Récit de la course : L'Echappée Belle - Parcours des Crêtes - 57 km 2019, par TO74

L'auteur : TO74

La course : L'Echappée Belle - Parcours des Crêtes - 57 km

Date : 24/8/2019

Lieu : Allevard (Isère)

Affichage : 2275 vues

Distance : 57km

Objectif : Terminer

11 commentaires

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57km de beauté... et d'apprentissage sur soi

Inscrit sur un coup de tête au parcours des crêtes, motivé par mon cousin avant la clôture rapide des inscriptions, je vois l'objectif se rapprocher peu à peu. Première fois pour moi sur cette distance, donc tout à découvrir.

J'espère mettre 11/12h au vu du descriptif et de la technicité du parcours, mais on verra bien.

Ma dernière course préparatoire devait être le trail de l'étendard fin juillet, sur 45km, mais ayant été arrêté au 17ekm pour cause de météo, puis ayant enchaîné avec 3 semaines de vacances, je ne sais pas trop quelle sera la forme...

 

Arrivée à Allevard sous le soleil avec le cousin, tout va bien. On prend le temps de grignoter, de papoter, pas trop de stress! Puis c'est le départ. Je le vois partir comme une fusée, mais pour ma part je reste vers la moitié du peleton pour ne pas partir trop vite. On attaque la montée tranquillement.

Tout va bien, l'arrivée au Collet d'Allevard permet de déboucher de la forêt et de prendre un peu le soleil sous les encouragements des personnes présentes, bonne ambiance!

On continue à monter avec quelques beaux coups de cul, mais ça se fait bien avec des jambes fraîches. Puis on débouche juste au-dessus du premier ravito de super-collet et là, j'aperçois sur le versant d'en face une myriade de petits points noirs étalés sur la large route forestière jusqu'à la crête des Plagnes. Oui, ce sont bien tous les coureurs en train de grimper (on dirait pourtant que les points sont immobiles). Ok ba il va falloir y aller!

Passage rapide au ravito et attaque de la pente sous le cagnard. Je suis juste derrière les deux premiers du 85km, bien affûtés les gars... Je ne les suis pas longtemps.

 

Attaque progressive de la descente après le passage aux Plagnes. De nouveaux muscles se réveillent, et malheureusement les sensations ne sont pas très bonnes : un "essui glace" un peu oublié se refait sentir légèrement au genou droit, et le ventre n'est pas au mieux. J'ai un point au niveau de l'oesophage. Peut-être ma boisson qui ne passe pas (elle m'écoeure un peu) ou le bout de saucisson avalé plus tôt dans la montée... Je temporise pour ne pas empirer la douleur au genou, jusqu'à arriver au torrent au fond de la combe qui annonce la fin de la descente.

 

Et c'est parti pour la montée vers les Férices, le début d'un long calvaire! Il fait une chaleur étouffante et je n'ai déjà bientôt plus d'eau dans mes flasques (j'en ai également dans le dos mais plus moyen d'avaler cette boisson isotonique). Heureusement on peut faire le plein et se raffraîchir dans un ruisseau. Ca repart mais avec une barre dans le ventre de plus en plus douloureuse. C'est la première fois que je ressens ça en course, même si j'en ai déjà entendu parler. J'essaie d'avaler une pâte d'amande mais dès que je mange ou je bois tout reste coincé au niveau de l'oesophage. Je dégaze pendant toute la montée en m'excusant intérieurement pour ceux qui sont derrière...

Je ne vois pas le bout jusqu'au refuge que je pensais plus près. En plus il est difficile de doubler les coureurs du 144km dans cette montée qui est logiquement harassante pour eux, donc j'essaie de ne pas trop leur mettre la pression.

Arrivée au minuscule refuge, c'est un peu l'effervescence car l'hélico est attendu pour évacuer quelqu'un. Je profite un peu de l'eau fraîche puis repart dans la montée qui est loin d'être finie !

Je suis seul sur le petit replat avant la dernière ascension quand un chamois déboule tout à coup 20m devant moi et traverse le sentier en bondissant dans la descente, droit dans le pentu ! Impressionnant. Je m'arrête pour observer, et lorsque mon suiveur me rejoint un second chamois part à son tour! Moment magique.

On reprend la marche. Le rythme ralentit fortement dans les dernières côtes avant le col d'Arpingon. Certains coureurs semblent hagards, un peu chancelants... Je pousse de toutes mes forces sur les bâtons pour me hisser jusqu'en haut.

Arrivé sur la crête, l'ambiance est détendue. On est un petit groupe qui se croise depuis le début de la montée et on admire le paysage minéral. J'essaie d'oublier les pépins gastriques. Je marque tout de même une pause à la pointe de la Frèche afin d'essayer d'avaler quelque chose. D'habitude je mange beaucoup en course, et là je me surprends à tenir en ayant surtout bu de l'eau.

