par nenoeil91 » 21 Fév 2011, 10:20
Teddy Tamgho sait se faire désirer. La finale du triple saut s’est achevée depuis déjà de longues minutes à Aubière mais le triple sauteur du CA Montreuil 93 prend le temps de savourer son record du monde. Avec 17,91 m, il vient d’améliorer d’un petit centimètre sa propre meilleure performance mondiale de tous les temps, réalisée il y a un peu moins d’un an lors des Mondiaux de Doha. Le champion de France tape dans les mains de ses potes à grand renfort de combinaisons. Puis il salue et remercie un par un les juges ayant officié pendant son concours, avant de signer des autographes à la pelle. C’est enfin l’heure de se présenter devant la presse. Et sans surprise, l’élève d’Ivan Pedroso n’a rien perdu de sa verve.
Teddy, quelles ont été vos sensations aujourd’hui ?
J’étais très, très bien. Mais je n’étais pas encore dans une forme excellente. Il y a encore un peu de boulot, de fraicheur à acquérir. Mais c’est quand même un record du monde. Un centimètre, c’est quand même un centimètre ! J’ai prouvé que mon boulot avec Ivan Pedroso ne m’avait pas ralenti. Au contraire, on a réussi à atteindre une grande série. Même sans courir, j’ai réussi à faire 17,36 m pour aller en finale. Au cinquième essai, je saute à 17,58 m alors que je m’écrase au multi. Je sais que ce saut aurait pu aller énormément loin. Maintenant, ça n’est pas grave. Le record, on le prend avec joie.
Que pouvez-vous nous dire sur ce quatrième essai ?
J’ai réussi à conserver pas mal de vitesse jusqu’à la fin de mon saut. Maintenant, c’est clair que j’ai ressenti de meilleures sensations au cinquième essai. C’est ce saut que je retiendrai. Il ne faut pas s’arrêter là. Il y a encore du boulot. Les 18 m, ça vient petit à petit. Je suis d’abord arrivé ici, à Aubière, pour gagner un titre car j’avais perdu l’an dernier. On est dans une situation où les championnats arrivent, où on pense de moins en moins à la performance et de plus en plus à la place.
Vous étiez revanchard après votre quatrième place à la longueur samedi…
Il n’y a pas que le physique qui compte. Je l’ai appris hier à la longueur où j’étais très fort. Pour gagner, il faut avoir de la maitrise et du savoir-faire, il faut du muscle mais aussi un cerveau pour coordonner tout ça. Aujourd’hui, pour le doublé aux championnats d’Europe, c’est du 50-50. Je sais que des gens disent que je n’en suis pas capable. On va commencer les discussions avec mon entraîneur. Maintenant, s’il me dit : pas de longueur, c’est lui le conducteur qui décide. Et s’il dit oui, je l’embrasserai encore plus.
Comment compareriez-vous votre concours à celui des Mondiaux de Doha, lors duquel vous aviez battu une première fois le record du monde ?
Je me suis moins lâché qu’à Doha. Là-bas, le contexte était celui d’une finale mondiale, c’était le sixième essai et j’étais en deuxième position. Il y avait tout pour que je sorte un saut à ce moment-là. Aujourd’hui, pour une fois, j’ai essayé de faire des choses académiques sans chercher la performance. Au cinquième essai, mes deux premiers sauts vont largement plus loin qu’au quatrième. Malheureusement, je m’écrase. Je me suis réceptionné un peu trop tôt. Ça prouve que ça n’est pas parfait. Je ne dois pas m’arrêter là.
Jusqu’où pouvez-vous aller ?
J’ai la conviction que 17,91 m, ce ne sont pas mes limites. J’ai déjà sauté à 17,98 m en plein air. Il y a encore mieux à faire. Il faut toujours aller chercher plus. Bolt a couru en 9’’69 puis il est allé chercher 9’’58. Isinbaeva a amélioré son record du monde centimètre par centimètre.
Que vous a apporté Pedroso ?
De la sérénité. C’est quelqu’un qui m’apaise. Je tiens d’ailleurs à dire à toutes les personnes qui n’ont pas cru en en moi que, ça y est, je leur ai montré que mon changement avait payé. Je me sens plus fort qu’il y a un an. J’arrive à enchaîner des sauts à 17,50 m comme des bonds à 17 m avant. C’est devenu facile. Je remercie Ivan, comme tous ceux qui ont toujours été là pour moi. On va fêter ce record. Non, en fait, pas tout de suite ! Mais après les championnats d’Europe !
Que vous a dit Ivan Pedroso à l’issue de votre concours ?
L’euphorie a fait qu’on s’est embrassés. Ivan, je le connais. On va faire le débriefing et il va me dire : No esta perfecto ! Je ne pense d’ailleurs pas avoir fait le saut parfait. C’était un saut avec de l’envie. Mais j’ai encore de l’énergie à revendre. Ça peut d’ailleurs paraître bizarre mais, finalement, c’est plus le cinquième essai que je retiendrai aujourd’hui.
La page de Barcelone est-elle définitivement tournée ?
Excusez-moi mais Barcelone, c’est fini. Je suis déjà dans la préparation des Jeux olympiques, où je retrouverai Idowu chez lui et aussi Compaoré, qui sera revenu en forme. Il y a encore des passages très bons qui m’attendent avant. C’est comme le kinder bueno en fait ! Idowu ne sera pas à Bercy. Il a ses raisons. C’est clair que c’est un sacré client. Mais je suis prêt à affronter n’importe qui.
il faut tenir ses résolutions, non parce que nous les avons prises, mais parce qu'elles sont bonnes