L'auteur : cyrilloof
La course : Madeira Island Ultra Trail - 115 km
Date : 10/4/2015
Lieu : Funchal (Portugal)
Affichage : 2031 vues
Distance : 115km
Objectif : Terminer
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Madeira Island Ultra Trail 115km
Le départ se fait de porto moniz, nous sommes environ 300, il est minuit. La route s élève très rapidement à travers les petites routes du village de pêcheur , le fracas des vagues sur les falaises volcaniques en fond sonore. Les pentes sont déjà très violentes , le ton est donné . Nous redescendons rapidement à travers les potagers du village dont les odeurs se mêlent à celles de l océan .
Après cette première et courte ascension , une seconde nous dirige vers des forêts tropicales humides. Manu me fait remarquer qu' il y a peu de frontales derrière nous , nous sommes dans les derniers...le choc!
Nous suivons pendant plusieurs kilomètres un(e) levada, c est un réseau d irrigation qui parcourt l île , fait de canaux réalisés avec de petites pierres méticuleusement ordonnées , il nous dirige à travers une végétation très dense.
La brume vient parfois brouiller le faisceau de la frontale et des cascades murmurent le long du chemin.
Je suis toujours avec Manu , on trottine à travers ce parfait jardin botanique , les barrières horaires sont serrées mais vu notre rythme on devrait être à l abri d une élimination.
Après environ 1000d+ la première vraie descente s amorce. Le chemin descend très rapidement , ce ne sont que des pierres humides , ça glisse énormément , les nombreuses chutes devant moi m'obligent à rester très attentif et me permettent d arriver en bas tranquillement .
J attend Manu quelques minutes au ravito , cette première partie très technique à déjà fait quelques blessés.
On repart ensemble vers une seconde ascension qui s annonce difficile , je prend mon rythme la première barrière horaire est au sommet , 1200m plus haut. Je remonte pas mal de coureurs , mais plus de traces de Manu . La végétation disparaît petit à petit , le ciel est rempli d étoiles , j éteins ma frontale pour marcher un peu au clair de lune , elle est à moitié pleine mais ça suffit . J arrive au ravito , 1h15 avant la barrière horaire , ça ne devrait plus être un souci dorénavant .
Ces 30km et 3000d+ m ont un peu assommé , je repars, sonné . Le ciel change de teinte , je déroule sur une piste 4•4 , entre dans une forêt de petits arbustes et poursuit par un petit sentier ludique, le cadre est superbe.
Le jour s est levé , la descente m'entraîne dans une forêt d eucalyptus au parfum puissant , le sentier en terre est moelleux , et dégage des arômes de café, c est un délice .
On arrive dans un village au cœur d une petite vallée verdoyante, ses jardins en terrasse et ses maisons toutes propres me donnent l impression d être dans un paysage idyllique de manga japonais.
Des marches puis du bitume me mènent jusqu au ravito km 47 . J'essai de me préserver car les prochains 30 km s annoncent rudes.
Le paysage change , plus abrupt, plus sec .
Mon genou droit commence à me faire mal , je crains cette douleur car je sais qu'elle peut s amplifier jusqu à devenir ingérable. Pas de panique , on verra. Après une courte montée brutale faite de marches gigantesques, un long sentier s élève progressivement et découvre une superbe vallée , il commence à faire chaud . Je devine enfin le col, derrière je serai à mi parcours .
Mon genou me fait soudainement très mal, plus moyen de courir. J essaie de descendre , c est la catastrophe , j ai vraiment mal. Je me pose sur un rocher et pense peut être devoir abandonner , avec cette douleur et tout ce qu il reste à parcourir, ça ne serait pas raisonnable . Je regarde dépité passer des coureurs , ils ont de la chance de pouvoir gambader ainsi.
Je repars, me force à plier le genou petit à petit en trottinant , ça a l air de passer, ça va de mieux en mieux , je reprends du monde dans cette descente sinueuse , on approche un village , plus question d abandon pour le moment!
