Récit de la course : Grand Raid Dentelles du Ventoux - 100 km 2010, par didstzach83

L'auteur : didstzach83

La course : Grand Raid Dentelles du Ventoux - 100 km

Date : 15/5/2010

Lieu : Gigondas (Vaucluse)

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Distance : 100km

Objectif : Pas d'objectif

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Grand Raid des Dentelles Ventoux 2010

L’année 2009 finissant pat la StéLyon , me rassurant sur mon adaptation au long, à l’ultra-long, les projets de 2010 ont rempli ma table excel….La Galinette , le Trail de la Sainte Victoire, devraient me préparer pour le 1er objectif du Grand Raid des Dentelles du Ventoux, puis le second  la T.D.S.Les blessures à répétitions, depuis la Galinette, commencent sérieusement à me prendre la tête…Le Trail de la Ste Victoire juste en assistance à mon ami Jacky, me rassure sur mon état de santé. Sa blessure me laisse tout seul quant à la participation au Grand Raid 2010.Les évènements ne me rassurent pas.Cinq jours de repos, plus un enchaînement de plus de 90 kilomètres sur quatre jours, ne m’auront pas rassuré pas du tout.Puis l’ami Eric, inquiet, s’occupe de la logistique. Hébergement, assistance sur la fin de parcours, il a tout prévu.De mon côté, les kikourous solidaires sont là. Surtout riri51, dont son récit figure en raccourci sur mon portable, avec en fond d’écran le parcours des 100 kms.Je connais par cœur son récit, mais je me l’adapte à ma sauce, car à l’évidence son niveau et son bagage sont au-dessus des miens.Ce vendredi je prends la route vers les Dentelles. Un petit passage chez l’Auberge du Bon Cœur d’Annie et Michel, dit Treize Langues, qui parle même au mur !On se dirige vers Gigondas, où je récupère mon dossard non sans avoir vidé mon sac, euh mon sac à dos….Une petit pression, Michel qui connaît tout le monde est à sa place. Puis l’élocution  des responsables des Rotary Clubs locaux.Retour à l’Auberge, où salade, pâtes et poisson, fraises, me seront offerts.Puis on se fait un Koh-lanta, et l’apothéose « L’Amour est aveugle », pelotage dans le Noir. Le summum !!!J’ai pas envie de me coucher, je sais que la nuit sera très courte !Mais fô bien y aller.Je prépare tout, l’alarme du téléphone sur deux heures trente. Mais je fais du fractionné, toutes les demies heures, je regarde l’heure.Puis le trou. Oups c’est trois heures trente.Je saute du lit, je récupère en urgence mon carbo cake et ma banane dans la cuisine. Je me revêts directement de ma tenue de compétition. Je retourne à dix reprises ma pharmacie, me trouvant pas le tube de vaseline. Sûr, il est devant moi, le stress !!!New Balance aux pieds, boosters, cuissard, tee shirt Millet, manches courtes, manchons, gants de soie, Buff Kikourou.Et ce sac à dos qui pèse une tonne !!!C’est déjà moins dix, Michel réveillé, m’ouvre le portail.Pas le temps de prendre le rond-point. Le plus court chemin. Pas de GPS, l’aller et retour de la veille auront suffi.J’avale mes deux parts de carbo cake, ma banane, et ma bouteille d’eau.A Quatre heures cinq je me gare sur le parking de la poste de Gigondas. Ouf !!Le sac sur le dos, c’est parti direction la salle des Fêtes.Là, je retrouve l’ambiance feutrée des grands trails.Je vole un café, deux morceaux de camembert, et je finis de m’équiper. J’ajuste la frontale. Puis là tout d’un coup, j’ai l’impression de faire 100 kilos, j’ai un ventre énorme, le sac est trop lourd. Je vais où là ???L’appel au micro et direction la file de gauche pour le pointage.Le peloton se forme tout naturellement.Puis le 1er souci, la sangle ventrale qui lâche. Deux dames sur le côté. «  bonjour, vous avez des doigts de fées ?, vous pouvez m’arranger »  Dans l’urgence avec une épingle à nourrice, elles me réparent la sangle.C’est le départ !!Ma montre GPS est enclenchée….Direction le Lac du Pathy à la frontrale, dans le silence.Tout le monde est en retenue, aucun mot…Apparemment je vais courir avec ce coureur vêtu de bleu. On est parti pour un bout de brousse. Moi c’est Didier, hein, moi c’est Laurent. On fait dans le court pour du long.Le jour se lève, c’est beau, c’est magique !!! Le Barroux, silence cathédrale, les frissons !!! Je bute une fois, deux fois sur les racines. Je pars en déséquilibre, j’ai dû frôler les 20 kms heure en quelques secondes, je me suis fait une frayeur, la 1ere.Le Lac de Pathy est là, 2 heures 25.  Sur les temps de riri51, trop rapide à mon goût.Musique, encouragements, c’est du feu de dieu. Complément du camel bag, banane, coca et hop la passerelle. Laurent est là aussi.Un coup de téléphone à mon épouse et ça repart, prochaine étape PC3 Combe Curnier, au pied du géant. Un paquet se forme, on se suit, on se perd, demis tours, on s’appelle, oh, hé, revenez, par là, par ici….C’est bien un Raid pas un trail, chercher la rubalise !! Ils ont dit !!!C’est beau, ça passe tout seul, déjà le PC3, avant l’ascension.Complément d’eau, casse croute, coca, j’attaque le sporténine. Un nouvel appel à mon épouse. Jacky l’absent m’appelle. Un appel à Eric, le soutien.Et puis, barrièrage, contrôle technique, pas de souci.Et l’ascension débute, toujours dans les temps pour finir.Euh là, tout seul, drôle de sensation. Je coule l’eau, j’enlève les gants, et rabats mes manchons. Ça cogne, tout cogne…J’ai loupé quelque chose, bizarre, je me fais dépasser par deux avions, je dépasse deux concurrents. Ça me rassure.Et puis ils ont inventé quelque chose. Un mur, un cap, que sais-je ??? L’enfer, ça promet pour la suite, je ne comprends pas. Alors je marche, je m’arrête et regarde le haut de la pente, lui devant moi il est pareil.Puis la pause, un ravito dans le vent. Une radio qui crépide, deux abandons, la voiture qui s’en va. Tout le de s’équiper le coupe vent, bonnet et gants. De l’eau glacée avalée sans précautions. Puis j’entends : à cette allure-là dans une heure au  sommet. Je dois garder ce groupe à vue, pas rester seul. La végétation change, les pierrés, les éboulis se succèdent. Puis ce coureur en kway jaune, assis par terre qui mange. On est tous dans le dur.Il neige !! Juste la neige des arbres qui par la force du vent me fouette le visage. Les congères sont bien là. Le décor change, lunaire.Puis ce coureur qui s’arrête et retourne son sac pour le vider ????Je le dépasse, c’est le silence, la colonne suit la piste. Le vent se fait de plus en plus fort. Il me re-dépasse, je suis obligé de m’éclater de rire. Bien tes chaussettes en lieu et place des gants. «  j’ai pas le choix ! »La chapelle dans le froid, le vent, la glace. Puis le bruit au loin des voitures, de la route. Un dernier coup de cul, et on sort sur la route, dans les nuages. Le col est là, bien là.Il y a bien du monde. Pourtant c’est l’hiver au sommet. Toutes ces voitures, ces motos, ces cyclistes, dans le froid, dans le mistral.Puis le ravito. Du bonheur.C’est pas midi, objectif Lune atteint !!Tout de suite un verre, puis deux de soupe chaude. Je mange fromage, banane, je remplis ma poche à eau. Je me débarrasse des gels usagés. Puis il faut que je trouve une solution pour ce dossard qui m’a pris la tête depuis cette nuit. Il est trempé, déchiré et tient par miracle sur l’élastique à la taille. Alors tant pis je l’épingle au sac à dos. Il faut que je le ramène en entier !!Je regarde machinalement ma montre, le chrono s’est arrêté en posant le sac au sol. Ça commence à me prendre la tête. Start et je repars, par où ??? Vous suivez la route puis dans le virage vous prenez le chemin !!Je descends sur le bitume, glacial, glacé. Drôle de sensation, des voitures, des motos, des cyclistes mais des raideurs point !!! Alors je fais demi-tour sur plus de trois cents mètres pour enfin croiser deux compatriotes, et demi-tour à nouveau. On suit la route jusqu’où. Un premier demi-tour, puis on descend toujours puis la piste à droite. La neige tout en dévers.Là, je ne comprends plus. Le froid m’a paralysé le cerveau. Je ne pas à l’aise du tout. Je n’arrête pas de glisser, de me vautrer dans la neige. Mes gants sont trempés.Je ne m’amuse pas, je ne m’amuse plus. Jamais, on descend retrouver le soleil, la chaleur. Puis le sous bois et je repars à courir enfin.Ça devait arriver, mon pied droit part dans le précipice, ma jambe gauche se bloque. Une douleur au genou avec les étoiles !!! Là il y a un blanc. Je me relève. Je marche presque inconsciemment. Le genou n’a pas tourné, tant mieux !Je cours à nouveau et ça loupe pas, mon montre GPS qui tombe dans le ravin dix mètres plus bas. Elle s’est défaite e ma ceinture. Il faut y aller. Je remonte et je repars jusqu’à quand…Puis c’est la grande descente vers Brantes. La piste une autoroute. Je me retrouve avec deux jeunes. A eux deux ils ont un vécu de folies, la diagonales fous, l’UTMB. Alors prudence pour finir je reste avec eux. On finira toujours.Mais ça me démange, je cours, eux alternent marche et course. On s’attend.Puis la brusque montée sur Brantes. Dure mais magnifique, deux photographes nous surprennent. On en est ri.Là, c’est la pause. Je m’alimente, j’appelle tout le monde. Tout le monde appelle, c’est le pied. Tout va bien. Je refais le plein. Laurent arrive et prend son temps. Les deux jeunes se changent. Moi je m’impatiente. Je repars seul. Le bitume pendant quelques centaines de mètres, puis au loin je vois la piste avec des taches fluo qui avancent.Je suis heureux, dans peu de temps Eric et Michel vont être là, pour m’accompagner, juste m’accompagner jusqu’au terme. Le chemin emprunté est trop beau. Alors photo sur photo j’enregistre ma progression, ma vision. Du bonheur à l’état pur.« T’es où ??», je sais pas mais j’avance. Puis ce long faux plat sur le bitume, où je mets le frein à main. Je marche sur la légère montée, je me refais la santé.Puis une montée, cette rivière, puis en haut Eric et Michel. Drôle de sensations !!Tape dans la main. Laissez-moi reprendre mon souffle, j’ai doublé plusieurs coureurs. Puis je commence à envoyer, ils sont avec moi juste derrière. J’ai l’impression de faire une séance, d’enfin courir. Veaux et son ravito, sa course de motos. Là on reste un moment. Je mange, je mange trop. J’en ai besoin pour me rassurer. Les deux dames sont super sympa, elles répètent les numéros des coureurs. La concurrente belge est là, pressée.Il faut repartir. Puis tout à coup, je ne transpire plus. J’ai pas de jambe, je souffle plus. Alors Eric devant m’attend, Michel reste derrière. Je suis bien entouré. Désolé, il faut que ça revienne. Et ce sera long, interminable. Mais ils sont patients, disponibles. Miracle, ça revient et c’est reparti, ouf !! PC6 Les Rissas.A ce ravito, nous apprécions. L’accueil, les drapeaux qui flottent, la soupe chaude, la musique, le salé. On prend des photos, on se fait photographier. Et direction Malaucène, on doit laisser cette équipe de bénévoles. Trop l’accueil dans le froid.Ça va descendre puis c’est Malaucène. Mais un raid, un trail, c’est aléatoire, élastique. Donc descentes, montées, plats, plus rien ne veut dire grand-chose. L’étape suivante, c’est Malaucène et  après plus que vingt bornes.Puis ce chemin, plein de boues !!!Pour lever le pied, il faut forcer un max. ça reste coller, de la glu !!!Puis cette descente hyper technique, mais c’est juste la fatigue qui change les sensations.Malaucène. Alors pourquoi pas un massage. Je finirais, je le sais maintenant. Soupe chaude, puis massage, pour la 1ere fois en compétition. Il fallait bien commencer un jour. Eric me remplit la poche d’eau. Il néglige de refaire le plein pour lui. On s’habille, coupe vent, gants, buff, et bonnet. C’est dix neuf heures passé.Puis contrôle du sac, faut tout sortir…Il commence sérieusement à faire froid. Fô repartir, fô avancer…Toujours ces montées après les ravitos. Fô que ça revienne….On traverse la route, et tout doucement je me retrouve devant à mener l’allure, la lampe frontale à la main, juste comme ça.La nuit se fait présente, on continue à monter, le col de la chaîne. Je suis bien. Mais