Récit de la course : Ecotrail de Sommand - 50 km 2013, par ThomasL

L'auteur : ThomasL

La course : Ecotrail de Sommand - 50 km

Date : 15/9/2013

Lieu : Sommand (Haute-Savoie)

Affichage : 2225 vues

Distance : 50km

Objectif : Terminer

Partager :

15 autres récits :

Revanche sur l'Ecotrail de Praz de Lys - Sommand

Le Praz de Lys c est une histoire de famille. Mon grand-père pilote survolait ce plateau idéalement situé face à la chaine du Mont-Blanc. Il finit par y faire construire un des premiers chalets sur cet alpage dans les années 50: ''Les Etoiles'', à côté de l'hôtel ''Sous le Jora''. Ma mère y passa toutes ses vacances d'adolescence avec de nombreux cousins. A partir de 4 ans j'y ai moi même passé tous mes étés, bercé par les aventures familiales des cousins. Le Buet, la Verte etc etc, mais surtout les sommets du coin, la Pointe de Marcelly, Uble, la pointe de Chalune, et le terrible Roc d'Enfer. C'est mon grand cousin Rémi qui m'amène la première fois faire le Marcelly quand j'avais 7 ans. Ce jour là j'ai eu l'impression de vivre un épisode de Tintin. La montée dans les sapins par le Planey avec ses fourmilières géantes et sa croix commémorant le scout foudroyé sur le chemin. Le sentier de crête aérien avec une vue à couper le souffle sur le Mont-Blanc, la grimpette finale où il faut mettre les mains, la croix sommitale qui surplombe toute la vallée du Giffre.  Un rapide coup d'oeil au passage câblé vertigineux ''Pas de l'Ane'', que je n'emprunterai que quelques années plus tard, puis c'est la première descente…

La crête de la Pointe Perret au Marcelly, empruntée lors de l'Ecotrail (photo non prise pendant la course)


Les années suivantes lors de notre déjeuner quotidien à "l'auberge du Chamois", je rencontre des enfants de mon âge dont les parents écumaient tous les sommets du coin… en baskets!? Je me souviens que ça jasait dur, la montagne ne devant se pratiquer qu'en grosses chaussures maintenant la cheville dans toutes ces pierres instables. C'est d'ailleurs toujours la vérité, mais il semblait que ces individus en grande forme avaient le pied ''marin''. Ma mère souffrant du vertige et mon père travaillant une bonne partie de l'été je me retrouve embarqué dans les virées de mes nouveaux copains. Découverte de la montée tambour battant, le palpitant à bloc, sans pause avant le sommet, et descentes en… trottinant en se laissant pousser par la pente. Ca ne vous dit rien? On est en 1980, l'appellation ''trail running'' n'existe pas, mais en revanche j'ai attrapé un virus dont je ne me suis jamais débarrassé: le '' y a quoi derrière la prochaine bosse?''
Une trentaine d annee plus tard, c'est désormais dans le chalet paternel que nous nous rendons le plus souvent possible avec la petite famille. Je crois bien qu apres avoir contaminé Florence, notre petite Lucie est accroc aux longues balades à cheval et Victor descend Chalune plus vite que moi. Une histoire qui se répète comme pour des milliers d'amoureux de la montagne. 

Donc vous l'avez compris Le Praz de Lys c'est dans l'ADN. Depuis quelques années je suis devenu un pratiquant assidu de course à pied. L'avènement du trail a fait la jonction avec ma passion pour la montagne. Mon premier rêve de longue épopée montagnarde se réalise en 2011 en finissant la CCC (92km/5500mD+). Alors quand un allumé a décidé de lancer une épreuve de 50km et 3700m de dénivelé, reliant les sommets les plus mythiques du Praz, je trouve vite un nouvel objectif! Mais il y a un hic. Yannick du magasin Twinner local, à l'origine de la course, et ancien athlète de haut niveau en ski nordique a placé 2 barrières horaires assez loin dans la course. Avantage:  les plus beaux points du parcours ont été passés au niveau de la barrière du Foron au 35é km. Inconvénient: la deuxième barrière se situe à 5km de l'arrivée et nécessite une moyenne de 5km/h sur l'ensemble des premiers 45km et 3400m de dénivelé positif. Quand on sait que sur les plupart des trails  les barrières tournent autour de 3,5 / 3,8km/h sur des ratios dénivelé / distance inférieurs, et qu'une grosse partie de la course passe sur sentiers très techniques, cela devient très compliqué pour un coureur de niveau moyen comme moi. En gros il est possible de se balader sur les 35km premiers km de la course et de se faire plaisir dans des paysages magnifiques jusqu'au Foron. En revanche pour finir ce n'est plus du tout de la balade et il y a intérêt à avoir couru le maximum de portions dès le départ de la course.
 
