L'auteur : Coureur du 34
La course : Trail de Nebian - 100 km
Date : 25/11/2023
Lieu : Nebian (Hérault)
Affichage : 316 vues
Distance : 100km
Objectif : Terminer
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Pas d'autre récit pour cette course.
J'en étais là après une dernière course en mai avec les 78 kms de l'Hérault Trail qui m'avaient réconciliés avec le trail long : pas de de blessures, un mental d'attaque et une envie de me mettre à nouveau dans le dur, de me confronter aux limites et au final de me sentir pleinement vivant.
Alors malgré une longue pause estivale et un manque de préparation au dénivelé, même pas peur, je n'ai pas longtemps hésité à dégainer le certif médical et la CB quand on m'a parlé de l'Ultra Trail de NéBian et ses 100 kms. Le plus facile est fait : j'ai mon dossard ! Pour le reste, je n'ai pas les 4400 m de D+ annoncés dans les pattes, je courrai encore une fois sans montre, sans plan précis. J'y vais un peu (trop) à la cool, une marque de fabrique, mais c'est aussi ça qui me stimule.
Et puis la logistique est simple, Nébian étant à moins d'une heure de chez moi et sentimentalement, c'est un grand plaisir de revenir trotter dans la région de mon adolescence.
Surtout, l'Ultra Trail de NéBian et ses petites sœurs sont des courses atypiques à l'ambiance hyper-festive et organisée par une bande de joyeux lurons qui le valent bien. Rien que le nom du trail UTNB prête à sourire. Et que dire de la Slip Race, un 3 kms tout en sobriété vestimentaire mais qui en a dans le pantalon (voir les vidéos sur le net) ou encore le Trail des Miquelets avec son jambon offert au meilleur du premier km qui devra porter son trophée charcutier sur le final.
Sans oublier évidemment le magnifique tour du cou à l'audacieuse esthétique rose léopard qui enterre définitivement Desigual et s'impose comme l'emblème du ton décalé de cet événement.
C'est un vent de fraîcheur qui souffle sur l'esprit trail, fraîcheur qui s'invite également sur les collines du parcours en cette froide après-midi de fin novembre. On annonce 4 degrés dans la nuit.
L'UTNB cultive une autre particularité : il faut enchaîner 8 boucles de 12.5 kms. Un peu moins en réalité car tous les coureurs partent pour un premier km groupé et tranquillou dans le village avant le départ réel pour atteindre la barre complète des 100 kms. Ces boucles ont de bons et de mauvais côtés : repasser à chaque tour dans la salle des fêtes permet d'accéder à son sac avec tout notre matos de recharge et rechange tout en profitant de l'assistance 4 étoiles des nombreux bénévoles, c'est vraiment un confort incroyable. Mais il ne faudra pas flancher psychologiquement dans les moments difficiles et jeter l'éponge « parce que la voiture est garée toute proche», ni se lasser de la répétition du parcours, ni se frustrer quand les premiers me doubleront et prendront des boucles d'avance.
Huit boucles, c'est une mini-série Netflix alors TOUDOUNNN, c'est parti. 👀
Episode 1 – Fast and furious
Même l'horaire de départ est original : impossible de faire la sieste, c'est à 15 heures que les 50 coureurs partent sur les pentes du Caylus, de la Ramasse, du Roc du Cayla. 50 coureurs, ce n'est rien surtout sur une telle distance. Je vais donc courir en solo majoritairement.
La première boucle se passe bien (manquerait plus que ça) mais un peu vite car on rejoint d'autres courses comme la Nébianaise et je me laisse embarquer dans les dépassements, on ne se refait pas. Les décors sont sympas avec de beaux points de vue à 360 sur l'arrière-pays, Mourèze au nord et le côté Sud. Le parcours alterne des secteurs roulants sur de larges pistes et d'autres plus joueurs, dans de la végétation en garrigue basse ou en sous-bois avec quelques bosses redoutables comme le sentier des chèvres facile à reconnaître, avec son sol constellé et l'odeur bien présente. Il faut donc souvent relancer et beaucoup courir pour un trail long.
Episode 2 – Au clair de la Lune
La 2nde boucle se fait sur l'élan et l'euphorie de la première, encore un peu trop rapide. L'exaltation est souvent l'ennemie de la raison, ça va se confirmer une nouvelle fois. C'est vers son dernier tiers que la nuit tombe de tout son poids et j'allume la frontale après avoir assisté au sublime coucher de soleil sur le Pic de Vissou. Désormais je ne jouirai plus de la vue des paysages dans les 5 prochaines boucles.
Episode 3 – Mister Freeze
La 3ème boucle correspond à ce que me réserve ce trail jusqu'à sa conclusion : il fait froid avec le retour du vent, je cours désormais seul, je dois rester prudent dans les quelques passages caillouteux et casse-gueule à la lueur de la frontale même si j'ai mémorisé le tracé et je sais à quoi m'en tenir, je commence à compter les tours qu'il reste, et ce n'est plus aussi facile que les 25 kms précédents. A chaque passage, les bénévoles sont extraordinaires de bonne humeur et d'attention : toute la nuit, nous aurons droit à leurs applaudissements quand on rentre dans la salle et leurs encouragements quand on en repart. Ils sont à nos petits soins, on a l'impression d'être dans un stand de F1 où l'on s'active autour de nous pour nous ravitailler. La musique bat son plein, David Guetta doit faire un set par là, c'est juste fou.🕺🤪
Episode 4 - Ils m'entraînent au bout de la nuit...
