, on reprend les minibus pour aller à Ouarzazate.
Baudoin, Michel, Koko et Patrick
Installation au même hôtel qu'à l'aller puis à l'initiative de Dom', on va déjeuner tardivement dans un resto mi-grec, mi-français, mi-marocain du centre ville (oui je sais, ça fait 3 moitiés mais ce sont des moitiés marocaines) où on va tester quelques mets et vins forts agréables. Mustapha se renseigne pour qu'on aille à l'aéroport voir pour mes bagages. On prend un taxi, on rentre dans l'aéroport, et là on nous dit de revenir le soir quand il y aura quelqu'un car dans la journée, comme il n'y a pas d'avions, et bien en dehors du service de sécurité il n'y a aucun personnel commercial...
C'est pas gagné cette affaire, moi je vous le dit, c'est pas gagné !
Patrice et Dom (1er ex) Patrick et Thomas (3ème ex)
Remise des prix à l'hôtel, repas de fin de course, très courte nuit puis retour à l'aéroport. On perd une partie des concurrents lors du transfert à Casa... (mais rassurez vous, là c'était normal...) puis vol Casa Paris.
Alain, Claude, Alex, Isa et Isa
Ça y est, c'est fini.
Alors quel bilan tirer de tout ça.
La première chose, bien sur, c'est le terrible élan d'entraide dont j'ai pu bénéficier de la part de toute l'équipe, coureurs ou staff.
Grâce à vous toutes et tous j'ai pu quand même prendre part à ce grand défi, mais aussi probablement vivre l'aventure d'une façon complètement différente que ce que je m'étais imaginé. Du coup cette victoire (sur moi même) et ma 5ème place, sont également les vôtres... Encore un grand grand merci pour tout !
Ensuite, si je me positionne d'un point de vue strictement physique, j'en tire pratiquement de la frustration. Je termine frais, sans blessure, et pratiquement dans un état de forme qui m'aurait permis de continuer encore. Alors pourquoi de la frustration ? Simplement parce que je me dis que j'aurais peut être pu en faire un peu plus.
Ça rejoint d'ailleurs une remarque qui m'a été faite "qu'est ce que ça aurait donné si tu avais eu des affaires ?"
Excellente question que je me suis bien sur posé. Et je n'ai pas la réponse, en tous cas je n'ai pas de réponse fiable à y apporter. Si j'avais eu mes affaires, il est certain que je serais parti plus rapidement. J'avais prévu de courir du départ à CP3, de marcher CP3-CP4 (à cause du sable) de courir CP4-CP5 et aussi entre CP6 et CP7. Pour le reste j'aurais géré en fonction du terrain mais le départ de CP7 était aussi totalement courable. Par contre est-ce que le fait de gagner ces quelques heures sur la première moitié aurait eu des impacts sur ma seconde moitié de course ? Je rappelle que ma plus longue épreuve jusqu'ici en non stop était de 200km (en Mauritanie), et que là j'ai fait +60% !
Du coup, comme je n'en saurai jamais rien, j'ai décidé de me satisfaire pleinement de ma course et du résultat obtenu, bien meilleur que ce que j'avais envisagé à l'origine (entre 96 et 100 heures en objectif).
Par contre, ce que je savais c'est que le pic difficile était le second jour. J'avais expliqué à certain avant la course que c'était ce cap qu'il fallait gérer. En fait le premier jour tout va bien. On est tous assez entrainés pour gérer une course sur 24 heures. La seconde journée est le point dur. C'est là que l'organisme souffre ne serait-ce que parce que des épreuves entre 24 et 48h on en fait pas tous les jours et que c'est totalement hors norme même pour nos entrainements fonciers. D'ailleurs les 6 premiers abandons ont eu lieu le second jour...
Là ou ça devient surprenant c'est qu'une fois passé ce cap, l'organisme se met en mode endurance. il s'adapte (en tous cas je l'ai ressenti comme ça) et pour peu qu'on ne modifie pas trop ce qu'on lui demande, une fois lancé on a l'impression que rien ne peut nous arrêter. Et c'est bien ce que j'ai vécu, d'où cette impression de pouvoir continuer encore.
Alors, bien sûr, une remarque qui n'a pas manquée c'est "Bon alors la prochaine fois tu viens sur la 555 ?"
Aujourd'hui ma réponse est clairement "non". En fait physiquement, je pense que j'étais en situation de continuer 200km de plus. Enfin je dis ça vu de la 333 mais globalement je n'avais aucun signe physique qui m'aurai permis de dire Stop !
Par contre, mentalement, je ne suis pas prêt. Les dernières sections ont été éprouvantes et il faut avouer que les paysages n'ont rien fait pour aider... Du coup la fin a été longue, très longue, parfois limite ennuyeuse. Alors autant physiquement cela devrais passer, autant mentalement j'aurais été rapidement hors du coup, et sur ce type d'épreuve, si la tête ne suit pas, ce n'est même pas la peine d'insister. J'étais probablement conditionné 333, et peut être aussi que le fait d'arriver à CP13 (puis 14) font que je me suis relâcher pensant que c'était gagné, et que si j'étais parti sur une 555 j'aurais pu tenir plus longtemps, mais bon pour le moment, je préfère consolider cette 333. J'ai mis 2 ans à la cuisiner, 4 jour à la déguster, alors place maintenant à une période de digestion bien méritée.
L'équipement...