J'en ai fait les frais l'année dernière, où par une journée magnifique, je me pointe relativement préparé en pensant que la caisse cumulée sur le maratrail de Faverges ( 42k/2700mD+ parcourus à 6km/h de moyenne), et le Tour des Glaciers de la Vanoise (60km/3500mD+ en 2012 à 4,5km/h de moyenne) feraient l'affaire. Sauf que ces 2 courses se font sur une majorité de chemins roulants. Comme en témoigne la vidéo à la fin de ce récit, je passe un bon moment à filmer l'Ecotrail, mais j'arrive au Foron les quadris en compote et explose dans la montée du plateau d'Uble pour finalement me faire arrêter au 40è km et 3000m D+ après 9h de course (donc 4,4km/h de moyenne)… Mon pote Tom, qui boucle un marathon en 3h, a la mauvaise idée de m'attendre sur les 25 premiers km, et de vouloir rattraper le temps perdu sur les 20 suivants. Je le retrouverai KO au poste de secours du Praz… Ah c'est pas une course de parigot en goguette l'Ecotrail du Praz!
 
FRUSTRATION… "I'LL COME BACK!" (Terminator) 
 
Pour 2013 je décide de prendre les choses "en jambes". Travail de vitesse en début d'année avec des trails roulants (50km de l'Ecotrail de Paris et Trail des Cerfs en 6h). Puis un gros coup de montagne en juin pour l'endurance: le sublime 80km du Mont-Blanc (83km / 6000mD+ très techniques bouclés en 23h soit 3,6km/h de moyenne). Aout 2013, nous passons 3 semaines de vacances au Praz de Lys où j'alterne séances de côtes à bloc au Lac de Roy, randos familiales, et sorties longues sur le parcours. Le temps est au top, la prépa se passe dans le bonheur. Cependant assez vite je m'aperçois que les fameux 5km/h de moyenne sont vraiment tendus à tenir. Yannick me dit qu'idéalement il faut avoir fini les 20 premiers km en 3h pour être tranquille sur le reste du parcours moins roulant. Mission impossible pour moi, j'arrive au mieux à les faire en 3h15 et à la fin de la boucle je suis tout sauf frais… Le problème est la descente du Marcelly. Plaques de schistes en dévers, cailloux roulants, rochers marches cassantes, je dois admettre que si je veux finir il faut que je reste entier, et que je n'ai pas la technique de course pour un tel terrain. Auparavant je prenais plus de risques, mais depuis mon accident de ski en 2009, je me suis nettement calmé. En plus j'ai constaté qu'en forçant trop en descente mes quadris fatiguaient et que cela se payait cash à la montée. Yannick me dit que certains arrivaient à finir en faisant la première boucle en 3h30 mais que c'était serré sur les barrières. On verra bien, pas le choix. Je mise sur la régularité et essaierai de courir le max de portions y compris les faux plats montants pour palier à ma faiblesse en descente.
 
Voici quelques photos du parcours prises lors de ma prépa, car pendant la course, je ne pourrais pas refaire le touriste! En revanche, si le temps est au beau fixe (en général un an sur deux), le parcours est vraiment sublime.

Sur la crête du Marcelly. Au loin derrière se trouve Chalune sur lequel la course passe au 30è km.



Sur le sommet de Chalune. Au loin la crête du Marcelly courue en début de course.


Chalune vu depuis Uble. A droite de la petite crête centrale la descente sur le Foron.



Haute Pointe, Chalune, Le Roc d'Enfer et Uble au premier plan. Le parcours de l'Ecotrail sillone autour de ces massifs et passe par le sommet de Chalune.