La 4ème boucle marque le passage des démons de minuit. La perspective d'atteindre 50 kms me réconforte et je serai classé même si j'abandonne. Le ciel est magnifique sur ma tête même si je dois la baisser pour rester vigilant. Est-ce une aurore boréale qui apparaît au dessus des montagnes ou une hallucination ? Mmmmm... De temps à autre, je vois une frontale surgir dans la nuit telle une comète (le tracé fait des boucles qui se touchent). C'est dans ce tour que je dépasse des coureurs qui luttent contre les barrières horaires et dans les suivants, j'en dépasserai d'autres. Le ravito intermédiaire au milieu de la boucle est désert mais fait office d'oasis dans la nuit : des packs de bouteilles restent là en libre service pour nous. En plus, les boissons sont fraîches, ahaha. A Nébian, les bénévoles sont toujours à fond, ça fait chaud au cœur et il faut se botter les fesses pour repartir sur les chemins.
Episode 5 – Houston, on a un problème
La 5ème boucle s'avère compliquée : je me caille sacrément, je commence à peiner physiquement et psychologiquement. Alors que je profitai jusque-là de la danse de l'air vif et pur sous la voûte céleste, j'y vois désormais un vent glacial et les ténèbres : dit prosaïquement, ça part en c...acahuètes. J'entame la 2nde moitié de l'UTNB, ce qui devrait me booster mais ça ne marche pas toujours ainsi : 4 boucles terminées pour un ressenti de 10 ! Il me semble que c'est dans celle-ci que les premiers m'ont déposé : le futur vainqueur m'a enrhumé dans une montée et son poursuivant 30 minutes plus tard m'a refilé la grippe dans une descente. Je crois également me rappeler que c'est au départ de cette 5ème boucle qu'un des 2 organisateurs, Adrien, a couru quelques centaines de mètres avec moi à la sortie du village, tellement cool. Et les bénévoles ? Ils continuent de faire la teuf et il se passe des choses dans la salle des fêtes que je ne peux pas répéter. 🥳
Je repars dans le noir, le froid et le doute.
Episode 6 – Titanic
Dans la 6ème boucle, je coule à pic. C'est sur la seconde moitié que je suis à la dérive, n'avance plus et suis même pris de vertiges. A posteriori, je pense avoir fait un début d'hypoglycémie (j'ai eu de plus en plus de mal à m'alimenter et j'ai zappé des casse-croûtes) ou bien c'est le sommeil qui m'assène ses coups de boutoir. La Nature me donne la leçon de mon manque de préparation et mon départ un peu rapide. Celui qui a dit que « le trail, c'est que du bonheur » est un sacré menteur. Je hais les ultimes marches qui descendent dans les ruelles du village, je hais la petite montée derrière l'église, je hais les rigoles qu'il faut enjamber à l'approche de la salle « défaite » où mon moral est porté disparu. Une fois dedans, je suis saisi de froid et grelotte, je ne sais pas si je peux continuer. Je reste environ une heure à reprendre des forces, à me réchauffer avec le réconfort inaltérable des bénévoles. « Should I stay or should I go? » L'air et la question me trottent dans la tête. 75 kms, c'est déjà pas mal mais je suis là pour en faire 100. Et si je rentre la boucle suivante, je suis certain de conclure la 8ème quitte à finir en rampant... Alors I go, je remets les couverts pour la 7ème fois en invoquant Sainte Rita, patronne des causes désespérées. 🙏
Episode 7 – Voyage au bout de la nuit
La 7ème boucle est trottinée lentement et laborieusement : j'ai vraiment peur de craquer sur les premiers kms et de faire demi-tour direction l'écurie. Mais progressivement, je me réchauffe et les plaies du 6ème tour cicatrisent. Mon rapport au temps et à l'espace est altéré, je passe en pilotage automatique, enfilant mécaniquement les mètres les uns après les autres. Évidemment, je marche beaucoup mais cela n'a aucune importance. Je dépasse même 2 coureurs qui terminent leur 75ème km et nous discutons le bout de gras au clair de lune. Autant dire que ça va mieux.
Je rentre une avant-dernière fois dans la salle des fêtes et en ressors avec la détermination forgée sur l'enclume du refus de l'abandon. 💪
Episode 8 – In UTNB we trust
La 8ème boucle est une copie conforme de la précédente : je cours à l'allure d'un jamaïcain anémique en chaise roulante sur du gravier. Il est 7 heures du mat, 16 heures d'effort et à mi-boucle, j'ai droit à un magnifique lever de soleil sur la plaine.
« Regarde, le jour se lèèèèèève, dans l'allégresse sur Nébian Tu me fais vivre Comme dans un rêve, Tout ce que j'aime : Besoin de rien, envie de trai-ai-ail » 🗣 (oui, dans mon apprentissage musical, je me suis arrêté à la maternelle), Bref, tout est bien qui finit bien et je déguste les derniers kms à la petite cuillère, je me sens vivant, tellement vivant et heureux d'en finir comme à chaque fois sur les longues distances : 100 bornes, et ouais mec !!! 🤩
Les bénévoles sont revenus encore plus nombreux au petit matin avec le même enthousiasme et célèbrent les finishers comme des rois. Merci 💯 fois à vous tous et aux organisateurs, jusqu'au bout, vous avez été fan-tas-tiques. Les mots ne suffisent pas pour tout décrire : l'ambiance de l'UTNB, ça ne se raconte pas, ça se vit. 👏👏👏
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2 commentaires
Commentaire de Mazouth posté le 07-02-2024 à 11:40:10
J'ai bien aimé ton récit qui vient de me faire découvrir une course que je ne connaissais pas et que je tenterais bien un jour tiens. Et grand bravo à toi pour avoir vaincu les démons de minuit au courage !
Commentaire de Arclusaz posté le 18-03-2024 à 10:34:52
Un récit plein d'humour et tu as su transformé la salle défaite en salle des fêtes. Bravo.
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