Ravitaillement au 60ème kilomètre il est environ midi . Il fait chaud , les sommets environnant sont tous vertigineux , je vais en gravir un , mais lequel? 1200d+ m attendent.
Je fini mon riz bolognaise , change de chaussettes et c est reparti. Ça va être dur mais je suis tellement heureux de ne pas devoir abandonner pour le moment que j ai le moral .
Ça grimpe fort, patience , je discute un peu avec quelques personnes en allant , la vue commence à être très impressionnante. Le sentier longe une crête , les parois sont vertigineuses, la végétation aride, la roche rouge , c est très volcanique.
J arrive au pico ruivo.
Le chemin bascule entre différentes crêtes , la brume apparaît par intermittence , on emprunte des petits tunnels , des escaliers énormes , ça monte ça descend, cette partie est extrêmement aérienne mais toujours sécurisée par une main courante, heureusement , une chute serait fatale.
Comment les habitants ont ils fait pour réaliser ce sentier improbable. Surréaliste et superbe , je crois ne jamais avoir parcouru de tels chemins , c est époustouflant .
J arrive au pico de ariero . Il est environ 16h30.
Encore 40km avec beaucoup de descentes. Ça va être dur , mais si mon genou me fiche la paix , ça va le faire. La douleur est revenue mais reste supportable. J appelle Charlotte , elle me raconte sa journée , ça me fait du bien.
J entame la longue descente dans la brume, mes jambes se dérouillent mais la fatigue est bien là. Je suis un petit sentier le long d un levada bordé de fleurs jaunes , arrivé à une intersection , pas de signalisation. Merde! Je me suis planté ..
Demi tour , heureusement ici c est plat. Ça me donne un coup de fouet, je trottine et retrouve mon chemin . J ai du perdre 20 minutes, c est pas si grave.Je retrouve des coureurs que j avais déjà doublés. Je reste dans un groupe qui descend bien , je m accroche . Je me fixe comme objectif d'arriver avant minuit, c est jouable , ça me motive. Je repars rapidement du ravito du km 88 pour la dernière ascension.
une nouvelle longue descente se présente , la nuit tombe , miracle, plus rien au genou , j en profite pour accélérer , un dernier sentier technique et vallonné finira de m épuiser .
Encore 10km.
J ai bien ralenti, mais j avance. A quelques kilomètres de l arrivée mon genou m envoie une douleur foudroyante dans une descente très abrupte. Je suis stoppé net. La claque !
Je continue en boitant , avec une branche comme béquille . Des oiseaux marins aux cris abominables se manifestent, la situation me semble ridicule.
J entend la mer , c est bon signe , je me réjouis que cet ultime avertissement de mon genou arrive si prêt du but. Hors de question d abandonner , il doit rester 4 ou 5 km.
J arrive à marcher sans me faire trop mal ,je me débarrasse de ce gros baton encombrant.
Une ville apparaît petit à petit, mais je ne reconnais pas Mâchico, j essai de trottiner un peu , on longe un levada entre les maisons, la pente est très faible mais je dois gravir la colline devant moi. Machico doit être derrière et il faudra tout redescendre de l autre côté .Un panneau m indique une autre direction , bizarre..
Je regarde mieux cette ville , je vois mon hôtel !! L arrivée est toute proche! Je m accroche dans les dernières pentes herbeuses , j arrive sur le front de mer, il ne peut plus rien m arriver, c est gagné!
Une longue haie d honneur attend les coureurs , je passe la ligne d arrivé anonyme mais très ému , 24h07, nquel bonheur. Manu termine également la course , quelques heures plus tard.
A l arrivée un bon buffet m attend , steak , frite , bière , miam miam ..
Mon hôtel et mon lit à 200m , le pied .
Ce trail est d'une rare beauté, les paysages variés, et l'organisation exemplaire permet de profiter sereinement de ce cadre taillé pour le trail
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