La semaine précédent la course les températures chutent, et un sale temps pluvieux s'installe. Impossible d'aller au boulot en vélo, et bien sûr dans le métro tout le monde a la crève. Le vendredi soir, 2 jours avant la course, c'est mon tour et j'ai les sinus en feu. Les prévisions météos sont exécrables, et ma motivation tombe dans les chaussettes de trail. Honnêtement je n'aurais pas eu la mission de fermer le chalet familial, et mon pote Tom qui venait prendre aussi sa revanche (avec seulement  2 semaines de prépa suite à 3 semaines d'arrêt entorse), je prenais l'option "dimanche matin sous la couette".
 
La nuit précédent la course, malgré le rhume je réussi à dormir convenablement, le sommeil entrecoupé par le bruit des trombes d'eau s'abattant sur le toit du chalet. A 5h nous nous levons à bloc avec le Tom. Il ne pleut plus et après une bonne dose de gatosport rejoignons le départ de la course bien motivés. Il y a sur place environ 120 coureurs, et j'ai rapidement je sens que la population est bien plus aguerrie que sur la majorité des courses que j'ai faites à ce jour. Manifestement tout le monde est là pour en découdre et les concurrents interviewés par le speaker font monter la pression, du plus connu, Arnaud Lejeune (9è UTMB 2013, qui gagnera l'Ecotrail en 6H) au quidam anonyme: ''je suis là pour faire un top 10''. Glups… Quand Yannick démarre son briefing, il se remet à tomber des cordes. Pas de souci sur le matériel obligatoire: tout le monde le porte vu la météo. ''Pour ceux qui hésitent à prendre leurs bâtons: prenez les! Aujourd'hui vous allez comprendre le sens du mot "technique" à la descente…'' Les bâches se relèvent et on se retrouve dehors sous la flotte. Pas le temps de pyschoter, à peine sommes nous sur la ligne que le départ est donné… Avec 10 minutes de retard, j'espère qu'ils en tiendront compte sur les fameuses barrières horaires, je sens que je vais en avoir besoin.
 
Ce coup ci Tom ne m'attend pas, c'est mieux si il veut finir. 3' de course et je suis dans les 10 derniers, magnifique! Heu les gars on part pour 50km et quelques bosses, c'est pas le 10km du 19è!? On ne panique pas pour autant, mais ça donne le ton. Curieux de voir si tout le monde tiendra un rythme pareil. De toute façon dès que la pente arrive, je remonte déjà quelques avions de chasse. Nous arrivons au spot de départ des parapentes sur Mieussy et quittons le chemin 4x4 pour attaquer un monotrace superbe sur la crête qui mène à la Pointe Perret. Je me cale à un bon rythme dans cette montée et mes prédécesseurs relancent comme il faut sur la moindre portion ''courable''. C'est la clé pour finir dans les temps. Entre rafales de vent et averses dans la face pas de danger de trop chauffer. Au sommet Bertrand fait le pointage, prof de ski indépendant, sympa de le voir là. On bascule sur la crête du Marcelly. Le paysage est superbe malgré le temps. Il y a un fond de lumière sur la vallée du Giffre, et de gros nuages noirs roulent entre les sommets très ''Seigneur des Anneaux''.  Je me force à calculer le moindre arrêt pour éviter de perdre du temps. Mes chaussures un poil trop grandes nécessitent un resserrage express que je ferai avant la bascule sous la croix. Pareil pour l'alimentation je me suis préparé un plan gel / barres / mini sandwichs pain de mie pour passer le moins de temps sur les ravitos et éviter un coup de moins bien, qui plomberait assurément ma moyenne. La descente du Marcelly est telle que l'imaginait: ultra glissante et piégeuse. Rapidement je me refais doubler dans tous les sens à tel point que je me demande si je ne suis pas le dernier sur cette portion… Mais ce n'est pas une surprise et dès que j'arrive sur le plat du Planey je remets le turbo et rattrape illico 2 concurrents.  J'ai eu la bonne idée de prendre avec moi les temps de passage du dernier finisher 2012. Je suis devant lui de 4' au Planey, ça me remonte le moral.
 