Je me joins à une file de coureurs pour attaquer la descente. Le premier avance très prudemment en annonçant que c'est technique. Il me laisse finalement passer en se plaignant que je le colle trop et que ça le stress. Tendu le gars! Je m'excuse quand même et tente d'avancer un peu dans cette descente technique, en économisant mon genou droit. Le chemin devient de plus en plus roulant vers Val Pelouse et on croise des randonneurs qui nous encouragent.

 

Arrivée à Val Pelouse en 6h17 alors que je visais plutôt 5h30. Tan pis. Je prends le temps d'avaler deux soupes afin d'essayer d'apaiser mon estomac. Je m'assieds un peu dans l'herbe pour consulter mon téléphone et profiter de l'ambiance familiale qui règne ici, avec un super concert qui met une bonne ambiance. Je resterais bien l'après-midi dans l'herbe avec une bonne bière. Mais je décide quand même de repartir. Objectif le Ponthet, en me disant que cette étape sera un test pour savoir si je finis.

On attaque à nouveau la montée en marchant tranquillement, mais mon ventre me lance toujours. J'ai noté qu'après le 35e il n'y aurait plus que de la descente, mais finalement je la redoute. Déjà dans la descente après le col de Perrière, impossible pour moi de courir, le genou me fait trop souffrir. Je laisse passer du monde et m'arrête en bas au ruisseau pour prendre le temps de m'asperger complètement.

Les dernières côtes jusqu'au col de la Perche sont éprouvantes. On dirait une armée de zombies : tout le monde marche en silence côte à côte, et semble avoir du mal à aligner deux pas... Mais qu'est-ce qu'on fout là? Je ne ressens plus de plaisir, je subis la course. Je commence à me dire que je ne vois pas l'intérêt de continuer après le Ponthet sans plaisir, de nuit, juste pour finir.

Passage au col, où les bénévoles nous annoncent qu'à partir d'ici, il est interdit d'abandonner. Réponse dans ma tête: et ba moi si, c'est décidé, j'arrête au Ponthet.

Je suis déprimé, j'ai les larmes aux yeux. Je ne prends même pas la peine de courir sur la petite crète qui mène au Grand Chat. Arrivé au sommet je m'arrête pour laisser passer le petit groupe de coureur. Je m'assieds dans l'herbe face au soleil couchant sur Chartreuse. Un vent frais balaie la crète, moment paisible!

Fuck le chrono, je me fais un petit pique-nique à base de patates à l'eau pour essayer de me caler un peu le bide. J'hésite à appeler ma femme pour lui annoncer que j'abandonne au Ponthet, mais je décide d'attendre d'y être.

Puisqu'il faut bien descendre, c'est parti, tranquillement et prudemment. Je suis presque seul, c'est paisible. J'entre dans la forêt, et là, miracle : peu à peu les jambes se mettent en route. J'ai baissé mes bas de compression pour libérer les mollets et le tendon et la douleur au genou s'est atténuée. Celle au ventre se fait moins ressentir également. Je retrouve des chemins de terre avec seulement quelques racines comme obstacle, j'ai l'impression d'être à l'entraînement à la Chambotte. Je retrouve peu à peu des jambes fraîches, comme si je n'avais pas couru de la journée! Je déroule, le plaisir revient, je double des coureurs. Pause bonbon à la barraque à Michel qui fait du bien au moral. Le bénévole m'annonce 1h jusqu'au Ponthet, je me dis que je mettrai moins!

Je m'amuse à zigzaguer dans la forêt jusqu'au petit replat où je prends le temps de marcher. Je sors mon téléphone: coup de fil à la famille pour souhaiter bonne nuit au petit qui va se coucher et annoncer à ma femme que je comptais abandonner au Ponthet mais que je vais finalement finir car j'ai retrouvé des jambes de feu! Je sens l'inquiétude au bout du fil : elle se dit que je suis dopé aux hormones et que je ne sens plus mon corps. Je tente de la rassurer.

L'arrivée au Ponthet est annoncée à l'avance par la sono qui crache! Sur place, ambiance de feu, bénévoles super sympas ! On nous annonce 500m de dénivelé restants, une broutille! Je refais le plein d'eau, savour de délicieux morceaux de pastèque et boit une soupe. Je range la casquette et les lunettes, enfile un t-shirt sec et la frontale car la nuit est en train de vite tomber.

 

C'est reparti pour la dernière étape. J'ai les jambes légères car je sais désormais que je vais finir! J'allume la frontale dans les sous-bois et papote avec les coureurs que je croise, c'est un peu l'euphorie! Puis je me retrouve seul dans la forêt. J'adore ces ambiances de course de nuit. C'est un peu une nouvelle course qui commence : le sprint final.