J'avais tout prévu, pesé, mesuré, calculé, sur de moi, et franchement, je reste persuadé que tout ce que j'avais prévu était parfaitement dimensionné pour cette épreuve... Sauf que je n'ai pas pu en profiter.
Cette remise en cause a été un grand moment pour moi, et pas mal d'ides pré conçues que j'avais ont volées en éclat. Attention, elles ont volé en éclat pour ce type d'épreuve, et pour des conditions de courses lentes et longues, mais quand même, cela ouvre de nouvelles portes.
Ça fait quelques temps que j'essaie de m'affranchir des produits dits "énergétiques" répondant d'avantage a des positionnements marketing qu'a de vrais besoins. Ça se voit très bien pour les courses sur route quand on me demande quel gel emporter pour un semi marathon ou un 10km... (oui, oui, il y en a qui se posent ce type de questions).
Je n'avais jamais franchi le pas de tout laisser de côté, conservant en général au minimum une boisson gout neutre car je ne mange pratiquement rien entre les CP ou les ravitos.
Là, j'ai fait toute la route à l'eau claire, intégrant un verre de coca à chaque ravito (toutes les 4-5 heures) et éventuellement un thé. Pour le reste (surtout le solide) ce fut un incroyable mélange de tout ce qu'on peut trouver sur le marché entre alimentation classique (thon à l'huile, viande séchée, chips, gâteaux apéro, nougat, compote), des lyo (vieux campeur, DK, produits à destination des hôpitaux...) et parfois des trucs bio ou énergétiques (mulebar, effinov,...).
Que des trucs que je n'avais jamais testé en course, et devant l'absence de choix possible, j'ai tout mangé (même du effinov... si, si Koko...) Et bien le résultat est terrible... Un peu faim au début (mais j'avais fait light sur mes CP heureusement complété par des "restes" de coureurs...) puis juste ce qu'il fallait... Et le tout sans le moindre problème de digestion ! Ok il est vrai que depuis pas mal de temps je m'habitue à manger de tout n'importe comment en course, mais au moins, pour cette fois, ça a eu un effet positif indiscutable.
Tiens un truc que je retiens, ce sont les pastilles vichy à la menthe... ou comment avoir une bouffée de fraicheur quand il fait 40° !
Donc forcément, tout ça fait que pour ma prochaine épreuve de ce genre (je n'ai pas encore dit qu'il y en aurait une !) je me poserai quelques questions...
Bon pour en finir, parce que j'ai été un peu long dans tout ça, j'en garde actuellement un souvenir très fort. Ces courses créent des liens entre les participants, liens qui généralement perdurent, mais là, la dette que j'ai vis à vis de toute l'équipe n'est pas prête de s'effacer...
Alors je termine par un grand grand merci à Franck, qui a été l'élément déclencheur de mon ré-équipement et à qui (je lui répète) je suis redevable d'une paire de chaussures...
Des Salomon XA Pro détruites après seulement 300km... Pas terrible Mr Salomon !
...à Koko pour sa présence, ses pastilles vichy et pour avoir réussi à me faire boire des soupes Effinov, à Jean-Claude, pour les 2 jambes supplémentaires, à Isa, Isa, Claude et Alex, non seulement pour m'avoir soigné, mais aussi pour tout le réconfort qui va avec, à Dom pour m'avoir habillé, à Patrice pour m'avoir éclairé (finalement j'ai regretté de ne pas avoir accepté la bière), à Patrick, pour le caleçon, à Gérard et Juju pour nos rencontres au CP, à Thierry et Françoise, pour m'avoir permis de rester à leur côtés, à Michel, celui qui parle aux scarabées pour son accueil avec JC à CP15, à Nanard pour m'avoir permis d'emmener Fanny dans cette aventure, et à Joël, Alain, William, Daniel, Baudoin, Thomas, Mustapha, à toute l'équipe locale sur les CP pour tout ce que vous m'avez, les uns et les autres apporté pour arriver au bout de cette épreuve. Bien sur un grand merci aussi à Alain pour être à l'initiative de tout ça... Sans lui et sans son "grain de folie" on ne serait pas là.
Voilà. maintenant place à 2 semaines de repos total, juste pour s'assurer que toute la mécanique se remet convenablement, et puis mon regard se portera vers mes premiers objectifs de 2012, année qui, je l'espère, sera aussi profitable qu'a pu l'être ma saison 2011.
Merci d'avoir tenu jusque là !
Michel
PS : Un grand merci également à Isa, Claude et Michel pour les photos intégrées à ce récit.
Accueil - Haut de page - Aide
- Contact
- Mentions légales
- Version mobile
- 0.09 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !
2 commentaires
Commentaire de Free Wheelin' Nat posté le 27-11-2011 à 12:39:08
Très chouette récit, Michel!
Badidon, tu as eu un mental de guerrier pour partir comme ça et ne pas t'épuiser avant même le départ!
Pour le reste , je n'ose même pas imaginer le truc... enorme...se balader tout seul comme ça dans le désert...RESPECT
Et tes affaires, elles sont arrivées quand?
Commentaire de leptitmichel posté le 28-11-2011 à 21:04:15
Toujours pas de news des affaires malgré les recommandés à Royal Air Maroc...
Sinon, pour la course, je pense qu'il est plus simple de repartir de 0 comme je l'ai fait que de perdre la moitié des choses et d'essayer de se rattraper aux branches... Mais bon, la décision de partir quand même a été largement poussée par la réaction des autres coureurs...
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.