Dans la descente moins technique jusqu'au Pontet je me laisse couler dans la descente sans forcer pour économiser les quadris au max. En bas faux plat montant, et là aussi je reprend 2 coureurs. Et dans la montée de l'hôtel vers le centre station je les laisse loin derrière moi. Je commence à me dire que les guibolles sont bien là, et que la crève des derniers jours n'efface pas 2 mois d'entrainement comme ça! Je passe en coup de vent au ravito du Praz, le temps d'attraper tucs et banane que je mangerai en marchant. Une charmante dame me lance un ''à toute à l'heure'' qui sonne bien agréable, d'autant plus que je suis quasiment à temps sur mes prévisions. Et je confirme les jambes sont là et bien là. Je remonte en courant la côte puis la route jusqu'au Bettex et rattrape d'autres coureurs dans la montée du lac de Roy. Le sentier passe au dessus du lac on se croirait en Ecosse avec la brume qui remonte sur la montagne. En revanche la portion plate vers la montée de Véran est un champ de mines (trous laissés par les vaches) rempli d'eau et de boue et j'y perds du temps. La montée de Véran est vite passée puis c'est enfin la bascule sur Sommand longue piste large sur laquelle je peux dérouler sans effort. J'arrive au ravito en 3h25, c'est 10' de moins qu'il y a un an mais 10' de plus que ce que j'avais prévu… Je refais le plein et mange un morceau. 3h30 pétante je redécolle, en me disant que rien n'est perdu.
 
Sur la montée du col de Chavannais je double 2 frères avec qui je vais faire du yoyo pendant les heures suivantes. Eux beaucoup plus rapides que moi en descente et moi avec plus de caisse en montée. Je croise un gars qui abandonne, il faut dire qu'on part dans la partie la plus sauvage de la course, et qu'une fois engagé il n'y a pas trop de choix que de continuer. J'ai l'impression d'arriver assez vite au col, en courant toutes les portions en faux plat montant. Bascule de l'autre côte, et à la fin de la descente je me fais rejoindre par les frangins. On fait un bout de chemin ensemble, bien agréable de ne plus être seul dans la pluie et le brouillard. La montée du col de Chavan est raide et glissante à souhait. Sur la crête on nous annonce la mi parcours. Je regarde mon gps en terme de dénivelé ce n'est pas tout à fait ça et estime plutôt la mi parcours vers le parking de la Ramaz que j'étais censé atteindre en 4h55. Je repasse le col seul et typique des bizarreries climatiques montagnardes, le temps est plus clément de l'autre côté. Ce passage est très technique, très raide en dévers, j'ai l'impression de skier dans la boue. J'adore cet endroit à flanc de falaise très sauvage. Cet été j'y ai croisé deux chamois qui ''volaient'' littéralement sur les pierriers: la fameuse foulée légère des indiens Tarahumaras que décrit Christopher Mc Dougall dans ''Born To Run''. Ou Kilian Jornet, l'homme chamois. Moi à cet instant c'est plutôt le style de la taupe qui creuse la montagne, et je me refais doubler par le duo de Passy (près de Chamonix, comme ils m'ont dit, pas Auteuil Neuilly Passy). Après un passage bien technique dans de gros rochers, arrive une longue descente sur chemin de 4x4. J'en profite pour récupérer en me laissant pousser par la pente. J'arrive sur la route continue à courir à un bon petit rythme dans la montée vers le col de la Ramaz, redouble les frérots, et arrive sur la parking en… 4h55! Wow j'ai rattrapé mes 10' de retard, suis pétante dans mes prévisions faites sur un parcours sec à 5,4km/h de moyenne, et surtout ne ressent aucune fatigue malgré les 27km et 2000m de D+. Je commence à vraiment y croire! 
 
