Récit de la course : Le Grand Raid de la Réunion : La Diagonale des Fous 2009, par Danielbouvier

L'auteur : Danielbouvier

La course : Le Grand Raid de la Réunion : La Diagonale des Fous

Date : 23/10/2009

Lieu : ST PHILIPPE (Réunion)

Affichage : 1459 vues

Distance : 150.1km

Matos : Sac et bonne humeur, sans rhum

Objectif : Terminer

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Cette diagonale m'a rendu fou

Au  moment où les heureux trailers vont s'élancer pour l'édition 2014, je vous propose mon récit 2009 sur un parcours historique à partir du Cap Méchant et la galerie photos qui va bien...

https://picasaweb.google.com/111607190965103793508/DiagonaleDesFousReunion2009

La diagonale des fous 2009 a débuté pour Lolo, Mimi, Dgéwhy, Gilou et moi au réveillon de la même année. C’est à ce moment, que l’on se fixe le ou les courses pour l’année. Après deux reports successifs la diagonale s’imposait en 2009. Charlie rejoint l’équipe des pas pressés au mois de février. Il ne restait plus qu’à s’entrainer en participant aux courses locales et plus lointaines dans les Alpes (Neandertrail et trail de l’Ubaye).
David Alexandre Winter (que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre) chantait « c’est à Orly que finissent les vacances à Paris », pour nous c’est là qu’elles ont débuté. A peine le temps de débuter un petit tarot (dans lequel nous ne devinerons pas ce qui va nous arriver !), qu’une alerte à la bombe nous oblige à déménager. L’explosion du colis piégé n’a pas, espérons-le, détruit une récolte de grenades réunionnaises.
Nous finirons ce tarot plus loin où Charlie nous a mis sur la paille.
Un vol de nuit plus loin, nous atterrissons à Roland Garros aussi délicatement que la petite balle sur les cours du même nom lors d’un smash. Après être tombé du ciel, ce dernier nous tombe sur les épaules (30° centigrades heureusement allégés par une brise marine). Les organisateurs choient leurs participants et nous reçoivent dans une annexe avec le comité régional du tourisme. Ils nous offrent des mets locaux et des rafraichissements où nous aperçûmes des boissons avec du rhum (lyophilisé sans doute).

Sans perdre un instant, nous sautons dans le break station wagon dont le coffre est encombré de deux sièges (dont nous ne pourrons pas nous débarrasser!) et filons vers le piton Maïdo. Il nous offre une vue époustouflante sur le cirque de Mafate. Heureuse initiative de Mimi que nous faire voir là où nous allons passer car nous traverserons ce cirque majoritairement de nuit.
    
Nous nous rendons ensuite au stade pour retirer les dossards. Par précaution, je photographie l’arrivée, pas très sur de la voir :+))
 
Le dossard s’obtient rapidement et de manière très souriante. Par contre nous renoncerons à rencontrer l’ensemble des partenaires devant la très longue file d’attente du stade de la Redoute.    Nous filons ensuite vers Saint Pierre notre premier lieu de villégiature. L’hôtel avec une piscine face à la mer sera le lieu idéal pour travailler notre somatisation (Quadri, ischio, pieds , dos, genoux, hanches (je suis pas sûr pour la hanche !)
     
Le jeudi précédant la course nous offre une journée très ensoleillée à Saint Pierre, mais nous voyons bien qu’à l’est le ciel est très noir et que les sommets sont encombrés de nuages. Cela va renforcer le travail somatique évoqué plus haut. (Les pieds mouillés ont tendance à former des ampoules beaucoup plus rapidement que des pieds secs).
Nous passons ensuite l’habit de lumière. A peine enfilées nos tenues, les premières gouttes gouttent. Nous prenons la direction de Cap Méchant, très tôt, de manière à éviter le stress de l’affluence et nous avons le droit à un déluge à l’abri dans l’arche break. Nous attendons sur le parking sous ce déluge.
A 22h, nous profitons d’une accalmie pour aller faire contrôler nos sacs et nous ravitailler. Nous retrouvons Gilou (avec l’objectif d’attraper l’avion le lundi pour Maurice) et quelques autres connaissances rennaises. Nous allons nous mettre à l’abri sous la halle providentielle du stade de Cap Méchant. A 23h, les coureurs avec des fourmis dans les jambes iront se plaquer sur la grille de départ (genre F1) et se feront saucer pendant une heure avec des intensités variables. Nous choisirons de rester au sec jusqu’au moment du départ.
A 0h vendredi, le départ est donné dans l’allégresse mais sous des trombes d’eau. Ce qui tombe (eau) du haut mouille un peu, mais le problème vient du bas. La pluie et le relief forment des ruisseaux dans lesquels nous pataugerons pendant une bonne heure mais de bonne humeur. Nous allons courir sur la route forestière pendant les 16 premiers kilomètres à un bon rythme.