Je rattrape plusieurs coureurs. Arrivés en haut de la montée on nous annonce 300m de faux-plat jusqu'au fort puis uniquement de la descente (c'était sans compter quelques petits coups de culs restant qui nous obligeront à relancer en maudissant les blagues des bénévoles).

Je pousse la frontale au max pour avoir une vision large et appuie sur le champignon dans la descente. Le plaisir est de retour, j'ai des jambes de folie! Je double pas mal de monde, essaie d'accélérer encore sur les portions de route, puis c'est l'arrivée par la route jusqu'à l'arche. Quelques centaines de mètres à visualiser l'arrivée qui se fait attendre, et ça y est, la délivrance, la cloche, le soulagement !

Avant le Ponthet, ma femme m'informait que le suivi live m'annonçait à 23h30 à Aiguebelle. J'arrive finalement à 22h26, en 12h19. Je pensais être en deuxième partie de classement mais finalement c'est pas si mal...

 

Bilan : une bien belle balade qui m'aura permis de découvrir un côté inconnu de Belledonne et d'en apprendre plus sur moi. Chapeau aux coureurs des 85 et 144, je ne sais pas comment vous faites ! Merci aux bénévoles et à l'organisation au top !

Désolé pour ce récit un peu long mais j'avais besoin de mettre des mots sur tous ces sentiments qui se sont succédés. Je redescends peu à peu de cet ascenseur émotionnel. A bientôt sur les sentiers !

11 commentaires

Commentaire de Arclusaz posté le 27-08-2019 à 14:23:16

Bravo pour ta course et cette renaissance si typique de l'ultra.
Bon, en même temps, quand on s'entraine à la Chambotte, on est avantagé (je dis ça en toute objectivité puisque je suis de la Biolle).

Commentaire de TO74 posté le 28-08-2019 à 15:21:22

Oui et on profite d'une super vue !

Commentaire de Ririjecko posté le 27-08-2019 à 22:46:16

Bravo pour cette belle course toute au courage.Pour l' anecdote j'ai terminé en 12h et..18 minutes avec un genou au bord de l'explosion. A 2,nous aurions pu faire un coureur valide:) bonne récupération

Commentaire de TO74 posté le 28-08-2019 à 15:22:24

Mince je ne t'ai pas rattrapé ! lol. Oui je crois que tout le monde a dû souffrir à un moment ou un autre sur ce parcours. Difficile de s'en sortir sans grabuge...

Commentaire de julvin posté le 28-08-2019 à 07:19:48

Bravo à toi et bel exemple de renaissance qui donne de l'espoir pour nos futurs moments de creux dans les prochaines courses. J'ai fini juste derriere toi. On s'est fait bippé ensemble. Tu m'as doublé dans la derniere descente où je confirme que tu semblais retrouvé lol, je t'ai un peu rattrapé sur les derniers hectomètres plus roulant (ou là moi je retrouvais mon terrain d'entrainement ... parisien :). Très bonne continuation !

Commentaire de TO74 posté le 28-08-2019 à 15:23:48

Merci ! Oui on a pas arrêté de faire le "yo-yo" avec pas mal de coureurs, à la fin on a l'impression de retrouver des têtes familières !

Commentaire de julvin posté le 28-08-2019 à 07:59:14

Bravo à toi et bel exemple de renaissance qui donne de l'espoir pour nos futurs moments de creux dans les prochaines courses. J'ai fini juste derriere toi. On s'est fait bippé ensemble. Tu m'as doublé dans la derniere descente où je confirme que tu semblais retrouvé lol, je t'ai un peu rattrapé sur les derniers hectomètres plus roulant (ou là moi je retrouvais mon terrain d'entrainement ... parisien :). Très bonne continuation !

Commentaire de BouBou27 posté le 28-08-2019 à 09:52:50

Montagnes russes de sensations ! Bravo a toi

Commentaire de TO74 posté le 28-08-2019 à 15:24:00

Merci

Commentaire de courotaf posté le 29-08-2019 à 08:59:12

Bravo à toi! Et pour les autre formats de course? Ben ils font pareil (-;

(et si jamais, c'est [i]Le Pontet[/i], sans «h»)

Commentaire de Spir posté le 05-09-2019 à 22:46:11

Ben oui, elle est toujours pénible cette section Val Pelouse-Pontet. Encore, sur le 57, tu as la chance de pouvoir la faire en partie de jour :) Bravo d'avoir su laisser faire le dos rond pendant ta période de creux en attendant que ça revienne. Il te reste à faire le choix du format pour l'an prochain ;)

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