Mais le plus dur reste à venir.  La montée en dévers vers le col de Chavasse (oui dans ce coin tout commence par Cha… voir Chav) est assez pénible. Des triples semelles de boue sous les chaussures alourdissent chaque pas… patinant. Mais ce n'est rien à côté de la descente vers les chalets blancs… Un toboggan de boue et de caillasse. C'est un cauchemard, et même les frangins descendeurs me doublent en galérant. Vient ensuite ZE gros morceau de la course: la montée de Chalune à 2200m. D'abord le col tout en dévers, raide et glissant. Je me cale derrière les frérots, en profite pour m'alimenter et mettre en route ma botte secrète: de la musique. Le problème c'est que la commande de sélection est bloquée par le froid et l'humidité. Pas grave tant que ''play'' et ''suivant'' fonctionnent sur les écouteurs c'est le bonheur. Le frangins me laissent passer et je me mets en mode ''warrior''. Ca marche: boosté par ''Team Ghost'' je rattrape d'autres coureurs au niveau du col. La montée sur la crête est terrible. Rafales de vent, brouillard givrant... ''Yes, Thomas!'' C'est Tom qui est redescend du sommet, ça me fait super plaisir de le croiser là.  ''P…. mec kesske c'est dur…'' effectivement le Tom a l'air un peu entamé, mais il envoie bien dans la descente, donc vue la caisse de l'animal, je suis persuadé qu'il va finir. Ca m'a mis un coup de fouet de le croiser là, je suis moins loin de lui que je ne l'imaginais, et ne vois même pas passer le ressaut rocheux aérien un peu avant le sommet. J'arrive en haut sur les talons d'autres coureurs et découvre un  gars assis sur un rocher avec des pompes de marche sur glace dans une combi tempête intégrale. Wow, c'est le bénévole qui pointe les temps qui vient de passer plusieurs heures seul au sommet au milieu des averses, du brouillard et autres rafales de vents glaciales. Respect, ça me parait encore plus dur que de courir. Je prend le temps de ''manger'' un gel (c'est la première fois que je mâche un gel, il a figé pendant la montée) et me lance dans la terrible descente de 1000m de D- spécial explosage de quadris.
 
La descente se passe plutôt pas mal, assez technique jusqu'au col de Chalune, elle devient plus roulante aussi. Le temps devient plus clément, il y a même un peu de lumière qui passe sur les contre forts du Roc d'Enfer, laissant apparaitre des cascades. C'est superbe. Le duo de frangins me redépasse encore une fois, mais j'avance bien et arrive au ravito du Foron avec vingt minutes d'avance sur la barrière horaire de 14h30. Cela dit je décide de ne pas trainer, moins de 2h pour faire les 10km et 800mD+ pour la barrière suivante et finale ça me parait bien sport à ce moment de la course, même si les chemins sont moins techniques. Les bénévoles du ravito sont super sympas. J'ai l'impression d'être sur un stand de formule 1: une check ma poche à liquide énergétique, l'autre me remplit mes bouteilles devant pendant que j'avale quelques bananes séchées. En 3' je repars au trop sur la route. La descente continue sur un sentier très ludique et sauvage le long du Foron. Je suis dans la forêt double 2 concurrents (première fois dans la descente!), je me régale. Après un petit coup de cul on passe dans le jardin d'un chalet ou les propriétaires ont installé un ravito sauvage. Je vois mes 2 acolytes  posés en train de boire du thé, mais malgré l'invitation je préfère assurer. ''Ne cours pas trop vite on ne va plus te rattraper!'' Ils ne croient pas si bien dire les bougres. je n'ai qu'une idée en tête, cette satanée barrière horaire. Lorsque le sentier débouche sur une route, une joyeuse équipe bien allumée supportent les coureurs. ''-C'est quoi ton prénom? Thomas… Allez Thomas tu vas tout déchirer, tu vas finir!'' Aha génial, j'attaque les 500mD+ du Plateau de Uble à bloc! 
 