je me suis détaché de mes deux potes. Michel arrive, Eric n’est pas bien, plus d’eau, il coince. Alors logique, on s’attend, on reste ensemble. On traverse la route puis à nouveau un chemin qui monte, qui monte. Michel se place devant, il ouvre la trace. Eric est là, juste derrière. Puis ce groupe de trois avec la Belge, on les dépose sans forcer. Puis ce zombie sans lumière, seul dans le noir. A le regarder ainsi, je sais que c’est pas un concurrent du grand Raid. Je vaux mieux que ça. Je le dis à Michel qui pose : tu fais le court ou le long ? Je connais déjà la réponse ; Tant pis pour lui ! Viens avec nous pour finir, je ne peux m’empêcher ! Non vous allez trop vite. Alors on continue cette interminable montée. Les gros mots n’empêcheront rien, il faut se la faire ! La crête et ce Mistral qui a failli faire envoler Michel, surprise totale.C’est l’enfer. Je sais que le dernier ravito est à moins de 9 kms, ça me rassure. Ça nous rassure. Je n’en suis plus sûr maintenant. On se repasse l’embout du camel bag, on partage l’eau dans la nuit et le vent. Puis des lumières arrivent sur nous, un, deux, un autre concurrent  nous passent. Ça ne me fait ni chaud ni froid, malgré la température. Le chrono, je pouvais le tomber depuis un moment mais l’important cette nuit, c’est pas ça. C’est Nous Trois.On dépose les antennes, ouf et ce ravito qui n’arrive pas, le GPS tourne toujours avec sa batterie de recharge, 94 kms déjà. La descente large, les lumières, la musique, ça y est, Saint Amand. Photos obligatoires. Je me prends deux bouteilles d’eau à la main. Je bois un verre de coca, mais je refuse toute alimentation, de peur du mal au ventre.Eric refait le plein, Michel retrouve à qui parler.Fô y aller, fô avancer. Alors j’y vais. Ça descend, on cherche la rubalise. « Eric a un souci, il est trempé !! ». « Je continue à avancer ! ».J’ai froid, je suis glacé. Le coca bu trop vite fait effet inverse, hypo glycémie, hypo thermie. Je claque des dents, je ne peux plus parler. Je grelotte.Cette descente brutale et ce genou gauche qui se rappelle à moi, cette chute dans la descente du Ventoux. J’ai mal, je suis sur une jambe, je le dis à Michel. Je regarde ma montre, elle s’est encore arrêtée au ravito. Fôdra trouver une solution pour la ceinture.Puis le chemin se fait moins pentu, plus agréable. On essaie de repartir mais Eric est décroché dans cette forêt de Gigondas, parcours des Dentelles. On repart à droite dans cette descente pour plonger sur les lumières, dans les maisons, la civilisation.Y a rien à dire, je lève les bras, tout au frein à main, même l’émotion. Je sers la main à Michel, une accolade à Eric. Ce qu’il a fait pour moi, ça n’a pas de nom, de mot. Si AMITIE.Alors la traversée de la place, par là, puis la légère montée. Eric marche, on s’arrête, on l’attend, on repart en courant dès la bascule, restent deux cents mètres.Virage à gauche, les barrières puis l’entrée dans la salle des Fêtes sous les  applaudissements.Rescapé, je suis un Rescapé du Grand Raid des Dentelles Ventoux 2010, en 19 heures 43 et à la 62eme place….Fatigué, mais pas épuisé, jamais dans le Rouge et le Noir. Pas de coup de déprime, de pleurs, de gamberges comme d’habitude.  Va falloir changer la philosophie des grands Trails, des Raids. On part ensemble, on rentre ensemble, ça n’a pas de Prix !!!!

2 commentaires

Commentaire de Fat Burner posté le 19-05-2010 à 19:58:00

Bravo pour ta course que j'ai pu partager par moments, sur les sentiers ou aux ravitos. Toute ma vie je me rappellerai de ce "zombie", croisé au sommet du St Amand, sans aucune lumière, au milieu des rafales à 100 km/h, qui me dit "c'est par où maintenant ?" J'ai du l'accompagner toute la descente jusqu'au dernier ravito en me retournant tous les 2 mètres pour l'éclairer !!!

Commentaire de Françoise 84 posté le 20-05-2010 à 15:22:00

Bravo à toi pour cette course et merci pour ton récit! A bientôt, champion!!

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