Nous retrouvons Gilou à ce premier ravitaillement et attaquons la piste qui monte au volcan. La sente est étroite et glissante, j’en profite pour me ramasser 4 ou 5 fois sous l’œil bienveillant de Mimi qui m’invite à rester parmi nous. Nous finissons par être patients et arrivons à Foc-Foc (2350 m de dénivelé depuis le départ). Nous en profitons pour nous sécher les pieds et nous remettre de la crème nok.
    
Le sentier relativement plat de 7 km. qui longe le volcan est un bonheur pour les yeux (et pour le physique après les 2400m de montée) entre les fleurs jaunes qui émergent de la lave et la végétation éclairée par le soleil levant. Nous en profitons pour prendre quelques photos et être filmés par l’équipe de tournage (que nous rencontrerons dans l’avion de retour) envoyée par la mondiale. Nous arrivons au ravitaillement du volcan (31ème) au bout de 6h tranquilles et 570ème.
    
La traversée de la plaine des sables est superbe et la montée vers l’oratoire sainte Thérèse dans un terrain extrêmement minéral et aérien. Nous apprécions son gravissement et sommes heureux de l’heure matinale car il fait déjà très bon. La descente vers la plaine des Cafres (réunionnais noirs) est appréciée et nous permet de récupérer sans nous fusiller les quadri. Le paysage nous semble droit sortir de l’Auvergne !
 
Nous apprécierons nettement moins les 3 kilomètres de route de ciment avant d’arriver à Mare à bout (50ème.). Nous avons gagné 90 places (474ème) sans nous en rendre compte ! Le temps de se restaurer copieusement bien que nous n’ayons pas très faim et nous voilà à l’assaut du coteau Kerveguen (600 m à gravir). Les marches sont hautes et le revêtement accidenté. Nous commençons à doubler des concurrents partis peut être un peu vite dans la première montée.
Je serai très prudent dans la descente qui suit (1000m d’un seul coup) parce que :
•    c’était mentionné dans le carnet des routes,
•    Mimi me l’avait dit,
•    un copain nous avait signalé sa descente fantastique en 2008 et sa douleur ensuite,
•    j’avais le souvenir de l’ultra trail du Verdon.
Sur la route qui rejoint Cilaos, je dépasse sans le reconnaitre Thierry qui m’en fera le reproche gentiment au ravitaillement à Cilaos (Il s’est blessé dans la première partie et abandonnera à deux Bras).
J’arrive à Cilaos à 13h45 pile poil dans le temps que je m’étais fixé en ayant gagné encore une cinquantaine de places (409ème). J’en profite pour me faire rechaper les pieds étonnamment en bon état mais avec la volonté de prévenir grâce aux bons soins des podologues du site. Mimi arrive ¼ d’heure plus tard et passe aussi au rechapage (ce qui ne lui était jamais arrivé, les ruisseaux du départ envoient leur sanction 14h plus tard).
Je repars seul et en pleine forme pour attaquer le sentier du Taïbit (1200m de dénivelé positif mais en réalité beaucoup plus car avant d’attaquer la réelle montée nous ferons plusieurs montées et descentes à iso niveau).
J’échange avec d’autres concurrents et nous tombons d’accord sur cet aphorisme : « le sentier du Taïbit est vraiment casse-couilles ». Mais, il nous permet de pénétrer (décidément) dans le cirque de Mafate uniquement accessible à pied (pas de route dans ce cirque où les premiers habitants furent des délinquants de Madagascar).
Une bruine bretonne (nous ne sommes pas dépaysés) nous accompagne depuis le début de l’après-midi et là en arrivant à Marla vers 18h (309ème) en 5 minutes le ciel se dégage totalement et me permettra de profiter du panorama du cirque de Mafate.
Après ce ravitaillement, nous passons sur un pont suspendu (la passerelle Etheve Joset) qui domine deux magnifiques piscines d’eau vive alimentées par une cascade haute et à fort débit.
Ce passage est le dernier moment agréable de cette journée. La nuit va être une galère où la force qu’il faudra mettre sur les rames sera uniformément croissante.
Je suis heureux de trouver des concurrents qui dévalent vers Trois Roches car j’ai trouvé le balisage insuffisant.
Le tronçon Trois roches – Roche Plate est peu agréable. Le revêtement du chemin est difficilement praticable et la descente est peu « courable ». Le temps réalisé est convenable.
Le tronçon Roche Plate- Grand Place (8 km.) nous est ensuite annoncé pour 3h. Cette annonce me met en colère car j’ai vraiment la sensation que les organisateurs ajoutent du dénivelé pour du dénivelé et je me dis à ce moment que les 35 heures que je me suis fixé comme objectif sont inaccessibles. Je vais mettre 3h15 pour ces 8 kilomètres !
C’est le début de ma paranoïa qui va me conduire pendant tout le reste de la nuit à croire que je suis dans un jeu. Allez savoir pourquoi, au début du tronçon Grand Place – Aurère (9,5 Km.), je comprends que je dois me rendre à un endroit où je disposerai du plan de poursuite du raid et que je dois revenir à Grand place pour pouvoir continuer. Je fais donc demi-tour (pendant combien de temps ?) mais sans le plan !!! Des concurrents, surpris de me voir faire demi-tour, m’enjoignent de les suivre, ce que je fais. Pendant que je les suis, je suis toujours convaincu qu’il me manque quelque chose et qu’à Aurère, je serai sorti de la course. Je suis très surpris de l’accueil très chaleureux qui m’est réservé et me fais tout petit dans mon coin en attendant la sanction !
Le responsable du site d’Aurère à qui j’indique que j’arrêterai bien me conseille d’aller jusqu’à Deux Bras. Toujours assez peu frais dans ma tête, je suis ses conseils mais au bout d’un kilomètre, je fais de nouveau demi-tour avec l’intention d’abandonner. Qu’est-ce qui fait que je poursuis dans le bon sens ensuite ? Je ne saurai le dire mais je suis toujours dans le même trip de jeu.
Je vais mettre 2h30 (entre demi-tour et hésitation sur le bon parcours) pour parcourir les 9 kilomètres de descente jusqu’à deux bras.
J’arrive à deux bras encore zombie et dans un autre monde (je me crois en France). Je suis surpris de voir que l’on me prend mon temps. Les bénévoles me demandent si j’ai un sac, je leur réponds : « non ». Je croyais à ce moment que j’assistais à une autre course. Je me dirige vers les tentes, les infirmières me trouvent une sale tête et m’encouragent à aller me coucher. Je leur dit « «non » car je suis convaincu que deux concurrents que j’ai suivis vont pouvoir me ramener à Aurère pour abandonner tranquillement.
Je m’assois sur une chaise et je m’endors pour une durée inconnue et je suis réveillé par une infirmière pour une raison aussi inconnue et là j’atterris.
Je sais où je suis. Je sais que je dispose de mon sac de rechange que je vais chercher. Je sais ce qu’il reste à faire et je prends la décision de repartir. C’est à ce moment que j’aperçois Mimi qui arrive à Deux Bras. Nous convenons que nous repartons dans ½ heure le temps qu’il passe à un second rechapage. Mimi laisse des piles de rechange à Lolo qui va se farcir une troisième nuit. Nous repartons à 8h du matin et Mimi a dans l’idée de mettre moins de 40h. (Je suis plutôt dans l’optique 6h pour faire les 27 kilo. restants ce qui ferai 38h mais je ne dis rien pour l’instant).
Et à ce moment, c’est de nouveau le bonheur de retrouver le jour, la compagnie de Mimi et la pleine possession de ma tête (les moyens physiques n’ont jamais fait défaut).
Nous montons tranquillement vers Dos d’âne (+800m) avec les encouragements des spectateurs qui ne faillira à aucun moment sur le parcours. Nous poursuivons vers le piton bâtard. Mimi commence à me stimuler pendant toute la montée en m’indiquant qu’arrivés en haut de piton Bâtard, nous descendrons ensuite pendant 20 kilomètres et qu’il faudra courir !
Cette montée est superbe et la luxuriance de la végétation nous accompagne sur la crête. Nous mettons le turbo dans la descente et nous allons profiter pleinement de cette dernière. Ce sera un jeu pour nous de doubler un maximum de concurrents et d’arriver en moins de 38 heures.
Nous maudirons le dernier chemin qui nous conduit au stade de La Redoute depuis Colorado. Un chemin horizontal qui n’en finit pas de monter et descendre. Un chemin malaisé pas du tout roulant plein de blocs de pierre.
C’est avec un plaisir certain que nous atteignons le pont sous lequel nous passons pour rejoindre la dernière ligne droite avant le stade.
Mimi et moi courrons encore à bonne allure et tendons les bras vers le ciel en signe de victoire (sur nous-mêmes) lorsque nous passons la ligne d’arrivée en 38h à la 279ème place.
Charlie, dont vous lirez le récit sur son blog http://coach-charlie.blogspot.com/, a la bonne idée de nous offrir une mousse (une Dodo) pour fêter notre arrivée.

C’est une superbe épreuve. J’en retiens énormément de points positifs :
•    les retrouvailles avec les amis,
•    la très bonne préparation en montagne sans bâtons avec Lolo,
•    le plaisir de courir avec Mimi,
•    la bonne préparation des pieds,
•    le travail spécifique des quadri pendant les 2 mois précédents la course,
•    le départ juste dans le bon timing,
•    la très bonne gestion des descentes,
•    l’alimentation et l’hydratation idoines.
Comme point d’amélioration, il conviendra d’apprendre à gérer la seconde nuit blanche avec des pauses adaptées, ce qui devrait éviter les divagations émanant de la fatigue.
Globalement donc, j’ai eu beaucoup de plaisir à aller à la Réunion, de rencontrer des personnes très accueillantes et très souriantes. Je suis revenu physiquement en pleine forme avec des quadri nickels et des pieds en bon état. J’en ai oublié la légère déception d’avoir raté les 35 heures et d’avoir déçu Martine.

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