Tellement à bloc que ma tête s'emballe et je me vois déjà sur la ligne d'arrivée. "Houla mon gars, reste concentré, tu risques encore de te casser les dents''. Mais ça passe, et enchaine les lacets à bon rythme. Je rattrape 2 compétiteurs dont une charmante coureuse qui me lâche: ''wow tu as fait une remontée de dingue!'' Mouais sauf qu'arrive la descente sur la vallée de la Crotte (véridique) et que la demoiselle me laisse sur place. Mais ça ne va pas trop mal, je passe moi même 3 autres coureurs qui ont l'air un peu de ramer. Au fond de la vallée, il reste 35' avant la barrière… Je commence à stresser, et met tout ce que j'ai comme jambes pour courir vers la dernière montée avant le Praz. Je double à nouveau quelques coureurs qui marchent, à mon avis il va y avoir des déçus… dont peut être moi. Un gars au bord de la route me crie'' allez 20' et tu es en haut!'' Ouaip y a 300D+ c'est jouable, mais avec un marathon et 3000m de D+ dans les pattes je suis au taquet. Je vois dans la montée un peu plus loin la coureuse du plateau d'Uble entrain de doubler un coureur. Allez je m'accroche, à bloc sur les bâtons, d'abord pour la rattraper.  Je dépasse le coureur qui a l'air au bout du rouleau, puis au 3è lacet rattrape la demoiselle. On monte ensemble en s'encourageant. Il reste 8' quand on prend le dernier lacet. C'est l'horreur, je sens mon palpitant dans ma gorge, mais je ne veux pas me faire arrêter à 5km de l'arrivée. Enfin le sommet, je suis mécaniquement la coureuse, mais ne vois plus de balisage après 100m. Je ne suis plus très lucide mais je sens que nous ne sommes plus sur le bon sentier ni dans la bonne direction. ''Stop on est entrain de se planter!!'' Je jardine un peu puis retrouve le balisage. Les 3 coureurs doublés dans la descente de Uble nous ont rattrapés. C'est un cauchemar il est 16h09, si ils ne tiennent pas compte des 10' de retard au départ c'est fini… Nous arrivons à bout de souffle au ravito à 16h10. 9h pétantes après le départ, j'ai tenu les fameux 5km/h de moyenne sur 45km et 3500m de D+. Il y a un an au même moment j'arrivais au plateau de Uble et on me retirait mon dossard... ''Mais non ne vous inquiétez pas, on ne ferme pas tout de suite vous pouvez manger un morceau!'' Quel bonheur d'entendre ça! C'est sûr je vais être finisher de l'Ecotrail du Praz de Lys dans des conditions extrêmes en plus!
 
Nous repartons avec la coureuse, en discutant joyeusement. Cette locale (le contraire m'eut étonné vu sa caisse), m'explique qu'il faut que je fasse du vtt pour mieux appréhender les descentes. Possible, d'ailleurs je la laisse partir car je suis beaucoup moins véloce qu'elle dans le sentier qui redescend dans la vallée de la Crotte avant une dernière montée vers Sommand. Je suis rattrapé par un coureur sans bâton. Quel bonheur de pouvoir discuter tranquilou sans stresser sur un temps limite. Le gars est aussi un Parisien, du genre gros baroudeur. Il est avec 2 potes qui sont derrières, et ils courent sans bâton, car ils font la course en préparation de… la Diagonale des Fous!? La Diagonale ou le Grand Raid de la Réunion est au même titre que l'UTMB une des courses les plus dures au Monde. En octobre, elle consiste à traverser l'ile par les cirques et le fameux Piton des Neiges. 160km et 10.000m de dénivelé. Les bâtons sont interdits sur cette course très technique, d'où l'idée de faire l'Ecotrail du Praz sans bâton. Vues les conditions, ils sont effectivement bien préparés héhé! Je laisse le future Raider attendre ses  potes et décide d'envoyer un peu la fin de la course. A 2 km du col de la Ramaz, un brouillard à couper au couteau s'installe. Je suis seul entrain de courir avec l'électro mutante de Fuck Buttons (oui ça s'appelle bien comme ça) dans les oreilles, l'instant est incroyable j'ai l'impression de voler. En traversant la route je vois des silhouettes près d'un voiture. Il y a Yannick qui a l'air bien content de me voir finir (pas autant que moi!). Je rejoins la piste descendant sur Sommand et profite du dernier km  de cette course qui se mérite. Surgissant d'un coup du brouillard l'arche d'arrivée tant attendue! Je finis les 50km et 3700mD+ en 10h15 pétantes. Tom sort de la tente, il a fini 25' avant moi c'est le pied!  Trop content aussi de voir les 2 frangins arriver 10 minutes plus tard. Seuls 2 concurrents arrivent après eux. Comme dirait l'ami JC on a fait du rase-motte avec les barrières horaires. Sinon, quelle incroyable équipe de bénévoles. Rarement vu un tel enthousiasme malgrés des conditions difficiles. Merci encore!
 
Voilà c'était un long récit, mais c'est toujours un bonheur de raconter l'histoire d'un rêve accompli. En terme de course c'était le second après la CCC. Vite un nouveau! Je vois un acronyme en 4 lettres...

Vidéo que j'ai filmée sur l'ecotrail 2012 (le beau temps y était, mais pas le finish...):


Aucun commentaire

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Votre annonce ici !

Accueil - Haut de page - Aide - Contact - Mentions légales - Version mobile - 0.08 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !